Nucléaire, coûts de production : le match Etats-Unis d'Amérique vs France

Karl Novatore

Remarque
   Les montants américains étant en dollars et les français en euros et, comme le taux de change est relativement stable depuis deux ans, je vous propose de prendre un facteur 1,10 pour la conversion.

  Pour avoir une comparaison recevable des coûts, le loyer économique du coût français n' a pas été pris en compte. 

Résultats
- France : 42€/MWh , Cour des comptes 2014 ; et cela ne s'est pas arrangé depuis,





- Etats-Unis : 30,5 $/MWh soit 28 €/MWh ( Nuclear Energy Institute (NEI ) 2020), avec une production 807 TWh en 2018.




    Ainsi, il apparait une différence notable de 33%, un tiers, sur le coût total, et ce n'est pas anodin.


  Notons que les catégories ne recouvrent pas exactement les mêmes choses, aussi, allons voir dans les sous-catégories.

Les dépenses d'exploitation 

- Coût du combustible (fuel)
En premier lieu, et c'est logique vu que c'est un marché global, constatons que le coût du combustible est quasiment le même à l'arrondi près : 6€/MWh côté français, 6$/MWh côté Etats-Unis.



   


 Hors combustible, le coût de celles ci se monte à 18€/MWh pour la France. Ci-dessous, les dépenses d'exploitation américaines. Les sous-catégories ne se recoupent pas forcément et la gestion du combustible est prise en compte.

 


Les dépenses de capital

- France




- Etats-Unis

  Là encore pas le même découpage.




Les fonds de démantèlement
 

  Ils sont pris en compte des deux côtés de l' Atlantique. Cela donne, hors combustible :
- 36€/MWh en France, 
- 26$/MWh soit 24€/MWh aux Etats-Unis.
Une remarque : la gestion du combustible usé ne coûte quasiment rien aux USA, contrairement aux 4€/MWh en France, liés au retraitement.

  Il reste tout de même 8€/MWh de différence. Ceci s'explique principalement par la production anémique du parc français. En effet, ce dernier a un facteur de charge de 68,5% en 2019 quand son équivalent américain tourne à 93,5%. Ainsi les coûts étatsuniens, hors combustible, et retraitement, seraient 25% plus faible car la production serait 25% plus élevé par MWe installé. Rien de plus logique puisque, hors combustible et retraitement, le coût du nucléaire est presque, exclusivement, constitué que de charges fixes.
  L'honneur est-il sauvé ? Pas si vite. Si le facteur de charge du nucléaire français est si bas, ce n'est pas parce que l'on n'utilise pas la capacité disponible ; le facteur de disponibilité est en effet de 71%, guère plus que le facteur de charge. Non, en réalité, le parc français est... sous-performant!

- les cycles de production sont de 12 ou 18 mois au lieu de 18 ou 24 mois. 
- la capacité des réacteurs n'est jamais augmentée à posteriori. Contrairement à la plupart des réacteurs dans le monde. Aux Etats-Unis, c'est 8 GWe d' augmentation.
- Les temps de rechargement et maintenance sont de 80 à 100 jours en moyenne en France contre 25 à 30 jours aux États-Unis. 

- Au delà même des différences volontaires de gestion, la perte de capacité non planifiée est de 12% en France contre 1% aux États-Unis.

  Les performances économiques sont donc catastrophiques en France. La disponibilité est la plus basse de l'OCDE, hors Japon, après la Belgique et la Corée. 

  Mais peut être est-ce la conséquence de performances de sûreté améliorées ? Apparemment... non.
  Vu qu'il n'y a quasiment jamais d'incident grave ou d'accident nucléaires, le meilleur estimateur disponible est de comptabiliser les incidents peu graves, classés niveau 1 ou 2 sur l'échelle INES. Si en France, l' ASN les enregistre tous ainsi, aux Etats-Unis, la
Nuclear Regulatory Commission (NRC) préfère son propre système.
  Elle publie la totalité des Licensee Event Reports (LER), qui couvrent les évènements INES 1 et 2 mais aussi quelques 0, événements significatifs mais pas d'incident. Le nombre de LER est donc supérieur au nombre d' INES 1 et 2.
Voici les tendances sur les dernières années



 

  Aujourd'hui, on voit bien que le parc étatsunien, selon cet indicateur qui est un des rares quantitatifs, est aussi fiable dans son fonctionnement que le parc français.
  La baisse des LER et des coûts aux Etats-Unis vous impressionnent-ils? Si tel est le cas, sachez qu'ils sont dûs à la dérégulation et à la compétition.
  En effet, pour rester résister
face à la concurrence du gaz et des EnRI subventionnées, les exploitants américains ont du faire preuve de dynamisme. Et ce, malgré d'autres désavantages par rapport à EDF concernant le coût du travail et le fait qu'ils n'exploitent, pour la plupart d'entre eux, qu'une ou deux centrales.
  Pour les LER, la NRC a entrepris un changement d'approche basée sur plus de latitude pour les exploitants accompagné d'un contrôle renforcé des éléments critiques à la sûreté et des incitations et des protections adaptées pour les lanceurs d'alerte.
   L'exploitation française (EDF) doit regagner en compétitivité et réaliser des audits et des comparaisons internationales. Elle n'est clairement pas sur une bonne dynamique. L' ASN se doit de réévaluer sa philosophie et ses méthodes qui dégradent la sûreté. 


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