NUCLÉAIRE / CANICULE : QUAND L'ATOME RESTE TOUJOURS INOFFENSIF POUR LA VIE AQUATIQUE

  Les porte-paroles de l'Apocalypse*, le parti EELV et, en général, la Nouvelle Union populaire écologique et sociale, NUPES, pourfendeurs à tout prix du nucléaire, ont beau le dire et le répéter dans tous les médias et sur les réseaux sociaux, rien n'y fait! Les chiffres sont têtus : NON, le fonctionnement des centrales nucléaires n'a pas impacté la vie aquatique durant cet été caniculaire!
  * "... L'apocalypse, c'est d'abord la révélation de secrets divins. Mais assez tôt, dans les premiers siècles du christianisme, le sens s'est réduit pour ne plus désigner que la révélation de la fin du monde jusqu'à l'établissement du royaume de Dieu... " Source
 
 
Les Quatre Cavaliers de l'Apocalypse, de gauche à droite : Mort, Famine, Guerre et Conquête dans un tableau de 1887 par Viktor Vasnetsov. L'Agneau est visible au sommet.
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Nucléaire, eau, climat : bilan de canicule

 

Sylvestre Huet

   Durant cet été 2022 caniculaire, les centrales nucléaires ont-elles nui à la vie de nos cours d’eau ? La question est logique, au vu des températures et des débits estivaux. Même si les épisodes caniculaires ont été bien plus courts qu’en 2003, leur répétition a soumis les éco-systèmes à rude épreuve.

 

Historique des vagues de chaleur. Les canicules de 2022, en mauve, présentent des durées et des intensités qui ne sont pas spectaculaires, mais leur répétition sur un seul été est sans précédent historique. En outre, le mois de juillet 2022 a été le plus sec jamais enregistré par Météo France, ce déficit pluviométrique, aggravé par la sécheresse de mai et juin, a fortement diminué le débit des cours d’eau.

  La réponse va surprendre. Et notamment ces responsables politiques qui ont martelé sans précaution un message d’alerte maximale. Ainsi, lors de la Fête de l’Humanité de septembre dernier, me suis-je retrouvé assis aux côtés de Sandrine Rousseau dans un débat sur la politique économique et la lutte contre le changement climatique. La députée EELV a affirmé à l’auditoire que le fonctionnement des centrales nucléaires avait fortement impacté la vie aquatique durant cet été caniculaire, y voyant un argument majeur pour ne plus utiliser cette technologie (1). Une affirmation rude, qui a suscité l’approbation d’une large part de l’assistance. Mais totalement dénuée de la moindre démonstration soutenue par des faits. Et que, révélons d’emblée la conclusion de l’enquête, que les faits… démentent absolument.

Surveillance sévère

  La surveillance des effets thermiques et hydro-écologiques du panache des rejets des centrales dans les cours d’eau est obligatoire, encadrée par la réglementation (le code de l’environnement), et réalisée, entre autres, par les personnels d’EDF. Cette surveillance donne lieu à des publications d’observations, analyse de leurs données, et même d’un programme de recherche en hydrobiologie depuis 2004, à la suite de la canicule de 2003.
  Une surveillance ? Oui, et plutôt sévère. Chaque cours d’eau utilisé par une centrale nucléaire est « équipé ». Le « panache thermique », est suivi par des bouées fixes, des profils de températures sur la colonne d’eau, des thermographies aériennes. Les paramètres physico-chimiques, microbiologiques, bactéries, amibes, légionelles…, planctoniques, zoo et phyto-plancton, et piscicoles font l’objet de mesures et prélèvements systématiques, en amont et à l’aval des centrales.

La centrale nucléaire de Cruas et ses quatre aéroréfrigérants. Ardèche, photo EDF.

   Objectif ? Détecter tout effet des rejets sur l’eau, l’abondance et l’état de santé de la flore et de la faune aquatiques. Cette surveillance est permanente, mais lorsque la canicule survient, elle est renforcée par des observations et prélèvements plus fréquents et spécialement destinés à cette détection. EDF est allée plus loin que la réglementation obligatoire en considérant que les températures de l’été étant durablement restées proches des valeurs limites, la surveillance renforcée a donc été maintenue tout l’été pour les centrales du Bugey, de Saint-Alban, de Golfech et du Tricastin.
  L’intensité de cette surveillance peut s’apprécier avec le tableau suivant qui la présente pour la centrale nucléaire de Golfech où l’on lit, par exemple, que chaque jour un technicien est allé vérifier, à l’amont, au droit des rejets et à l’aval de la centrale des signes éventuels de mortalité piscicole.



  Températures ? Le débit du Rhône à Saint Alban, le 11 août 2022 est de 329 m3/s. La température à l’amont est de 26,2°C en moyenne journalière, et de 27,9°C à l’aval, après mélange, frôlant la limite des 28°C considérée comme la plus élevée des conditions climatiques normales. Ce jour là, l’un des deux réacteurs de la centrale fonctionnait à pleine puissance.

Situation des mesures de températures réalisées sur toute la largeur et toute la profondeur de l’eau à l’amont et l’aval de la centrale nucléaire de St Alban.

Poissons, algues et bactéries
  Tout l’été, des techniciens ont donc relevé les températures, prélevé des échantillons d’eau et de faunes et flores aquatiques. Notamment pêché des poissons, à l’amont et l’aval des centrales pour les identifier, les compter et analyser leur état de santé, en début et fin d’épisode caniculaire, et avec la perspective de comparer ces observations sur la longue durée, notamment au printemps prochain, afin d’observer un effet retardé sur la reproduction.
  Des exemples de cet effort systématique et précis de surveillance ? Commençons par le plus spectaculaire pour le grand public, donc les poissons. Et d’abord par cette information : durant tout cet été caniculaire aucune mortalité piscicole n’a été observée à l’amont, au droit et à l’aval des centrales nucléaires. Mais cette observation rudimentaire, que les associations de pêcheurs peuvent également faire, est complétée par une surveillance précise, faite grâce à des prélèvements et analyses.
  Pour la centrale du Bugey, des pêches ont été réalisées en juin, août et septembre. Espacées pour ne pas aggraver le stress dû à la canicule. Et systématiques chaque année pour suivre sur la longue durée l’évolution des peuplements qui dépendent de bien d’autres facteurs que l’impact de la centrale. Voici celui du 10 août 2022

 

Le prélèvement du 10 août pour la centrale nucléaire du Bugey. L’analyse préliminaire ne montre pas d’effets particuliers de la centrale relativement aux prises habituelles.

  Puis, Chevesnes et Goujons sont analysés à la recherche de pathologies :


L’examen de l’état sanitaire des poissons les plus abondants ne montre aucun signe d’un effet de la centrale nucléaire du Bugey.

  À Saint-Alban aussi, on pêche le Goujon et la Chevesne, puis on les analyse à la recherche de pathologies qui pourraient être reliées aux rejets de la centrale. Voici par exemple le résultat de la pêche réalisée le 9 août :

 


  Voici un résultat de la surveillance de la concentration en cyanobactéries, dont certaines sont toxiques pour l’homme et la faune, et qui prolifèrent en cas de fortes températures et faibles débits


Lors de l’épisode caniculaire d’août 2022, surveillance de la concentration en cyanobactéries à l’amont et l’aval de la centrale nucléaire de Golfech. LQ signifie limite de quantification, donc inférieure à la capacité de détection.

  Les mesures physico-chimiques sont nombreuses, voici celles du pH, le potentiel hydrogène bien connu des amateurs d’aquarium, à l’amont et l’aval de la centrale du Tricastin du 1er juillet au 11 septembre.


Les rejets de la centrale nucléaire du Tricastin n’ont aucun effet sur le pH, le potentiel hydrogène, qui est resté tout l’été en « bon état ». La mesure est effectuée une fois par heure.

  Et voici celles de l’oxygène dissous, qui ne montre aucune différence entre l’aval et l’amont de la centrale du Tricastin.

 


  Dans son rapport préliminaire, EDF note qu’il faudra attendre la fin des analyses, et notamment des observations de plus longue durée, pour une conclusion définitive. Mais l’ensemble des résultats déjà disponibles indiquent tous que le fonctionnement des centrales nucléaires n’a pas eu d’influence notable sur le milieu aquatique durant l’été 2022 et ses canicules à répétition. Un résultat qui ne surprendra pas, puisqu’il est similaire à celui déjà observé… en 2003, lors du pire épisode caniculaire historique connu de Météo France.

Une perte de production faible
  Cet été caniculaire signifie t-il que produire de l’électricité avec des centrales nucléaires va devenir impossible durant les étés plus chauds des prochaines décennies ? Pas vraiment, montrent les chiffres des pertes de production dues à des limitations de puissance ou des arrêts imposés par la réglementation sur les températures et débits des cours d’eau utilisés.
  Voici ces pertes pour les 22 dernières années. L’année 2022 n’est pas particulièrement significative, puisqu’elle affiche une perte de 0,5 TWh, soit 0,2% de la production annuelle. Une perte limitée aussi en raison de dérogations exceptionnelles accordées à certains sites… mais les résultats très positifs de la surveillance des paramètres physico-chimiques des eaux, comme des flores et faunes aquatiques montrent que les limites règlementaires sont probablement trop sévères si l’on veut faire une balance raisonnable entre avantages et inconvénients climatiques et écologiques de l’électro-nucléaire. N’émettre presque pas de CO2 toute l’année, 4 g/kWh,  et donc lutter efficacement contre le réchauffement climatique d’un côté, risquer un effet très temporaire et très limité dans l’espace de l’autre. La balance pèse très lourdement en faveur des avantages, notamment pour la flore et la faune aquatique.



Aéroréfrigérants
  Derrière ces résultats très positifs se cache la réponse à une question simple : de combien d’eau a besoin un réacteur ? Le refroidissement du réacteur lui-même n’utilise pas l’eau extérieure à la centrale mais se réalise dans le générateur de vapeur. Le contact entre la chaleur utilisée pour produire l’électricité et la source froide extérieure se réalise dans le condenseur du turbo-alternateur.
  Quelle quantité est nécessaire ? Il faut distinguer deux cas radicalement différents. En « circuit ouvert » — sans aéroréfrigérant — un réacteur va prélever 45 m3/seconde pour un 900 MW et 57 m3/seconde pour un 1300 MW et jusqu’à 61 m3/seconde pour un EPR de 1650 MW. Mais il va en reverser 100% dans le cours d’eau ou la mer. C’est pourquoi, pour le total des centrales nucléaires, près de 98% de l’eau prélevée est retournée à la mer ou aux cours d’eau. Ces réacteurs en circuit ouvert sont donc installés en bord de mer où sur des fleuves dont le débit est toujours très supérieur à leurs besoins, même en cas de sécheresse exceptionnelle.
  S’il dispose d’un aéroréfrigérant, un réacteur va puiser beaucoup moins d’eau, entre 4,6 m3/seconde par réacteur pour les centrales installées sur les grands fleuves comme le Rhône, et 2 m3/seconde pour ceux de la centrale de Civaux, pourtant plus puissants, sur la Vienne. Les aéroréfrigérants permettent de relâcher l’essentiel de la chaleur dans l’air via la vapeur produite et reverser de l’eau — avec un débit de 1,25 m3/seconde, la consommation réelle est donc limitée à 0,85 m3/seconde — très peu réchauffée, dans la rivière pour un réacteur de la centrale de Civaux : 2-1,25 =0,75, l’écart doit venir des arrondis, les valeurs réelles sont de toute façon fluctuantes.



  Ces dispositifs expliquent pourquoi les débits des cours d’eau, même ceux de la Vienne, sont toujours très supérieurs aux besoins des centrales nucléaires, et pourquoi les effets de ces dernières demeurent très faibles. Voici par exemple le suivi journalier du débit de la Vienne à Civaux en 2022. Le débit n’est jamais descendu sous les 10 m3/seconde qui sont la limite réglementaire sous laquelle le prélèvement est interdit alors que, lorsque la centrale fonctionne à pleine puissance de ses deux réacteurs, elle ne consomme réellement que 1,7 m3/seconde.
  Schéma de prélèvement d’eau de la centrale de Civaux, la plus performante du parc, notamment pour le très faible échauffement de l’eau : en été, il est même possible de mesurer que l’eau remise à la Vienne est plus froide que lors de son prélèvement.

 


Le débit de la Vienne est toujours resté au dessus de la limite réglementaire de prélèvement lors des épisodes caniculaires de 2022. Au maximum de sa puissance, la centrale ne consomme pas plus de 1,7 m3/seconde.

(1) Bon… ce n’était pas aussi dingue que la déclaration de Jean-Luc Mélenchon accusant les centrales nucléaires de réchauffer la Méditerranée.

   Sur le Web

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