" Pour raccorder les nouveaux parcs solaires et éoliens ainsi que les bornes de recharge pour voitures électriques, mais aussi améliorer la résistance des câbles aux événements climatiques extrêmes, le gestionnaire français du réseau de distribution d’électricité, Enedis, prévoit d'investir plus de 5 milliards d'euros par an d'ici à 2032, contre moins de 3 milliards sur les quarante dernières années, a signalé la filiale d'EDF... "
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" ... Changement de pylônes, renouvellement des lignes électriques, enfouissement de certaines, installation de nouveaux postes électriques, renforcement des interconnexions en zones frontalières... Les Français doivent s'attendre, au cours des prochains mois et mêmes années, à voir de plus en plus de chantiers aux abords du réseau de transport d'électricité à haute tension. Son gestionnaire, RTE, prévoit en effet de mener des projets tous azimuts et d'augmenter de 50% ses investissements dans les quinze prochaines années pour accompagner la transition énergétique et renouveler les infrastructures vieillissantes.
Au total, une enveloppe de 33 milliards est prévue sur la période 2019-2035, mais le rythme d'investissements sera beaucoup plus élevé au cours des prochaines années. RTE passera ainsi d'1,3 milliard d'euros d'investissements en 2020 à un rythme de croisière de 2 milliards d'euros par an, dès 2022... "
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Ainsi, il en va ici comme en France et, comme partout dans le monde, l'essor des EnR, qui, pour rappel, n'ont pas vocation à rester ad vitam æternam d'où l'emploi du mot " transition "*, entraîne des dépenses pharaoniques pour adapter les réseaux à cette nouvelle donne!
Comme disait AUDIARD Michel " Les conneries c'est comme les impôts, on finit toujours par les payer. ", le tout est de savoir maintenant : QUI AU FINAL VA PAYER? Nous, on croit savoir!...
* " Passage d'un état à un autre ", Larousse
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En panne de transmission
Vous voulez doubler la taille de notre réseau de transport d'électricité ? Au rythme de croissance actuel, cela ne prendra qu'environ 140 ans !
Des milliardaires, des bureaucrates et des universitaires affirment que le passage à un système d'électricité entièrement renouvelable nécessitera de doubler ou de tripler la taille de notre réseau de transport à haute tension. Il est facile d'en parler. Le concrétiser ? C'est une toute autre histoire.Le mois dernier, Michael Bloomberg, le méga-milliardaire new-yorkais, a écrit un article pour son journal, intitulé " Les pannes d'électricité de l'hiver mettent en évidence la nécessité d'une énergie propre ". Dans cet article, Bloomberg, qui donne 500 millions de dollars au projet Beyond Carbon par l'intermédiaire de son organisation caritative Bloomberg Philanthropies [" Faire évoluer les États-Unis vers une économie fondée à 100 % sur les énergies propres "], affirme que notre réseau électrique devrait s'appuyer davantage sur les énergies renouvelables dépendantes des conditions météorologiques, car " les énergies renouvelables présentent des avantages par rapport au charbon et au gaz en cas de conditions météorologiques défavorables ".
L'ancien maire de New York a poursuivi en affirmant qu'outre de meilleures batteries, les États-Unis devaient construire " les lignes de transmission à longue distance " nécessaires pour acheminer davantage d'énergie éolienne et solaire. " Lorsque les systèmes de chauffage, de ventilation et de climatisation, HVAC, de Chicago fonctionnent, les panneaux solaires du sud-ouest atteignent leur maximum. Nous avons simplement besoin de plus de lignes à grande vitesse pour relier les deux régions ". Mettez de côté l'absurdité des " lignes à grande vitesse ", l'électricité utilise-t-elle des " lignes à faible vitesse " ?, et concentrez-vous sur son affirmation principale : " plus nous construisons rapidement des capacités de transmission [...], plus nos familles et nos communautés seront en bonne santé et en sécurité ".
En 2021, un autre milliardaire, John Doerr, qui, comme Bloomberg, donne des centaines de millions de dollars à des groupes d'activistes climatiques, voir mon article du 26 janvier " The Billionaires Behind The Gas Bans " [" Les milliardaires à l'origine des interdictions d'utilisation de l'essence "], a fait une déclaration similaire sur la nécessité d'une expansion massive du transport d'électricité à haute tension. Dans son livre Speed & Scale : An Action Plan for Solving Our Climate Crisis Now [ " Vitesse et échelle : un plan d'action pour résoudre la crise climatique dès maintenant "], Doerr présente ce qu'il appelle des " politiques clés de réduction des émissions ", page 333, y compris une norme sur l'électricité propre qui pourrait, en théorie du moins, réduire les émissions d'au moins 50 % d'ici à 2025 et de 100 % d'ici à 2040. Dans ce qui s'apparente à une note de bas de page, M. Doerr explique que sa modélisation suppose " un doublement du réseau de transport par rapport à la situation actuelle ".
Les bureaucrates sont, eux aussi, de la partie. En mai dernier, l'administration Biden a annoncé la création d'un fonds de 2,5 milliards de dollars [2.333.075.000€] destiné à soutenir le développement du réseau national de lignes à haute tension. Dans un communiqué de presse, le ministère de l'énergie a déclaré que " des estimations indépendantes indiquent que nous devons étendre les systèmes de transmission d'électricité de 60 % d'ici 2030, et qu'il faudra peut-être les tripler d'ici 2050 pour répondre à l'augmentation de la production d'énergie renouvelable et aux besoins croissants d'électrification du pays ".
Ce communiqué de presse du ministère de l'énergie semble faire référence au rapport Net Zero America, publié fin 2020 par un groupe d'universitaires de l'université de Princeton, qui a fait l'objet d'un battage médiatique important. Dans un des scénarios, ils affirment que les États-Unis pourraient déployer des capacités éoliennes considérables, couvrant la majeure partie du Missouri et l'est de l'Iowa, et que pour accueillir cette capacité, les États-Unis devront disposer d'une capacité de transmission 3,2 fois plus importante que le système existant, d'ici à 2050.
Cette carte a été publiée par le Lawrence Berkeley National Lab. Elle prétend montrer les économies potentielles qui pourraient être réalisées en augmentant la capacité des lignes à haute tension ; sauf que les auteurs n'ont pas estimé le nombre de kilomètres de lignes qui seraient nécessaires et ni pris en compte les conflits potentiels en matière d'utilisation des sols.
Autre exemple : un document publié le 7 février 2023, par le Lawrence Berkeley National Lab, qui affirme qu'en 2022, " une capacité supplémentaire aurait pu réduire les coûts du système électrique de manière plus importante que pour n'importe quelle année entre 2012 et 2021 ". Le document comprend une carte, voir ci-dessus, avec une superposition d'un système théorique à haute tension et le nombre de millions de dollars qu'il pourrait permettre d'économiser avec 1 000 mégawatts de capacité. Mais le mot " miles " [I,6Ikm] n'apparaît nulle part dans l'analyse. Il n'y a aucune reconnaissance du fait que toute cette nouvelle capacité de transmission a une empreinte physique qui devra être quantifiée, cartographiée et construite. Au lieu de cela, les auteurs du rapport — dont au moins deux sont titulaires d'un doctorat — expliquent que l'objectif de la " fiche d'information repose sur le concept simple selon lequel le transport permet à un ensemble de générateurs moins coûteux de répondre à la charge que s'ils étaient disponibles autrement ".
À cela, ma réponse, peu technique, est la suivante : " sans blague, professeur ".
Le problème avec toutes ces affirmations et tous ces rapports émanant de milliardaires, de bureaucrates, d'universitaires et d'élites travaillant dans nos laboratoires nationaux, c'est qu'aucun d'entre eux n'a pris la peine d'analyser la faisabilité de leurs plans ou la manière dont leurs programmes d'expansion pourraient réellement fonctionner dans la vraie vie. Il n'y a pas une seule mention, ou même le début d'une réflexion, sur les conflits que leurs projets pourraient rencontrer dans les villages, bourgs des territoires ruraux. Aucun d'entre eux n'a pris la peine d'effectuer des comparaisons entre la quantité de capacité à haute tension construite chaque année aux États-Unis et sur le temps qu'il faudrait pour réaliser les extensions qu'ils envisagent.
En réalité, la multiplication des conflits d'utilisation des sols auxquels sont confrontés les projets éoliens et solaires dans tout le pays, une réaction que j'ai documentée dans la base de données sur les rejets de projets renouvelables récemment mise à jour, qui est maintenant consultable, combinée à l'opposition généralisée dans l'Amérique rurale aux projets de ligne à haute tension, montre qu'une expansion aussi massive du réseau ne se produira pas.
Les chiffres — et l'histoire — ne mentent pas. Parlons d'abord des chiffres
En 2012, le National Renewable Energy Laboratory a estimé que si les États-Unis envisageaient de produire 90 % de leur électricité, à partir de sources renouvelables, ils devraient, environ, doubler leur capacité de ligne à haute tension. Le réseau disposent actuellement d'environ 240 000 miles [386 242,56km] de lignes à haute tension. En d'autres termes, si le réseau électrique devait être alimenté quasi exclusivement par des sources d'énergie renouvelables, il faudrait qu'il arrive à une taille lui permettant de faire près de dix fois le tour de la Terre.
L'année dernière, j'ai contacté Jean Reaves Rollins, présidente de la société de conseil C Three Group, basée à Atlanta, qui suit la croissance des infrastructures énergétiques aux États-Unis. Je lui ai demandé de me fournir les chiffres de la croissance du réseau de transport à haute tension, 230 kV et plus, des États-Unis depuis 2008. Mme Rollins et son équipe m'ont gracieusement fourni ces données. Les chiffres donnent à réfléchir.
Entre 2008 et 2021, selon le C Three Group, le réseau de transport à haute tension des États-Unis a augmenté d'environ 1 700 miles [2 735,88 km]/an. Ainsi, au rythme actuel de croissance, il faudra environ 140 ans pour doubler la taille du réseau de transport à haute tension américain !
Et rappelons que les 1 700 miles/an de croissance du réseau comprennent à la fois les projets internes aux USA et les projets entre les USA et d'autres États. Pour ces derniers, Mme Rollins et son équipe nous ont également fourni des chiffres ; ils sont encore plus inquiétants. Entre 2008 et 2021, les États-Unis n'ont ajouté qu'environ 217 miles [349,23 km]/an de ligne à haute tension. Cela signifie que la carte du Lawrence Berkeley Lab montrant des systèmes de transmission à l'échelle du continent n'est rien d'autre qu'un vœu pieux.
Mme Rollins et son équipe ont également fourni des chiffres sur les coûts. Entre 2008 et 2021, chaque nouveau kilomètre de ligne à haute tension a coûté environ 4 millions de dollars [3 730 224,57€]. Par conséquent, SI ces chiffres restent inchangés et que les États-Unis souhaitent doubler leur capacité de transport à haute tension, le coût pour les consommateurs s'élèverait à environ 1 000 milliards de dollars.[aujourd’hui I milliard de dollars = 933,940,000€! X I000] Mais l'inflation et d'autres facteurs entraîneront sans aucun doute des coûts nettement plus élevés. Par exemple, en Californie, le projet Tehachapi Renewable Transmission Project, qui achemine l'électricité des producteurs d'énergie renouvelable du comté de Kern vers le sud et le comté de San Bernardino, a coûté environ 2 milliards de dollars [I.865.940.000€] pour un projet qui s'étend sur 173 miles [278,42 km], soit un coût d'environ 11 millions de dollars/mile.[I0.261.680€] Ainsi, tenter de doubler la taille de notre réseau électrique pourrait coûter 2 000 milliards de dollars, voire plus.[aujourd’hui I milliard de dollars = 933,940,000€! X 2000]
Mais que représentent au final tous ces montants faramineux en comparaison de la longue liste de projets avortés ou retardés de construction de ligne à haute tension, qui jalonnent l'histoire des États-Unis? Tant de " cadavres " accumulés!... Pour un très grand nombre d'entre eux, c'est l'opposition déterminée des populations et des autorités publiques locales qui est à l'origine de l'arrêt des projets. Je n'en citerai que quelques-uns.
En 20I7, l'Iowa a adopté une loi interdisant le recours au domaine éminent [" ensemble des terres concédées par un seigneur, sur lesquelles ce dernier a une propriété supérieure qui lui donne le droit de percevoir des redevances " ; Larousse] pour l'installation de lignes à haute tension. Cette mesure a eu raison du projet Rock Island Clean Line, une ligne de transport à courant continu de 500 miles [804.672 km] et d'une valeur de 2 milliards de dollars [I.865.940.000€] qui visait à acheminer de l'électricité de l'Iowa à l'Illinois. L'opposition a contraint le promoteur du projet, Clean Line Energy Partners, basé à Houston, à retirer sa demande.
Début 2018, Clean Line Energy Partners a annoncé qu'elle suspendait son projet, initié depuis des années, de construction d'une ligne de transport de 720 miles [~I.I59 km], d'une valeur de 2,5 milliards de dollars [2.333.075.000€], à travers l'État de l'Arkansas. La Plains & Eastern Clean Line visait à transporter la production éolienne de l'Oklahoma vers les clients du sud et du sud-est des États-Unis. Mais le projet s'est heurté à une opposition farouche en Arkansas, où toute la délégation du Congrès de l'État s'est opposée à l'accord.
Toujours en 2018, les autorités de régulation du New Hampshire ont rejeté un projet de ligne à haute tension appelé Northern Pass Transmission, qui devait acheminer l'énergie des installations hydroélectriques du Québec vers les consommateurs du Massachusetts. Mais le projet de 192 miles [~309 km] et de 1,6 milliard de dollars [I.49I.776.000 €] — qui devait traverser les White Mountains [Montagnes Blanches] du New Hampshire — a fait l'objet d'un veto lors d'un vote unanime du Comité du New Hampshire, chargé de l'évaluation du site.
Un projet similaire, le Grain Belt Express, d'une valeur de 2,3 milliards de dollars [2.I44.428.000 €] et d'une longueur de 780 miles [~I.256 km], est retardé depuis des années en raison de l'opposition des habitants des zones rurales du Missouri et d'autres États. Proposé pour la première fois en 20I0, ce projet de 4 000 mégawatts est conçu pour transporter l'électricité du Kansas vers l'Indiana et d'autres États. Mais en 20I5, la Commission du service public du Missouri a bloqué le projet après avoir conclu que le coût pour les propriétaires terriens de l'État dépassait ses avantages. La bataille autour du projet a été partiellement résolue à la mi-20I8 lorsque la Cour suprême du Missouri s'est prononcée en faveur de la ligne de transport. Mais le projet se heurte encore à des obstacles en matière d'autorisation au Kansas, au Missouri et dans l'Illinois. Le mois dernier [janvier 2023], un législateur de l'État de l'Illinois, Adam Neimerg, a déclaré que le Grain Belt Express "n'apporte rien aux habitants de l'État de l'Illinois en matière d'énergie. Il prive donc de nombreux citoyens de leurs droits de propriété ".
En outre, de nombreux autres exemples illustrent les longs délais de mise en œuvre de ce type de projet. Par exemple, le projet TransWest Express vise à transporter l'énergie éolienne du Wyoming vers l'Utah, le Nevada et la Californie. Ce projet est en cours de développement depuis 2005, mais sa construction n'a toujours pas commencé. Il appartient à la société Anschutz du milliardaire Philip Anschutz, établi à Denver. Comme je l'ai indiqué ici la semaine dernière, la Power Company of Wyoming, propriété d' Anschutz, développe les projets éoliens géants de Chokecherry et de Sierra Madre. Elle a besoin du projet TransWest pour transporter l'électricité du Wyoming vers des clients situés plus à l'ouest. Le projet attend toujours les autorisations finales du Bureau of Land Management. Sur son site web, TransWest indique qu'elle prévoit de commencer la construction cette année et de terminer le projet en 2026. Ainsi, si les promesses se concrétisent sur le terrain, le projet TransWest aura mis plus de deux décennies avant de voir le jour!
Et la liste est encore longue de retards et d'annulations de projets de ligne à haute tension. Cependant, la conclusion est sans équivoque : malgré le battage médiatique incessant sur les énergies renouvelables, il est tout simplement IMPOSSIBLE que les États-Unis soient en mesure de doubler, encore moins de tripler, sa capacité de transmission à haute tension nécessaire pour accueillir tous les projets éoliens et solaires envisagés dans des délais raisonnables.
Cela nous amène à un autre point tout aussi essentiel : le réseau électrique actuel, c'est-à-dire les poteaux, les transformateurs, les tours, les lignes, les parafoudres et les autres éléments nécessaires pour acheminer l'électricité des centrales aux consommateurs, ressemblera beaucoup au réseau de demain et d'après-demain. Compte tenu de cette réalité, les décideurs politiques et les entreprises de services publics devraient chercher des moyens d'utiliser le réseau existant en installant de nouvelles centrales de production à faible ou à zéro émission de carbone dans des endroits qui ont déjà accès à un réseau de ligne à haute tension.
Certaines entreprises envisagent cette stratégie. En octobre dernier, TerraPower, qui développe un petit réacteur modulaire, a annoncé qu'elle avait entamé une étude pour évaluer le déploiement de son réacteur Natrium dans cinq centrales au charbon actuellement exploitées par PacifiCorp, qui appartient au méga-conglomérat Berkshire Hathaway. Selon le communiqué de presse de PacifiCorp, l'étude évaluera, entre autres, la réaffectation des " actifs de production et de transmission existants au bénéfice " des clients de l'entreprise..
En septembre dernier, le ministère de l'énergie a publié un rapport selon lequel " 80 % des sites de centrales au charbon désaffectées ou en activité qui ont été évalués présentent les caractéristiques de base nécessaires pour être considérés comme pouvant accueillir un réacteur nucléaire avancé ". Il n'est pas surprenant que le rapport comprenne nombre de références au système des lignes à haute tension et au fait que les nouvelles centrales nucléaires " pourraient utiliser les infrastructures existantes de transmission, de transport et d'approvisionnement en eau laissées par les centrales au charbon mises hors service ".
Il nous aura fallu plus d'un siècle pour construire notre réseau électrique. C'est le réseau Mère!, celui dont dépendent tous nos systèmes les plus critiques. Si nous voulons sérieusement réduire les émissions de gaz à effet de serre, nous devons renoncer au mirage du tout renouvelable. Nous devons accepter les limites physiques du réseau électrique dont nous disposons et prendre au sérieux l'ajout de l'énergie nucléaire à notre bouquet énergétique en installant de nouveaux réacteurs nucléaires plus petits, plus sûrs et moins coûteux là où les générateurs brûlent actuellement des hydrocarbures.
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