FRANCE, ÉNERGIE : LE NUCLÉAIRE, L' ATOUT MAJEUR DANS LA RÉUSSITE DU " BOUCLIER TARIFAIRE "

  Remercions, nous, béotiens, dans le domaine de l' énergie, Valérie Faudon pour son éclairage sur le  " comment ça marche ? " ; même, si, après lecture, on a bien compris, malheureusement, que le temps béni de l'électricité " bon marché " appartient, désormais, au passé.
  À noter, que, en même temps, les gouvernements successifs font tout pour réduire la part du nucléaire, le meilleur allié des Français ! Va comprendre, Charles !
Le pire est avenir !...

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Bouclier tarifaire : le nucléaire protège les ménages français contre la crise de l’énergie

Valérie Faudon, Déléguée générale de la Sfen [Société française d' énergie nucléaire]

Élisabeth Born, Premier ministre. ©Eric PIERMONT / AFP

  La hausse des coûts de l’énergie en Europe est massive et la France s’en sort plutôt mieux que ses voisins européens. L’État a pris la décision de mettre en place un strict bouclier tarifaire. Quel rôle a joué le nucléaire dans ce mécanisme ?
  Le 26 août dernier, les prix de gros de l’électricité pour 2023 en France [1] atteignaient un record en dépassant les 1 000 euros le mégawattheure, MWh, contre 85 euros/MWh un an auparavant. Alors que beaucoup s’inquiètent pour la facture des ménages, le gouvernement [2] a annoncé le 3 septembre le maintien d’un « système de bouclier » en 2023 afin de « protéger les français et leur pouvoir d’achat ». La situation reste difficile toutefois pour de nombreuses entreprises.
  Alors que l’Europe vit la plus importante crise énergétique de son histoire récente, il est important de comprendre la relation entre les prix de gros et les prix de détail et quelle est la situation de la France par rapport aux autres pays européens. En particulier, la situation met en évidence comment le nucléaire a contribué à protéger les Français en 2022 des hausses massives des factures observées chez nos voisins. Une grande partie de cette charge, comme on le verra, a reposé sur les finances d’EDF et contribue aux difficultés financières de l’entreprise.

Un marché de l’électricité lié aux prix du gaz
  Le marché de gros est le lieu où se rencontrent l’offre d’électricité, les producteurs, et la demande d’électricité, les fournisseurs, qui l’achètent pour la revendre aux clients finaux, qu’ils soient particuliers ou professionnels. Les échanges se font soit en gré à gré, soit en bourse sur Epex Spot France pour les échanges spot, échéance journalière, la veille pour le lendemain,  et EEX pour les produits à terme en Europe : semaine, mois, trimestre, année. Comme la majorité des marchés, celui-ci évolue en fonction de l’équilibre offre/demande. La fixation des prix sur le marché spot et à terme, dont les bases réglementaires ont été définies par différents textes européens depuis 1996, fonctionne sur le mode du « merit order ». Les produits à terme sont plus représentatifs des coûts d’approvisionnement des fournisseurs, répercutés in fine aux clients finaux.
  Dans l‘ordre de mérite économique, les moyens de production se classent selon leur coût variable de production : coût marginal. On trouve d’abord le solaire et l’éolien, ensuite la production nucléaire, enfin les centrales thermiques à gaz ou à charbon. On retient les offres, par ordre de préséance économique, jusqu’à ce que la demande en électricité soit servie. En général, ce sont les centrales thermiques qui sont marginales. Leur coût de production, avec la prise en compte du coût du CO2, fixe le prix du marché spot.

Une crise multifactorielle
  Dès l’automne 2021, les prix de l’électricité sur les marchés de gros européens ont subi la pression de la première hausse des prix du gaz. Elle était liée à la reprise post-Covid, et de la montée des prix du CO2. Cette hausse s’est amplifiée dans toute l’Europe avec la guerre en Ukraine, à partir de fin février 2022, et la compétition internationale sur les achats de gaz naturel liquéfié. La baisse de la disponibilité du parc nucléaire français, suite à la découverte de phénomènes de corrosion sous contrainte, vient s’ajouter dans le cas de la France. Selon Jean-Bernard Levy [3], PDG d’EDF, les deux premiers facteurs liés aux marchés du gaz expliqueraient aujourd’hui 85 % de la hausse des prix.

 
  Le gouvernement, pour protéger les ménages des hausses de prix, a décidé dès le vote de la loi de finances 2022 en novembre 2021 de plafonner la hausse des tarifs réglementés de vente d’électricité, TRVE, à 4 % TTC en moyenne au 1er février 2022 pour l’ensemble des consommateurs résidentiels et professionnels éligibles. Pour rappel, les TRVE représentent les offres pratiquées par les fournisseurs historiques d’électricité en France, soit EDF sur 95 % du territoire et les entreprises locales de distribution, ELD, sur les 5 % restants. Selon la CRE [4], fin juin 202I, près des deux tiers des 33,6 millions de sites résidentiels disposaient toujours d’un contrat de fourniture au TRVE, sachant qu’une part importante des offres de marché, proposées par les fournisseurs alternatifs,  restait indexée sur le TRVE : avec souvent un rabais de quelques pourcents.

Le rôle clé de l’ Arenh
  Pour fixer les tarifs réglementés, la Commission de régulation de l’énergie, CRE, autorité administrative indépendante, suit une méthodologie « d’empilement des coûts » dans des conditions prévues par la loi. Le TRVE est construit par un empilement de trois composantes, chacune représentant environ un tiers du total : coûts d’acheminement par les réseaux, taxes et fourniture d’électricité : approvisionnement et commercialisation. La partie fourniture est calculée pour une part importante à partir du coût d’approvisionnement à l’Accès régulé à l’énergie nucléaire historique, Arenh, dont le prix est bloqué à 42€/MWh depuis janvier 20I2. Elle prend aussi en compte un coût d’approvisionnement en énergie de la part restant à approvisionner aux conditions de marché, au-delà les volumes d’ Arenh.
  Dans sa délibération du I8 janvier[5], la CRE a proposé aux ministres de l’Énergie et de l’Économie de faire évoluer les TRVE, au Ier février 2022, de + 44,5% HT, soit 35,4% TTC, pour les consommateurs résidentiels, qui prenait en compte, dans le calcul du TRVE, l’augmentation inédite des prix de gros de l’électricité. Le gouvernement a refusé la proposition tarifaire de la CRE et a fixé, par arrêté, un barème des TRVE correspondant à une augmentation de 4 % TTC en moyenne comme le lui permettait la disposition prise en loi de finances.

Un différentiel de prix entre la France et ses voisins

  Avant la crise, la France offrait, en grande partie grâce à son énergie nucléaire, des prix de l’électricité pour les ménages bien inférieurs à ceux de ses voisins. Ainsi, en 202I, l’écart avec les prix allemands était de près de 70 %.

 



  Ce différentiel entre la France et les pays voisins s’est réellement creusé quand on regarde l’augmentation de la facture d’électricité [6] pour les ménages sur un an dans différents pays européens[7].


  On constate que sur un an, entre juillet 202I et juillet 2022, si la facture moyenne française est restée sous les 750€/an, celle-ci a doublé en Belgique, aux Pays-Bas, en Allemagne, et au Royaume-Uni. Le Royaume-Uni a annoncé pour sa part une hausse des prix de détail additionnelle de l’électricité de 80% au Ier octobre 2022.
  Une récente étude de l’Insee [8] conclut que les mesures prises cette année sur le plafonnement des prix du gaz et de l’électricité aurait permis de limiter l’inflation d’au moins trois points.
  En août 2022, la France était le premier pays de la zone euro à limiter au mieux les effets de l’inflation annuelle avec un taux ramené à 6,5 %, inférieur aux taux constatés en Allemagne, 8,8 %, en Belgique, I0,5 %, en Italie, 9,0 %, ou aux Pays-Bas : I3,6 % [9].

Le financement du bouclier tarifaire

  Deux sources de financement sont précisées. D’une part, l’augmentation du plafond de l’ Arenh, Accès régulé à l’électricité nucléaire historique, de 20 TWh sur 2022 : EDF a dû mettre à disposition des fournisseurs déjà bénéficiaires d’ Arenh qui le demanderaient un volume additionnel au prix de 46,2 €/MWh, tout en achetant à ces mêmes fournisseurs un volume équivalent d’énergie au prix de 257€/MWh : voir analyse sur la valeur économique du nucléaire.
  D’autre part, la baisse de la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité : TICFE. Le gouvernement a fixé le tarif de la TICFE à I euro le mégawattheure pour les ménages, contre 22,50 euros le mégawattheure auparavant, pour la période du Ier février 2022 au 3I/0I/2023. Il s’agit du minimum autorisé par Bruxelles. Pour rappel, la Sfen, dans son livre blanc, acte II, propose que la baisse de la fiscalité sur l’électricité, vecteur bas carbone de la transition énergétique, soit pérennisée.
  Dans son communiqué de presse du I4 mars 2022, le Groupe EDF évaluait l’impact négatif de la première décision sur son Ebitda 2022 à I0,2 milliards d’euros. Le 2 septembre, le ministre de l’Économie[I0] a estimé que l’État aura dépensé 10,5 milliards d’euros pour le bouclier tarifaire sur l’électricité.
  Le ministre du budget Gabriel Attal a annoncé le 2 septembre sur France Inter le prolongement du bouclier tarifaire en 2023 face à l’inflation et la hausse inédite des prix de l’énergie liée à la guerre en Ukraine. En pleine préparation du budget 2023, il a précisé néanmoins qu’il ne souhaitait laisser « dérailler ni la facture des Français, ni nos finances publiques ». Il a précisé que « les arbitrages sont en cours » et « doivent être rendus dans les prochains jours ». Cette crise a montré la nécessité de disposer de moyens de sources d’approvisionnements en énergie indépendantes des aléas des agendas politiques. C’est le cas pour le nucléaire, comme pour toutes les filières. 


[I] France 24 26/08/22 : Flambée du prix de l’électricité en France : « Les prix sont complètement démentiels »
[2] BFMTV AFP 3/09/2022 « Prix de l’énergie : Gabriel Attal annonce le maintien du bouclier tarifaire en 2023 »
[3] Table ronde REF2022 le 22/08/2022
[4] CRE Juin 202I : rapport d’évaluation des tarifs réglementés de vente d’électricité
[5] CRE I/02/2022 Evolution des tarifs réglementés de vente d’électricité : hausse de 4% TTC au Ier février 2022
[6] CREG : Évolution prix de l’énergie Belgique et pays voisins
[7] Ibid.6
[8] INSEE (I/9/2022)
[9] Eurostats
[I0] JDD 2/09/22

  Sur le Web 


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