LA COMMISSION NATIONALE DU DÉBAT PUBLIC, CNDP, PARTIELLEMENT FERMÉE À LA VOX POPULI ?

  La suppression envisagée des consultations citoyennes, telles que celles organisées par la Commission nationale du débat public, CNDP*, suscite plusieurs réflexions :
  1. Un cadre institutionnel propice à la concentration du pouvoir
    Ce projet s’inscrit parfaitement dans l’esprit de la Constitution de la Ve République, pensée par le général de Gaulle : un bastion présidentiel*. En effet, cette Constitution confère au Président de la République des pouvoirs considérables et unilatéraux. Par exemple, le Président peut dissoudre l’Assemblée nationale et ainsi écarter les élus du peuple souverain, alors que ces derniers n’ont aucun moyen de le révoquer en retour.
  2. Une démocratie à double vitesse
    Bien que le peuple s’exprime lors des élections et des référendums, ses choix peuvent être contournés par les institutions. L’exemple emblématique reste le rejet du Traité de Lisbonne lors du référendum de 2005, finalement ratifié par le Congrès en 2008, trois ans plus tard.
  3. Un manque d’engouement pour les consultations citoyennes
    Il faut également reconnaître que ces consultations souffrent souvent d’une faible participation, ce qui en limite l’impact. Dans ce contexte, la suppression de la CNDP, bien que regrettable, ne soulèvera probablement pas de grand émoi dans la population.
  En conclusion, ce qui nous indigne véritablement, ce n’est pas tant la fermeture partielle annoncée de la CNDP qui inquiète, mais plutôt l’érosion progressive et inévitable des espaces dédiés à l’expression populaire. Une fois encore, on nous assure que cette évolution est dans l'Intérêt général. Mais qu’on ne s’y trompe pas : elle ne fait qu’accentuer l’éloignement entre les citoyens et leurs représentants.
 
* Avec l'émergence du droit à la participation du public dans les décisions ayant des répercussions sur l’environnement, inscrit dans la Convention d'Aarhus et la Charte de l'environnement, la législation française a mis en place diverses procédures permettant à chacun d'exercer ce droit. La CNDP a pour rôle de veiller au respect de ces mécanismes participatifs et, dans certains cas, d'en assurer directement l'organisation. Elle est constituée d'un président, de deux vice-présidents et de 22 commissaires issus de divers milieux — parlementaires, élus locaux, membres du Conseil d'État, de la Cour de cassation, de la Cour des comptes, représentants d'associations, du patronat et des syndicats, garantissant ainsi son indépendance.
 
** « Oui. au fond, le futur régime — la Ve République — se révèlera très proche de la IIIe République, avec un souverain constitutionnel, qui sera à la fois plus et moins qu'un roi : moins, par ce que les liens de la couronne n'existeront pas; plus, parce qu'il disposera de pouvoirs bien supérieurs à ceux de la plupart des souverains régnants. »
 « Le futur régime veut faire de la présidence de la République une magistrature d'influence, mais on commence par tenir le chef de l'État en dehors de tout »  
COTY René, I882-I962, Président de la République I954-I959, entretien avec TOURNOUX Raymond, 2I octobre I958, La tragédie du général, Librairie Plon, I967, p. 290.
 
File:René Coty - 1954.jpg
COTY rené, en  en I954.
 
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Grands projets industriels : l’État veut supprimer les consultations citoyennes


Le projet de mine de lithium à Échassières, Allier, a dû passer par la Commission nationale du débat public. - Wikimedia Commons / CC BY-SA 4.0 / Tomtoom03 
 
  Le jour même du vote de la censure du gouvernement de Michel Barnier, la nouvelle est passée presque inaperçue. Mercredi 4 décembre, le gouvernement renversé a mis en consultation un projet de décret qui entend modifier les catégories de projets soumis à la Commission nationale du débat public, CNDP. L’exécutif veut exclure du champ de la CNDP tout projet industriel dont le coût serait supérieur à 300 millions d’euros, sous prétexte d’accélérer la réindustrialisation du pays.
  Cette autorité indépendante, créée en 1995 par Michel Barnier, alors ministre de l’Environnement, s’assure que le public est bien concerté dans l’élaboration des projets ayant un impact sur l’environnement. C’était par exemple le cas pour l’ouverture d’une mine de lithium dans l’Allier ou la création d’usines de batteries électriques dans le Nord. 
 
Consultation en ligne jusqu’au 27 décembre 
 
  Si les recommandations recueillies par la CNDP ne sont pas contraignantes, elles peuvent jouer un rôle important. Dans 60 % des cas, le projet en ressort modifié. En 2022, l’instance avait conclu que le projet éolien offshore au large de l’île d’Oléron ne suscitait « aucun consentement de la population ». Face à ces résultats, l’État avait retenu un autre lieu.
  Le décret gouvernemental est soumis à une consultation publique en ligne jusqu’au vendredi 27 décembre. Pour l’heure, il a fait l’objet de 2 500 contributions, majoritairement négatives. Le projet suscite également une levée de boucliers parmi les associations environnementales.
  Pour l’association Générations futures, « sous couvert d’accélérer la réalisation de projets industriels », ce texte est « une nouvelle régression du droit à l’environnement ». Ilaria Casillo, vice-présidente de la CNDP, estime que, si le décret est adopté, « la population n’aura plus son mot à dire sur ces projets et elle ne sera même pas informée de leur existence, de leur impact, de leur coût… ».
  Or, ces projets liés à la décarbonation de l’industrie, et donc à la transition écologique, « méritent d’être débattus, car ils sont au cœur de la transformation des territoires », insiste-t-elle. Lors des débats, « il n’y a pas de tabou, les citoyens peuvent parler de tout et avoir accès à des informations fiables pour se forger un avis ». Pour Ilaria Casillo, « ce projet de décret montre que l’État a peur de la parole citoyenne ».
  Ce n’est pas la première fois que la CNDP est dans le viseur de l’exécutif. L’ancien ministre de l’Économie Bruno Le Maire avait tenté de la supprimer au printemps avec le projet de loi de simplification, finalement interrompu par la dissolution de l’Assemblée nationale.
 
  Sur le Web

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