HAUTE-MARNE, CHAMARANDES-CHOIGNES : APRÈS LE PROJET D'USINE ÉOLIENNE, D'USINE SOLAIRE, VOICI LE PROJET D'USINE À GAZ

 
  "  La commune de Chamarandes-Choignes est constituée de deux villages, situés sur les bords de la Marne. Les villages bénéficient d’une situation agréable, à deux pas de la ville mais dans un environnement privilégié, organisé autour de la rivière et du canal entre Champagne et Bourgogne. Les bois de la rive droite constituent un lieu de promenade privilégié pour les marcheurs et les vététistes, ainsi qu’un territoire de chasse réputé. Il n’est pas rare d’y croiser des chevreuils, biches ou autres cervidés. "
Source
 
 Cette présentation de la commune a de quoi réjouir les résidents actuels et attirer de nouveaux arrivants. La question est de savoir si cela sera toujours le cas, lorsque les nouveaux découvriront la ville vivant sous l'usine éolienne et, aux côtés des usines à gaz et photovoltaïque ?
  Surtout que pour eux, les surprises ne s'arrêteront pas là ! Ils apprendront également que les deux usines, éolienne et à gaz, sont les DEUX PLUS GROSSES USINES D'ÉNERGIES DITES VERTES ET DURABLES du département ! Avec des éoliennes de 200m en bout de pale [i] et un méthaniseur à la capacité XXXXL, " La capacité de traitement sera ainsi de 355 tonnes/jour en moyenne. (...) La production de digestat par le projet est estimée à II8 I7I tonnes/an "[ii], elles explosent les " records " précédents, chacune dans son domaine
   Pas sûr toutefois que ces " records " fassent vraiment rêver quiconque, mise à part Madame le maire et son conseil municipal[iii], au soutien indéfectible, les I3 exploitants agricoles investis et la filière de Shell ! 
 
Un projet pharaonique au coût exorbitant
  Ce projet, qualifié de " record " par certains, en détient un autre, moins glorieux : celui de son prix exorbitant, avoisinant les 80 millions d'euros.
  D'après l'excellent article du jhmQuotidien, ci-devant, la répartition du capital est la suivante : 5I% détenus par les I3 exploitants agricoles et 49% par NECC. Cela signifie que les I3 exploitants auraient investi environ 4 millions d'euros, soit près de 3 millions d'euros par personne.
  Un investissement colossal qui soulève des questions :
  • Comment ces exploitants agricoles ont-ils pu mobiliser des sommes aussi importantes ? 
  • Sont-ils endettés à long terme ? 
  Ces questions légitimes méritent d'être éclaircies, car un tel investissement, dans un contexte économique difficile, ne peut manquer de susciter des interrogations.

Missions régionales d'autorité environnementale, MRAe, Grand Est : avis
 " Il sera épandu sur un parcellaire représentant une surface épandable de I2 423 ha répartie sur I45 communes. "
  " Les parcelles, d’épandage et de l’exploitation sont classées en zone vulnérable aux nitrates par
l’arrêté du 4 août 202I7 du préfet de la région Île-de-France, préfet coordonnateur de bassin Seine
Normandie.
"
  " L’évaluation des risques sanitaires permet de conclure à l’absence de risques inacceptables pour
la santé du voisinage. Les mesures de mitigation présentées sont de nature à minimiser les
impacts du projet sur l’environnement.
"
  " L’ Ae s’est toutefois interrogée sur :
  • le bilan énergétique de ce processus;
  • le risque d’introduction de déchets non conformes dans le méthaniseur avec ses conséquences sur la qualité des digestats qui ont vocation à être épandus et donc sur l’impact sur les sols agricoles;
  •  l’utilisation de productions agricoles spécifiques, CIVE, et leur impact environnemental, l’épandage en zone Natura 20008, en ZNIEFF et dans le Parc National de Forêts; l’impact global en nitrates sur les eaux souterraines et superficielles via les apports de digestats. "
  " L’étude de dangers est proportionnée aux risques présentés par les installations projetées. "
  " Enfin, l’ Ae considère qu’il est indispensable non seulement de démontrer la conformité du projet aux plans d’actions national et régional pour la limitation des nitrates, mais aussi de proposer des mesures garantissant l’amélioration de l’état des eaux souterraines, par diminution progressive des apports globaux des nitrates et en proposant si nécessaire des apports distincts et argumentés suivant les types de parcelles. "
 
 En conclusion, une fois de plus, depuis le vaste remembrement des années 50-70, Dame Nature et les populations rurales ont été témoins de la défiguration et de la destruction de leur environnement, tout cela au seul bénéfice d'une minorité d'exploitants agricoles, de propriétaires fonciers, d'opportunistes se présentant comme des défenseurs de l'environnement, et... de notables politiques locaux. Le tout rentabilisé inlassablement et uniquement grâce aux subventions provenant des fonds publics ![iii]
 
 En attendant, Chamarandaises, Chamarandais, Choignardes, Choignards, si l'envie vous en prenait :
   " L'indignation est un commencement. Une manière de se lever et de se mettre en route. On s'indigne, on s'insurge, et puis on voit. "
BENSAÏD Daniel

 
[i]. Le triste record est détenu actuellement par les éoliennes de l'usine dit " Vannier amance ", Fayl-Billot, Pierremont et Pressigny : I83m en bout de pale.

[ii]. Pour comparaison, l'usine à gaz sur Langres  : " Les digesteurs “ mangent ” 35 tonnes de matières chaque jour ", soit " que "... I2 775 tonnes/an ! Fin 2022, dans la région Grand Est, il y avait en activité : 278 méthaniseurs, I87 cogénérations - 9I injections et 39 nouvelles installations, dont 2I injections. 


Répartition par départements.


Distance moyenne pour l'épandage. 
  Source.

[iii].  " Le réchauffement climatique est aujourd’hui une évidence et même si l’évolution de nos modes de consommation est nécessaire, le besoin d’électricité est toujours présent. Les objectifs nationaux sont clairs sur la nécessité de remplacer les énergies fossiles, émettrices de CO2, par des énergies renouvelables ; et à notre niveau, le Conseil Municipal a décidé d’apporter sa pierre à la transition écologique.
   Par ailleurs, les ressources financières de nos communes diminuent et l’état sanitaire de nos forêts se dégrade. Cette proposition de projet éolien est une opportunité de bénéficier de retombées financières régulières sur long terme ; que nous pourrions notamment investir pour pérenniser notre patrimoine forestier. Nous avons donc choisi de travailler avec une société française et indépendante, Opale Energies Naturelles, pour développer ce projet éolien en forêt des « Grands Bois » sur la route de Chaumont à Laville-aux-Bois.
   De plus, par sa dimension participative, ce projet nous permet d’associer la commune dès le développement du projet et sans risque financier. Si le projet est autorisé, notre commune, et plus largement les acteurs du territoire, dont des citoyens, pourraient détenir 20% du parc éolien. Cette opportunité nous permet de rester dans la gouvernance du parc, tout en bénéficiant des retombées financières liées à la vente d’électricité produite. Un comité de pilotage a été mis en place et nous permet de suivre le déroulement des études et de travailler avec Opale sur les mécanismes financiers participatifs. Le conseil municipal valide par délibération chaque étape du projet.
   Comme nous l’avons fait depuis les premières réflexions, nous informerons régulièrement les habitants de Chamarandes-Choignes de l’avancement du projet. D’autres phases de concertation sont d’ores-et-déjà prévues : vous aurez ainsi l’occasion de vous exprimer et de nous poser toutes vos questions. »
Bernadette RETOURNARD, mairesse de Chamarandes-Choignes "

[iv]. Pour rappel : "  Les dépenses publiques en faveur de l’agriculture, hors industries agro-alimentaires, prennent la forme de :
  • « concours publics à l’agriculture », au sens de la commission des comptes de l’agriculture, qui sont attribués par l’Union européenne ou par l’État et les régions sous forme d’aides et subventions ou d’allégements de charges fiscales et sociales ;
  • dépenses de fonctionnement des services publics affectés à l’agriculture, y compris les services d’enseignement et de recherche ;
  • contributions de l’État et des autres régimes de sécurité sociale[I] au financement des régimes de protection sociale des exploitants et salariés agricoles.
  Le total de ces dépenses, qui correspond au coût pour les contribuables nationaux ou communautaires, s’élève à I9,7 Md€ en 2022, soit 47 % de la valeur ajoutée brute de la branche agriculture : 4I,6 Md€. Il est de 25,9 Md€, soit 62 % de cette valeur ajoutée agricole, si on ajoute le coût du financement de la protection sociale des agriculteurs, dont l’estimation est toutefois difficile et donnée à titre indicatif. "

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***
 

Énergies. Bien qu’instruit discrètement, le dossier d’un super-méthaniseur sur la route de Biesles avance à grands pas. L’enquête publique, ultime phase avant les travaux, commence le 11 mars. 

 

   Avec son potentiel de I30 000 tonnes de végétaux à avaler chaque année, le futur méthaniseur de Chamarandes-Choignes est un monstre : presque un nain face aux 220 000 tonnes de Mourenx, Pyrénées-Atlantiques, mais colossal devant les 20 000 petites tonnes de la zone Plein’ Est à Chaumont.
   Le dossier a été déposé par la société Nature-Energy-Chamarandes-Choignes, NECC, composée d’un groupement de treize agriculteurs locaux détenant 5I% du capital, et de Nature Energy pour 49%. Cette dernière est une filiale de Shell, et la présence financière massive d’un pétrolier dans l’opération fait grincer quelques mâchoires. Dont celle de Jean-Jacques Bailly, militant de la Confédération paysanne et qui se veut lanceur d’alerte : « La méthanisation est un procédé qui produit presque autant de déchets, les digestats, qu’il ne consomme de matières premières. Pour l’épandage de ces déchets servant d’engrais, ce sont I42 communes qui sont concernées. » 
 
Gros chiffres
  Le projet cumule les chiffres étourdissants : occupant 11 hectares, l’usine n’avalera que 23% de déchets agricoles diverses mais tout le reste en cultures produites intentionnellement. Les résidus représenteront II0 000 tonnes de fertilisants plus ou moins azotés qu’il est recommandé d’enfouir après épandage. Ces zones se répartissent sur plus de 11 000 hectares dans I40 communes en Haute-Marne mais aussi dans l’Aube et jusque dans les Vosges. De taille comparable, le méthaniseur près de Châtillon-sur-Seine, Côte-d’Or, avait provoqué une vague de protestations, mais est désormais opérationnel.
 
Transparence
  Beaucoup d’interrogations naissent autour du projet de près de 80 millions d’euros, dont certaines ont trait à son impact environnemental : combien de camions pour transporter les I30 000 tonnes de végétaux vers les cuves ? Et dans le sens inverse pour l’épandage ?
  Le peu de transparence autour du projet jusque-là, sans le rendre vraiment suspect, interroge. L’enquête publique qui démarre le 11 mars devrait lever les zones d’ombre. Sur le site envisagé pour le méthaniseur géant, route de Biesles, soit on a été mauvais communicant, soit on continue dans le flou : le panneau annonçant l’enquête publique est presque invisible et complètement impossible à lire depuis la route. 
 
  Une réunion d’information à l’initiative de NECC se tiendra le I2 mars à I8 h 30 à Choignes.
 




 
Méthanisation, mode d’emploi
  Les méthaniseurs étaient initialement de petites unités destinées à valoriser les déchets des exploitations agricoles sur place. Désormais, les grosses usines visent des rentabilités massives : les intrants, la somme de la biomasse mobilisée, sont de plus en plus colossaux. Le procédé reste rentable grâce à un prix avantageux de rachat du gaz pour le réseau de distribution national. Devenue une industrie, la méthanisation intéresse les agriculteurs gros producteurs de biomasse et les distributeurs d’énergie, au premier rang desquels Total ou comme à Choignes, Shell.
  La réglementation a évolué en 2023, avec des subventions attractives et assouplissant leurs conditions d’accès. Depuis 2022, tout est bon pour suppléer le gaz russe.
  L’usine de Chamarandes-Choignes sera alimentée très majoritairement de CIVE, cultures intermédiaires à vocation énergétiques, autrement dit des céréales produites exprès pour le méthaniseur, et certains s’émeuvent de la cohérence environnementale de ce fonctionnement.
 
Procédure méticuleuse
  Du reste, en effet, les communes en question sont listées dans l’avis d’enquête publique, et leurs habitants invités à s’exprimer. La procédure qui doit amener à la création de cette usine à gaz est extrêmement balisée. NECC a décidé d’entrer dans la danse administrative en sollicitant d’abord une Autorisation environnementale, AE, en juillet dernier. Le dossier comporte une étude d’impact. Sur ces pièces, l’autorité environnementale a rendu son avis le I7 août, NECC a corrigé son dossier en décembre tandis que l’Inspection des installations classées pour la protection de l’environnement donnait son feu vert en octobre. Les commissaires enquêteurs ont été désignés en novembre : nous voici à l’enquête publique, ouverte pour un petit mois, jusqu’au 11 avril.
  À l’issue du rapport du commissaire enquêteur portant aussi sur le permis de construire, l’autorisation environnementale sollicitée initialement sera délivrée. Elle est indispensable pour entamer les travaux.
 

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