USINE ÉOLIENNE : PROMESSE DE BAIL : UNE ANNULATION EST TOUJOURS LÉGALEMENT POSSIBLE

  De nombreux agriculteurs ayant signé une promesse de bail — que ce soit en qualité de propriétaires, d’exploitants ou en tant qu’héritiers d’un signataire initial — pensent qu’ils ne peuvent ni y mettre fin, ni refuser de conclure le bail définitif lorsque le projet tarde à se concrétiser, même s’ils le souhaitent. Cette peur est souvent alimentée par les opérateurs, qui les menacent de poursuites judiciaires s’ils osent se retirer. 
  Pourtant, cette appréhension n’est pas fondée. Un exemple concret à Andelaroche1 — Allier. illustre cette réalité : un propriétaire signataire d’une promesse de bail a refusé de conclure le bail définitif et l’opérateur n’a engagé aucune action judiciaire, préférant abandonner le projet. 
 
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1. La commune fait partie de la Communauté de communes du Pays de Lapalisse. 
  « Aux portes de l'Auvergne et du Roannais, où se rencontrent les pays d'oc et d'oïl, Andelaroche est un petit village connu dès l'Antiquité. En 1292, le fief appartient à un certain Audin de Gléné — à l'origine du nom, sa famille le gardera jusqu'au XVIᵉ siècle. Ande et Laroche sont réunies peu avant la Révolution.
  Arrosée par l' Andan et le Balavan, la commune s'étale au fond d'une gorge, ses hameaux s'éparpillent sur les vallons, contreforts de la Montagne Bourbonnaise. Le territoire est essentiellement rural et agricole, très boisé, vallonné, et ponctué de nombreux étangs. »
 
  Dans l’affaire jugée par la Cour d’appel de Riom, 1re chambre, le 31 mai 2022 — n° 20/01146, cette dernière a examiné la clause de prorogation automatique prévue à l’article 11 de la convention. Elle a jugé qu’elle créait un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, pour les raisons suivantes :
« La mise en place … de ce dispositif dérogatoire de prorogation sur demande unilatérale et discrétionnaire du bailleur, alors que la durée initiale profitant au bénéficiaire de la promesse avait été précisément calculée sur un temps suffisamment long de six années, apparaît effectivement procéder d’un déséquilibre significatif entre les droits et obligations respectifs des parties. »
  La Cour a relevé que cette clause de prorogation :
  • s’appliquait de manière unilatérale sans marge de discussion contractuelle,
  • prolongeait de manière substantielle l’engagement au-delà d’une période déjà longue — de six à neuf années, voire douze avec une seconde prorogation,
  • comprenait un préavis de seulement quinze jours avant l’échéance, ce qui était objectivement disproportionné par rapport à la durée initiale de six ans.
 En conclusion, la Cour a considéré que les modalités de cette clause rendaient l’ensemble du mécanisme « exorbitant du droit commun contractuel » et entaché de caractère abusif. 
  Elle en a tiré la conséquence suivante :
 « Cette clause de prorogation automatique prévue à l’article 11 de la convention litigieuse sera en conséquence réputée non écrite en raison de son caractère abusif. Dans ces conditions, M. [L] [W] est en droit d’opposer à la société FERME ÉOLIENNE D’ ANDELAROCHE la caducité de la convention litigieuse à compter du 11 juillet 2019, sans qu’il soit dès lors nécessaire de poursuivre la discussion sur les autres moyens. »
  Ainsi, la Cour d’appel a considéré que la promesse ne produisait plus d’effets à l’expiration de la période initiale de six ans, faute d’un mécanisme de prorogation valable
 
Références juridiques applicables
  • Article 1171 du Code civil — Aux termes de cet article, dans un contrat d’adhésion, toute clause qui crée, au détriment du non-professionnel, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties est réputée non écrite; cela s’applique aussi aux clauses de promesse de bail conclues entre un exploitant agricole particulier et un opérateur.
  • Notion de clause abusive La jurisprudence considère comme abusives les stipulations qui, par leur contenu ou leurs effets, créent un déséquilibre significatif entre les parties, notamment lorsque la charge d’immobilisation et les délais imposés ne correspondent pas à la nature et aux objectifs réels de la convention.
Principales leçons juridiques  
  • Une promesse de bail emphytéotique n’est pas irrémédiablement contraignante si elle présente des clauses créant un déséquilibre significatif et des engagements excessifs, notamment au travers d’un mécanisme de prorogation automatique disproportionné.
  • Le bénéficiaire d’une promesse ne saurait s’en prévaloir pour contraindre indéfiniment le signataire à conclure le bail définitif si les conditions contractuelles dépassent manifestement ce qui peut être exigé d’un non-professionnel en termes d’immobilisation foncière ou d’exigence unilatérale de prolongation. 
  • Une clause de prorogation qui délivre un avantage excessif à l’opérateur et impose une charge disproportionnée au propriétaire peut être réputée non écrite et conduire à la caducité de la promesse dès l’expiration de la période initiale.
  Ainsi, que vous soyez signataire d’une promesse de bail ou héritier d’un tel engagement, les éléments ci-dessus démontrent clairement que l’annulation ou la dénonciation d’une promesse de bail est juridiquement possible, si les conditions sont réunies : clauses abusives ou déséquilibre significatif !
  Nous espérons que ces informations vous auront apporté l’éclairage nécessaire pour appréhender plus sereinement vos droits.
 
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