DOCUMENTS CONCERNANT LES RELATIONS GERMANO-POLONAISES ET LE DÉBUT DES HOSTILITÉS ENTRE LA GRANDE-BRETAGNE ET L'ALLEMAGNE LE 3 SEPTEMBRE 1939, ÉPISODE VI

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   5. Sur ce, j"ai rappelé au Feldmarschall Gœring que si j"avais toujours compris la nécessité pour les Tchèques, étant donné leur position géographique, de vivre dans les relations politiques et économiques les plus amicales avec la grande Allemagne, il m'avait personnellement assuré au mois d'octobre que c' était bien là tout ce que son Gouvernement désirait. L'action précipitée de l'Allemagne à la date du 15 mars, et que j'attribuais à nouveau aux " hommes sauvages " du parti, avait par conséquent été, en dehors de tout et de n'importe qui, un grand choc pour moi personnellement, et avait défait tout ce que j'avais cherché à réaliser pendant les deux années de mon séjour à Berlin. D'ailleurs, quelque indifférent que cela pût lui paraître, je ne pouvais m'empêcher de considérer la destruction de l'indépendance des Tchèques comme une erreur politique majeure, et cela dans l'intérêt propre de l'Allemagne.
  6. Le Feldmarschall parut ressentir un peu de confusion devant cette attaque personnelle contre sa propre bonne foi et m'assura que lui-même n'avait rien connu de la décision avant qu'elle n'eût été prise. L'eût-il su, ajouta-t-il, il ne serait pas parti pour San-Remo ; son séjour là-bas ne lui avait d'ailleurs pas profité autant qu'il l'avait espéré, étant donné le surcroît inattendu de travail dont il avait été chargé par la suite. Il se mit alors en devoir de donner une explication assez peu convaincante, bien que similaire à celle que le Baron von Weizsäcker m'avait fournie en mars dernier, des tentatives allemandes d'en arriver à un arrangement satisfaisant avec les Tchèques et de leur échec attribuable à l'obstination tchèque et à la résurrection, à la suite d'encouragements venus d'Amérique, de ce qu'il appelait " l'esprit Bénès ".
  7. Mon temps était limité, j'ai dit au Feldmarschall Gœring que je connaissais parfaitement les raisons produites par son Gouvernement pour justifier son action, mais que je jugeais plus important de lui faire comprendre, à lui-même, le point de vue britannique qui en avait été la conséquence. À la suite du " coup " de Prague, le Gouvernement de Sa Majesté et la nation britannique se trouvaient résolus à s'opposer par la force à toute nouvelle agression. Personne plus que nous, lui dis-je, ne désirait un arrangement amiable entre l'Allemagne et la Pologne dans la question de Dantzig et dans celle du corridor, mais si l'Allemagne essayait de résoudre ces questions par une action unilatérale telle, qu'elle forcerait les Polonais à recourir aux armes pour sauvegarder leur indépendance, nous et les Français, aussi bien que d'autres pays, serions impliqués dans le conflit, et cela avec toutes les conséquences désastreuses qu' entraineraient une guerre mondiale prolongée, surtout pour l'Allemagne, etc... Le Feldmarschall Gœring ne parut point mettre en doute notre décision de nous battre et se borna dans sa réponse à essayer de prouver que les circonstances en 1939 étaient différentes de celles de 1914, qu'aucune puissance ne pourrait l'emporter sur l'Allemagne en Europe, qu'un blocus s'avérerait cette fois inefficace, que la France ne supporterait pas une guerre longue, que l'Allemagne pouvait faire plus mal à la Grande-Bretagne que cette dernière ne serait capable de lui infliger, que l'histoire de l'Allemagne était fait de hauts et de bas successifs, que nous vivions précisément dans une période de " montée ", que les Polonais n'avaient pas d'expérience militaire, que leurs seuls officiers ayant quelque valeur étaient ceux qui avaient reçu leur instruction dans l'armée allemande, qu'ils n'étaient pas avant et n'avaient jamais constitué une nation vraiment unie et que, puisque ni la France, ni nous-mêmes ne pouvions lui donner une assistance militaire effective, la Russie de son côté, et dans son propre intérêt, ne désirant point le faire, ils recevraient une terrible leçon, etc... Le Feldmarschall en vérité, se servit intégralement de tous les arguments auxquels on pouvait s'attendre dans une réplique à l'affirmation que l'Allemagne allait nécessairement à la défaite. Si j'étais troublé par ses allusions à l'inexistence de l'unité polonaise, et qui rappelaient les arguments allemands de l'année dernière à propos de la Tchéco-Slovaquie, il m'a donné l'impression, par la défense un peu trop véhémente de sa cause, d'avoir considérablement moins de confiance qu'il n'en exprimait.

Lord Halifax et Göring, 1937. Bundesarchiv, Bild 102-17986

  8. À la fin de cette tirade, il me demanda en outre si l'Angleterre " poussée par la simple envie envers une forte Allemagne ", était réellement décidée à lui faire la guerre et, dans le cas contraire, ce qu'il fallait faire pour l'empêcher. Je répondis qu'aucune personne de bons sens ne pourrait envisager sans horreur une guerre moderne, mais que nous ne reculerions pas devant elle, si l'Allemagne avait recours à un autre acte d'agression. Si, par conséquent, l'on voulait éviter la guerre, il était nécessaire d'avoir de la patience et de brider les " hommes sauvages " en Allemagne. J'admettais, lui dis-je, que l'Allemagne d'aujourd'hui fût dans une condition " dynamique " alors que l'Angleterre, par tradition, était le pays des compromis. Mais tout compromis a des limites, et je ne voyais pas comment la situation pouvait être sauvée, à moins que son Gouvernement ne fût préparé à attendre, pour permettre aux esprits excités de retrouver leur calme et aux négociations d'être reprises dans une atmosphère plus favorable.
  9. À ce moment, le Feldmarschall Gœring fit la remarque que si les Polonais tentaient d'occuper Dantzig, rien n'empêcherait les Allemands d'agir immédiatement. Mon temps étant limité, je n'ai pas fait de commentaires sur cette affirmation, mais j'enchaînais en disant que ni le Premier ministre, ni vous-même, n'aviez encore abandonné l'espoir d'une solution pacifique, aussi bien entre l'Allemagne et la Pologne qu'entre l'Allemagne et la Grande-Bretagne, mais que tout dépendait maintenant de la conduite et des actes de l'Allemagne.
  10. Comme déjà je m'étais levé, la conversation pris une tournure plus amicale. Bien que je fusse pressé, il insista pour me montrer avec beaucoup de fierté les grandes modifications architecturales qu'il poursuivait dans sa maison de Karinhall, et qui comprennent notamment la construction d'une salle à manger capable de tenir un nombre incroyable d'invités, toute entière construite en marbre et garnie de tapisseries. Incidemment, il mentionna que ces constructions ne seraient pas terminées avant novembre. Il me montra aussi avec orgueil les cartons des tapisseries, représentants des dames nues portant les noms des différentes vertus, tels que " Bonté ", " Charité ", " Pureté ", etc... Je lui dis que celles-là au moins avaient l'air pacifiques, mais que je n'arrivais pas à voir la " Patience " parmi elles.
  J'ai l'honneur, etc...

Discussions germano-polonaise

Note explicative
  Certaines discussions ont eu lieu entre les Gouvernements allemand et polonais à la fin de l'année 1938 et au début de 1939. Les déclarations allemandes et polonaises en ce qui concerne ces négociations sont contenues dans les documents joints.

N° 13

Extrait du discours de Herr Hitler au Reichstag, le 28 avril 1939

  Quant aux rapports polono-allemands, il y a peu de chose à dire. Là encore, et naturellement avec intention, le Traité de Versailles a porté à l'Allemagne une très grave blessure. Par la singulière création du corridor reliant la Pologne à la mer, on voulait surtout, et pour tous les temps à venir, empêcher une entente entre la Pologne et l'Allemagne. Ce problème est — comme je l'ai déjà souligné — peut-être le plus douloureux de tous pour l'Allemagne.
  Mais pourtant j'ai imperturbablement soutenu cette opinion que la nécessité pour l' État polonais d'un libre accès à la mer ne peut pas être négligé, et qu'en principe, même dans ce cas, les peuples que la Providence a destinés ou, si l'on veut, condamnés à vivre côte à côte, ne devraient pas, artificiellement et sans nécessité, se rendre la vie encore plus amère.
  Le défunt maréchal Pilsudski, qui professait la même opinion, se trouva donc prêt à examiner la possibiité de clarifier l'atmosphère des relations germano-polonaises, et enfin à conclure l'accord par lequel l'Allemagne et la Pologne, dans le règlement de leurs rapports réciproques, étaient résolues à renoncer définitivement à la guerre comme moyen. Cet accord avait, il est vrai, une seule exception, qui fut pratiquement concédée à la Pologne. Il fut entendu que les pactes d'assistance mutuelle déjà antérieurement conclus par la Pologne — ceci vise le pacte d'assistance avec la France — n'en seraient pas affectés. Mais il allait de soi que cette exception ne pouvait porter, exclusivement, que sur le pacte d'assistance mutuelle déjà conclu auparavant et non sur quelque nouveau pacte à conclure à son gré. C'est un fait que l' Accord germano-polonais [en allemand : Deutsch-polnischer Nichtangriffspakt ; en polonais : Polsko-niemiecki pakt o nieagresji ; il fut signé le 26 janvier 1934 entre la Pologne de Józef Piłsudski et le Troisième Reich d'Adolf Hitler. Le pacte visait à interdire pour dix années à venir le recours à la force dans la résolution des conflits frontaliers et économiques entre les deux pays. De fait, la Pologne put maintenir des relations cordiales avec l'Allemagne pendant les cinq premières années qui suivirent la conclusion du traité, tout en gardant des relations amicales avec la France, avec laquelle elle avait signé un pacte d'assistance mutuelle, et le Royaume-Uni. Le traité est dénoncé unilatéralement par Hitler le 28 avril 1939, après le refus polonais d'accepter l'annexion par l'Allemagne du « corridor de Dantzig ». Le traité fut définitivement abrogé lorsque l'Allemagne envahit la Pologne le 1er septembre 1939... ; source] arriva à détendre remarquablement la situation européenne.
  Néanmoins, il y avait entre l'Allemagne et la Pologne une question pendante, qui, tôt ou tard, devait tout naturellement recevoir une solution : c'était la question de la ville allemande de Dantzig. Dantzig est une ville allemande et qui veut appartenir à l'Allemagne. Par contre, cette ville a des conventions contractuelles avec la Pologne, lesquelles, il est vrai, lui furent imposées par les dictateurs de paix de Versailles. En outre, la S.D.N. [Société des Nations], naguère la plus grande cause de trouble, est maintenant représentée par un Haut-Commissaire qui, il est vrai, est extraordinairement plein de tact. Il faut que, au plus tard avec l'extinction progressive de cette néfaste institution, le problème de Dantzig, soit traité d'une manière ou de l'autre. J'ai considéré que la solution pacifique de cette question serait une nouvelle contribution à une détente européenne définitive. En effet, ce n'est certainement pas au moyen de la campagne menée par des excitateurs de guerre tombés dans la démence, que l'on peut servir cette détente européenne, mais par l'élimination des facteurs réels de danger.

Hans von Moltke, Jozef Pilsudski, Joseph Goebbels et Jozef Beck, lors de la visite du ministre allemand à Varsovie, en juin 1934. Sur le Web

  Après divers échanges de vues sur le problème de Dantzig, il y a quelques mois déjà, j'ai fait soumettre au Gouvernement polonais une offre concrète. Je vais, Messieurs, vous exposer cette offre et vous jugerez vous-mêmes si elle ne représente pas, comme contribution à la cause de la paix européenne, le summum d'esprit de conciliation qu'on puisse imaginer.
  Ainsi que je l'ai déjà souligné, j'ai toujours reconnu que ce pays avait besoin d'un accès à la mer et j'ai toujours tenu compte de ce besoin. Vous savez que je ne suis non pas un homme d'État démocrate, mais un national-socialiste qui compte avec les réalités. Mais j'estimais également indispensable de bien faire comprendre au Gouvernement de Varsovie que, de même qu'il désire avoir accès à la mer, de même l'Allemagne doit pouvoir disposer d'un accès à sa province de l' Est.
  Ce sont là, avouons-le, de difficiles problèmes. La responsabilité n'en incombe pas à l'Allemagne, mais à ces jongleurs de Versailles qui, dans leur malignité ou dans leur manque de réflexion, ont disposé çà et là en Europe une centaine de barils de poudre dont chacun se trouvait pourvu de mèches que l'on ne pouvait guère éteindre. Or, l'on ne saurait résoudre ces problèmes d'après des idées démodées ; il faut plutôt, à mon avis, s'engager ici dans de nouvelles voies. Car l'accès de la Pologne à la mer par le corridor et, inversement, un passage allemand à travers ce corridor sont, par exemple, dépourvus de toute valeur militaire. L'importance de ces voies relèvent exclusivement du domaine psychologique et du domaine économique. Vouloir attribuer à une artère de ce genre une valeur militaire quelconque serait la démonstration d'une ignorance totale de la chose militaire.
  J'ai donc fait soumettre au Gouvernement polonais la proposition suivante :
   1° Dantzig rentre comme État Libre dans le cadre du Reich allemand ;
   2° L'Allemagne obtient, à travers le corridor, une route et une ligne de chemin de fer dont elle puisse disposer librement et qui ait le même caractère exterritorial pour l'Allemagne que le corridor lui-même pour la Pologne.
  En échange, l'Allemagne est prête :
  1° à reconnaître tous les droits économiques de la Pologne à Dantzig ;
  2° à assurer à la Pologne, à Dantzig, un port libre, ayant toutes les dimensions souhaitées, et d'accès complètement libre ;
  3° à reconnaître et à accepter par là les frontières actuelles entre l'Allemagne et la Pologne et à les considérer comme définitives ;
  4° à conclure avec la Pologne un pacte de non-agression de vingt-cinq ans, donc un pacte qui dépasserait de beaucoup les limites de ma propre existence ;
  5° à faire garantir l'indépendance de l' État slovaque en commun par l'Allemagne, la Pologne et la Hongrie, c’est-à-dire à renoncer pratiquement à toute prépondérance exclusivement allemande sur ce territoire.
  Le Gouvernement polonais a décliné mon offre et s'est seulement déclaré prêt :
  1° à négocier sur la question du remplacement du Haut-Commissaire de la Société des Nations ;
  2° à envisager des facilités sur le transit à travers le corridor.
  J'ai regretté sincèrement cette attitude, pour moi incompréhensible, du Gouvernement polonais ; cependant, cela seul n'est pas décisif. Mais le pire est qu'à présent, comme la Tchéco-Slovaquie il y a un an, la Pologne elle aussi, croit devoir, sous la pression d'une campagne universelle et mensongère, mobiliser des troupes, bien que l'Allemagne n'ait, de son côté, ni mobilisé un seul homme, ni songé à entreprendre une action quelconque contre la Pologne. Comme je l'ai dit, cela est en soi très regrettable, et la postérité décidera un jour si vraiment on a eu raison de décliner cette proposition unique faite par moi. Ce n'était là, comme je l'ai dit, qu'un effort de ma part pour résoudre, par un compromis réellement unique, cette question qui tient tant à cœur à toute la nation allemande, et pour la résoudre à l'avantage des deux pays.
  Mais, selon ma conviction, la Pologne, dans cette solution, n'était pas partie donnante, elle était seulement partie prenante, car il semble pouvoir être mis hors de doute que jamais Dantzig ne deviendra polonais. L'intention agressive purement imaginaire attribuée à l'Allemagne par la presse mondiale a conduit ensuite aux " offres de garantie " que vous connaissez, et à un engagement d'assistance réciproque qu'a assumé le Gouvernement polonais, et qui, par conséquent, au cas d'un conflit de l'Allemagne avec une autre puissance quelconque, entrainant l'entrée en lice de l'Angleterre, obligerait la Pologne à prendre militairement position contre l'Allemagne. Cet engagement est contraire à la convention que j'ai conclue en son temps avec le maréchal Pilsudski. En effet, cette convention mentionne exclusivement des engagements déjà existants à cette époque, c'est-à-dire les engagements — qui nous étaient connus — de la Pologne vis-à-vis de la France. Étendre après coup ces engagements est contraire aux termes du pacte de non-agression germano-polonais. Dans de telles conditions, je n'aurais pas conclu ce pacte à l'époque. En effet, quels sens peuvent donc avoir des pactes de non-agression, si l'un des partenaires se réserve pratiquement la possibilité d'une foule de cas d'exception!
  Il y a ou bien sécurité collective, c'est-à-dire insécurité collective et éternel péril de guerre, ou bien des accords clairs, et qui excluent cependant par principe toute action par les armes contre les contractants.
  Pour cette raison, je considère l'accord conclu à l'époque entre moi et le maréchal Pilsudski comme unilatéralement violé par la Pologne et donc comme ayant cessé d'exister!
  J'en ai fait la communication au Gouvernement polonais. Mais je ne puis que répéter ici que cela ne signifie aucun changement de mon attitude de principe par rapport aux problèmes indiqués ci-dessus.
  Si le Gouvernement polonais désire arriver à un nouveau règlement contractuel de ses relations avec l'Allemagne, je m'en féliciterai, à la condition toutefois qu'un tel règlement repose alors sur l'obligation absolument claire et engageant les deux parties dans la même mesure.
  L'Allemagne est, en tout cas, volontiers disposée à assumer de tels engagements et, ensuite, à les remplir.
 
 

N° 14

Mémorandum du Gouvernement allemand remis au Gouvernement polonais, le 28 avril 1939

  Le Gouvernement allemand a pris note de la déclaration polono-britannique en ce qui concerne la poursuite et les buts des négociations qui ont été conduites récemment entre la Pologne et la Grande-Bretagne. Au terme de cette déclaration, il a été conclu entre les Gouvernements polonais et britannique une entente temporaire ["... Le 6 avril, lors d'une visite à Londres du ministre polonais des Affaires étrangères, il est convenu d'officialiser l'assurance en une alliance militaire anglo-polonaise, en attendant les négociations. Le texte du « communiqué anglo-polonais » indique que les deux gouvernements sont « en parfait accord sur certains principes généraux » et qu'il est « convenu que les deux pays sont prêts à conclure un accord à caractère permanent et réciproque...», ... " ; source] destinée à être remplacée sous peu par un accord permanent qui établira des liens d'assistance mutuelle entre la Pologne et la Grande-Bretagne dans le cas où l'indépendance de l'un des deux États serait directement ou indirectement menacée.
  2. Le Gouvernement allemand se considère lui-même obligé de communiquer ce qui suit au Gouvernement polonais :
  3. Quand en 1933, le Gouvernement National-Socialiste s'est mis en devoir de donner une forme nouvelle à la politique allemande après le retrait de l'Allemagne de la S.D.N. ["... Il fallut attendre le 10 septembre 1926, pour voir les Allemands entrer officiellement à la Société des nations, une entrée certes fort remarquée, sous les applaudissements des délégués de tous les États membres et sous le regard enthousiaste de la presse internationale et du public, massés dans les galeries de la salle de la Réformation où se tenait la VIIe assemblée générale ordinaire de la SDN. Beaucoup de contemporains voulaient alors voir dans cet événement la promesse d’une pacification durable des relations intereuropéennes : « Ce n’est pas la première fois qu’après une grande guerre, les peuples, hier ennemis, se rapprochent. L’histoire du monde est faite de réconciliations de cette sorte. Mais, jamais elles n’ont eu cette solennité, cette grandeur, ni présenté ces garanties de durée » écrivait alors le célèbre journaliste genevois, William Martin, pourtant réputé pour son objectivité et sa modération., ... " ; source ; " En 1933, l'Allemagne accroit sa puissance militaire secrètement. Hitler se retire définitivement de la Conférence de désarmement de Genève en octobre 1933 ainsi que de la S.D.N. : Société des Nations. Il décide que les effectifs de l'armée passeront de 100.000 à 300.000 hommes, chiffre bien supérieur à ce qu'autorise le traité de Versailles., ... " ; source], son premier objectif fut de stabiliser les relations germano-polonaises sur un plan nouveau. Le chancelier du Reich allemand et feu le maréchal Pilsudski se sont trouvés d'accord dans la décision de briser avec les méthodes politiques du passé et pour prendre, en ce qui concerne la solution de toutes les questions touchant les deux États, la voie d'une entente directe entre eux.


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  4. En renonçant inconditionnellement à l'emploi de la force, des garanties de paix ont été instituées de façon à aider les deux États dans leur tâche difficile de résoudre tous les problèmes économiques, politiques et culturels, grâce à un ajustement juste et équitable de leurs intérêts mutuels. Ces principes, contenus sous une forme obligatoire dans la déclaration de paix germano-polonaise du 28 janvier 1934, visaient à ce but et devaient, par leur succès pratique, ouvrir une ère entièrement nouvelle dans les relations germano-polonaises. L'histoire politique de ces cinq dernières années démontre que, dans la pratique, ils se sont affirmés efficaces pour les deux pays. Récemment encore, le 26 janvier de cette année, lors du cinquième anniversaire de la signature de cette déclaration, les deux parties ont publiquement confirmé ce fait, tout en insistant sur leur volonté commune de maintenir dans l'avenir leur adhésion aux principes établis en 1938.
  5. L'accord qui vient d'être conclu par le Gouvernement polonais avec le Gouvernement britannique est en contradiction à ce point évidente avec les déclarations solennelles datant d'il y a quelques mois à peine, que le Gouvernement allemand ne peut que noter avec surprise et étonnement un renversement aussi total de la politique polonaise. Sans même tenir compte de la façon dont sa formulation définitive pourra être déterminée par les deux parties, le nouvel Accord polono-britannique a été conclu dans l'intention de constituer un pacte d'alliance en bonne et due forme, qui, en raison de son sens général et de l'état actuel des relations politiques, se trouve dirigé exclusivement contre l'Allemagne. Il découle des obligations maintenant acceptées par le Gouvernement polonais, que la Pologne a l'intention, en certaines circonstances, de prendre une part active à tout conflit germano-britannique éventuel, dans le cas d'une agression contre l'Allemagne, même si ce conflit n'affectait pas la Pologne et ses intérêts. C'est là un coup direct et patent porté contre le principe de la renonciation à tout emploi de la force, tel qu'il est contenu dans la déclaration de 1934.
  6. La contradiction entre la déclaration germano-polonaise et l'Accord polono-britannique va cependant encore plus loin dans ses conséquences. La déclaration de 1934 visait à constituer une base pour le règlement de tous les différends qui pourraient surgir entre les deux pays, indépendamment des complications ou combinaisons internationales, par des discussions directes entre Berlin et Varsovie, à l'exclusion de toutes les influences extérieures. Il est évident qu'une base de ce genre doit reposer sur la confiance mutuelle entre les deux parties et sur la loyauté politique des intentions qu'une des parties nourrit envers l'autre.
  7. Le Gouvernement polonais, cependant, par sa récente décision d’adhérer à une alliance dirigée contre l'Allemagne, a donné à comprendre qu'il préférait une promesse de secours émanant d'une tierce Puissance à la garantie directe de paix donnée par le Gouvernement allemand. Étant donné ce fait, le Gouvernement allemand est obligé de conclure que le Gouvernement polonais n'attache pas, pour le présent, une importance quelconque à la recherche d'une solution du problème germano-polonais par le moyen d'une discussion directe et amicale avec le Gouvernement allemand. Le Gouvernement polonais a donc ainsi abandonné la voie tracée en 1934 pour l'établissement des relations germano-polonaises.
  8. Le Gouvernement polonais ne peut pas, sous ce rapport, en appeler au fait que la déclaration de 1934 n'affectait en rien les obligations contractées auparavant par la Pologne et l'Allemagne dans leurs relations avec des tierces parties, et que le Traité d' Alliance entre la Pologne et la France maintenait sa pleine valeur côte à côte avec cette déclaration. L'Alliance polono-française existait déjà en 1934 quand la Pologne et l'Allemagne se sont mises en devoir de réorganiser leurs relations. Le Gouvernement allemand était à même d'accepter ce fait, étant donné qu'il était en droit de s'attendre à ce que les dangers possibles résultant d'une Alliance polono-française, qui datait de la période la plus aiguë des difficultés germano-polonaises, perdraient automatiquement et de plus en plus de leur importance grâce à l'établissement de relations amicales entre l'Allemagne et la Pologne. Cependant l'entrée de la Pologne en relation d'alliance avec la Grande-Bretagne, effectuée cinq années après la publication de la déclaration de 1934, ne peut en aucune façon, et pour cette raison même, être comparée politiquement avec l' Alliance polono-française, toujours valable. Par cette nouvelle alliance, le Gouvernement polonais s'est subordonné lui-même à une politique inaugurée par d'autres, et qui vise à l'encerclement de l'Allemagne.
  9. Le Gouvernement allemand, de son côté, n'a pas donné le moindre motif pour un tel changement de la politique polonaise. Chaque fois que l'occasion lui en fut offerte, il a, tant publiquement qu'au cours de conversations confidentielles, donné au Gouvernement polonais les assurances les plus formelles, que le développement amical des relations germano-polonaises était un des buts fondamentaux de sa politique extérieure, et que, dans ses décisions politiques, il respecterait toujours les intérêts propres de la Pologne. C'est ainsi que l'action entreprise par l'Allemagne au mois de mars de cette année, dans le but de pacifier l' Europe centrale, n'était pas, dans l'opinion du Gouvernement du Reich, de nature à porter atteinte d'une façon quelconque aux intérêts polonais. Cette action a conduit à la création de cette frontière commune Polono-hongroise [Hongrie : " Subissant la pression des nationalistes radicaux et des fascistes hongrois au fur et à mesure que le régime nazi se consolidait, le pays tomba petit à petit sous l'influence de l'Allemagne au cours des années 30. Lorsque l'Allemagne commença à redessiner ses frontières nationales en Europe, la Hongrie réussit à regagner des territoires (avec l'aide des Allemands et des Italiens). Parmi ces territoires se trouvaient le Sud de la Slovaquie tchécoslovaque, 1938, la Ruthénie subcarpatique de la Tchécoslovaquie démembrée, 1939, la Transylvanie septentrionale de la Roumanie, 1940, et la région de Backa de la Yougoslavie démembrée : 1941. En novembre 1940, la Hongrie rejoignit l'Axe. Les troupes hongroises participèrent aux côtés de l'armée allemande à l'invasion de la Yougoslavie, avril 1941, et de l'Union Soviétique : juin 1941. [...] En 1939, le gouvernement hongrois, après avoir interdit aux Juifs de servir dans les forces armées, mit en place un service de travail forcé pour les jeunes gens en âge de porter les armes. En 1940, l'obligation du travail forcé fut étendue à tous les hommes juifs valides. Après l'entrée en guerre de la Hongrie, les travailleurs forcés, organisés en bataillons de travail sous le commandement d'officiers de l'armée hongroise, furent employés dans des travaux de construction liés à la guerre, souvent dans des conditions brutales. Soumis à un froid extrême, sans abri, sans nourriture suffisante, ni soins médicaux adéquats, pas moins de 27 000 travailleurs forcés juifs hongrois moururent avant l'occupation de la Hongrie par l'Allemagne en mars 1944., ... ; source], qui du côté de la Pologne avait toujours été indiquée comme un objectif politique important. Bien plus, le Gouvernement allemand a donné à comprendre sans équivoque qu'il était prêt à s'expliquer d'une façon amicale avec le Gouvernement polonais sur tous les problèmes qui, dans l'opinion du Gouvernement polonais, pourraient surgir à la suite du changement survenu dans les conditions de l'Europe centrale.
 
 
 
Miklós Horthy avec Adolf Hitler à Berlin, 1938. Miklós Horthy, 1868-1957, vice-amiral de la Marine impériale de l' Empire austro-hongrois ; Régent du royaume de Hongrie, 1920-1944 ; grâce au plein soutien d'Adolf Hitler, la Hongrie récupère, aux arbitrages de Vienne, certains territoires de la Grande Hongrie, en Slovaquie, 1938, Ruthénie subcarpatique, 1939, Transylvanie, 1940, et Yougoslavie, 1941, où l'armée hongroise intervient directement aux côtés des forces germano-italiennes. Enfin, la Hongrie participe activement à l'invasion allemande de l'URSS à partir de l'été 1941 ; après la guerre, la république fédérative populaire de Yougoslavie demande à ce qu'il soit jugé comme criminel de guerre. Les Alliés refusent et il est relâché. Il s'exile au Portugal. Sur le Web

  10. C'est dans un esprit tout aussi amical que le Gouvernement allemand a essayé de régler encore une autre question qui demeurait en suspens entre la Pologne et l'Allemagne, c’est-à-dire celle de Dantzig. Le fait que cette question exigeait une solution a depuis longtemps été affirmé avec énergie du côté allemand et il n'était pas nié du côté polonais. Pendant longtemps, dans le passé, le Gouvernement allemand s'est efforcé de convaincre le Gouvernement polonais qu'une solution, tenant équitablement compte de l'intérêt des deux parties, était certainement possible, et que la disparition de ce dernier obstacle ouvrirait avec les perspectives les plus favorables, la voie d'une collaboration politique de l'Allemagne et de la Pologne. Sous ce rapport, le Gouvernement allemand ne s'est pas borné à des allusions d'une nature générale, mais au mois de mars de cette année, il a proposé au Gouvernement polonais, dans une forme amicale, un règlement de cette question sur les bases suivantes :
  11. Le retour de Dantzig au Reich. La construction d'une voie ferrée et d'une autostrade [autoroute] extra-territoriales entre la Prusse Orientale [province de l'ancien royaume de Prusse. Capitale : Königsberg ; aujourd'hui Kaliningrad, en Russie. Elle fut partagée entre l'U.R.S.S., qui reçut le Nord, et la Pologne à la conférence de Potsdam : 1945 ; Larousse] et le Reich. En échange, la reconnaissance de l'intégralité du corridor polonais et de celle de la frontière occidentale de la Pologne ; la conclusion d'un pacte de non-agression pour vingt-cinq ans ; le maintien des intérêts économiques de la Pologne à Dantzig et le règlement des autres problèmes économiques et de communication qui se présenteraient pour la Pologne à la suite du rattachement de Dantzig au Reich. Simultanément le Gouvernement allemand affirmait, en assurant l'indépendance de la Slovaquie, qu'il était prêt à respecter les intérêts polonais.


La Prusse-Orientale de 1923 à 1939. @ CC BY-SA 3.0

 
 Les évolutions de la frontière germano-polonaise : 1938-1945. Sur le Web

  12. Nul de ceux qui connaissent les conditions de Dantzig et dans le corridor, ainsi que les problèmes qui s'y rattachent ne peut nier, s'il juge objectivement en la matière, que ces propositions constituaient le véritable minimum des demandes à formuler du point de vue des intérêts allemands auxquels il est impossible de renoncer. Cependant le Gouvernement polonais donnait une réponse qui, bien qu'elle fût couchée sous la forme de contre-propositions, montrait dans son essence un manque de compréhension intégral du point de vue allemand, et équivalait purement au rejet des propositions allemandes. Le Gouvernement polonais prouva lui-même qu'il ne considérait pas sa réponse comme susceptible de permettre le commencement de discussions amicales, en procédant simultanément, d'une manière aussi inattendue qu'effective, à une mobilisation partielle, sur grande échelle de l'armée polonaise. Par ces mesures entièrement injustifiées, le Gouvernement polonais dévoilait le sens et l'objet des négociations qu'immédiatement après il a entreprises avec le Gouvernement britannique. Le Gouvernement allemand ne croit pas qu'il soit nécessaire de répondre à la mobilisation partielle de l'armée polonaise par des contre-mesures de caractère militaire. Il ne peut cependant passer, sans commentaires, sur les décisions prises récemment par le Gouvernement polonais et se trouve, à son regret, obligé de faire la déclaration suivante :
  a) Le Gouvernement polonais n'a pas saisi l'occasion qui lui était offerte par le Gouvernement allemand d'arriver à un arrangement équitable dans la question de Dantzig, à une garantie définitive des frontières communes entre la Pologne et le Reich, par cela même à un renforcement permanent des rapports de bon voisinage entre les deux pays. Le Gouvernement polonais a même rejeté les propositions allemandes conçues dans ce but.
  b) Simultanément, le Gouvernement polonais acceptait, vis-à-vis d'un autre État, des obligations politiques incompatibles avec l'esprit, le sens ou le texte de la Déclaration germano-polonaise du 26 janvier 1934. Par cela, le Gouvernement polonais a, de façon arbitraire et unilatérale, rendu cette Déclaration nulle et non avenue.
  13. En dépit de cette nécessaire affirmation de fait, le Gouvernement du Reich n'a pas l'intention de modifier son attitude fondamentale dans la question de l'avenir des relations germano-polonaises. Si le Gouvernement polonais attachait de l'importance à une nouvelle organisation de ces relations sur la base d'un traité, le Gouvernement allemand se déclare prêt à agir, mais à la seule condition qu'un tel arrangement prenne l'aspect d'une obligation précise, liant les deux parties.

N° 15

Discours prononcé au Parlement par M. Beck, Ministre des Affaires étrangères de Pologne, 5 mai 1939

  I. La session du Parlement m'offre l'occasion de combler quelques lacunes qui se sont produites dans mon travail des mois derniers. Le cours des évènements internationaux pourrait peut-être justifier, de la part du Ministre des Affaires étrangères, des déclarations plus copieuses que n'en comporte mon unique exposé à la Commission des Affaires étrangères du Sénat.
  2. D'un autre côté, ce fut précisément cette succession rapide des évènements qui m'a poussé à remettre une déclaration publique jusqu'au moment où les principaux problèmes de notre politique étrangère auraient pris un aspect mieux défini.
  3. Les conséquences de l'affaiblissement des institutions internationales collectives, un changement complet dans les méthodes des relations entre nations, sur lesquelles j'ai eu, à différentes occasions, à faire rapport devant les Chambres, ont fait que de nombreux problèmes nouveaux ont surgi en différentes parties du monde ; ce processus et les résultats qui en découlent ont, au cours des derniers mois, atteint les frontières de la Pologne.
  4. L'on peut donner une définition très générale de ce phénomène en disant que les relations entre les différentes Puissances ont pris un caractère plus individuel, et présentent, chacune, les aspects qui leur sont propres. Les règles générales se sont relâchées. Une nation, simplement, parle plus souvent et plus directement à l'autre.
  5. Pour ce qui nous concerne, des évènements très sérieux se sont produits. Nos contacts avec certaines Puissances sont devenus plus faciles et plus intimes, alors que, dans d'autres cas, des difficultés sérieuses se sont produites. En considérant les choses d'un point de vue chronologique, je fais allusion en première ligne à notre accord avec le Royaume-Uni, avec la Grande-Bretagne. À la suite de contacts diplomatiques répétés, dont le but était de définir l'étendue et l'objet de nos relations futures, nous avons atteint, lors de ma visite à Londres, à un accord, basé sur le principe d'une assistance mutuelle dans le cas d'une menace directe ou indirecte contre l'indépendance de l'un de nos deux pays. La formule de cet accord vous est connue aux termes de la déclaration de M. Chamberlain du 6 avril, dont le texte a été établi d'un commun accord et qui doit être considéré comme un pacte conclu entre les deux gouvernements. Je considère de mon devoir d'ajouter que la forme et le caractère des conversations très étendues que nous avons eues à Londres confèrent une valeur particulière à cet accord. Je voudrais que l'opinion publique polonaise se rendit compte que j'ai trouvé, chez les hommes d'État britanniques, non seulement une connaissance approfondie des problèmes politiques généraux de l' Europe, mais également une attitude envers notre pays, d'un caractère tel, qu'elle a permis de discuter de tous les problèmes essentiels avec franchise et confiance, sans aucune réserve ou doute.
  6. Il a été possible de trouver rapidement les principes d'une collaboration polono-britannique, tout d'abord parce que nous avons clairement établi, l'un envers l'autre, que les intentions des deux Gouvernements coïncidaient en ce qui concerne les problèmes européens fondamentaux ; très certainement ni la Grande-Bretagne, ni la Pologne n'ont d'intention agressive quelconque, mais elles demeurent également fermes dans la défense de certains principes de base pour la conduite de la vie internationale. 
 

Beck avait rencontré le Premier ministre Neville Chamberlain et il a été annoncé plus tard que la Grande-Bretagne protégerait la Pologne contre la menace allemande.

  7. Les déclarations parallèles de certains leaders politiques français, confirment qu'il est entendu entre Paris et Varsovie que l'efficacité de notre pacte défensif non seulement ne peut être affectée par des changements survenant dans la situation internationale, mais que bien au contraire cet accord doit constituer un des éléments les plus essentiels de la structure politique de l'Europe. Le Chancelier du Reich allemand a pris l'Accord polono-britannique comme prétexte pour déclarer, unilatéralement, nul et non avenu l'accord qu'il avait conclu avec nous en 1934.
  8. Avant d'en arriver à la situation actuelle en la matière, permettez-moi d'esquisser une rapide étude historique.
  9. Le fait que j'ai eu l'honneur de participer activement à la conclusion et à l'exécution de ce pacte m'impose le devoir de l'analyser. Le pacte de 1934 était un grand évènement en 1934. Il constituait une tentative pour améliorer les rapports historiques entre deux grandes nations, d'échapper à l'atmosphère malsaine des discordes quotidiennes et d'intentions toujours plus hostiles, de s'élever au-dessus des animosités qui s'étaient accumulées pendant des siècles, enfin de jeter des bases solides pour un respect mutuel. Toute tentative de s'opposer au mal constitue toujours la forme la plus heureuse d'une activité politique.
  10. La politique de la Pologne a démontré notre respect pour ce principe aux instants les plus critiques des récentes années.
  11. À ce point de vue, Messieurs, la rupture de ce pacte n'est pas chose sans importance. Cependant chaque traité ne vaut que ce que valent les conséquences qu'il entraîne. Et si la politique et la conduite de l'autre partie s'éloignent des principes du pacte, nous avons aucune raison pour porter le deuil de son affaiblissement ou de sa rupture. Le Pacte polono-allemand de 1934 était un traité de respect mutuel et de bonnes relations de voisinage, et comme tel il a apporté une contribution positive à la vie de notre pays, à celle de l'Allemagne et à celle de toute l'Europe. Mais il est apparu depuis une tendance à l'interpréter comme étant de nature à limiter la liberté de notre politique, comme une raison pour exiger de nous des concessions unilatérales, contraires à nos intérêts vitaux ; ainsi a-t-il perdu son vrai caractère.
  12. Abordons maintenant la situation présente. Le Reich allemand s'est saisi du seul fait de l'entente polono-britannique comme d'une raison suffisante à la rupture du pacte de 1934. Différentes objections d'ordre juridique ont été soulevées du côté allemand. Je me permettrai de renvoyer les juristes au texte de notre réponse au mémorandum allemand, qui sera remis aujourd'hui au Gouvernement allemand. Je ne voudrais pas retenir plus longtemps votre attention sur la forme diplomatique de cet évènement, mais un de ses aspects présente une signification particulière. Le Gouvernement du Reich, ainsi qu'il appert [de apparoir ; ressort avec évidence que ; Larousse] du mémorandum allemand, a pris sa décision sur la foi d'articles de presse, sans s'enquérir des vues du Gouvernement britannique ou polonais quand au caractère de l'entente intervenue. Il n'aurait pas été difficile de la faire, car, immédiatement après mon retour à Londres, j'ai déclaré que j'étais prêt à recevoir l'Ambassadeur d'Allemagne qui, jusquà présent, n'a pas cru, toutefois, devoir saisir cette occasion.
  13. Pourquoi cette circonstance est-elle importante? L'esprit le plus simple comprendra clairement que ni le caractère, ni le but, ni l'étendue de l'accord n'a pu déterminer cette décision, mais bien le simple fait de sa conclusion. Et cela à son tour est important quand il s'agit d'apprécier les objectifs de la politique allemande ; si, en effet, contrairement à ses déclarations précédentes, le Gouvernement du Reich avait interprété la déclaration polono-allemande de non-agression de 1934 comme destinée à isoler la Pologne et à empêcher une collaboration normale et amicale de notre pays avec les Puissances occidentales, nous aurions, nous-mêmes, et toujours, repoussé une interprétation de cette nature.
  14. Pour apprécier sainement la situation, il nous faut tout d'abord poser une question : quel est le véritable but de tout ceci? Sans cette question et sans la réponse que nous y ferons, nous ne pouvons pas apprécier proprement le caractère des déclarations allemandes à propos d'affaires importantes pour la Pologne. J'ai déjà fait allusion à notre attitude envers l'Occident. Reste la question des propositions allemandes en ce qui concerne l'avenir de la Ville Libre de Dantzig, les communications du Reich avec la Prusse Orientale à travers notre province de Pomorze, corridor [en français Poméranie ; région côtière au sud de la mer Baltique dans le nord-ouest de la Pologne et le nord-est de l'Allemagne. Elle comprend les estuaires de la Vistule et de l' Oder atteignant la rivière Recknitz à l'ouest et s'étend sur environ 200 kilomètres à l'intérieur des terres. La limite orientale fait l'objet de plusieurs interprétations dans la terminologie polonaise et allemande : en Pologne, la Poméranie orientale, Pomorze Gdańskie, correspond au territoire le long de la baie de Gdańsk jusqu’à la Pomésanie sur la rive droite de la Vistule, alors que les termes allemands de la Poméranie antérieure et postérieure se réfèrent à l'ancien duché de Poméranie et à la province de Poméranie au sein de l'État de Prusse... ; source] et les autres sujets présentés comme étant d'un intérêt commun à la Pologne et à l'Allemagne.
  15. Étudions donc chacun de ces problèmes tout à tour.
 

" La Poméranie, région côtière de la mer Baltique, se trouve au nord de la Pologne, à l'embouchure de la Vistule. Ce positionnement stratégique lui a valu une grande importance économique et politique, centrée sur la ville millénaire de Gdansk, membre de la Ligue Hanséatique et capitale de la région. " Sur le Web
 
   À suivre...

   Livre bleu anglais n° I, Documents concernant les relations germano-polonaises et le début des hostilités entre la Grande-Bretagne et l'Allemagne le 3 septembre 1939, présenté au Parlement par Ordre de Sa Majesté par le Secrétaire d' État aux Affaires étrangères ; traduction Autorisée et Officielle du document publié par His Majesty's Stationery Office, Paris, 1939, pp. 18-28

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