L'ESSOR DES ÉNERGIES RENOUVELABLES ENTRAÎNE UNE VOLATILITÉ ACCRUE DES PRIX SUR LES MARCHÉS DE L'ÉLECTRICITÉ

  Depuis les années 2000, la France a connu une croissance fulgurante de sa production d'électricité d'origine éolienne et solaire, en dépit d'une demande d'électricité stable. Cette progression remarquable s'inscrit dans une politique volontariste qui a été portée par tous les présidents de la République et gouvernements qui se sont succédés depuis cette époque.
 Cependant, l'essor à marche forcée des énergies renouvelables n'est pas exempt de critiques, car il s'accompagne de multiples impacts négatifs, dont en premier lieu les dommages sanitaires subis par nombre de riverains des installations et les atteintes à la qualité de vie. À cela, vient s'ajouter l'agression de l'environnement, de la biodiversité et du patrimoine bâti et, côté économique, une volatilité accrue des prix de l'électricité, principalement due à l'intermittence de la production des ENR, qui a des répercussions directes sur le pouvoir d'achat des ménages français, confrontés à une hausse constante des coûts énergétiques.
  Le plus ironique est qu'en l'absence de garanties financières publiques, aucun investisseur privé ne s'aventurerait dans ce domaine. 
  Au final, pour nombre de Français ruraux, il s'agit d'une double peine !...
 
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 Les marchés de l’électricité sont-ils devenus fous ?

 
  Après en avoir terminé avec la période de leur envolée, les marchés de l’électricité en Europe et en France se sont effondrés en moins de six mois et depuis ils connaissent des mouvements très erratiques liés à la variabilité des productions de renouvelables. De plus, du fait de l’importance des productions des parcs solaires ou éoliens à certaines heures, ou à certaines périodes, et dans certaines zones, on voit se développer les actions de restriction à distance des productions de certains d’entre eux par les gestionnaires de réseau, GRT, pour maintenir l’équilibre du système électrique. C’est ce qu’on appelle l’écrêtement de productions, qui peut être vu comme un gaspillage par les non-spécialistes, mais qui répond à cette exigence dans des réseaux inadaptés. 
 
Une volatilité extrême des prix à l’échelle de la journée
  La volatilité des prix augmente, tant en niveau qu’en fréquence. Au cours de ces trois derniers mois, de nombreux jours ont vu alterner des prix profondément négatifs et des prix dépassant les 100 €/MWh. En Allemagne par exemple, le 14 avril 2024, les prix sont passés de –150€ le MWh à 15h à 130€ à 19 h : voir figure 1. Tandis que les nombres d’heures où les prix nuls ou faibles sont de plus en plus importants, les épisodes de prix négatifs se multiplient dans tous les pays européens. Ce sont les surproductions des EnR intermittentes (EnRi) — éoliennes terrestres et marines, et solaire photovoltaïque — par rapport aux demande horaires qui expliquent les nombreux épisodes de prix nuls ou négatifs.
  Ces derniers, qui paraissent a priori aberrants, s’expliquent par les offres de producteurs conventionnels peu flexibles qui préfèrent payer pour rester en fonctionnement pendant les heures d’abondance des productions d’EnRi, avant le moment où la demande résiduelle, demande nette des productions EnRi, re-croît en fin de journée, car leurs coûts de démarrage et de montée en puissance sont élevés.
 
 Figure 1 : Prix sur le marché horaire allemand le 14 avril 2024 (source : ENTSO-E Transparency Platform)
 
  Ce phénomène se trouve d’abord dans les pays où les renouvelables intermittentes occupent une part importante dans la production totale comme l’Allemagne, l’Espagne, le Pays-Bas, le Danemark où elle est de plus de 40%. Mais la France n’y échappe pas par effet de contagion du fait de l’intégration des marchés par les interconnexions avec l’Allemagne, comme on le voit dans la figure 2 sur le dimanche du 14 avril. En 2023, on a ainsi compté en France plus 147 h de prix négatifs contre 300 h pour l’Allemagne, selon les statistiques de l’ ACER, l’agence de coordination des régulateurs de l’énergie. 
 
 Figure 2. Parallèle entre prix horaires des marchés électriques allemand et français le dimanche 14 avril 2024 : source : RTE. éCO2mix platform.
 
  Au-delà de ces divers effets des productions d’EnRi développées à très grande échelle, plusieurs questions se posent. Le marché tel qu’il est conçu est-il défectueux ? Un investisseur peut-il s’y retrouver pour investir dans des équipements de production de toute nature, et notamment dans des moyens de flexibilité ? Les prix négatifs qui participent à ces défauts pour investir peuvent-ils être éliminés ?

Le marché est -il défectueux ?
  Le market design n’est pas en soi défectueux. Obligatoirement structuré en marchés horaires du fait de la non-stockabilité de l’électricité, il est logique que, sous l’effet de la concurrence entre les producteurs ceux-ci soient amenés à faire des offres de prix qui soient alignées sur le coût du combustible de leurs équipements pour être sûr d’être appelés. Or les EnRi, éolien, solaire, ont un coût variable d’exploitation nul. Donc, lorsqu’ils doivent faire des offres de prix sur le marché horaire, comme doivent le faire toutes les nouvelles installations de plus de 3 MW, ils peuvent le faire à prix nul pour être sûrs d’être pris par le Marché : sachant qu’ils bénéficient par ailleurs d’un complément de rémunération qui est ajouté au prix du marché chaque heure, qui leur garantit un  revenu fixe par MWh produit pendant 15 ans. Or ces installations qui produisent de façon corrélée aux mêmes moments de la journée, si le soleil brille ou si le vent souffle dans une zone donnée, toutes les capacités présentes fonctionnent, voient leurs productions forcément appelées par le marché horaire car ils offrent leur production à prix nuls. L’addition de ces capacités solaires ou éoliennes a donc pour effet de faire baisser les prix horaires en moyenne, et de les annuler certaines heures les jours où leur production est forte et la demande horaire est faible comme pendant un week-end ou les vacances d’été.
  Le phénomène des prix négatifs apparaît avec l’augmentation de la part des productions ENRi dans le mix. Dans un pays à fort ensoleillement, les centrales pilotables sont contraintes de diminuer leur production ou s’arrêter vers le milieu de la journée alors qu’en fin d’après-midi, elles doivent augmenter leur production en temps opportun pour répondre aux pics de demande du soir alors que le soleil se couche. Comme on l’a dit, ceux-ci ayant des temps de réponse et des coûts non négligeables de re-démarrage ou de montée en puissance, les opérateurs peu flexibles considèrent plus avantageux de rester en fonctionnement pendant les heures excédentaires en payant pour pouvoir continuer à produire. Les prix négatifs ne sont donc pas un défaut du market design tel qu’il a été conçu. Sa fonction est d’abord d’assurer la coordination horaire de court terme entre unités de production de différents types et appartenant à des différents opérateurs. En étant provocant, on pourrait même voir l’existence de prix négatifs comme la preuve de leur bon fonctionnement.
  Il faut par ailleurs s’attendre à ce que le nombre de prix nuls, ou négatifs, augmentent au fur et à mesure du développement des capacités d’EnRi. Dans un exercice de l’ AEN-OCDE de 2019 sur la comparaison des coûts de système entraînés par différents moyens de production électrique, et dans lequel plusieurs scénarios de pénétration des EnRi à coût marginal nul sont étudiés[1], on montre que les heures à prix nul ou négatif commencent à apparaître quand la part de leur production annuelle dépasse les 30%, ce qui est déjà le cas en Allemagne, 42%, Espagne, 45%, Portugal, 45% avec l’hydraulique fil de l’eau, loin devant l’Italie, 18,3%, et la France : 14,5%. Quand un mix atteint les 50% de parts d’ ENRi, on compte plus de 1200 heures de prix nuls ou négatifs. Et, quand il atteint 75% de part d’ ENRi, on compte entre 3600 et 3800 heures, soit la moitié de l’année.

L’écrêtement de productions solaires et éoliennes en cas de surproduction
  À ceci s’ajoute l’autre phénomène qui est révélateur d’un défaut d’adaptation des systèmes électriques à forte part d’EnRi : l’écrêtement d’un montant significatif des productions d’EnRi certaines heures qui commence juste en France à se manifester au printemps 2024, notamment les jours de week-end où la demande est plus faible. Il résulte soit de l’auto-réduction des injections des producteurs éoliens ou solaires sur le réseau certaines heures, soit de l’action à distance du gestionnaire de réseau, GRT, qui doit rééquilibrer les productions du système. Dans ce cas elles résultent de l’inadaptation du réseau central, ou de celle des réseaux de répartition, aux localisations massives d’équipements ENRi dans des zones qui ne sont pas des zones de forte consommation.
  Dans le premier cas, le plus courant en France, l’arrêt volontaire de production de certains parcs solaires ou éoliens pendant certaines heures s’explique par les prix spot négatifs. En effet ces parcs ne sont pas sous le régime des tarifs d’achat et de la priorité d’accès au réseau, mais sous le récent régime des contrats de complément de rémunération par rapport aux prix du marché. Ces contrats en France qui garantissent un revenu par MWh quand les prix spot sont en dessous d’un revenu fixé dans le contrat, par exemple 70 €/MWh, ont deux spécificités qui incitent les producteurs à s’écrêter lors qu’il y a des prix négatifs : on ne paie pas le complément quand le prix est négatif ; de plus il existe une prime à la non-production pendant les heures où les prix sont négatifs.
  Dans les graphiques de la plateforme éCO2mix de RTE, on voit bien ce phénomène d’auto-restriction des productions solaires et éoliennes au cours des mois d’avril et mai. On peut le voir par exemple le 16 avril, dans le diagramme des productions horaires des différentes techniques ci-dessous où se lisent bien les restrictions des productions solaires : orange.
 
 Figure 3. Les productions des différents équipements le samedi 20 avril.
 
   En prenant l’exemple des productions éoliennes du samedi 20 avril, on voit ci-dessous aussi la correspondance des heures d’auto-restriction avec celle des prix négatifs.
 

La production éolienne du 20 avril 2024, diagramme du haut, et profil des prix horaires de ce même jour : diagramme du bas.

  Dans le second cas, qui est le plus courant en Europe, c’est le GRT qui commande l’écrêtement de producteurs éoliens ou solaires. C’est explicable par les congestions du réseau de transport qui entraîne l’impossibilité d’évacuer les surplus de production EnRi dans une région vers d’autres zones, ou pour les parcs solaires, depuis les réseaux de répartition. L’écrêtement de productions pour les unités de solaire PV commence à se manifester de façon significative en Tchéquie et Pologne, mais c’est bien en dessous de l’Espagne, 1,7% de la production totale en 2022, et l’Italie : 1,6% cette même année. C’est en Allemagne où le phénomène est le plus marqué, mais il est associé surtout aux productions éoliennes.
  Elles se trouvent surtout dans le nord du pays et en Mer du nord alors que les consommations se situent plutôt dans le sud.  Les écrêtements en 2023 se sont traduits par une perte de 19 TWh produits par des éoliennes, soit 4% de la production totale du système allemand, du fait des grandes difficultés du renforcement des liaisons nord-sud. La perte de revenus des producteurs leur a été compensée pour plus d’un milliard d’€ par les trois gestionnaires de réseau. En même temps ceux-ci ont supporté un surcoût d’au moins trois milliards pour ce « re-dispatching » qui impose de mettre en service des équipements conventionnels dans d’autres zones. L’ensemble a été payé par les consommateurs par une hausse du prix du service de transport.
  En France le système français a connu jusqu’ici peu d’écrêtements commandés par RTE ou Enedis. D’ailleurs ils ne sont pas encore répertoriés au plan européen. Ceci s’explique à la fois par la moindre part des productions éoliennes et solaires dans le système, 14,5% en 2023, par le bon maillage du réseau, par le suivi étroit du développement régional des capacités éoliennes et solaires par RTE, ainsi que par les outils dits de « dimensionnement optimal du réseau ».

Le marché peut-il encore envoyer des bons signaux de long terme pour investir ?
  Si le marché n’est pas défectueux pour réaliser les coordinations entre unités de production et entre systèmes en temps réel, en revanche, il est profondément défectueux pour envoyer des signaux de long terme. Le drame avec le market design basé sur des marchés horaires, même complétés par des marchés à terme, c’est qu’il y a toujours un décalage entre le prix horaire aligné sur le coût marginal du dernier producteur et le coût complet de production de l’équipement de celui-ci. Il n’y a donc aucune chance qu’avec la somme de ses revenus horaires sur le durée, il recouvre ses coûts d’investissement et rentabilise son capital. À fortiori la moyenne annuelle des prix horaires n’a aucune chance d’être alignée sur le coût moyen de production du mix ; en conséquence il faudrait que les revenus d’un opérateur qui investirait dans tout l’éventail du mix soient suffisamment sûrs pour le décider à investir dans tout l’éventail des équipements nécessaires à l’optimisation du mix.
  Avant l’arrivée des EnRi à coût marginal nul, Il y avait donc déjà une difficulté intrinsèque à investir dans les différentes technologies, notamment dans les équipements dédiés à la production en pointe, turbines à gaz notamment, ce qui a posé très tôt le problème de la garantie de sécurité de fourniture pendant les heures critiques. De plus le déploiement " hors marché " des EnRi a détruit un peu plus le rôle des prix du marché comme signal de long terme pour investir dans tout l’éventail des technologies non-EnRi, nucléaire, centrales gaz, etc.,. Elles font baisser les prix de marché en moyenne annuelle et réduisent le nombre annuel d’heures pendant lesquelles ces équipements conventionnels sont appelés par les marchés horaires. C’est aussi le cas des moyens de flexibilité pour adapter le système à la présence d’EnRi à grande échelle.

Comment développer des moyens de flexibilité suffisants ?
  S’il y avait beaucoup plus de moyens flexibles dans le système qui soient capables de monter en puissance très rapidement, le marché n’aurait pas à appeler les équipements rigides pendant les heures de remontée de la demande horaire et de réduction des productions solaires. Il n’y aurait donc pas des prix négatifs qui, comme on l’a vu, résultent des offres de producteurs rigides, qui préfèrent payer pour rester en fonctionnement afin d’être présents lors de la remontée de la demande horaire. Les moyens de flexibilité qui seraient à développer comprennent les turbines à gaz à rampe rapide, les programmes d’effacement de demande, le stockage par batteries ainsi que les STEPs, stations de transfert d’énergie par pompage, là où il y a encore des sites équipables : ce qui n’est pas le cas de la France avec seulement 1 GW en plus des 5 GW existants. Ces stockages sont en mesure de se recharger pendant les heures d’abondance des productions d’EnRi pour les restituer lorsque les EnRi produisent moins et que la demande horaire est plus élevée. On peut ajouter à ces moyens l’ajout d’interconnexions qui permettent de mieux exploiter le foisonnement des productions éoliennes ou solaires entre systèmes[2]
  Pour les tenants du Marché, les sources de flexibilité sont supposées pouvoir se développer « par le marché », c’est-à-dire par les revenus que l’investisseur pourrait tirer sur les différents étages du marché de l’électricité, à savoir le mécanisme de rémunération des capacités, les marchés journaliers et infra-journaliers de l’énergie en jouant des arbitrages de prix entre les heures d’abondance et les heures de tension ainsi que les marchés d’ajustement, balancing, et de services système. Mais ces revenus sont très volatiles à court terme et hautement incertains sur la période de recouvrement du capital. Le stockage marchand ne peut certainement pas se développer à l’échelle requise sur de telles bases.
  Des appels d’offre spécifiques sont donc nécessaires pour les différents types de sources flexibles en relation avec les besoins de flexibilité créés par le développement des ENRi, qui doivent être estimés par le gestionnaire de réseau et le planificateur. Elle doit aussi rechercher le développement adapté des réseaux de transport et de répartition pour limiter les congestions et les écrêtements de production solaire ou éolienne dans certaines zones. Tout ceci suppose une programmation évolutive des différents équipements du mix électrique. Elle doit être effectuée à intervalle régulier pour que soient réalisés les équipements nécessaires en temps voulu et que soient évitées le sous-développement des sources de flexibilité.
  Pour conclure, les marchés de l’électricité ne sont pas fous, malgré leur fonctionnement très volatile et apparemment aberrant. Ils fonctionnent efficacement pour les coordinations en temps réel et de court terme, pour gérer les déséquilibres horaires et journaliers, et pour assurer l’intégration des systèmes. En revanche, ils deviennent de plus en plus impuissants à assurer les investissements de long terme dans toutes les technologies nécessaires au développement et à l’optimisation du système.
  Les déséquilibres de long terme qui se profilent actuellement dans les différents systèmes de l’UE qui intègrent beaucoup d’EnRi résultent d’une gouvernance énergétique contradictoire à l’échelle de l’UE, gouvernance basée sur des partis pris idéologiques tant en matière de Marché que de rejet de certaines technologies : nucléaire, gaz avec CCUS. Ceci se traduit par un régime hybride plein d’ambigüités, qui conduit à un secteur qui n’est ni vraiment planifié, ni vraiment orienté par le marché. Les politiques nationales de flexibilité sont insuffisantes, sans parler du manque de coordination entre elles.
  La récente réforme de l’ Electricity Market Design définie par le Règlement, sous-directive, adopté fin 2023 est un pas en avant, mais il n’est pas suffisant. Il faudrait une reconnaissance explicite dans un texte européen du rôle de planificateur de chaque État-membre et de son autonomie de choix dans le domaine de l’électricité. Il faut arriver à un régime combinant de façon intelligente marché de court terme, planification et appels d’offre concurrentiels pour des contrats de long terme. Mais ceci n’empêchera pas les marchés de l’électricité de garder un fonctionnement très complexe et parfois très surprenant pour les non-spécialistes.


    Cet article est l'œuvre de la source indiquée. Les opinions qui y sont exprimées ne sont pas nécessairement celles de Les vues imprenables et PHP.
 

DÉFORESTATION INDUSTRIELLE : UNE MENACE GRANDISSANTE POUR LA PLANÈTE ET LES COMMUNAUTÉ LOCALES EN INDE ET DANS LE MONDE

ne pensent pas à ceux dont la vie en dépend et qui partagent une profonde relation avec elles. Ils ne veulent pas non plus que leur mode de vie change. Parler de la préservation des forêts et avoir son existence liée à elles sont deux choses différentes. Les Adivasis ont façonné chaque aspect de leur vie en fonction des forêts ; nous vénérons la nature, nos dieux et déesses habitent la forêt, tout comme nous. Nos rituels et nos fêtes sont également liés aux forêts, où nous entretenons, ensemble, une relation aussi intime et sûre qu’au sein d’une famille. C’est cette perspective qui nous distingue de ceux qui sont séparés de la nature, et qui informe notre vision du monde naturel.

Supporter la colonisation interne

Pendant longtemps, avant l’indépendance de la nation indienne, les Adivasis ont lutté pour leur autonomie contre les propriétaires terriens, les bailleurs de fonds et les Britanniques. Leur mouvement a commencé bien avant le début de la lutte des nationalistes indiens pour l’indépendance — un aspect de l’histoire qui est encore trop peu exploré. Même après l’indépendance, les Adivasis ont continué à lutter contre le gouvernement de leur propre nation. Et au nom du développement de celle-ci, nous avons été forcés d’endurer la douleur cuisante du déplacement perpétuel et de la migration. Il existe deux grands partis dans le pays : le Congrès et le Bharatiya Janata Party (BJP). Sous leur règne, le développement a été utilisé comme couverture pour l’acquisition forcée de terres et de forêts appartenant aux Adivasis.

« Il existe deux grands partis dans le pays : le Congrès et le Bharatiya Janata Party (BJP). Sous leur règne, le développement a été utilisé comme couverture pour l’acquisition forcée de terres et de forêts appartenant aux Adivasis. »

Les maoïstes rendent la lutte des autochtones plus difficile car il est aisé pour l’État d’incarcérer les Adivasis en les qualifiant de combattants maoïstes. Appelés localement « naxalites », les maoïstes, après une rébellion armée contre l’État indien dans le village de Naxalbari au Bengale occidental en 1967, ont dû se cacher dans les forêts, où ils ont également diffusé leurs idées parmi les peuples indigènes. Cependant, bien avant l’apparition du maoïsme dans les régions adivasis, nous avions nos propres méthodes d’organisation, de résistance et de lutte. Au nom de la lutte contre le maoïsme, l’État a établi des centres de police dans les villages adivasis, et ce paysage militarisé a rendu la vie des Adivasis encore plus difficile, un véritable enfer quotidien. Nos forêts ont été occupées par des unités de la Central Reserve Police Force (CRPF), dont les soldats violent nos femmes et brûlent nos maisons. Nous sommes fouillés et contrôlés avant d’entrer dans nos forêts et nos villages, et nous ne sommes pas autorisés à aller et venir librement. Cette situation nous prive de notre liberté, jusqu’à l’intérieur des forêts. Souvent, de nombreuses luttes indigènes non violentes sont qualifiées de violentes, et des Adivasis innocents sont emprisonnés en voyant brandis contre eux l’étiquette de « maoïsme ». Des personnes appartenant à différentes religions se sont également engagées dans un bras de fer avec les Adivasis, menaçant ainsi notre langue et notre culture, et poussant notre identité, telle qu’elle est définie par les forêts, vers l’effacement.

Pourquoi pointe-t-on les canons sur les forêts et les montagnes ?

Il y a quelques années, pour s’opposer à la multiplication des camps de police dans leur voisinage, les Adivasis Munda du Jharkhand1 ont gravé sur la pierre certains articles de la constitution indienne qui traitent des droits constitutionnels des Adivasis, ce qui a marqué le début du mouvement Pathalgadi. À l’époque, le Jharkhand était gouverné par le BJP, qui a qualifié le mouvement comme étant inspiré par les maoïstes et a porté des accusations contre plusieurs villageois. Dans les villages des Munda Adivasis, de nouveaux camps de police ont vu le jour.

ne pensent pas à ceux dont la vie en dépend et qui partagent une profonde relation avec elles. Ils ne veulent pas non plus que leur mode de vie change. Parler de la préservation des forêts et avoir son existence liée à elles sont deux choses différentes. Les Adivasis ont façonné chaque aspect de leur vie en fonction des forêts ; nous vénérons la nature, nos dieux et déesses habitent la forêt, tout comme nous. Nos rituels et nos fêtes sont également liés aux forêts, où nous entretenons, ensemble, une relation aussi intime et sûre qu’au sein d’une famille. C’est cette perspective qui nous distingue de ceux qui sont séparés de la nature, et qui informe notre vision du monde naturel.

Supporter la colonisation interne

Pendant longtemps, avant l’indépendance de la nation indienne, les Adivasis ont lutté pour leur autonomie contre les propriétaires terriens, les bailleurs de fonds et les Britanniques. Leur mouvement a commencé bien avant le début de la lutte des nationalistes indiens pour l’indépendance — un aspect de l’histoire qui est encore trop peu exploré. Même après l’indépendance, les Adivasis ont continué à lutter contre le gouvernement de leur propre nation. Et au nom du développement de celle-ci, nous avons été forcés d’endurer la douleur cuisante du déplacement perpétuel et de la migration. Il existe deux grands partis dans le pays : le Congrès et le Bharatiya Janata Party (BJP). Sous leur règne, le développement a été utilisé comme couverture pour l’acquisition forcée de terres et de forêts appartenant aux Adivasis.

« Il existe deux grands partis dans le pays : le Congrès et le Bharatiya Janata Party (BJP). Sous leur règne, le développement a été utilisé comme couverture pour l’acquisition forcée de terres et de forêts appartenant aux Adivasis. »

Les maoïstes rendent la lutte des autochtones plus difficile car il est aisé pour l’État d’incarcérer les Adivasis en les qualifiant de combattants maoïstes. Appelés localement « naxalites », les maoïstes, après une rébellion armée contre l’État indien dans le village de Naxalbari au Bengale occidental en 1967, ont dû se cacher dans les forêts, où ils ont également diffusé leurs idées parmi les peuples indigènes. Cependant, bien avant l’apparition du maoïsme dans les régions adivasis, nous avions nos propres méthodes d’organisation, de résistance et de lutte. Au nom de la lutte contre le maoïsme, l’État a établi des centres de police dans les villages adivasis, et ce paysage militarisé a rendu la vie des Adivasis encore plus difficile, un véritable enfer quotidien. Nos forêts ont été occupées par des unités de la Central Reserve Police Force (CRPF), dont les soldats violent nos femmes et brûlent nos maisons. Nous sommes fouillés et contrôlés avant d’entrer dans nos forêts et nos villages, et nous ne sommes pas autorisés à aller et venir librement. Cette situation nous prive de notre liberté, jusqu’à l’intérieur des forêts. Souvent, de nombreuses luttes indigènes non violentes sont qualifiées de violentes, et des Adivasis innocents sont emprisonnés en voyant brandis contre eux l’étiquette de « maoïsme ». Des personnes appartenant à différentes religions se sont également engagées dans un bras de fer avec les Adivasis, menaçant ainsi notre langue et notre culture, et poussant notre identité, telle qu’elle est définie par les forêts, vers l’effacement.

Pourquoi pointe-t-on les canons sur les forêts et les montagnes ?

Il y a quelques années, pour s’opposer à la multiplication des camps de police dans leur voisinage, les Adivasis Munda du Jharkhand1 ont gravé sur la pierre certains articles de la constitution indienne qui traitent des droits constitutionnels des Adivasis, ce qui a marqué le début du mouvement Pathalgadi. À l’époque, le Jharkhand était gouverné par le BJP, qui a qualifié le mouvement comme étant inspiré par les maoïstes et a porté des accusations contre plusieurs villageois. Dans les villages des Munda Adivasis, de nouveaux camps de police ont vu le jour.

ne pensent pas à ceux dont la vie en dépend et qui partagent une profonde relation avec elles. Ils ne veulent pas non plus que leur mode de vie change. Parler de la préservation des forêts et avoir son existence liée à elles sont deux choses différentes. Les Adivasis ont façonné chaque aspect de leur vie en fonction des forêts ; nous vénérons la nature, nos dieux et déesses habitent la forêt, tout comme nous. Nos rituels et nos fêtes sont également liés aux forêts, où nous entretenons, ensemble, une relation aussi intime et sûre qu’au sein d’une famille. C’est cette perspective qui nous distingue de ceux qui sont séparés de la nature, et qui informe notre vision du monde naturel.

Supporter la colonisation interne

Pendant longtemps, avant l’indépendance de la nation indienne, les Adivasis ont lutté pour leur autonomie contre les propriétaires terriens, les bailleurs de fonds et les Britanniques. Leur mouvement a commencé bien avant le début de la lutte des nationalistes indiens pour l’indépendance — un aspect de l’histoire qui est encore trop peu exploré. Même après l’indépendance, les Adivasis ont continué à lutter contre le gouvernement de leur propre nation. Et au nom du développement de celle-ci, nous avons été forcés d’endurer la douleur cuisante du déplacement perpétuel et de la migration. Il existe deux grands partis dans le pays : le Congrès et le Bharatiya Janata Party (BJP). Sous leur règne, le développement a été utilisé comme couverture pour l’acquisition forcée de terres et de forêts appartenant aux Adivasis.

« Il existe deux grands partis dans le pays : le Congrès et le Bharatiya Janata Party (BJP). Sous leur règne, le développement a été utilisé comme couverture pour l’acquisition forcée de terres et de forêts appartenant aux Adivasis. »

Les maoïstes rendent la lutte des autochtones plus difficile car il est aisé pour l’État d’incarcérer les Adivasis en les qualifiant de combattants maoïstes. Appelés localement « naxalites », les maoïstes, après une rébellion armée contre l’État indien dans le village de Naxalbari au Bengale occidental en 1967, ont dû se cacher dans les forêts, où ils ont également diffusé leurs idées parmi les peuples indigènes. Cependant, bien avant l’apparition du maoïsme dans les régions adivasis, nous avions nos propres méthodes d’organisation, de résistance et de lutte. Au nom de la lutte contre le maoïsme, l’État a établi des centres de police dans les villages adivasis, et ce paysage militarisé a rendu la vie des Adivasis encore plus difficile, un véritable enfer quotidien. Nos forêts ont été occupées par des unités de la Central Reserve Police Force (CRPF), dont les soldats violent nos femmes et brûlent nos maisons. Nous sommes fouillés et contrôlés avant d’entrer dans nos forêts et nos villages, et nous ne sommes pas autorisés à aller et venir librement. Cette situation nous prive de notre liberté, jusqu’à l’intérieur des forêts. Souvent, de nombreuses luttes indigènes non violentes sont qualifiées de violentes, et des Adivasis innocents sont emprisonnés en voyant brandis contre eux l’étiquette de « maoïsme ». Des personnes appartenant à différentes religions se sont également engagées dans un bras de fer avec les Adivasis, menaçant ainsi notre langue et notre culture, et poussant notre identité, telle qu’elle est définie par les forêts, vers l’effacement.

Pourquoi pointe-t-on les canons sur les forêts et les montagnes ?

Il y a quelques années, pour s’opposer à la multiplication des camps de police dans leur voisinage, les Adivasis Munda du Jharkhand1 ont gravé sur la pierre certains articles de la constitution indienne qui traitent des droits constitutionnels des Adivasis, ce qui a marqué le début du mouvement Pathalgadi. À l’époque, le Jharkhand était gouverné par le BJP, qui a qualifié le mouvement comme étant inspiré par les maoïstes et a porté des accusations contre plusieurs villageois. Dans les villages des Munda Adivasis, de nouveaux camps de police ont vu le jour.

  En Inde et dans de nombreux autres territoires à travers le monde, y compris en France, des peuples autochtones et des ruraux se mobilisent localement pour préserver leur histoire, leur patrimoine culturel et naturel face aux intérêts économiques des industriels et des États, qui utilisent la déforestation comme moyen de pression.
  Face à l'urgence climatique, il est essentiel de trouver des solutions durables qui prennent en compte les besoins des populations locales et la préservation de l'environnement. La déforestation, qui contribue à la destruction des habitats naturels et à l'émission de gaz à effet de serre, ne peut être une réponse viable à long terme.
 " Les vrais hommes de progrès sont ceux qui ont pour point de départ un respect profond du passé. "
RENAN Ernest, I823-I892 
 
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 Photo :  Mettle30
  
  Jacinta Kerketta appartient à la communauté Oraon Adivasi du Jharkhand. Elle est poète, écrivain et journaliste indépendante. Elle a publié trois recueils de poésie, dont Angor, traduit en français en 2016. Dans ce texte, publié dans la revue The Funambulist et que nous traduisons, elle met en lumière les luttes politiques des communautés Adivasi en Inde, qui se battent depuis des décennies contre la répression étatique et l’extractivisme. Avec le vol de leurs rivières, de leurs forêts et de leurs terres, les Adivasis voient leur existence même menacée d’effacement et s’appuient sur la sagesse de leurs ancêtres, la force de leurs montagnes et leur attachement à la vie pour organiser une puissante résistance.
 
 भागते हुए छोड़कर अपना घर
पुआल मिट्टी और खपरे
पूछते हैं अक्सर
ओ शहर !
क्या तुम कभी उजड़ते हो
किसी विकास के नाम पर ?
(अंगोर, २०१६)

" Ils ont quitté leur maison,
Leur ferme, leur paille, pour l’exode
Et demandent encore et encore :
« Ô ville !
T’arrive-t-il jamais d’être arrachée à toi
Au nom d’un prétendu progrès ?
"
Angor, Banyan, 2016
 
  L’Inde compte plus de 120 millions d’ Adivasis. Le terme Adivasi désigne ceux qui vivent depuis la nuit des temps, ceux qui sont les premiers habitants de cette terre. Notre vie ne peut s’imaginer sans les forêts. Elles sont synonymes de diversité, c’est pourquoi les Adivasis qui les respectent cultivent également une valorisation de cette même diversité. Lorsqu’une forêt est déracinée, c’est tout le monde de la vie des Adivasis qui est déraciné. Autour de nous, de nombreuses personnes parlent de préserver les forêts, mais aucune part de leur existence n’est liée à ces écosystèmes naturels. Ils veulent protéger les forêts, mais ne pensent pas à ceux dont la vie en dépend et qui partagent une profonde relation avec elles. Ils ne veulent pas non plus que leur mode de vie change. Parler de la préservation des forêts et avoir son existence liée à elles sont deux choses différentes. Les Adivasis ont façonné chaque aspect de leur vie en fonction des forêts ; nous vénérons la nature, nos dieux et déesses habitent la forêt, tout comme nous. Nos rituels et nos fêtes sont également liés aux forêts, où nous entretenons, ensemble, une relation aussi intime et sûre qu’au sein d’une famille. C’est cette perspective qui nous distingue de ceux qui sont séparés de la nature, et qui informe notre vision du monde naturel.
 

 
 
 
L’Inde compte plus de 120 millions d’Adivasis. Le terme Adivasi désigne ceux qui vivent depuis la nuit des temps, ceux qui sont les premiers habitants de cette terre. Notre vie ne peut s’imaginer sans les forêts. Elles sont synonymes de diversité, c’est pourquoi les Adivasis qui les respectent cultivent également une valorisation de cette même diversité. Lorsqu’une forêt est déracinée, c’est tout le monde de la vie des Adivasis qui est déraciné. Autour de nous, de nombreuses personnes parlent de préserver les forêts, mais aucune part de leur existence n’est liée à ces écosystèmes naturels. Ils veulent protéger les forêts, mais ne pensent pas à ceux dont la vie en dépend et qui partagent une profonde relation avec elles. Ils ne veulent pas non plus que leur mode de vie change. Parler de la préservation des forêts et avoir son existence liée à elles sont deux choses différentes. Les Adivasis ont façonné chaque aspect de leur vie en fonction des forêts ; nous vénérons la nature, nos dieux et déesses habitent la forêt, tout comme nous. Nos rituels et nos fêtes sont également liés aux forêts, où nous entretenons, ensemble, une relation aussi intime et sûre qu’au sein d’une famille. C’est cette perspective qui nous distingue de ceux qui sont séparés de la nature, et qui informe notre vision du monde naturel.
 
 
Supporter la colonisation interne
  Pendant longtemps, avant l’indépendance de la nation indienne, les Adivasis ont lutté pour leur autonomie contre les propriétaires terriens, les bailleurs de fonds et les Britanniques. Leur mouvement a commencé bien avant le début de la lutte des nationalistes indiens pour l’indépendance — un aspect de l’histoire qui est encore trop peu exploré. Même après l’indépendance, les Adivasis ont continué à lutter contre le gouvernement de leur propre nation. Et au nom du développement de celle-ci, nous avons été forcés d’endurer la douleur cuisante du déplacement perpétuel et de la migration. Il existe deux grands partis dans le pays : le Congrès et le Bharatiya Janata Party : BJP. Sous leur règne, le développement a été utilisé comme couverture pour l’acquisition forcée de terres et de forêts appartenant aux Adivasis.
  Les maoïstes rendent la lutte des autochtones plus difficile car il est aisé pour l’État d’incarcérer les Adivasis en les qualifiant de combattants maoïstes. Appelés localement « naxalites », les maoïstes, après une rébellion armée contre l’État indien dans le village de Naxalbari au Bengale occidental en 1967, ont dû se cacher dans les forêts, où ils ont également diffusé leurs idées parmi les peuples indigènes. Cependant, bien avant l’apparition du maoïsme dans les régions adivasis, nous avions nos propres méthodes d’organisation, de résistance et de lutte. Au nom de la lutte contre le maoïsme, l’État a établi des centres de police dans les villages adivasis, et ce paysage militarisé a rendu la vie des Adivasis encore plus difficile, un véritable enfer quotidien. Nos forêts ont été occupées par des unités de la Central Reserve Police Force, CRPF, dont les soldats violent nos femmes et brûlent nos maisons. Nous sommes fouillés et contrôlés avant d’entrer dans nos forêts et nos villages, et nous ne sommes pas autorisés à aller et venir librement. Cette situation nous prive de notre liberté, jusqu’à l’intérieur des forêts. Souvent, de nombreuses luttes indigènes non violentes sont qualifiées de violentes, et des Adivasis innocents sont emprisonnés en voyant brandis contre eux l’étiquette de « maoïsme ». Des personnes appartenant à différentes religions se sont également engagées dans un bras de fer avec les Adivasis, menaçant ainsi notre langue et notre culture, et poussant notre identité, telle qu’elle est définie par les forêts, vers l’effacement.
 
Pourquoi pointe-t-on les canons sur les forêts et les montagnes ?
  Il y a quelques années, pour s’opposer à la multiplication des camps de police dans leur voisinage, les Adivasis Munda du Jharkhand1 ont gravé sur la pierre certains articles de la constitution indienne qui traitent des droits constitutionnels des Adivasis, ce qui a marqué le début du mouvement Pathalgadi. À l’époque, le Jharkhand était gouverné par le BJP, qui a qualifié le mouvement comme étant inspiré par les maoïstes et a porté des accusations contre plusieurs villageois. Dans les villages des Munda Adivasis, de nouveaux camps de police ont vu le jour.
 
 Constitution de l'Inde à l'entrée d'un village Adivasi | Niraj Sinha, The Wire.
 
  Dans plusieurs régions adivasi, le gram sabha, assemblée villageoise, a été renforcé dans le cadre de la loi de 1996 sur l’extension des panchayats aux zones répertoriées : Panchayats Extension to Scheduled Areas, PESA. Toutefois, en raison de leur manque de présence sur le terrain, ils n’ont pas été en mesure de fonctionner efficacement. La loi PESA de 1996 stipule que l’eau, la forêt, la terre et les minéraux sont les ressources naturelles qui sont désormais contrôlées par les villageois. Elle indique en outre que, sans l’autorisation du gram sabha, personne ne peut interférer avec ces ressources qui appartiennent exclusivement à ces villages et aucune entreprise n’est autorisée à exploiter des mines dans la région sans leur permission. Mais les gouvernements eux-mêmes tentent d’affaiblir cette législation et les entreprises demandent l’autorisation des fausses autorités du gram sabha pour lancer les opérations minières. Cette situation a conduit, dans plusieurs régions du pays, à une résistance interminable, qui s’étend sur plusieurs décennies. Les Adivasis remettent en question leur propre gouvernement et demandent pourquoi des armes sont pointées vers leurs forêts et leurs montagnes.
  Depuis vingt ans, les habitants des monts Deomali, dans le district de Koraput, Odisha2, résistent à l’exploitation de la bauxite dans leurs montagnes. Les forêts sont la force et la nourriture des Adivasis, en particulier des femmes : elles nous permettent de devenir autonomes. La vie des gens est profondément liée aux forêts : notre culture, notre langue, nos rituels, nos fêtes, notre foi, tout est lié. Chaque déracinement signifie la fin de tout pour ces communautés. Déplacés de leurs maisons et dispersés dans d’autres parties du pays, les Adivasis ne sont même pas appelés Adivasis parce que le registre des droits sur nos terres, land’s records of rights, devient la base pour obtenir un certificat de caste pour l’éducation de nos enfants. C’est pourquoi la mort d’une forêt efface non seulement l’identité, mais l’existence même des Adivasis.
 
À Chhattisgarh, un combat en cours pour protéger la forêt Hasdeo
  Dans le Chhattisgarh3, les habitants luttent depuis longtemps pour préserver Hasdeo Aranya, une vaste forêt de Sal. Le Sal est considéré comme un arbre sacré pour les Adivasis. Sans lui, aucune célébration, aucune fête, aucune cérémonie de mariage ne peut être complète. Il s’agit d’un arbre extraordinaire qui ne peut pas être cultivé en plantant simplement un jeune arbuste. Les Sal poussent d’eux-mêmes : lorsque leurs graines tombent, les pluies donnent naissance à un millier d’arbres et une nouvelle forêt prend vie. Une fois détruites, il est presque impossible que les forêts de Sal repoussent — peut-il y avoir une alternative à des milliers d’années d’un monde de vie ? Dans l’immensité de cette forêt de Sal, les communautés Gond, Kanwar, Binjhwar et Oraon Adivasi prospèrent. Cette forêt qui s’étend sur 170 000 hectares est réputée pour sa biodiversité et abrite aussi bien des éléphants que des humains. C’est la forêt la plus riche du centre de l’Inde. Elle est reliée aux parcs nationaux du Madhya Pradesh4 et du Jharkhand. À la demande de la Cour suprême de l’Inde, le Wildlife Institute of India a réalisé l’année dernière une étude qui a conclu que si une seule nouvelle mine de charbon était approuvée à Hasdeo Aranya, cela perturberait la délicate relation entre les éléphants et les humains, aggravant ainsi les conflits entre eux.
  En 2010, un comité conjoint du ministère du charbon et du ministère de l’environnement, des forêts et du changement climatique a déclaré Hasdeo Aranya « No-Go Zone » compte tenu de la biodiversité remarquablement riche et de la sensibilité écologique de la forêt, interdisant tout type de projet minier dans la région. C’était le seul gisement de charbon en Inde dont l’accès était totalement interdit. Cependant, en l’espace d’un an, cédant à la pression des entreprises, le comité consultatif sur les forêts a approuvé un projet d’extraction de charbon, à Parsa East et Kete Basan, dans la région. Bien que le National Green Tribunal en ait annulé l’approbation en 2014, la Cour suprême a ordonné la poursuite du projet d’exploitation minière tout en exigeant un rapport sur les effets néfastes de cette exploitation sur Hasdeo Aranya. Tant que celui-ci n’a pas été remis, les travaux miniers peuvent continuer et, aujourd’hui, le dossier est encore en suspens. Entre-temps, en 2014, la Cour suprême a déclaré illégales 204 mines de charbon attribuées dans tout le pays, dont 42 mines de charbon dans le Chhattisgarh. Le processus de vente aux enchères et d’attribution des mines de charbon a recommencé dans toute l’Inde, mais la situation à Parsa East et Kete Basan est restée inchangée : les travaux miniers se sont poursuivis sans relâche.
 
 Destruction de la forêt Hasdeo à Chhattisgarh | Alok Putul 

La foi des Adivasis se trouve dans les forêts et les montagnes
  Génération après génération, les institutions et la foi des Adivasis dépendent toujours des forêts et des montagnes. Dans le Chhattisgarh, les Adivasis Gond croient que les âmes de leurs ancêtres résident dans ces milieux. La société Gond Adivasi possède un système de naar très fort, que l’on peut également appeler système de village. Les gens croient que dans les limites d’un village, les montagnes, les rivières, les étangs, les chutes d’eau, les ressources en eau douce, les champs, etc. sont tous soutenus par les forces de la nature. On dit que le village tout entier fonctionne grâce aux énergies jumelles de ses femmes et de ses hommes, qui comprennent sept énergies appartenant aux premières et dix aux seconds, tandis que cinq sont des peyn, qui se réfèrent aux âmes des ancêtres. Toutes ces énergies disposent d’un espace distinct au sein du village et, de temps à autre, les habitants se rendent dans ces espaces et vénèrent ces énergies. Dans le système naar, tout est lié et la perte de l’un aura inévitablement un impact sur l’autre. Par exemple, la disparition des montagnes signifie que le pouvoir des pluies s’affaiblit; si la rivière s’assèche, le mode de vie des habitants se restreint également.
  Dans la société Gond Adivasi, les gens sont très attentifs aux signes de la nature. Par exemple, avant de creuser un puits ou un étang, ils parlent à la forêt et à la terre et attendent des signes de la nature. Ils essaient d’évaluer s’ils ont sa permission. Ils ont leur propre façon d’évaluer les eaux souterraines : ils se promènent avec un bâton en bambou, et là où il bouge le plus vite, ils trouvent le niveau d’eau le plus élevé. Les gens considèrent ces forêts et ces montagnes comme leur famille et en prennent soin avec le même sentiment d’intimité.

Des femmes adivasi manifestent pour protéger la forêt de Hasdeo | Aranya Bachao Sangharsh Samiti.
 
Les forêts et la vie, seul livre sacré pour les Adivasis
  Le livre sacré des Adivasis est le livre des forêts et de la vie. Nous le lisons en le vivant, et cette lecture commence par les forêts, par la lecture de la nature elle-même. Nous nous situons au-delà des notions de péché et de vertu, de paradis et d’enfer. Nous avons beaucoup de questions : sur les mystères de cette terre, sur la vie et la mort, sur l’univers, sur le voyage dans l’au-delà, sur notre existence. Nous trouvons nos réponses dans la vie, les forêts et la nature. Ce sont ceux qui croient aux écritures de la vie et de la nature qui s’appellent eux-mêmes « Adivasi ». Sans comprendre ceux qui ont une relation si forte avec la forêt, le développement de la soi-disant « société civilisée » n’a cessé de les expulser de leurs propres rivières, forêts et terres.
  Le Dr Ram Dayal Munda, éminent intellectuel, dirigeant et travailleur culturel du Jharkhand, avait l’habitude de dire : « Je naachi se baachi ». Cela signifie que la société qui ne peut pas se synchroniser avec le rythme de la terre ne peut pas survivre sur cette terre. C’est pourquoi il est crucial pour notre société de suivre la cadence de la terre, de marcher, de danser avec son pouls. Lorsque nous parcourons les récits originels des Munda Adivasis du Jharkhand, nous constatons que le Créateur travaille en interrogeant encore et encore les humains, qu’il est attentif à leurs suggestions et qu’il tient compte de leurs opinions. Leur relation n’est pas fondée sur une dynamique de pouvoir entre supérieurs et inférieurs.
 
 Quand l’arrogance du Soleil a pris fin, la Terre est née
  Dans l’ Arunachal Pradesh, il existe la communauté Tani Adivasi. L’écrivain Joram Yalam Nabam a compilé des histoires Tani. Il explique que dans ces contes, l’histoire originelle relate qu’auparavant, le Soleil était rempli d’arrogance. C’est pourquoi il était sans cesse consumé par son propre orgueil. C’est lorsque son arrogance s’est éteinte que la Terre est devenue habitable pour tous. Il faut l’anéantissement complet de l’arrogance et du complexe de supériorité pour que naisse un monde coexistant dans l’harmonie. Aujourd’hui, afin d’assurer la survie de la nature et des humains, il est nécessaire que l’arrogance des humains s’éteigne également. Le complexe de supériorité doit s’effondrer afin que soit construite une relation harmonieuse entre la nature et les humains. Il ne s’agit pas de simples principes adivasi, mais plutôt d’une philosophie de vie.
  Désormais, la société dite civilisée et les humains se considèrent comme supérieurs et, ivres de leurs structures et de leur orgueil, ils en sont arrivés à se brûler et se détruire eux-mêmes. Partout dans le monde, on se préoccupe du changement climatique ; des conférences, des débats et des conversations se déroulent partout. Autant d’événements organisés par ceux-là mêmes qui ont joué un rôle dans la destruction de la nature, dans le déplacement global des populations et l’augmentation des migrations — eux qui, justement, ne veulent apporter aucun changement à leur mode de vie. Et c’est là, aussi, que les voix des personnes en contact direct avec la nature et dont l’existence est liée à celle-ci ne sont pas entendues, ne sont pas prises en compte. Aujourd’hui, plus que jamais, il est important que nous écoutions ceux qui sont reliés aux forêts à travers le monde, que nous apprenions à écouter les forêts elles-mêmes.

  वे हमारे सभ्य होने के इंतज़ार में हैं
  और हम उनके मनुष्य होने के.
  (ईश्वर और बाज़ार, २०२२)
  Ils attendent que nous devenions civilisés
  et nous attendons qu’ils se transforment en humains
.
  Ishwar aur Bazar, 2022.
 
1. État situé au nord-est de l’Inde
2. État côtier situé à l’est de l’Inde
3. État voisin de l’ Odisha, situé au centre de l’Inde
4. État voisin du Chhattisgarh qui couvre le centre de l’Inde
  
  Source : BALLAST
 
  Cet article est l'œuvre de la source indiquée. Les opinions qui y sont exprimées ne sont pas nécessairement celles de Les vues imprenables et PHP.


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