L’ AGONIE D’ UNE ARMÉE, METZ – I870, JOURNAL DE GUERRE D’UN PORTE-ÉTENDARD DE L’ ARMÉE DU RHIN, ÉPISODE XX

Précédemment
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  Après treize jours perdus d'une façon si préjudiciable, on allait enfin sortir de cette incertitude énervante, du moins on le croyait.
  Depuis les prouesses de notre général à Mars-la-Tour, il ne fut plus question pour notre division de marcher à l'avant-garde; nous étions désignés pour rester en réserve.
  Toute l'armée quitte ses bivouacs de grand matin pour prendre le même chemin que le 26; cette fois, de nombreux ponts furent établis sur la Moselle; malgré cela l'écoulement fut encore trop lentcxciv ! L'ennemi, prévenu à temps, put réunir sur le point que le maréchal avait choisi un effectif assez élevé. Aucune ruse de guerre ne fut tentée pour induire l'adversaire en erreur, en simulant une action sur d'autres pointscxcv.
 Les corps de l'armée du Rhin devaient se déployer en avant du fort Saint-Julien; le 6e formant l'aile gauche, le 3e à droite, le 4e au centre, le 2e corps avec la garde impériale en réserve ainsi que la cavalerie indépendante. 

 " Fort Saint-Julien est situé sur les hauteurs de Saint-Julien-lès-Metz et surplombe la ville de Metz et la vallée de la Moselle. Le fort a été conçu dans l’esprit du concept de « forts détachés » développé par le lieutenant du génie colonel Séré de Rivière en France et Von Biehler en Allemagne. (...) Les travaux ont commencé en I867. Le fort n’a pas été achevé en I870, lorsque la guerre a éclaté entre la France et l’ Allemagne. Le système défensif a été achevé et mis au point par des ingénieurs allemands entre I87I et I89I. (...) ". Aujourd'hui, le fort accueille un... restaurant italien ! Sur le Web.

  Un coup de canon tiré de la forteresse devait être le signal de l'attaque pour les troupes de première lignecxcvi. Ce fut le maréchal Lebœuf qui ouvrit le feu le premier sur l'ennemi. L'action s'étendit rapidement aux autres corps. Pendant que nos troupes gagnaient du terrain, on remarqua une grande confusion dans les rangs de l'adversaire qui d'abord recula.
  Les villages de Nouilly [commune située à ~7 km au nord-est de Metz; I97 habitants en I87I, 720 en 202I] et Noiseville [Noisseville] furent enlevés à la baïonnette; l'ardeur de nos troupes était irrésistible.
  Le corps de Ladmirault s'emparait en même temps de Servigny-Sainte-Barbe, [Servigny-lès-Sainte-Barbe] les Prussiens abandonnaient toutes leurs positions. La brèche était largement ouverte à la chute du jourcxcvii; c'est la victoire !
  Cette mémorable soirée fut saluée par un cri de triomphe de toute l'armée; le cercle paraissait rompu et il l'était en effet. Nous allions donc enfin pouvoir reprendre la campagne et l'offensive si avantageuse pour l'ardeur de nos soldats. Il paraissait facile pour certains chefs de prendre l'ennemi à revers, de détruire ses ouvrages de campagne et de battre en détail, avant qu'il ait pu se concentrer; mais il fallait déployer une grande vigueur à la suite d'une rapide conception; ce n'était pas dans les habitudes de notre chef. Le résultat de la soirée du 3I donnait l'espérance d'une victoire éclatante pour le lendemain.
  Le général Changarnier, vieux vétéran des guerres d' Afrique, faisait campagne comme volontaire sans être investi de commandement; vers la fin de la journée, voyant l'ennemi plier, il fit sonner la charge par tous les clairons qu'il put réunir. La division Montaudon s'élança avec une vigueur extrême; l'ennemi, dont les rangs contenaient beaucoup de soldat de la Landwehr, [armée de réservistes; créée en I8I3 par les généraux Scharnhorst, Gneisenau et Manenbach, elle est composée de soldats non professionnels, mais suffisamment instruits pour faire de bons combattants le moment venu, une fois encadrés par des engagés ou associés à eux] céda le terrain en évacuant la position. Ce fut un moment de joie inexprimable pour nos courageux soldats qui provoquèrent cette déroute; l'adversaire laissait une vingtainecxcviii de canons de position qu'il n'eut pas le temps de détériorer.
  L'ennemi en fuite ne fut pas poursuivi; le feu cessa vers les I0 heures du soir. Le maréchal ne jugea pas le moment opportun pour faire avancer le reste de son armée et appuyer l' héroïque effort des 3e et 4e corps.
C'était une occasion unique pour le chef de l'armée du Rhin de se réhabiliter dans une certaine mesure; tel était l'avis de plusieurs généraux. Il s'en tint à ce premier succès. Cela parut incompréhensible de ne pas profiter de l'élan de nos soldats pour assurer le passage et continuer la poursuite de l'ennemi par cette nuit éclairée par la lune comme en plein jourcxcix, sur un terrain plat, nu, sans obstacle. D'ailleurs, le mouvement en avant était tout indiqué. On " attendait les ordres ". Ils n'arrivèrent pas.
  Il était facile de prévoir que les Allemands, étant fixé sur notre point d'attaque, ne s'en tiendraient pas à cet échec; pendant la nuit, toute leur armée fut mise en mouvement, ils reçurent des renforts considérables; nos postes avancés furent enlevés, nos troupes refoulées et les canons capturés, repris par les Prussienscc.
  Pendant que nos troupes subissaient cette nouvelle épreuve si pénible après le courage déployé la veille, le maréchal reposait tranquillement au château de Grimont. Ce fut, au réveil, un étonnement qui provoqua des plaintes amères sur la façon dont l'armée était conduite. La tâche confiée à Bazaine dépassait de beaucoup ses moyens et ses forces. Il n'était à sa hauteur ni par son activité physique, ni par ses talents, ni par son énergie morale. Tandis que ses soldats se battaient, le grand chef " dormait du sommeil du juste ".
  Dans la matinée du Ier septembre, il ne fut pas pour l'armée question de sonner le réveil; tous les officiers au petit matin connaissaient les évènements de la nuit. Ce fut une immense clameur contre le maréchal, " contre ce dormeur épais, qui ne songeait qu'à son bien-être ". Je revois encore le général Dupreuil, au milieu d'un groupe d'officiers supérieurs et de généraux de cavalerie, je l'entends, dans son indignation mal contenue se servir de ces expressions.
 
Ier septembre.
 
  Malgré l'échec de la nuit qui annulait le succès de la veille on avait confiance dans le courage de nos troupiers que rien ne rebutait. 
  L'action recommença vers 5 heures du matin; le fort Saint-Julien tirait activement avec ses pièces de douze, il n'en avait pas de plus fortes en batterie. Après quelques manœuvres, notre division qui avait passé cette nuit au bivouac, la bride au bras, dans l'espoir d'être utilisée dans cette nuit très éclairée par la lunecci, vint prendre sa place de bataille, près du château de Grimont, où le maréchal reposait encore. Les reflets de nos cuirasses et le brillant des casques des dragons de Murat, attirèrent l'attention de l'artillerie ennemie qui nous prit pour cible, selon sa coutume; ses batteries, tenues à distance par la forteresse, ne produisirent que peu d'effet. Quelques projectiles éclatèrent devant le front du régiment. 
 
Deux pièces de I2 en batterie, durant le siège de Paris, Porte Maillot. " (...) Le canon de I2, I2I m/m 3, en bronze, se charge encore par la bouche; il tire jusqu’à 3.000 mètres mais l’armée française n’en possède qu’une trentaine de batteries pour les troupes en campagne. Nos fusées, réglées pour trois distances seulement, n’explosent généralement pas au contact du sol, ce qui rend l’ajustement de tir difficile. Néanmoins, les ricochets peuvent être efficaces contre des troupes en ordre serré. (...) "; sur le Web.
 
  L'action était engagée fortement sur toute la ligne. Nous assistions depuis le commencement de ce spectacle grandiose d'une bataille qui se passait sous nos yeux, sur un terrain s'abaissant en pente douce dans la direction du village de Malroy [situé à environ 9 km au nord de Metz; 2I5 habitants lors du conflit, 35I en 202I] jusqu'à la Moselle. Partout le sol était noir de Prussiens en mouvement.
  Quelques obus passèrent au-dessus de notre têtes; [" (...) Les Allemands possèdent le canon Krupp, en acier, à l’âme rayée, se chargeant par la culasse, de deux calibres : 4, soit 77 m/m 85, et 6, soit 92 m/m I5. Leur portée dépassant 3.000 mètres, ils surclassent nettement nos batteries de 4. Seules celles de I2, trop peu nombreuses, sont en mesure de les inquiéter. (...); sur le Web] l'un d'eux en éclatant atteignit le général de Gramont à la partie supérieure de son képi qui fut enlevé; le général chancela et s'abattit, on le crut tué. Il se releva rapidement, un peu ému. Un trompette qui se trouvait à pied à côté de ce groupe d'officiers ramassa le képi du général et le lui remit. La frayeur de notre chef fut de courte durée; il put voir par l'empressement qu'on lui témoigna combien il était aimé. Il remerciait en souriant, disant : " Ce coup-ci ça n'est rien; ce sera pour une autre foisccii. "
  Le général Murat, qui se trouvait près de lui, l'embrassa fraternellement. Cette petite scène touchante pendant le fracas de la bataille fit impression sur les spectateurs. Ce sont des incidents qui se gravent dans la mémoire. À ce moment je remarquai que le prince, qui était décoré de nombreux ordres, ne portait sur sa tunique que la médaille militaire.
  Quel joli soldat que le prince Murat; c'était pour nous le type du cavalier accompli, souple, audacieux. Nous avions une haute opinion de son courage, nous sentions que, s'il avait été libre de ses mouvements, il aurait pu faire de grandes choses; tous nos cavaliers l'eussent suivi partout; mais il n'était que brigadier et ne pouvait se permettre aucune initiative. Au contraire en raison de sa situation, il s'observait plus que tout autre, sauf à se dédommager avec le colonel Friant, car ils échangeaient entre eux leurs impressions, sans éclat, souvent en ma présence, sans méfiance aucune, bien que le prince sût que je prenais des notes.
  La bataille se déroulait sur tout le front; la division Fauvart-Bastoul [Jacques Alexandre Jules, I8I4-I888; nommé général de brigade, I865, il est alors à la tête d'une brigade du 2e corps] fut citée comme ayant accompli une action héroïque en se précipitant sous une grêle de balles et d'obus sur le village de Flanville. [depuis le décret impérial de Slomensk, 2I août I8I2, Flanville a fusionné avec Montoy, pour former la commune de Montoy-Flanville; aujourd'hui la commune se nomme Ogy-Montoy-Flanville et elle est à environ 9 km à l'est de Metz ] Ce village conquis, elle reçut l'ordre de s'y installer fortement, et résista à tous les assauts que l'ennemi, comprenant l'importance de cette position, tenta pour l'en déloger.
 
FAUVART-BASTOU, général de brigade Photo Carjat, Paris. Sur le Web.
 
  Les autres corps eurent le même succès. L'adversaire ébranlé pliait sur certains points; un dernier effort et nous étions maîtres de la trouée ! L'armée allait donc pouvoir venger l'échec de la nuit, sortir du cercle et se donner de l'air : quelle perspective encourageante !
  Vers I0 heures et demie le maréchal fit enfin son apparition; il arriva, suivi de son état-major, et se plaça à côté de notre division, en avant du fort Saint-Julien, seul, en tête de ses officiers, l'air inquiet, renfrogné. Nous étions là, dans cette position, pied à terre, depuis le matin, espérant voir notre chef échanger quelques bonnes paroles avec des officiers supérieurs ou autres, comme cela avait lieu souvent dans les corps, quand Ladmirault, Canrobert, Bourbaki, etc... passaient devant les rangs. Une parole réconfortante coûte peu, on aime cela dans l'armée, ça fait plaisir.
  Nous nous attendions à voir le maréchal avec dans le regard ce reflet joyeux que donne la victoire, car la fortune paraissait cette fois sourire à nos armes, il n'en fut rien. Jamais notre chef n'avait paru plus maussade; il était là, à côté de nous, la figure colorée, un peu bouffie, avec des yeux rougis, clignotants.
  Chacun se communiqua ses impressions, elles furent franchement défavorables et cela ne fit qu'augmenter l'antipathie que l'on ressentait invinciblement pour ce chef.
  C'est à ce moment qu'une surprise fit passer un frisson chez tous les officiers. Que se passe-t-il donc sur la ligne de bataille ? On dirait un mouvement rétrograde en échelons, exécuté avec régularité comme au champ de manœuvre par une fraction de l'armée. Qu'est-ce que cela pouvait signifier ?  On savait que le corps du maréchal Lebœuf avait souffert, mais avait tenu ferme; son chef s'était exposé sans se ménager. Les Prussiens tiraient avec leur artillerie en désespérés. Ce tir, mal réglé, ne causait aucun mal, leurs lignes ployaient; nos soldats étaient bien convaincus, dans leur élan irrésistible, que cette fois les Allemands étaient encore battus. Et nous avions l'air de reculer sans que toutes nos troupes fussent engagées.
  Était-ce une retraite ou le résultat d'une erreur ?
  Le maréchal avait fait venir sur ce plateau une nombreuse cavalerie qui ne demandait qu'à se précipiter sur l'ennemi, nous avions devant nous une belle vallée; l'adversaire semblait avoir rompu ses formations et paraissait en désordre; c'était le moment propice pour nous lancer sur lui, bien qu'il fût protégé par une forte batterie que l'on apercevait distinctement. Le champ était vaste pour manœuvrer, on pouvait s'élancer de front et sur ses flancs. On crut un instant que c'était la pensée du chefcciii...
  Non ! c'était un bien recul de nos troupes. Chacun explique à sa façon ce mouvement aussi étrange qu'incompréhensible. Bazaine voulait probablement réserver sa cavalerie pour l'exécution du plan ténébreux conçu par lui.
  Des officiers en relations avec leurs camarades de l'état-major général, qui se trouvait derrière le chef d'état-major Jarras, ne purent donner aucun renseignement. Le général Jarras lui-même ignorait ce que signifiait ce mouvement, car il s'était nettement prononcé dans le conseil pour une action énergique.
  Nous avons dit que les maréchal n'était pas communicatif avec ses lieutenants; il passait même pour ne pas consulter le général Jarras, ni l'entretenir de ses projets. Cependant, c'était son bras droit; il est indispensable qu'aucun secret militaire n'existe entre le général en chef et son chef d'état-major, en ce qui concerne les opérations de la campagne; le chef supérieur peut être enlevé, disparaître, il faut un confident pour que l'armée ne soit pas désemparée. Chez un chef correct, habile, c'est une force de ne pas divulguer ses plans, mais il ne doit pas y avoir de secrets entre le chef d'état-major général et le commandant en chefcciv.
  Que voulait donc le maréchal ? Une nouvelle retraite était impossible, puisqu'on pouvait d'autant mieux vaincre que toutes les troupes n'avaient pas été engagées dans cette affaire; que du côté de l'ennemi on comptait un grand nombre de soldats de la Landwehr, on avait eu la preuve la veille, où celle-ci avait lâché pied; et que notre nombreuse cavalerie n'avait pas été utilisée ni la veille ni dans cette matinée.
  On apprit qu'une réunion avait eu lieu au château de Grimontccv; que le maréchal semblait indécis, hésitant, craignant même une sortie qui l'aurait sans doute obligé de justifier sa conduite auprès de l'autorité suprême.
  Tel fut les sentiment des membres de cette conférence. Le maréchal succombait sous le fardeau d'une responsabilité écrasante. Se voyant méprisé, ayant entièrement perdu la confiance de son armée, il sentait que si elle était victorieuse elle allait détruire toutes ses combinaisons occultes; il n'hésita plus, il la fit encore rétrograder; il suivit les avis des généraux commandant la place de Metz. On a prétendu que, s'il avait pu prévoir ce qui se passait le même jour à Sedan, sa décision aurait été tout autre; il aurait pu se présenter au parti politique qui le soutenait avec la seule armée encore formidable qui restait à la France. C'était du reste le mobile de sa conduite, disait-on, s'il ne s'était pas laissé prendre au piège par le prince Frédéric-Charles. Tout cela n'était que suppositions comme beaucoup de choses qui passent pour être historiques avec la considération du temps.
  Hélas ! oui, nous battions encore une fois en retraite ! Nous voyions l'ennemi se replier, nous céder du terrain, et nous allions encore lui donner l'illusion de la victoire en nous retirant ! Cela nous semblait le résultat d'un malentendu incroyable, puisqu'on ne connaissait pas d'officiers ayant communiqué cet ordreccvi. Il eût suffit d'un coup de clairon pour reporter les troupes en avant; on l'attendit inutilement, le mouvement se continuait !
  On ignorait que cet ordre avait été transmis directement par le maréchal en sortant de cette réunion, alors que tous les commandants de corps s'y étaient opposés, sauf les généraux qui avaient la défense de Metz.
  Le maréchal, laissant sa cavalerie sur place, fit demi-tour, suivi de son nombreux état-major, pour rentrer dans l'après-midi dans son quartier du Ban-Saint-Martin, où ses bagages étaient restés sous la surveillance du commandant Villette, [Henry Léon WILLETTE, I822-I892; "...   Durant la guerre contre l'Allemagne, il effectue toute la campagne auprès de son chef et est fait prisonnier en I0/70, Bazaine a juste le temps de le nommer provisoirement lieutenant colonel avant la reddition de la Place. Après la Guerre, il n'abandonne pas son chef qui est traduit devant le Conseil de Guerre et il est maintenu comme son aide-de-camp. Il est cependant mis en disponibilité en décembre I873. (...) "; sur le Web] son homme de confiance. Ce récit fut accrédité, ce qui prouverait que le maréchal n'avait pas l'intention de quitter Metz, sans quoi il n'eût pas laissé ses bagages en arrière et on aurait pu constater quelques préparatifs d'emballage, il n'en fut rien; c'est encore un indice à défaut d'autres preuvesccvii
 
  WILLETTE, lieutenant-colonel. Photo Appert, Paris.

   Il faut renoncer à expliquer l'émotion de toute l'armée en se sentant de nouveau le jouet sanglant de ce chef. La rumeur grandissante, s'élevant de tous côtés, à dû frapper ses oreilles ! Mais il demeura obstinément sourd à ce douloureux gémissement d'une armée qu'il allait livrer sans honneur et sans gloire.
  On ne verra plus le maréchal.
  Il eut tellement conscience de son impopularité, que pendant les deux derniers mois qui suivirent, jusqu'à la capitulation, ses soldats ne l'aperçurent plus une seule fois; il resta enfermé au Ban-Saint-Martin.
  Ce chef étrange ne parut nulle part, ni à Metz ni au camp, ni aux ambulances ! Il n'adressa pas un mot de consolation à ses victimes, ni à sa vaillante armée jusqu'à la catastrophe finale. Cette armée qui ne demandait qu'à combattre, à se dévouer pour la défense de notre chère patrie, il allait l'immobiliser de nouveau, la rendre impuissante en l'affamant pendant deux longs mois !
  Que de cris d'indignation chez tous, depuis le sous-lieutenant jusqu'aux grades les plus élevés; c'était révoltant ! Ce n'est pas une plume aussi peu exercée que la mienne qui peut reproduire les scènes de désolation qui, à la suite de cette retraite ruinant nos espoirs, se déroulèrent partout, en ville, dans les cafés, aux bivouacs. 
  Que se passait-il en France ? Nous ignorions tout, puisque les communications étaient de nouveau interceptées.
  L' Empereur pas plus que le conseil de la Régence n'étaient là pour briser cet homme; et, disons le mot, puisqu'il n'avait plus d'autre titre aux yeux de tous, pour briser le traître, ainsi qu'il sera désigné désormais.
  
  À suivre...
 
cxciv. Jarras impute cette lenteur à l'absence de surveillance des états-majors des corps d'armée et des divisions. Général JARRAS, loc. cit., I78.
  " Le mouvement du 3I ne se fit pas avec l'ordre et la rapidité qu'on avait espéré. " Colonel FIX, loc. cit., 53.
 
cxcv. " Non seulement on ne cherchait pas à tromper l'ennemi, mais on semblait vouloir lui enlever toute espèce de doute sur nos projets; on répétait les mêmes manœuvres, les troupes se montraient sur les mêmes points, on eût dit que la journée du 26 n'avait été que la répétition de l'acte qui allait se jouer. " Colonel d' ANDLAU, loc. cit., I44. 
 
cxcvi. " À 3 heures de l'après-midi le coup de canon qui devait donner le signal de l'action n'était pas encore tiré. Il le fut toutefois vers 4 heures. " Colonel FIX, loc. cit., 54.
 
cxcvii. " Il n'y avait plus qu'à continuer, et avec de l'énergie nous pouvions aller prendre pied sur le plateau de Sainte-Barbe. Que les réservent suivent, qu'elles soutiennent les premières troupes, et le passage est ouvert. " Colonel d' ANDLAU, loc. cit., I59.
 
cxcviii. Seize pièces abandonnées par les Allemands à Servigny reprises par eux dans le retour offensif de la nuit.
 
cxcix. Jarras prétend au contraire que la nuit était très obscure, loc. cit., I82.
 
cc. Reprise de Servigny par les Allemands, vers 11 heures du soir.
 
cci. En contradiction avec le rapport officiel et avec Jarras.
 
ccii. Ce képi et une paire d'épaulettes ont été déposés à la grotte de Lourdes, comme ex-voto, par les soins de Mme la duchesse de Gramont-Lesparre, son épouse : note de l'auteur.
 
cciii. Sur l'opportunité d'une charge, le colonel d' Andlau n'est pas d'accord ici avec le lieutenant Farinet : " Que la cavalerie de réserve ait reçu à ce moment l'ordre de monter à cheval et de former ses escadrons, rien n'est plus exact, mais que le maréchal ait songé à la faire charger sur le terrain découvert qui se trouvait en avant de Servigny, c'est ce dont nous voulons douter; c'eût été l'envoyer à la mort sans aucune chance de succès... suivent le conditions de la charge. Dans de semblables conditions on avouera qu'une charge de cavalerie eût été une folie. " Metz, Campagnes et négociations, loc. cit., I65-I66. DICK DE LONLAY, loc. cit., V, 396 : "  Cette charge de cavalerie sous le feu concentrique de batteries s'étendant de Failly jusqu'au-delà de Servigny, sur un espace sillonné de nombreuses et fortes tranchées garnies de troupes prussiennes, eût été une insigne folie dans de telles conditions; elle n'eût été justifiée que par les nécessités d'une retraite pour arrêter la poursuite de l'ennemi ". 
  LEHAUTCOURT, loc. cit., VII, I9I-I92, émet une opinion semblable.
 
cciv. Il n'existait aucune confiance entre le maréchal Bazaine et le général Jarras; ce dernier ne fut jamais tenu au courant des projets du maréchal. Voir JARRAS, loc. cit., I9I-202.
 
ccv. Cette réunion fut tenue le 3I à I heure de l'après-midi; les commandants de corps d'armée étaient réunis; les commandants en chef de l'artillerie et du génie n'étaient pas présents. Bazaine donna ses instructions, et fit connaître à ses lieutenants qu'il avait reçu, le 29 et 30, deux dépêches, lui annonçant la marche de Mac-Mahon, pour nous donner la main. Voir JARRAS, loc. cit., I78-I79. 
 
ccvi. " Il semble que, pour certaines de nos troupes du moins, la retraite ait été le résultat de la la lassitude générale plutôt que de la volonté de leurs chefs. " — " De fait personne, paraît-il, n'ordonna la retraite; elle eut lieu parce que les troupes comprirent qu'on ne faisait ou qu'on ne voulait rien faire de bon et qu'on ne s'occupait pas d'elles. Elles e retirèrent tranquillement comme d'un commun accord. " LEHAUTCOURT, loc. cit., VII, I93.
 
ccvii. Le colonel Boyer, aide-de-camp du maréchal Bazaine, aurait dit le jour de la sortie : " Oui, le maréchal va essayer de passer; mais il pense bien que cela ne réussira pas... " Le même propos aurait été tenu par un autre officier de son entourage... Colonel d' ANDLAU, loc. cit., I57.

 COMMANDANT FARINET, L'Agonie d'une Armée, Metz-I870, Journal de guerre d'un porte-étendard de l'Armée du Rhin, ancienne librairie Furne, Boivin & Cie, Éditeurs, I9I4, p. 222-233.
 
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