Allemagne : l’énergie renouvelable semble destinée à devenir un cauchemar financier

EPAW
Fred F. Mueller

6 février 2013

Promue en Allemagne comme un doux rêve, l’énergie renouvelable semble destinée à devenir un cauchemar financier.
Le vent dans les cheveux, le soleil sur la peau, et le reflux dans votre porte-monnaie.

L’ "EEG " est la loi allemande pour les Énergies Renouvelables.





L’Allemagne s’est embarquée à toute vapeur dans une entreprise de transformation énergétique, ayant pour but de convertir 80% de sa production d’électricité à des sources soi-disant renouvelables. Une attention toute particulière est accordée à des sites qui génèrent de l’électricité à partir du vent et du soleil, complétés par de la biomasse, de l’incinération de déchets et de l’hydroélectrique. Un des arguments les plus frappants des promoteurs de cette politique est que tout cela est moins cher à long terme que les solutions conventionnelles car le vent, le soleil et l’eau sont disponibles gratuitement et en permanence. De plus l’énergie renouvelable a contribué à faire baisser les prix sur les marchés de négoce d’électricité. Mais malgré ces nouvelles apparemment bonnes, on se demande pourquoi la taxe allemande EEG (ajoutée aux factures d’électricité) augmente chaque année, avec une hausse à couper le souffle de 47% pour 2013. Raison de plus pour jeter un œil plus poussé au développement du coût de paiement de l’ EEG, l’argent pris aux utilisateurs d’électricité et transféré aux opérateurs de sites d’énergies « renouvelables », un regard plus poussé sur où ce périple va nous mener dans les années à venir. Faire une telle évaluation prédictive est grandement simplifié par un peu de mathématiques de base.

Pour mener à bien une telle analyse, on doit d’abord trouver les coûts réels pris aux citoyens allemands par propriétaires d’unités de production d’énergie « renouvelable » tel que stipulé dans la loi EEG. Cette loi a pour intention de promouvoir les « renouvelables » en garantissant aux opérateurs des prix fixes d’électricité sur une période de 20 ans. Pour le consommateur, ces totaux bruts sont beaucoup plus significatifs que les primes, en apparence modestes rapportées au kilowatt heure, qu’il trouve sur sa facture d’électricité. Le truc, c’est que ce qu’il voit sur sa facture n’est qu’une portion mineure de la réalité. Le coût total lui est au final refourgué, non seulement sur sa consommation directe d’énergie, mais aussi sur la totalité de son coût de la vie. Si l’on exclut les marchandises exportées, toute l’électricité facturée à l’industrie, au commerce, au négoce et au secteur public est, par le biais de prix augmentés, de charges et de taxes en fin de compte, pris dans le porte-monnaie du contribuable moyen. Il n’y a pas d’autre façon pour une économie de fonctionner. La clameur publique actuelle de forces politiques qui exigent qu’on n’autorise pas d’exceptions pour les industries gourmandes en énergie n’est jusqu’ici qu’une tactique de diversion, ayant pour unique but que de tromper des citoyens allemands en état de choc.

Les données pertinentes peuvent facilement être trouvées sur le site web de la plateforme d’information des 4 opérateurs du réseau de transmission allemand, 50Hertz, Amprion, Tennet et TransnetBW (www.eeg-kwk.net). Depuis leur démarrage en 2000, ces paiements (1) sont passés de 883 millions d’euros à 16,673 milliards d’euros en 2011 (figure 1).



Figure 1 – Paiements annuels aux opérateurs de « renouvelables » dans le cadre de la loi EEG (source : eeg-kwk.net)


Où nous mène cette tendance ?

Quand on observe le développement de ce coût, toute personne ayant l’habitude des chiffres et des calculs aura tôt fait de reconnaître que l’augmentation n’est pas linéaire. En effet, la courbe devient de plus en plus verticale. Un tel motif nous met immédiatement au défi d’identifier l’équation sous-jacente et de calculer les évolutions à attendre pour les prochaines années.

Cette prédiction est facilitée par le fait que, pour des raisons politiques, aucune modification significative de l’ EEG n’est prévue, au moins pour les 2 ou 3 prochaines années. Une raison à cela est l’échec retentissant des ambitions de le réduire du ministre fédéral en charge à l’époque, Röttgen, au sénat (Bundesrat) en 2012. De plus, de nouvelles élections fédérales sont prévues pour fin 2013 et, au vu de l’écrasante popularité de l’idéologie « renouvelable » dans la population, tous les partis politiques ayant une chance de participer au prochain gouvernement sont fortement engagés à maintenir leur soutien vigoureux pour la « transition énergétique » en cours.

Moyennant de rapides calculs, on s’aperçoit que la courbe actuelle correspond à la description d’une équation quadratique. Le développement probable jusqu’en 2015 peut ainsi être facilement prévu (figure 2). D’ici là, le total brut annuel des paiements devrait atteindre la somme impressionnante de 28 milliards d’euros.



Figure 2 – Projections des dépenses dues à la loi EEG


Quels sont les coûts réels?

Pire encore, les chiffres révélés jusqu’à présent ne révèlent en fait qu’une fraction des coûts qui vont frapper la population – en plus des paiements déjà effectués au titre de l’ EEG. Comme pour un iceberg, dont la plus grande partie est invisible sous l’eau, les barres de la figure 1 ne correspondent qu’aux versements déjà effectués ou échus dans l’année.

Pour se faire une idée, il faut garder à l’esprit que la garantie de rémunération fixe, pour un site reconnu comme satisfaisant les exigences de la législation EEG, demeure valide pour 20 ans. Les 883 millions d’euros de l’année 2000 ne représentaient donc que la première tranche d’un engagement total de 17,66 milliards d’euros, un « abonnement » irrévocable aux dépens de tous les consommateurs d’électricité, jusqu’en 2020. Ces engagements ont, depuis, augmenté d’année en année. Les chiffres totaux correspondant et leurs développements probables jusqu’en 2015 peuvent facilement être calculés à l’aide du tableau en figure 3. En 2012, la somme totale des paiements déjà effectués et des engagements de paiement futurs atteint le total cumulé de 376 milliards d’euros, un montant proche du budget fédéral allemand. D’ici 2015, on peut estimer que ce chiffre atteindra un total de 570 milliards d’euros.



Figure 3 – Coût et pronostic de l’engagement total national cumulé jusqu’en 2015

Qu’est-ce que ça signifie pour le citoyen?

En regardant en premier lieu le fardeau annuel imposé au résident individuel et à un foyer de 4 personnes, on peut facilement calculer les montants liés, en divisant le coût total annuel par le nombre d’habitants, à environ 81,9 millions. Ceci révèle rapidement que, même aujourd’hui, chaque habitant subit un coût bien plus élevé que ce que révèle sa facture d’électricité (figure 4). La principale cause de cette différence est que, alors que les ménages privés ne consomment qu’environ un quart de l’électricité vendue en Allemagne, ils doivent en plus financer la totalité des coûts de l’ EEG pour les trois quarts restants, pour les raisons citées plus tôt. Partant d’un modeste 43 euros par ménage de 4 personnes en 2000, ces coûts ont atteint 919 euros pour 2012. D’ici 2015, une hausse supplémentaire allant jusqu’à 1 386 euros peut être anticipée.




La base réelle de l’iceberg
Mais l’ampleur réelle des coûts auxquels va être confrontée la famille allemande ordinaire du fait de l’ EEG n’apparaît vraiment que quand toute l’étendue des paiements passés et courants, plus les engagements futurs dus à l’engagement à 20 ans, est recalculée par ménage. Même en arrêtant toute nouvelle installation de sites d’énergies « renouvelables » avec effet immédiat, ces engagements nous lient pour l’avenir. En 2012 déjà, le fardeau total des paiements passés et actuels et des engagements irrévocables dus par foyer de 4 personnes atteint un total de plus de 18 000 euros (figure 5).



Figure 5 – Engagement réel et pronostic de l’engagement total pour un ménage moyen de 4 personnes entre 2000 et 2015

Si la politique actuelle de transition énergétique reste inchangée jusqu’en 2015, cette somme va augmenter jusqu’à plus de 27 000 euros. Et, aussi impressionnant que puisse être ce chiffre, il ne reflète pas tout le tableau, puisque ni les taxes ni les dépenses liées au renforcement du réseau de transmission et à la capacité de secours (par exemple, des lignes à haute tension supplémentaires, des unités de stockage d’énergie ou des paiements envisagés pour des centrales électriques en réserve non profitables) ne sont pas encore pris en compte. On peut donc conclure que, même si le vent et soleil n’enverront jamais de facture, comme aiment à le déclarer les promoteurs des politiques « vertes », les factures vont certainement continuer à être envoyées par les opérateurs des installations d’énergies renouvelables, qui ont droit à un copieux retour dénué de tout risque pendant 20 ans, grâce à la loi EEG – en faveur des « renouvelables ».

Note : En ce qui concerne ces chiffres, on entend souvent l’argument que les revenus (bien plus bas) récoltés par les énergies « vertes » dans les places de marché de négoce d’électricité devraient en être retranchés ; mais pour la présente étude, il parait permissive de laisser de côté cet aspect en première analyse : en fait, cette électricité non nécessaire – l’Allemagne avait jusqu’à récemment l’une des infrastructures de génération d’électricité les plus saines du monde - est déversée sur les marchés, en accord avec les stipulations de la loi EEG. Ceci se fait aux dépens des autres producteurs, dont les pertes devront encore être couvertes par le public d’une façon ou d’une autre. Les conséquences en sont mises en évidence par un récent article dans le « Zeitschrift für Kommunalwirtschaft“ du 5 décembre 2012, qui révèle que les opérateurs de la toute nouvelle et ultra moderne centrale à cycle combiné d’Irsching 5, en Bavière, ont l’intention de la fermer pour une durée de deux ans, malgré son efficience – avec un rendement thermique de 60%, elle est de loin plus efficiente que tout autre type de centrale thermique. D’après l’article, ses opérateurs affirment qu’ils sont poussés hors du marché par la hausse des quantités d’électricité « renouvelable » vendue sur les marchés d’électricité à des prix qu’ils ne sont pas en mesure de pratiquer.


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