- quand... j'en ai besoin?
ou
- quand... le vent a décidé de souffler?
ou
- quand le soleil daigne enfin briller?
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«L’Allemagne devrait sortir du charbon plutôt que du nucléaire»
FIGAROVOX/TRIBUNE - Pour Maxence Cordiez, ingénieur dans le secteur de l’énergie, la lutte antinucléaire en Allemagne se fait au détriment de la préservation du climat. L’ouverture de la centrale à charbon Datteln 4 souligne selon lui ce paradoxeMaxence Cordiez
5 juin 2020
Centrale à charbon Datteln 4. INA FASSBENDER/AFP
Samedi 30 mai, l’Allemagne a ouvert une nouvelle unité de production électrique au charbon «Datteln 4», en Rhénanie-du-Nord-Westphalie. Si sa construction a débuté en 2007, donc avant la confirmation par la Chancelière Angela Merkel de la sortie du nucléaire, le maintien de ce projet - en contradiction directe avec l’urgence climatique - s’inscrit néanmoins dans cette politique.
L’Allemagne est un pays industriel de 83 millions d’habitants. Cela suppose certains besoins électriques, même en l’absence de vent et de soleil. Les capacités de production d’électricité non dépendantes de l’heure et de la météo, dites «pilotables», doivent donc être en mesure de répondre seules à la demande. C’est ce que font les centrales à combustibles fossiles, lignite, houille et gaz, nucléaires, à biomasse et les barrages hydroélectriques, peu nombreux outre-Rhin. L’Allemagne prévoit de fermer ses derniers réacteurs nucléaires d’ici 2022
De fait, depuis le début de sa transition énergétique «l’Energiewende» l’Allemagne a conservé un parc pilotable d’une puissance globalement inchangée, à 100 GW, en dépit d’une forte progression des capacités renouvelables intermittentes, 12 GW en 2002 contre 112 GW en 2020. Sur la période, une partie de la puissance nucléaire et à charbon a été remplacée par de nouvelles centrales à gaz et à biomasse.
La pertinence de Datteln 4 doit se lire dans ce contexte. L’Allemagne prévoit de fermer ses derniers réacteurs nucléaires d’ici 2022, soit 8,1 GW de puissance au total. Ces fermetures seront compensées - au moins en partie - par d’autres capacités pilotables: charbon et surtout gaz, d’où la construction du gazoduc Nord Stream 2 entre l’Allemagne et la Russie.
Dans un article publié en janvier 2019 dans ces même colonnes, j’expliquais pourquoi le plan allemand de sortie du charbon - pire source d’énergie pour le climat - en 2038 n’était pas crédible. J’évaluais également les émissions de gaz à effet de serre que l’Allemagne aurait pu éviter chaque année si elle avait décidé en 2010 de sortir du charbon plutôt que du nucléaire, bas-carbone. Ainsi, quand nos voisins auront fermé leurs derniers réacteurs en 2022, le surplus d’émission par rapport à un scénario de sortie prioritaire du charbon s’élèvera à environ 130 millions de tonnes équivalent CO2 tous les ans, soit environ 14 % de la totalité des émissions domestiques allemandes…
Certes, les émissions de gaz à effet de serre de l’électricité outre-Rhin diminuent malgré tout, du fait de la progression des renouvelables et de la substitution de charbon par du gaz. Mais cela ne doit pas cacher le chemin qu’il reste à parcourir. Les émissions de ce secteur restent très élevées et une politique de sortie du charbon plutôt que du nucléaire aurait permis d’aller bien plus loin dans la «décarbonation». On ne peut pas imaginer qu’un pays de 83 millions d’habitants cesse toute activité consommatrice d’énergie.
Enfin, notons que d’un côté de la frontière l’Allemagne ouvre une centrale à charbon de 1100 MW, et de l’autre côté la France ferme les 1800 MW bas-carbone de la centrale nucléaire de Fessenheim. On ne peut qu’admirer la cohérence avec les grands discours sur la nécessité de préserver le climat…
En réaction à l’ouverture de la centrale de Datteln 4, de nombreuses ONG environnementales ont manifesté leur indignation. Certaines d’entre elles sont pourtant mal placées pour déplorer une conséquence directe du succès de leur combat contre l’énergie nucléaire. L’abondance énergétique étant ce qui sépare notre niveau de vie actuel de l’ère préindustrielle, on ne peut pas imaginer qu’un pays de 83 millions d’habitants cesse du jour au lendemain toute activité consommatrice d’énergie. En refusant l’atome, on fait donc le choix de conserver une dépendance au charbon et/ou au gaz.
Ces ONG devraient comprendre que lutter pour la préservation du climat ne peut pas se limiter à déplorer qu’il change, tout en favorisant son dérèglement par le refus d’éléments de solution. Lutter pour le climat, c’est analyser des problèmes complexes et non binaires, établir des priorités et aider les sociétés à faire des choix à la fois difficiles et réalistes.Les questions énergétiques et écologiques sont complexes et non manichéennes.
Les alternatives aux combustibles fossiles sont loin d’avoir le potentiel de remplacer ces derniers dans leurs usages actuels: trop abondants, trop accessibles et trop pratiques. Contenir le dérèglement climatique dans des limites acceptables suppose des économies d’énergie dans des proportions dont rien ne prouve que les populations sont prêtes à les accepter. Si on commence à rejeter certaines sources d’énergie alternatives telles que le nucléaire, les efforts de sobriété à fournir seront encore plus importants et notre succès improbable.
Les questions énergétiques et écologiques sont complexes et non manichéennes. Les ONG environnementales doivent comprendre que si elles ne les traitent pas avec la rigueur intellectuelle qui s’impose, leur action - loin d’améliorer la situation - peut contribuer à significativement l’aggraver. L’enfer est pavé de bonnes intentions et l’ouverture de Datteln 4 en est l’illustration.
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