Nicolas Casaux
I. Les énergies « vertes » : une double imbécillité
Depuis plusieurs années, dans les médias
 grand public, la propagande en faveur du développement des énergies 
dites « vertes » (et, plus largement, en faveur du « développement 
durable ») ne cesse de s’intensifier. En parallèle, l’état du monde 
naturel ne cesse d’empirer (je pourrais citer une liste interminable 
d’indicateurs de la catastrophe écologique en cours, mais il est plus 
simple de souligner qu’aucun indicateur ne témoigne d’une amélioration 
véritable).
Le magazine GEO, par exemple, vient de publier un article intitulé Bilbao, fer de lance d’une industrie éolienne espagnole revigorée.
 Dans l’article, on apprend que « l’industrie éolienne espagnole a 
trouvé à Bilbao, au Pays basque, un fer de lance pour préserver sa 
compétitivité face à la Chine et l’Europe du nord ». Ce que cela nous 
indique, très clairement, c’est que l’industrie éolienne doit être une 
industrie compétitive, comme les autres, en s’intégrant au capitalisme 
mondialisé. « L’énergie terrestre, alias ‘onshore’, est le pari de 
l’entreprise Haizea, qui prévoit de fabriquer des éoliennes de 160 
mètres de haut, dans une usine flambant neuve du port de Bilbao, de 500 
mètres de long pour 130 de large. […] Haizea compte également percer 
dans l’éolien ‘offshore’, en mer. La compagnie fabriquera des tours pour
 les éoliennes offshore, dont les bases s’enfoncent jusqu’à 50 mètres 
sous le fond marin et 110 mètres sous la surface de l’eau. »
Ainsi que Philippe Bihouix, Guillaume 
Pitron et Olivier Vidal (directeur de recherche au CNRS, qui s’intéresse
 aux nouvelles industries des soi-disant « renouvelables ») le montrent 
dans leurs travaux[1],
 et ainsi que la Banque mondiale l’explique dans un de ses communiqués, 
le développement des énergies dites « vertes » génère et va entraîner 
une énorme augmentation de l’exploitation de diverses ressources 
non-renouvelables (métaux, minerais, etc.), avec des impacts 
environnementaux à la mesure de cet essor. C’est-à-dire catastrophiques.
Voir
Les énergies "vertes" et les métaux rares (Guillaume Pitron - TV5)
Mais le caractère absurde et 
contre-productif du fait de présenter ces nouvelles industries 
« vertes » (du solaire, de l’éolien, de l’hydroélectrique, etc.) comme 
des solutions ne se limite pas à leur aspect non écologique, 
antiécologique. Le fait qu’aucune de ces industries ne soit réellement 
écologique ne constitue que la moitié de l’angle mort de la rhétorique 
en leur faveur.
L’autre moitié relève d’une évidence 
encore plus flagrante : à quoi sert l’électricité produite par ces 
industries (du solaire, de l’éolien, de l’hydroélectrique, etc.) ? 
Certainement à rien que l’on puisse qualifier d’écologique, à rien qui 
ne bénéficie au monde naturel, à rien qui ne participe de sa 
préservation ou de sa guérison. L’électricité produite par ces 
industries sert à la même chose que l’électricité produite par des 
centrales au charbon, au gaz naturel, ou nucléaires. À savoir, à 
alimenter en énergie des usines (de Monsanto, d’armement, etc.), des data centers,
 des télévisions, des réfrigérateurs, des micro-ondes, des voitures, des
 rasoirs électriques, des machines à café, des ordinateurs, des 
trottinettes électriques, des segway, des iPad, des iPod, des 
iPhone, des iWatch, des iMac, des McDonald, des consoles de jeux vidéo, 
des chaines Hi-Fi, des lecteurs Blu-Ray, des brosses à dents 
électriques, des sèche-cheveux, à recharger des téléphones mobiles, etc.
 Autant de choses dont la production et le fonctionnement sont tout sauf
 écologiques.
Mais tout comme il espère ou croit que 
les énergies soi-disant « renouvelables » ou « vertes » le sont 
vraiment, le mouvement écologiste grand public espère que la production 
et le fonctionnement de toutes ces choses seront (et peuvent donc être) 
rendus « renouvelables » ou « verts » dans le futur.
Une des inepties du mouvement écologiste
 grand public relève de ce qu’il ne comprend pas, ou refuse d’admettre, 
que l’ensemble du mode de vie de la civilisation électrique est 
écologiquement insoutenable, et que même si toute l’énergie qu’il 
utilisait provenait de sources d’énergies (véritablement) « vertes », 
écologiques (ce qui n’est pas possible), cela ne résoudrait qu’une 
petite partie d’un problème qu’il refuse de poser autrement qu’en des 
termes qui le rendent insoluble. En effet, si au lieu de demander 
comment rendre « vert » tel ou tel aspect de la civilisation 
industrielle, il se demandait s’il est possible, et s’il est 
souhaitable, de les rendre écologiques, il commencerait à entrevoir 
l’impasse écologique dans laquelle il nous mène.
II. L’ éco-consommation (l’ écomoralisme de classe) : une fausse solution vraiment inique
« Nous avons aujourd’hui un mode de vie 
insoutenable ». C’est ce qu’affirme Pascal Canfin, PDG du WWF, dans une 
petite vidéo qui a récemment fait le buzz sur les réseaux 
sociaux. On ne peut qu’acquiescer, évidemment. Seulement, la suite de 
son plaidoyer, qui traite des solutions, illustre bien la raison pour 
laquelle il est à la tête d’une branche nationale de l’ONG écologiste la
 plus célèbre du capitalisme mondialisé :
« On a montré au WWF qu’on pouvait, sans dépenser 1 euro de plus, pour une famille de 2 adultes et 2 enfants, aller jusqu’à 50 % de produits bio. »
Il recommande ensuite de remplacer la 
viande « par des pâtes ou par des légumineuses, ou par des fruits et des
 légumes », et explique qu’il est important de manger « moins de viande,
 mais mieux de viande ».
Voir
Quand le "Bio" tourne mal... - Geoff Lawton
(Pourquoi le bio n’est pas et ne sera jamais une solution aux problèmes que nous connaissons)
-Oubliez les douches courtes - VOST/FR (Derrick Jensen)
(Bien sûr, ailleurs, Pascal Canfin et le WWF prônent peut-être, en plus des pâtes et des légumineuses, d’autres solutions ou types de solutions, mais qu’il ait choisi de résumer sa minute-solution à ce message en particulier en dit long).
Ce qui nous ramène au premier exemple et à la manière dont l’écologisme 
grand public ne perçoit pas (ou occulte sciemment) l’ampleur du 
caractère antiécologique de la civilisation industrielle mondialisée. Il
 se contente de faire illusion, de promouvoir des fausses solutions, qui
 ne menacent pas les classes des riches et des puissants mais qui 
permettent de donner le change, de garantir la paix léthargie sociale, de préserver le statu quo, à défaut de la planète.
1.Voir, de Philippe Bihouix, l’article Du mythe de la croissance verte à un monde post-croissance, voir aussi mon article L’étrange logique derrière la quête d’énergies ‘renouvelables’, qui expose cela plus en détail. ↑
2.À ce sujet, il faut lire l’article de Derrick Jensen, Oubliez les douches courtes.
2.À ce sujet, il faut lire l’article de Derrick Jensen, Oubliez les douches courtes.
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