Emprunts toxiques: Le tsunami qui vient

L'éternel recommencement


31 JANVIER 2015 | PAR ERIC PESCHOT



Aujourd'hui, avec l'envolée du franc suisse les taux des emprunts toxiques explosent. L'inaction et la frilosité des élus locaux et nationaux risquent demain de remplir les poches de quelqu'uns et de nous coûter cher collectivement. Pourtant depuis des années certaines associations et certains élus ne cessent d’alerter à propos de ces emprunts, de Dexia, de la dette des collectivités locales et territoriales. Elles n'ont eu de cesse que d'exhorter tous les élus à informer les citoyens, à s’engager au sein des associations de victimes de ces emprunts, pour peser sur les décisions et les choix à venir.


La plupart ont préféré ne pas le faire. Ils ont déserté le terrain de l’action se contentant au mieux pour certains d’aller en justice. Ils ont mis tous leurs espoirs dans une annulation des taux par le juge, plutôt que dans l’initiative citoyenne et collective pour obtenir réparation. Ils ont préféré cette solution parce qu'elle leur permettait de s'exhonérer du débat démocratique, d'éviter les questions par trop embarrassantes tout en donnant l'impression d'agir.


La plupart des équipes municipales qui se sont faites élire début avril 2014, l'ont été sur la promesse fallacieuse de la stabilité de la pression fiscale et même pour certains d'une baisse des impôts. La plupart d'entre celles qui étaient touchées par cette peste financière ont tablé sur une action en justice que pourtant elles auraient dû savoir de plus en plus fragile. Pour répondre aux énormes difficultés présentes et à venir elle n'ont envisagé pour la plupart d'entre elles que d'empiler des mesures d’économies bricolées et disparates tentant désespérément de faire passer sous le tapis le débat citoyen nécessaire.


Le résultat ne s’est pas fait attendre. Les communes et leurs élus n'ayant pas pesé de tout leur poids, n'ayant pas informé les citoyens, le gouvernement en a profité pour faire voter une loi au mois de juillet dernier qui a annulé rétroactivement les plus prometteuses possibilités juridiques d’annulation de ces prêts. En contrepartie de quoi il a concédé la mise en place d'un fonds de soutien pour les communes qui renégocieraient ces emprunts et accepteraient de payer des pénalités. Mais dès sa création, ce fonds de solidarité, en partie alimenté par les banques, ne répondait absolument pas à la gravité de la situation.


Depuis le jeudi 15 janvier 2015 c'est encore pire : la renégociation n’est même plus économiquement viable. En effet c’est ce jour-là que la Banque Nationale Suisse (BNS) a décidé d’abandonner sa politique consistant à maintenir la parité Franc suisse €uros à 1.20 franc suisse pour 1 €uro. À peine cette décision prise, le Franc suisse s’est envolé. Il côte désormais à parité avec l’euro, soit une réévaluation d’environ 15 %. Pour les communes, les collectivités territoriales, leurs habitants, l'ensemble des citoyens de ce pays cette information est annonciatrice d’une véritable catastrophe.


En effet, les taux des emprunts toxiques que les communes, les hôpitaux, les départements et les régions ont contractés s’envolent et vont atteindre des niveaux inégalés de 25% par an pour certain. Dans ces conditions la renégociation des emprunts toxiques fondés sur le Franc suisse pourrait coûter aux citoyens des milliards d’euros de pénalités.


La solution n’est ni la résignation, ni la renégociation et le fonds de solidarité, dont le montant est définitivement et notoirement insuffisant. La seule solution consiste en une annulation législative des modes de calcul des taux d'intérêt de ces prêts. Une loi doit les déclarés illégaux au motif qu’ils sont spéculatifs et illégitimes. Les banques doivent leur substituer le taux légal, qui est aujourd'hui de 0,93%, sans compensation ni pour la banque prêteuse ni pour la banque de contrepartie.


Pour imposer cette solution de justice et d'équité, nos élus locaux et nationaux qu'ils soient confrontés ou non à ces emprunts n’ont pas d’autre choix que : 

  • de se mobiliser partout et soutenir partout celles et ceux qui se mobilisent d'engager ou poursuivre des actions en justice sur la base du manquement par la banque prêteuse à ses devoirs d’information, de conseil et de mise en garde;
  • d’adhérer aux associations qui luttent contre les emprunts toxiques ; 
  • d'informer enfin véritablement et complètement les citoyens et d'encourager leur mobilisation.


Ne nous leurrons pas même si notre commune ou notre département ou notre région n'est pas aujourd'hui contaminé, les effets délétères de ces emprunts qui toucheront les communes, les départements et les régions voisins nous rattraperons bientôt.


Des élus combatifs, garant des intérêts des citoyens, de l'intérêt général auraient engagé la bataille depuis longtemps. Manifestement il y a quelque chose de définitivement exsangue, de démocratiquement mort dans nos institutions, qui font aujourd'hui la part belle aux hommes d'appareil, aux gestionnaires à courte vue, qui envisagent les mandats d'élus comme un moyen d'accéder à une certaine notabilité, comme un moyen de promotion sociale, pire comme un métier.


Commentaire: 

« Les démocraties ne peuvent pas plus se passer d'être hypocrites que les dictatures d'être cyniques». Georges Bernanos



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