« Si nous voulons que tout reste pareil, il faut que nous changions tout » (1), semble être la devise de la nouvelle majorité au pouvoir outre-Rhin. Changement de distribution mais, toujours la même pièce énergétique !
(1). « Se vogliamo che tutto rimanga come è, bisogna che tutto cambi ! »
Di Lampedusa Giuseppe Tomasi, 1896-1958, Il Gattopardo, 1958, Le guépard, Seuil, Paris, 1959.
Di Lampedusa Giuseppe Tomasi, juillet 1957. Source.
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La politique « énergie-climat » de la nouvelle coalition gouvernementale allemande : pas de changement fondamental de la politique énergétique du gouvernement sortant
Suite à la dissolution du parlement allemand en décembre 2024 et aux élections fédérales en février 2025, l’Union chrétienne démocrate (CDU) et l’Union chrétienne-sociale en Bavière (CSU sont parvenues en avril 2025 à former une coalition gouvernementale avec les Sociaux-démocrates (SPD).
La nouvelle coalition a publié le 9 avril 2025 un document posant les bases de leur collaboration pour les 4 prochaines années, le traditionnel contrat de coalition.
L’approbation des instances des 3 parties est nécessaire avant que la nouvelle coalition prenne ses fonctions. Le SPD va organiser une consultation de ses membres.
Le nouveau gouvernement prendra ses fonctions vraisemblablement début mai 2025. Il est prévu d’élire Friedrich Merz de la CDU comme chancelier.
Bien que n´étant pas juridiquement contraignant, le contrat de coalition permet aux partis membres du gouvernement de se positionner sur les sujets majeurs en détaillant les grandes lignes du programme des quatre prochaines années.
Le nouveau gouvernement en Allemagne confirme que l’atteinte des objectifs de l’accord de Paris sur le climat est une priorité. L’objectif national de neutralité carbone d’ici 2045 (Zéro émission nette), fixé par la Loi Fédérale sur la Protection du Climat, entrée en vigueur en août 2021, ne sera pas mis en cause.
100 Md€ du fonds spécial extrabudgétaire d’infrastructure de 500 Md€ adopté en mars 2025 iront à un fonds spécial existant, censé promouvoir les objectifs de zéro émission nette de l’Allemagne d’ici 2045.
Concernant le tournant énergétique, la nouvelle coalition gouvernementale mise en général sur la continuité de la politique énergétique du gouvernement sortant.
Tous les potentiels des renouvelables seront exploités, mais l’objectif est maintenant d’obtenir des coûts énergétiques durablement bas et prévisibles, compétitifs au niveau international.
Les entreprises électro-intensives auront droit à un allègement important par un « prix de l’électricité pour l’industrie ».
Pour pallier la variabilité de la production des énergies renouvelables telles que l’éolien et le photovoltaïque, il est prévu de lancer rapidement des appels d’offres, ouverts sur le plan technologique, pour la construction de 20 GW de centrales à gaz à l’horizon 2030.
L’objectif de la sortie de la production d´électricité à partir du charbon d’ici 2038 au plus tard, déjà décidé en 2020, est maintenu. Le rythme de déploiement de nouveaux moyens pilotables dictera le calendrier de fermeture (ou de mise en réserve) des centrales à charbon.
Le nucléaire n’est pas mentionné du tout dans le contrat de coalition. La nouvelle coalition n’envisage donc pas un retour à l’utilisation du nucléaire jusqu’à nouvel ordre. En revanche, le soutien à la recherche sur la fusion sera renforcé, avec pour objectif que « le premier réacteur de fusion au monde soit construit en Allemagne ».
La Loi sur le chauffage des bâtiments du gouvernement sortant, très controversée en Allemagne, sera abolie et remplacée par une nouvelle loi « plus ouverte à la technologie, plus flexible et plus simple ».
La nouvelle coalition a publié le 9 avril 2025 un document posant les bases de leur collaboration pour les 4 prochaines années, le traditionnel contrat de coalition.
L’approbation des instances des 3 parties est nécessaire avant que la nouvelle coalition prenne ses fonctions. Le SPD va organiser une consultation de ses membres.
Le nouveau gouvernement prendra ses fonctions vraisemblablement début mai 2025. Il est prévu d’élire Friedrich Merz de la CDU comme chancelier.
Bien que n´étant pas juridiquement contraignant, le contrat de coalition permet aux partis membres du gouvernement de se positionner sur les sujets majeurs en détaillant les grandes lignes du programme des quatre prochaines années.
Le nouveau gouvernement en Allemagne confirme que l’atteinte des objectifs de l’accord de Paris sur le climat est une priorité. L’objectif national de neutralité carbone d’ici 2045 (Zéro émission nette), fixé par la Loi Fédérale sur la Protection du Climat, entrée en vigueur en août 2021, ne sera pas mis en cause.
100 Md€ du fonds spécial extrabudgétaire d’infrastructure de 500 Md€ adopté en mars 2025 iront à un fonds spécial existant, censé promouvoir les objectifs de zéro émission nette de l’Allemagne d’ici 2045.
Concernant le tournant énergétique, la nouvelle coalition gouvernementale mise en général sur la continuité de la politique énergétique du gouvernement sortant.
Tous les potentiels des renouvelables seront exploités, mais l’objectif est maintenant d’obtenir des coûts énergétiques durablement bas et prévisibles, compétitifs au niveau international.
Les entreprises électro-intensives auront droit à un allègement important par un « prix de l’électricité pour l’industrie ».
Pour pallier la variabilité de la production des énergies renouvelables telles que l’éolien et le photovoltaïque, il est prévu de lancer rapidement des appels d’offres, ouverts sur le plan technologique, pour la construction de 20 GW de centrales à gaz à l’horizon 2030.
L’objectif de la sortie de la production d´électricité à partir du charbon d’ici 2038 au plus tard, déjà décidé en 2020, est maintenu. Le rythme de déploiement de nouveaux moyens pilotables dictera le calendrier de fermeture (ou de mise en réserve) des centrales à charbon.
Le nucléaire n’est pas mentionné du tout dans le contrat de coalition. La nouvelle coalition n’envisage donc pas un retour à l’utilisation du nucléaire jusqu’à nouvel ordre. En revanche, le soutien à la recherche sur la fusion sera renforcé, avec pour objectif que « le premier réacteur de fusion au monde soit construit en Allemagne ».
La Loi sur le chauffage des bâtiments du gouvernement sortant, très controversée en Allemagne, sera abolie et remplacée par une nouvelle loi « plus ouverte à la technologie, plus flexible et plus simple ».

Markus Söder (CSU), Friedrich Merz (CDU) et Lars Klingbeil (SPD) lors de la présentation des résultats de leurs négociations de coalition le 9 avril 2025, Source : REUTERS/Annegret Hilse
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Protection du Climat
La nouvelle coalition soutient les objectifs climatiques de l’accord de Paris, tout en sachant que le réchauffement climatique est un problème mondial et que la communauté internationale doit le résoudre ensemble.L’objectif national de neutralité carbone d’ici 2045 (Zéro émission nette), fixé par la Loi Fédérale sur la Protection du Climat, entrée en vigueur en août 2021, n’est pas mis en cause.
Suite à une modification de la loi fondamentale en mars 2025 /2/, un fonds spécial extrabudgétaire d’infrastructure de 500 milliards d’euros a été créé. 100 milliards d’euros de ce fonds iront au « Fonds pour le climat et la transformation » (Klima- und Transformationsfonds), censé promouvoir les objectifs de zéro émission nette de l’Allemagne d’ici 2045.
Les mots « neutralité carbone d’ici 2045 » apparaissent ainsi pour la première fois explicitement dans la Loi fondamentale. Toutefois, cela ne fait pas de la « neutralité climatique d’ici 2045 » un objectif obligeant l’État, en vertu de la Constitution, à atteindre cet objectif.
Toutefois le soutien à un futur objectif climatique de l’Union Européenne pour 2040, qui viserait 90% de réduction des émissions par rapport à 1990, n’est soutenu par la nouvelle coalition qu’à condition que l’Allemagne ne soit pas obligée de réduire ses émissions au-delà de son objectif climatique intermédiaire pour 2040, soit 88% par rapport à 1990 /3/.
En mai 2024, le gouvernement sortant avait approuvé une stratégie de gestion du carbone, comprenant le CSC et le CCUS, pour atteindre la neutralité carbone d’ici 2045 en Allemagne /4/. Il a été prévu de créer un cadre juridique pour la mise en place d’une infrastructure de canalisation de CO2 et d’un stockage définitif de CO2 au large des côtes allemandes. Les « Länder » ont la possibilité d’opter pour un stockage de CO₂ à terre. Cela pourrait devenir une option pour les régions du sud de l’Allemagne.
Suite à la dissolution du parlement allemand en décembre 2024, une modification de la Loi, autorisant le captage et stockage du CO2, n’est pas encore entrée en vigueur.
La nouvelle coalition promet un « paquet législatif imminent » permettant le recours aux techniques du captage et stockage du CO2 dans le secteur de l’industrie, là où d’autres options ne sont pas disponibles ainsi que pour les centrales à gaz.
En outre, la coalition considère le captage direct de l’air (Direct Air Capture) comme une technologie d’avenir possible pour éliminer le CO2
Notes de l’auteur :
La nouvelle coalition s’en tient aux objectifs climatiques du gouvernement sortant. L’objectif de neutralité carbone d’ici 2045 (Zéro émission nette) est maintenu.
Même si l’on ne croit pas à l’universalité du « principe de Pareto » (les premiers 80% d’accomplissement d’un objectif fixé nécessitent 20% de l’effort, les 20% nécessitent 80% de l’effort), les défis augmentent au fur et à mesure que l’on se rapproche de l’année cible et la réduction des émissions de gaz à effet de serre va donc devenir de plus en plus difficile.
La figure 1 permet de mieux comprendre ce qui a été réalisé jusqu’à présent et les tâches que l’Allemagne doit encore accomplir dans les années à venir au sujet de la réduction des gaz à effet de serre.
En 60% du temps (35 ans) écoulé depuis 1990, la réduction moyenne était de 13 Mt CO2éq/an. Dans les 40% du temps encore disponible (25 ans), il faudrait doubler la réduction annuelle pour atteindre l’objectif de 2045.

Figure 1 : réduction des émissions de gaz à effet de serre depuis 1990 et objectif de 2045 /6/
En l’état actuel des choses, l’objectif de « neutralité carbone en 2045 » est quasiment impossible à atteindre. Les responsables en sont conscients, mais ils n’en parlent pas : le gouvernement a raison de douter de la confiance des citoyens.
Ce « silence » du gouvernement vise aussi à ne pas ternir l’image de l’Allemagne en tant que modèle dans le domaine de la protection du climat sur la scène internationale.
Ce « silence » du gouvernement vise aussi à ne pas ternir l’image de l’Allemagne en tant que modèle dans le domaine de la protection du climat sur la scène internationale.
Marché du carbone européen
La nouvelle coalition soutient la pertinence du dispositif de marché du carbone européen SEQE-UE (ETS) pour assurer la décarbonation.
Le SEQE-UE 2 (ETS 2), adopté en 2023 par l’Union Européenne, est un nouveau marché carbone qui démarrera en 2027 et qui couvrira les émissions de CO2 des énergies fossiles utilisées dans les secteurs du transport routier, du bâtiment, de la construction et de la petite industrie. L’adaptation du système national de tarification du CO2 au SEQE-UE 2 est déjà entrée en vigueur début 2025 /3/.
Efficacité énergétique
L’efficacité énergétique est, selon la nouvelle coalition, un pilier pour la réalisation des objectifs climatiques. Elle sera atteinte notamment par des incitations fiscales et des signaux de marché. La loi sur l’efficacité énergétique et la loi sur les services énergétiques seront modifiées, simplifiées et mises en conformité avec le droit européen.
Ce texte du contrat de coalition ne stipule pas si les objectifs de réduction de la consommation énergique décidés par le gouvernement sortant seront repris ou modifiés.
Notes de l’auteur :
La Loi sur l’efficacité énergétique décidée par le gouvernement sortant en 2023 et actuellement en vigueur prévoit une forte réduction de la consommation finale d’énergie et de l’énergie primaire /3/. D´ici 2030, la consommation finale d’énergie devrait diminuer d’au moins 26,5% et celle de l’énergie primaire d’au moins 39,3% par rapport à 2008.
À l’horizon de 2045 le gouvernement sortant avait envisagé une réduction de la consommation finale d’énergie d’au moins 45% et de la consommation d’énergie primaire de l’ordre de 57% par rapport à 2008.
Les objectifs de réduction de la consommation sont très ambitieux, ce qui implique un effort important. En 60% du temps (35 ans) écoulé depuis 1990, la réduction moyenne était de 41 PJ/an. Dans les 40% du temps encore disponible (25 ans), il faudrait plus que tripler la réduction annuelle de la consommation finale d’énergie pour atteindre l’objectif de 2045.
Il s’agit d’une ingérence fondamentale dans l’économie nationale, avec des conséquences prévisibles pour la prospérité et la stabilité de la société. Les dommages collatéraux économiques attendus seront vraisemblablement énormes.
L’efficacité énergétique est, selon la nouvelle coalition, un pilier pour la réalisation des objectifs climatiques. Elle sera atteinte notamment par des incitations fiscales et des signaux de marché. La loi sur l’efficacité énergétique et la loi sur les services énergétiques seront modifiées, simplifiées et mises en conformité avec le droit européen.
Ce texte du contrat de coalition ne stipule pas si les objectifs de réduction de la consommation énergique décidés par le gouvernement sortant seront repris ou modifiés.
Notes de l’auteur :
La Loi sur l’efficacité énergétique décidée par le gouvernement sortant en 2023 et actuellement en vigueur prévoit une forte réduction de la consommation finale d’énergie et de l’énergie primaire /3/. D´ici 2030, la consommation finale d’énergie devrait diminuer d’au moins 26,5% et celle de l’énergie primaire d’au moins 39,3% par rapport à 2008.
À l’horizon de 2045 le gouvernement sortant avait envisagé une réduction de la consommation finale d’énergie d’au moins 45% et de la consommation d’énergie primaire de l’ordre de 57% par rapport à 2008.
Les objectifs de réduction de la consommation sont très ambitieux, ce qui implique un effort important. En 60% du temps (35 ans) écoulé depuis 1990, la réduction moyenne était de 41 PJ/an. Dans les 40% du temps encore disponible (25 ans), il faudrait plus que tripler la réduction annuelle de la consommation finale d’énergie pour atteindre l’objectif de 2045.
Il s’agit d’une ingérence fondamentale dans l’économie nationale, avec des conséquences prévisibles pour la prospérité et la stabilité de la société. Les dommages collatéraux économiques attendus seront vraisemblablement énormes.

La politique énergétique
Au sujet du tournant énergétique, la nouvelle coalition gouvernementale mise en général sur la continuité de la politique énergétique du gouvernement sortant.
Tous les potentiels des renouvelables seront exploités, mais les aspects de l’ abordabilité, de la rentabilité et de la sécurité d’approvisionnement seront systématiquement pris en compte.
L’objectif est d’obtenir des coûts énergétiques durablement bas et prévisibles, compétitifs au niveau international.
Pour atteindre l’objectif de rentabilité du tournant énergétique, une approche systémique est envisagée pour optimiser l’interaction entre le développement des énergies renouvelables, la stratégie de nouveaux moyens pilotables, le développement ciblé des réseaux électriques et du stockage d’énergie. De plus davantage de flexibilité du système électrique et une exploitation efficace des réseaux doivent être atteints.
D’ici mi-2025, le nouveau gouvernement prévoit de faire examiner, comme une base pour la poursuite des travaux, la consommation d’électricité prévisible à l’horizon de 2030, l’état de la sécurité d’approvisionnement, le développement des réseaux électriques, le développement des énergies renouvelables, les objectifs de la numérisation et la trajectoire de la montée en puissance de l’hydrogène.
Notes de l’auteur :
La stratégie bas carbone du gouvernement sortant s’est appuyée sur une électrification des usages, donc une hausse de la consommation nationale brute à 750 TWh (670 TWh nets) d’ici 2030 dont 80% seraient fournis par des énergies renouvelables. La tendance baissière de la consommation électrique nationale depuis une dizaine d’années contraste avec ces prévisions de la consommation à l’horizon de 2030/35.
Les estimations du cabinet McKinsey montrent que la consommation nationale d’électricité pourrait être inférieure aux attentes de la planification actuelle /5/.
La morosité de la situation économique ainsi que la montée en puissance retardée de l’électro-mobilité, l’installation de pompes à chaleur ainsi que la mise en place de capacités d’électrolyseurs font que la consommation brute d’électricité serait à l’horizon de 2030 de l’ordre de 20% de moins qu’actuellement prévu.
Les investissements systémiques globaux pourraient donc être considérablement réduits, notamment en ralentissant le développement des capacités renouvelables et donc en limitant les investissements nécessaires dans l’infrastructure de réseau.
Réduction des prix de l’énergie
Pour l’heure, l’Allemagne a une seule zone de prix pour l’électricité. La nouvelle coalition veut conserver une zone d’enchères (ou « bidding zone ») pour l’Allemagne, c’est-à-dire que l’intention de Bruxelles de diviser le marché allemand de l’électricité en plusieurs zones d’enchères est rejetée par la nouvelle coalition.
La coalition s’est entendue pour réduire d’au moins cinq centimes par kWh la facture énergétique des entreprises et des consommateurs. Comme mesure immédiate il est prévu de baisser les taxes sur l’électricité « au niveau minimum européen ». De plus il est prévu de plafonner durablement les tarifs d’utilisation des réseaux.
Les entreprises électro-intensives seront soulagées par un prix de l’électricité industrielle plus avantageux.
Le gouvernement veut durablement prolonger la compensation des prix de l’électricité et l’étendre à d’autres secteurs, comme par exemple le prix du gaz.
En outre, la suppression de la taxe sur le stockage est prévue. Il s’agit aussi de mettre à profit les potentiels de production de gaz naturel dans le pays, ce que le gouvernement sortant avait toujours refusé.
Accélération de la planification et des autorisations des projets d’énergies renouvelables
La nouvelle coalition veut accélérer le développement des énergies renouvelables en facilitant la démarche de planification. La réussite de la transition énergétique passe par une réduction de la bureaucratie ainsi que par des procédures de planification et d’autorisation plus rapides et de meilleure qualité.
Réseaux d’électricité et flexibilisation du système électrique
La modernisation des réseaux électriques sera poursuivie de manière synchronisée avec le développement des énergies renouvelables. Toutes les activités doivent s’orienter vers des besoins réalistes et être coordonnées entre elles.
Il est prévu de réaliser les nouvelles traces en courant continu, dans la mesure du possible, sous forme de lignes aériennes.
Les obstacles à la flexibilisation du système électrique seront supprimés afin d’améliorer l’utilisation des énergies renouvelables dans tous les secteurs. La nouvelle coalition veut encourager davantage le développement de capacités de stockage adaptées au système électrique et l’utilisation des véhicules électriques comme moyen de stockage de l’énergie (concept de « vehicule-to-grid ” ou « véhicule-réseau »).
Notes de l’auteur :
Le développement des réseaux et notamment du réseau de transport accuse actuellement un retard considérable par rapport à la planification et n’est pas synchrone au déploiement des énergies renouvelables, ce qui augmente le risque de congestion des réseaux /3/.
Étant donné que l´installation de nouvelles lignes à haute tension se heurte aux refus des riverains et aux associations de protection de la nature, le gouvernement sortant avait opté pour l’enfouissement des lignes. En revanche les coûts de construction sont plus élevés et rendent l’entretien ultérieur plus difficile.
Le pari des énergies renouvelables, de l’hydrogène et des moyens pilotables
Énergies renouvelables
Le mix énergétique allemand continuera à reposer sur un déploiement important des énergies renouvelables. Le « développement déterminé » des énergies renouvelables comprend le développement du solaire et de l’éolien, de la bioénergie, de l’énergie hydraulique et de l’exploitation de l’énergie géothermique.
L’objectif de la nouvelle coalition est que les énergies renouvelables puissent à terme se refinancer entièrement sur le marché.
L’objectif intermédiaire de la Loi actuellement en vigueur sur l’augmentation et l’accélération du développement de l’éolien terrestre, soit consacrer 1,4% du territoire allemand à l’éolien terrestre, sera maintenu. L’objectif pour 2032 sera réexaminé (selon la loi il est prévu, d’ici fin 2032, de consacrer 2% du territoire allemand à l’éolien terrestre /9/).
Dans le domaine de l’éolien en mer, il est prévu de se pencher sur la problématique de l’effet de sillage.
Les potentiels existants dans le domaine de l’hydroélectricité et des stations de pompage-turbinage seront exploités.
L’accord de coalition promet aussi la présentation « dès que possible d’une loi d’accélération de la géothermie ».
Notes de l’auteur :
Le développement des énergies renouvelables, décidé par le gouvernement sortant, sera pour l’instant poursuivi par la nouvelle coalition.
Il reste à voir si une baisse de la consommation d’électricité d’ici 2030 par rapport aux pronostics actuels entraînera une réduction des objectifs de développement de l’éolien et du solaire.
Jusqu’à présent, les parcs éoliens en Mer du Nord sont planifiés avec une densité des éoliennes si élevée que l’effet de sillage pourrait avoir un impact significatif sur le nombre d’heures équivalent pleine puissance et doit donc être pris en compte pour la planification future. Pour plus d’informations sur l’effet de sillage voir /10/.
Hydrogène
L’Allemagne veut jouer un rôle de premier plan dans une initiative européenne sur l’hydrogène et s’engager en faveur de réglementations nationales et européennes pragmatiques et de leur mise en œuvre rapide.
Notes de l’auteur :
La nouvelle coalition reprend ainsi pour l’essentiel les objectifs du gouvernement sortant.
Conscient de l’importance de l’hydrogène, le gouvernement allemand avait adopté en 2020 la « Stratégie nationale pour l’hydrogène ». L’objectif était de faire de l’hydrogène une technologie clé dans le cadre de la transition énergétique en particulier dans les industries qui ne peuvent pas utiliser directement l’électricité.
La stratégie nationale a été actualisée en 2023 dans le but de mettre à disposition suffisamment d’hydrogène « vert » et ses dérivés à l’horizon de 2030.
Les principaux objectifs : une capacité nationale d’électrolyseurs de 10 GW d’ici 2030, le déploiement des infrastructures de transport d’hydrogène et le développement d’une stratégie d’importation d’hydrogène « vert ». Pour plus d’information, cf. /3/.
Moyens pilotables
Construction de nouvelles centrales à gaz
Il est prévu de créer des conditions-cadres fiables pour permettre des investissements dans une capacité de moyens pilotables suffisante pour assurer la sécurité d’approvisionnement.
Pour cela il est prévu de réviser la stratégie de moyens pilotables et de lancer le plus rapidement possible des appels d’offres, ouverts sur le plan technologique, pour la construction de 20 GW de centrales à gaz à l’horizon 2030.
Ces nouvelles centrales à gaz seront construites en priorité sur des sites de centrales existants et en fonction des besoins régionaux.
Grâce à un mécanisme de capacité technologiquement ouvert et orienté vers le marché, il sera possible de créer un mix de moyens pilotables technologique adapté au système électrique, composé de centrales à gaz et d’autres installations de production (par exemple bioénergie et cogénération), des installations de stockage et des solutions de flexibilité.
En outre, une capacité importante de production de moyens pilotables permet de stabiliser et même de réduire les coûts de l’électricité. Pour ce faire, des centrales de réserve seront utilisées à l’avenir non seulement pour éviter une pénurie d’approvisionnement, mais aussi pour stabiliser le prix de l’électricité.
Notes de l’auteur :
La nouvelle stratégie en matière de moyens pilotables pour pallier la variabilité de la production des énergies renouvelables diffère de celle du gouvernement sortant.
Le gouvernement sortant avait publié en juillet 2024 un projet de loi sur la sécurisation des centrales électriques, laquelle n’est pas entrée en vigueur suite à la dissolution du parlement allemand en décembre 2024 /3/.
Il a été prévu de construire une capacité de 500 MW de centrales électriques pouvant fonctionner immédiatement à 100% à l’hydrogène et de 10 GW de nouvelles centrales à gaz « prêtes pour l’hydrogène ». De plus il a été prévu de subventionner 500 MW de dispositifs de stockage d’énergie et de transformer à l’hydrogène 2 GW de centrales à gaz existantes.
La nouvelle coalition mise sur l’ouverture technologique et veut construire au moins une capacité de 20 GW. Il peut s’agir non seulement de centrales à gaz, mais aussi d’autres installations de production (par exemple bioénergie et cogénération).
Cela répond à une demande de l’industrie, qui voulait que la bioénergie et notamment les installations de couplage chaleur-force (CCF), dites aussi de cogénération, soient également incluses dans la stratégie de moyens pilotables en backup.
Autre nouveauté : l’intention d’utiliser les centrales de réserve pour stabiliser le prix de l’électricité. C’est probablement le résultat des événements de décembre 2024 lorsque, pendant un court épisode pratiquement sans vent ni ensoleillement, les prix sur les marchés de gros se sont envolés à 936 €/MWh non seulement au niveau national mais aussi avec répercussion sur le prix dans certains pays voisins /4/. Toutes les centrales de réserve en Allemagne n’ont pas été sollicitées à l’époque par les gestionnaires des réseaux.
Abandon du charbon
La nouvelle coalition s’en tient aux trajectoires d’abandon de la production d’électricité à partir du charbon décidées pour 2038 au plus tard.
Le rythme de déploiement des nouvelles centrales à gaz dictera le calendrier de fermeture (ou de mise en réserve) des centrales à charbon.
Notes de l’auteur :
La Loi de sortie de la production d´électricité à partir du charbon au plus tard d´ici 2038, entrée en vigueur en 2020, ne sera pas modifiée. Pour plus d’information sur Loi de sortie du charbon voir /3/.
Le gouvernement sortant avait souhaité avancer la date de sortie définitive du charbon à 2030, « dans l´idéal ». Cet avancement de date de sortie n’a pas été repris dans le nouveau contrat de coalition.
Abandon des centrales nucléaires
Le nucléaire n’est pas mentionné du tout dans le contrat de coalition.
Notes de l’auteur :
La CDU/CSU et le SPD ne veulent pas, jusqu’à nouvel ordre, envisager un retour à l’utilisation des centrales nucléaires.
Pourtant, lors de la campagne électorale, la CDU/CSU avait souhaité conserver un « rôle significatif » au nucléaire dans le cadre de l’atteinte des objectifs climatiques et promis d’étudier le redémarrage des derniers réacteurs arrêtés.
Pour plus d’information sur le nucléaire en Allemagne voir /8/.
Fusion Nucléaire
Le soutien à la recherche sur la fusion sera renforcé, avec pour objectif que « le premier réacteur de fusion au monde soit construit en Allemagne ».
La nouvelle coalition reprend ainsi pour l’essentiel les objectifs du gouvernement sortant.
Notes de l’auteur :
Le gouvernement sortant avait déjà annoncé en 2023 que l’Allemagne augmenterait considérablement le financement de la recherche sur la fusion. Avec les fonds déjà réservés aux institutions de recherche, l’Allemagne investira plus d’un milliard d’euros dans la fusion nucléaire d’ici à 2028.
Début 2024, la Ministre fédérale de la Recherche avait présenté le programme « Fusion 2040 – recherche vers une centrale à fusion » dans le but de préparer la construction du premier réacteur à fusion en Allemagne à partir de 2040. Pour plus d’information voir /8/.
On peut toutefois se questionner sur le réalisme de ces échéances.
Secteurs du bâtiment et des transports
Secteur du bâtiment
La loi sur la rénovation énergétique des bâtiments (Gebäudeenergiegesetz) du gouvernement sortant, entrée en vigueur en janvier 2024, sera abolie. Avec cette loi le gouvernement sortant souhaitait faire progresser le passage aux énergies renouvelables pour le chauffage des bâtiments /3/.
La nouvelle loi sur l’énergie dans le bâtiment sera « plus ouverte aux technologies, plus flexible et plus simple ». La réduction des émissions de CO₂ doit devenir « le paramètre central ».
L’accord de coalition prévoit une aide publique pour l’installation d’un chauffage respectueux du climat. Mais on ne sait pas encore à combien s’élèvera cette aide.
Secteur des transports
Il est prévu d’améliorer l’infrastructure de transport afin de renforcer la résilience et d’atteindre les objectifs climatiques. Les investissements dans le réseau ferroviaire allemand seront augmentés.
La nouvelle coalition s’engage clairement en faveur du site automobile allemand et de ses emplois et mise sur l’ouverture à la technologie c’est-à-dire la technologie la mieux adaptée à une application spécifique.
La nouvelle coalition salue en principe l’électrification de la flotte de véhicules, mais rejette expressément un quota légal global.
L’électro-mobilité sera encouragée par des incitations à l’achat. Le développement de l’infrastructure de recharge des voitures et des camions sur l’ensemble du territoire sera encouragé et les subventions augmentées.
La plupart des autres points relatifs à la promotion de l’électro-mobilité ont été repris par le gouvernement sortant. Ainsi, les avantages fiscaux sur les véhicules électriques seront prolongés jusqu’en 2035, alors qu’ils prendraient fin en 2030 selon la situation actuelle. L’exonération de péage pour les camions à zéro émission sera également prolongée au-delà de 2026.
Notes de l’auteur :
Une limitation générale de la vitesse à 130 km/h sur les autoroutes allemandes, comme initialement demandé par le SPD, n’apparaît plus dans le contrat de coalition.
L’annulation de l’interdiction de la vente des véhicules thermiques neufs à partir de 2035, telle que prévue par la CDU dans son programme, est absente du contrat de coalition.
Participations de l’État
La nouvelle coalition veut examiner les participations stratégiques de l’État dans le secteur de l’énergie, y compris dans les réseaux de transport.
Notes de l’auteur :
Le réseau de transport de l’électricité est d’une importance stratégique pour l’économie allemande et fait partie de l’infrastructure critique du pays.
Il appartient aujourd’hui pour l’essentiel à quatre gestionnaires de réseau de transport : 50Hertz, Amprion, TenneT et TransnetBW. Il s’agit d’entreprises privées, dont certaines ont des participations étrangères /7/.
Déjà en 2017, le gouvernement allemand avait renforcé son droit de veto contre le rachat d’entreprises stratégiques par des investisseurs étrangers, empêchant ainsi l’entrée de la Chine dans le secteur allemand de l’électricité. Le groupe public chinois SGCC voulait en effet acquérir 20% des parts de l’opérateur de réseau est-allemand 50Hertz en 2018.
Références
/1/ CDU, CSU, SPD (2025) Koalitionsvertrag 2025 – 2029 zwischen CDU, CSU und SPD, en ligne : https://www.cdu.de/app/uploads/2025/04/Koalitionsvertrag-2025.pdf
/2/ Bundesgesetzblatt (2025), Gesetz zur Änderung des Grundgesetzes (Artikel 109, 115 und 143h) vom 22.03.2025, en ligne : https://www.recht.bund.de/bgbl/1/2025/94/VO.html
/3/ Allemagne-Energies (2025) Le tournant énergétique allemand, en ligne : https://allemagne-energies.com/tournant-energetique/
/4/ Allemagne-Energies (2025) Allemagne : les chiffres clés de l’énergie en 2024, en ligne : https://allemagne-energies.com/2025/01/05/__trashed/
/5/ McKinsey (2025) Zukunftspfad Stromnachfrage, Perspektiven zu Veränderungen der Energiebedarfe und deren Auswirkungen auf die Wirtschaftlichkeit der Energiewende in Deutschland bis 2035, McKinsey &Company, en ligne : https://www.mckinsey.de/news/presse/2025-01-20-zukunftspfad-stromnachfrage
/6/ ET (2025) Energiewende 2025 : Hoffnungen und Realitäten, Energiewirtschaftliche Tagesfragen 75. Jg. 2025, Heft 4, en ligne : https://www.energie.de/et/news-detailansicht/nsctrl/detail/News/energiewende-2025-hoffnungen-und-realitaeten
/7/ GRT (2025), In Germany, the four transmission system operators (TSOs) 50Hertz, Amprion, TenneT and TransnetBW are responsible for transregional supply and transmission in the extra-high voltage grid, en ligne : https://www.netztransparenz.de/en/
/8/ Allemagne Energies (2025) Historique de la sortie du nucléaire, en ligne : https://allemagne-energies.com/sortie-du-nucleaire/
/9/ Allemagne Energies (2025) Énergies renouvelables : de nombreux défis, en ligne : https://allemagne-energies.com/energies-renouvelables/
/10/ Allemagne Energies (2020) Le développement de l´éolien maritime dans la partie allemande de la Mer du Nord tributaire de l´effet de sillage, en ligne : https://allemagne-energies.com/2020/04/17/le-developpement-de-leolien-maritime-dans-la-partie-allemande-de-la-mer-du-nord-tributaire-de-leffet-de-sillage/