La haine des autres pour l'énergie nucléaire

"Si les apparences
Sont quelquefois contre moi
Je ne suis pas ce que l'on croit
...
Je suis le mal aimé
"

Extrait, Claude François, Le mal aimé,  auteurs : Eddy Marnay, Terry Dempsey

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Rejeter le nucléaire pour de mauvaises raisons n’est pas raisonnable

Tribune
Alexis Quentin
  Alexis Quentin, délégué Syndical élu CSE et CSSCT siège Alliance CFE UNSA Énergies, revient sur deux contre-vérités souvent affirmées sur le nucléaire : le manque de démocratie et le manque de transparence.

  Le nucléaire est-il transparent et démocratique ? Si vous posez cette question dans la rue, on vous rira probablement au nez en vous répondant que le nucléaire est peut-être transparent, encore que, démocratique certainement pas. Une défiance étonnante, alors que l’information disponible à propos de l’industrie nucléaire est extrêmement riche, et que les conditions de développement de cette énergie impliquent, depuis ses origines, les Français via les institutions de la Ve République.
Le nucléaire, transparent ? Vous rigolez…

 

Only France via AFP

  Et pourtant… Contrairement à ce que certains affirment, le nucléaire est bel et bien un domaine sujet à la plus grande transparence. Votée en 2006, la loi Transparence et Sûreté Nucléaire précise que « toute personne a le droit d'être informée sur les risques liés aux activités nucléaires et leur impact sur la santé et la sécurité des personnes, ainsi que sur l'environnement et sur les rejets d'effluents des installations ». C’est ainsi qu’est créé notamment le Haut Comité pour la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire (HCTISN). Toutes les parties intéressées sont représentées dans cette instance de débat et d’information : parlementaires, élus locaux, associations de défense de l’environnement, syndicats, et les Commissions Locales d’Information. Toutes les délibérations du HCTISN sont publiques, et accessibles gratuitement. Pour l’anecdote, lorsque j’habitais dans le Cotentin, je recevais régulièrement dans ma boîte aux lettres des lettres d’information de l’usine de la Hague, exploitée alors par la COGEMA, qui informaient les riverains des impacts environnementaux de l’usine. Et c’était bien avant la loi TSN. Quelle autre industrie en fait autant ?

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  En outre, l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), dont l’indépendance est totale [vis-à-vis du politique], publie régulièrement des rapports. Toutes les inspections donnent lieu à des comptes rendus publics, et les lettres de suite à toutes les inspections réalisées dans les installations nucléaires. Le moindre incident - un capteur surveillant un paramètre important pour la sûreté qui tombe en panne par exemple - est déclaré et connu de toutes et tous. La Commission Locale d’Information, donc notamment les élus des communes environnantes, est informée. Quelle autre industrie peut en dire autant ?
  Bien loin de l’image d’opacité véhiculée par certains, la disponibilité des informations du secteur nucléaire devrait servir de modèle à certains autres secteurs plutôt que d’être décriée.

Démocratique le nucléaire ? Et puis quoi encore…
  Dernièrement, la ministre de la Transition Écologique, Barbara Pompili, a laissé entendre que les choix en matière de politique énergétique, et donc les choix sur le nucléaire, n’avaient pas toujours été faits de manière démocratique. Une déclaration contestable. S’il serait trop long de refaire l’historique complet de la chose, quelques dates méritent d’être rappelées.
  En 1981, quelques mois après l’élection de François Mitterrand, a eu lieu à l’Assemblée Nationale un débat, dont la lecture du compte-rendu est passionnante. Durant deux jours, il n’a été question que de politique énergétique, et principalement de la politique nucléaire qui serait mise en place durant ce septennat. Ce débat s’est terminé par un vote, à 4h du matin, avec plusieurs centaines de députés encore présents.

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  Dix ans plus tard était votée la loi Bataille sur la gestion des déchets nucléaire, aussi un modèle démocratique. Après cette loi ont eu lieu 20 ans de travaux scientifiques, d’auditions devant une commission nationale d’évaluation et devant l’ OPECST, l’Office Parlementaire d’Évaluation des Choix Scientifiques et Techniques, plusieurs débats publics, avant la publication d’un texte en 2015, concernant CIGEO, le projet français de centre de stockage profond de déchets radioactifs, qui est l’aboutissement de tout ce processus. Quelle autre industrie peut se targuer d’avoir eu autant d’instances démocratiques impliquées dans les processus de décision ?
  Pourtant, le caractère démocratique de l’énergie nucléaire est trop souvent oublié ou nié par nos responsables politiques d’aujourd’hui, parfois par manque d’information, souvent par idéologie et opportunisme politique.

Pourquoi tant de haine ?

  Lorsqu’il est question du nucléaire, deux points reviennent systématiquement chez ses opposants : l’accident de Tchernobyl, et le nucléaire militaire. Le premier point entend dénoncer un manque de transparence, à cause notamment du supposé mensonge d’État sur le nuage radioactif venant de Tchernobyl qui se serait miraculeusement arrêté à la frontière française. Pourtant, on sait aujourd’hui qu’il n’y a pas eu de mensonge d’État : les hausses de radioactivité ont été rapidement identifiées et n’ont jamais été niées. La désinformation sur ce sujet a été encouragée par des militants antinucléaires qui n’ont pas hésité à falsifier les faits pour arriver à leurs fins. Cette croyance est tellement ancrée dans l’imaginaire que rétablir la vérité demande un travail digne de Sisyphe.
  Quant au lien avec le domaine militaire, censé illustrer la dimension non-démocratique du nucléaire, il est aujourd’hui inexistant, dans le sens où le nucléaire civil ne sert pas à développer des armes nucléaires. Et c’est un fait, vérifiable, depuis des dizaines d’années par quiconque se donne la peine de chercher.

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  En somme, le nucléaire aujourd’hui est bien l’une des industries les plus transparentes en France, et son développement a été scruté, accompagné et validé par les représentants élus démocratiquement.
  Que peut-on attendre d’autre ? Peut-être que la filière n’ait plus honte d’être ce qu’elle est, qu’elle communique, prenne son bâton de pèlerin pour aller à la rencontre de la population, et défende cette transparence et ce caractère démocratique. On peut aussi attendre des différentes autorités, qui ont notamment pour mission de communiquer, qu’elles le fassent, qu’elles corrigent celles et ceux qui profèrent des contre-vérités. On peut enfin attendre de la classe politique qu’elle dise la vérité et rien que la vérité sur cette énergie et les conditions de son développement, plutôt que de sous-entendre que les décisions qui l’ont portée peuvent s’apparenter à des dénis de démocratie.
  Comme toutes les industries, celle du nucléaire n’est pas parfaite, mais elle a de nombreux atouts à faire valoir dans la transition énergétique qui s’impose. La rejeter pour de mauvaises raisons n’est pas raisonnable.

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