La médiatrice européenne remet en cause la transparence des groupes d'experts

EurActiv.com
traduit par Manon Flausch
03 février 2016


Commentaire: «L'homme est maintenant le jouet des savants, des ingénieurs et des planificateurs»

Ivan Illich (1926-2002); Une société sans école, trad. Gérard Durand, p. 181, Éd. du Seuil, coll. Points n° 117


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Emily O'Reilly [European Parliament/Flickr]


La Commission européenne devrait publier les PV des quelques 830 groupes d'experts qui influencent son travail, selon le Médiateur européen.

Emily O'Reilly, qui occupe le poste de médiatrice européenne, lance des enquêtes sur la mauvaise gestion institutionnelle, suite à des plaintes ou de sa propre initiative. Elle se concentre notamment le système des groupes d'experts, dont le manque de transparence et le parti-pris pour l'industrie ont été vivement critiqués lors de la consultation publique réalisée en mai dernier.

Les 830 groupes sont composés de quelque 25 000 experts, représentants les États, l'industrie et la société civile. Les avis de ces groupes de conseil façonnent les propositions législatives de la Commission. Outre les avis des groupes d'experts, la Commission utilise des consultations publiques, des études et des audits pour élaborer ses décisions politiques.

L'exécutif a déjà assuré à la Médiatrice qu'elle réviserait le règlement relatif aux experts, afin de modifier les règles sur le conflit d'intérêts et d'ouvrir davantage la procédure de sélection. Les organisations qui siègent dans ces groupes doivent à présent aussi se conformer au registre de transparence européen.

Si elle reconnait que l'exécutif a fait des progrès, la Médiatrice a publié une nouvelle série de recommandations le 2 février:
  • Les délibérations des groupes ne devraient être tenues secrètes que si cette mesure est « objectivement justifiée » ;
  • Les procès-verbaux des réunions devraient exposer clairement les opinions des membres et être publiés rapidement ;
  • Les programmes et documents devraient être publiés avant les réunions et le travail des groupes et sous-groupes systématiquement publié ;
  • Les experts devraient faire des déclarations d'intérêts annuelles ;
  • La Commission devrait définir la notion d'« équilibre » dans la composition des groupes.

La Commission doit répondre aux recommandations de la Médiatrice d'ici le 30 avril. Le Médiateur européen n'a pas le pouvoir d'obliger la Commission à suivre ses recommandations, mais pourrait conclure son enquête par un rapport accablant gênant pour l'exécutif.

« Il y a eu beaucoup de progrès depuis le début de l'enquête, mais les citoyens ont le droit de savoir comment l'avis des experts influence les prises de décisions européennes », a indiqué Emily O'Reilly. « La publication de ce genre d'information permettra aux groupes d'experts d'être perçus comme plus légitimes. »

« À maints égards, la position du Médiateur est à présent très proche de celle de la Commission », précisent les recommandations.

Contrairement aux comités qui définissent comment mettre le droit européen en pratique, les groupes d'experts ne sont pas prévus par les traités européens.

En avril dernier, les défenseurs de l'environnement et l'industrie du gaz de schiste se sont affrontés suite à des accusations selon lesquelles les entreprises contrôlaient un groupe de conseil très influent sur la fracturation hydraulique.

>> Lire : Le lobby du gaz de schiste noyaute un groupe d’experts de la Commission

Le même mois, Greenpeace Europe a estimé que l'industrie des énergies fossiles avait noyauté un groupe de travail technique présidé par le Bureau européen de prévention et de réduction intégrées de la pollution, qui influence les décisions sur la pollution de l'air.



CONTEXTE

La Commission européenne dispose de centaines de groupes de conseil qui participent à l'élaboration des lois et politiques européennes. La composition de ces groupes a déjà été critiquée. Le Médiateur européen, qui enquête sur les cas de mauvaise administration au sein des institutions, s'est d'ailleurs penché sur la question.

Emily O'Reilly, la Médiatrice actuelle, a présenté à la Commission une série de propositions visant à rendre ces groupes plus équilibrés et plus transparents.

Elle a exhorté l'exécutif européen à établir un cadre législatif contraignant pour tous les groupes d'experts, qui précise notamment l'équilibre de représentation dans les différents groupes.

La Commission devrait aussi, selon elle, prendre des mesures afin de limiter les éventuels conflits d'intérêts et publier plus d'informations sur le travail des groupes de conseil.

PROCHAINES ÉTAPES

30 avril 2016: Délai de réponse de la Commission à l'enquête du Médiateur.

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