"L'hypocrisie est un vice à la mode, et tous les vices à la mode passent pour vertus."
Molière, 1622-1673
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Un climat de faux jetons
Photo by Jarosław Kwoczała on Unsplash - https://unsplash.com/photos/ynwGXMkpYcY — Jarosław Kwoczała ,
Des États-Unis à la Chine en passant par la Norvège, les décisions hypocrites en ce qui concerne le climat pleuvent de toute part.
La presse économique a récemment rapporté la décision du fonds d’investissement privé Storebrand, qui gère 83 milliards d’euros d’actifs, de se désengager de 5 sociétés pour cause de non respect de l’accord de Paris sur le climat.
La Norvège
Storebrand reproche aux groupes pétroliers américains ExxonMobil et Chevron, au chimiste allemand BASF, au géant minier anglo-australien Rio Tinto et au producteur américain d’électricité Southern Company d’œuvrer contre l’Accord de Paris qui vise à limiter à 2°C, voire à 1,5°C, le réchauffement climatique. L’assureur s’est désengagé entre autres de BASF et Exxon Mobile.
Il se trouve que Storebrand est un fond… norvégien ! Son homologue étatique, le fonds souverain du pays, le « Governement Pension Fund-Global » (ex-Petroleum Fund !) bannit lui aussi à tour de bras : l’exclusion du suisse Glencore et du britannique anglo-américain mais aussi des producteurs d’électricité allemand RWE, australien AGL Energy et sud-africain Sasol est motivée par leur présence importante dans le charbon, dont la Norvège a été longtemps un exportateur.
Ils peuvent se le permettre. Les cinq millions de Norvégiens sont à la tête d’un bas de laine de 1000 milliards d’euros… gagnés en exportant du gaz, du pétrole et même du charbon. Si un débat a eu lieu ces dernières années dans la population pour savoir si c’était bien éthique de continuer, la décision a quand même été « Drill, baby drill » comme disent les Texans. Et l’exploration a repris. Le pays lorgne les gisements les plus au Nord, là où il y a des zones à l’écosystème un peu fragile ; mais bon, ils prendront des précautions. La production vise d’atteindre à nouveau les pics des années 2000.
La Norvège est le troisième exportateur mondial de gaz, après les USA et la Russie. Mais selon les autorités, ils ont un gaz plus propre que les autres. Dont acte.
Et c’est d’autant plus juteux de flatter la Vertitude pour la Norvège qu’elle possède aussi des possibilités importantes d’électricité d’origine hydraulique, et ainsi profite de la bêtise du Danemark et de l’Allemagne : elle achète à prix négatifs les jours de tempête, et revend très cher les nuits d’hiver sans vent. C’est tellement juteux qu’un câble sous marin d’interconnexion est prévu avec l’Angleterre. Bref, la Norvège gagne sur tous les tableaux.
Les Norvégiens ont beau être luthériens en majorité, le jésuitisme leur va très bien : vertueux, mais en bon Nordiques, pragmatiques avant tout.
Et les autres pays
On ne peut guère partir en guerre contre l’hypocrisie norvégienne : quasiment tout le monde fait la même chose. Prenons les trois premières économies mondiales :
L’Allemagne entraîne toute l’Europe dans une course folle aux ENR… mais rénove ses centrales au charbon, et négocie le gaz russe.
La Chine a signé le protocole de Paris, qui n’exige rien d’elle avant 2035… Elle construit des centrales à charbon à tour de bras.
Obama, lorsqu’il signait l’accord, permettait en même temps la plus formidable révolution énergétique depuis un siècle avec le gaz de schiste… En Californie, c’est le gaz et le charbon des centrales des États voisins qui sauvent un peu la sécurité d’alimentation électrique.
L’ex-président des Maldives se posait en victime de la montée du niveau des mers, tout en équipant ses îles d’aéroports pour accueillir les touristes…
Et les people…
C’est sans doute chez les people qu’on trouve les excès les plus indécents : de leurs piscines du Lubéron, ou du cap Ferret, nos vedettes de cinéma hurlent à la Vertitude, entre deux allers-retours parisiens en hélicoptère. Tel ancien ministre de l’Environnement fait du hors-bord ultra puissant en Bretagne, après avoir dévasté des zones entières de paysage avec son équipe de tournage télévisuelle héliportée lorsqu’il était un homme de spectacle…
Aux États-Unis c’est pire encore : le maître en la matière est évidemment Al Gore, avec ses manoirs, son penthouse sur les docks de San Francisco, lui qui alerte sur la montée des eaux… Mais Di Caprio n’est pas mal non plus, lui qui n’hésite pas à faire l’aller-retour Cannes New York pendant le festival pour aller recevoir un prix du meilleur ambassadeur de l’environnement… Récemment, Harrison Ford, fervent thuriféraire de Greta Thunberg, a fait juste un aller-retour dans son jet privé pour chercher son fils à l’école… Et Greta Thunberg va à New York en bateau à voile, mais change de skippers entre l’aller et le retour… et eux voyagent en jet…
La France imperturbable
La France, dans sa logique cartésienne excluant l’ambivalence, seule au milieu de tout cela, reste droite dans ses bottes : le nucléaire c’est mal, on l’arrête. Le pétrole c’est mal, on interdit les forages en Guyane. Les métaux c’est mal, on interdit les mines. Le plastique c’est mal, on vend notre industrie chimique.
Mais nous serons fiers de laisser un pays si vertueux à nos petits-enfants.
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