Dans son combat pour la sauvegarde de l'environnement du Sud haut marnais, Les Vues Imprenables vous informent que, malheureusement, le danger vient de toute part.
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Et Rosa de Vroncourt, l'avait déjà écrit... il y a longtemps.
Bonne lecture
En avant toute
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Feu de bois, joli feu de bois, du génie de l’homme à la folie humaine
Il y a longtemps, très longtemps, l’homme a eu le génie d’apprivoiser le feu. Il l’a sans doute d’abord laissé dehors, le craignant, avant d’oser l’installer, tard, bien plus tard, au centre des maisons faites de végétaux. Plus tard encore, il a eu le génie de l’adosser à un mur de pierres, mur qui allait accumuler un peu de la chaleur dégagée, afin d’en perdre moins.
Ce n’est que très loin dans cette histoire d’amour et de crainte que l’homme a commencé à enfermer le feu pour se chauffer. Les romains l’ont fait dans leurs plus somptueuses villas, mais le gros de la population semble s’être contenté de feux ouverts. Il faudra attendre les derniers siècles d’une très vieille histoire pour que le feu fermé se généralise pour le chauffage, même si on a tôt appris à l’utiliser pour d’autres usages: Cuisson des poteries et des tuiles, de la chaux et du plâtre, transformation des métaux, verrerie, cuisson du pain, lente combustion du charbon de bois…
On se focalise sur les pays de l’Est ou du Nord les pensant précurseurs, et n’attribuant à nos paysans qu’une inefficace cheminée ouverte. Du four on est passé au fourneau, au poêle. Le poêle, n’est ce pas le nom dans ma région aux hivers rigoureux, de la chambre qui jouxte la cuisine ! On admire les poêles de masse des autres, on a fait aussi bien, sinon mieux: La bouche du four à pain, située dans la cuisine, s’ouvrait sur la cheminée pour l’évacuation des fumées, et le massif cul du four était dans la chambre. Chaleur assurée pour une semaine entre deux cuissons ! Au fond de la cheminée une plaque de fonte donnait directement sur le placard à claire voie de la chambre, où elle rayonnait, placard servant d’étuve et de séchoir avant de renvoyer la chaleur vers la pièce. C’est cet usage d’étuve qui aurait, selon certains, donné un autre nom à cette pièce dans les Vosges voisines: Le « caillon », lieu où on fait cailler le lait. Avec la cuisine, nos deux pièces habitables tiraient leur nom du feu de bois et de ses usages domestiques !
Cela ne doit rien enlever au génie de tous ceux qui ont inventé, puis amélioré la boite à feu au fil de quelques siècles seulement. Lui donnant de la masse, faisant circuler la chaleur par des circuits complexes avant de la relâcher, inventant la double combustion, qui brûle les résidus des fumées et fait gagner au bas mot 30% de rendement, les chaudières qui permettent avec un foyer unique de chauffer un bâtiment entier. Fourneaux et chaudières qu’on a eu le génie de rendre de plus en plus performants, passant des faibles rendements du feu ouvert à des rendements atteignant 70%, puis 80%, puis maintenant plus de 100% pour les chaudières à condensation. On sait produire avec le bois plus d’énergie que l’énergie, n’est-ce pas merveilleux ?
Au fil des siècles, le génie de l’homme a compris qu’il fallait respecter cette précieuse ressource et par conséquent améliorer pas à pas les boites à feu pour chauffer plus en brûlant moins de bois. Mais ce faisant, jamais l’homme ne s’est pris pour un génie, il a mis des pierres dans le foyer, adossé le feu à un mur, enfermé le feu… par soucis d’efficacité. Et jamais les inventions n’ont été très coûteuses : il fallait que le feu efficace soit accessible au plus grand nombre, sinon quel intérêt ? Le bois était tiré des forêts communales ou voisines, ou, au pire, flotté vers les villes par le moindre ruisseau.
De nos jours, des hommes, que la société prend pour des génies, ont décidé de transformer le bois…, de le transformer en carburant. Il faut pour cela construire de très, très coûteuses installations, après avoir payé pendant des années des personnes qu’on appelle des scientifiques pour réfléchir à la question. Ces installations sont fabriquées avec des matériaux qui demandent beaucoup, beaucoup d’énergie. À deux cent kilomètres à la ronde, les forêts sont écumées et se transforment en usines à bois, où on tronçonne, déchiquette, même ce qui serait utilisable en bûches ou en bois d’œuvre, avant de transporter les copeaux en camions. Sur place, on utilise beaucoup, beaucoup d’énergie, pour, « Miracle ! », transformer le bois en pétrole ! On nous annonce, pour les centrales les plus révolutionnaires, un rendement prévu de 30 à 35 pour cent pour la transformation. Juste la transformation !
Mais on oublie de préciser qu’en amont de la centrale à 30/35%, il y a la coupe, le déchiquetage (les troncs entiers sont râpés comme de vulgaires carottes !), le transport du bois, et aussi l’extraction, le transport et la transformation des métaux et autre matériaux qui ont servi à construire les installations, leur construction ; qu’en aval il y a le transport du produit pas encore fini vers les stations de mélange, puis vers l’utilisateur, pour terminer dans des moteurs à explosion, dont le rendement est de 30% ! Mais au fait, 30% de 30%, cela ne fait guère plus de 10%, et ces 10%, je ne suis pas certaine qu’ils suffisent pour toutes les opérations non comptabilisées de déchiquetage, transport, construction... ! C’est finalement bien moins efficace et combien plus coûteux que le feu ouvert au centre de la hutte néolithique ! Et on appelle cela le progrès ! On vous fait passer ces « merveilles » pour le nec plus ultra de l’écologie ! Tout le monde gobe ! Élus et financeurs en tête ! Mais il existe sans doute quelques êtres de bon sens pour s’exclamer « Quel caillon » !1, « Projet fumeux ! »…
Je vois déjà bien des vieux paysans pleins de bon sens se retourner dans leur tombe pour jeter un œil du côté de leur forêt communale et bougonner: « Fumisterie ! Autant foutre une allumette dans les piles de bois en lisière des forêts, le rendement sera le même et ça coûtera moins cher ! » Je dois avouer que c’est aussi mon avis ! Pourquoi gâcher en ruineux orgueil une énergie que l’on sait exploiter à son plein rendement à moindre frais ! C’est ce qu’on appelle familièrement « faire partir en fumée » argent et ressources ! Au lieu d’utiliser l’argent du contribuable (car c’est encore et toujours ce même argent qui sert à tout !) pour dilapider ses ressources naturelles (car c’est aussi à lui qu’elles appartiennent), pourquoi ne pas plutôt aider ledit contribuable à les utiliser avec une efficacité maximale.
Dans de grandes villes, des hôpitaux immenses sont chauffés au bois. Quel serait le coût de l’installation de chaudières performantes dans les écoles, les maisons de retraite, les hôpitaux de nos départements ruraux… par rapport au coût de ces chimères ? Le bois produit sur place, serait consommé sur place, sans autre transformation que le débitage en bûches, qui occuperait une main d’œuvre locale. Les employés libérés par la pelouse, qui ne pousse plus beaucoup quand on chauffe, assureraient le chargement des chaudières entre les moments destinés à l’entretien. C’est sans aucun doute bien trop simple pour nos décideurs ! Il est vrai que cela fait mieux de dire « Dans mon département j’ai la super centrale truc muche, qui produit du pétrole avec du bois et 8 emplois. », sans préciser à quel coût monétaire, environnemental et humain ; que d’avouer: « Toutes les écoles de mon département sont équipées de chaudières à bois et brûlent avec un rendement maximal des ressources qui n’ont pas fait plus de cinq kilomètres, occupant l’employé communal en morte saison ».
Et si l’écologie, c’était simplement le bon sens ? Le progrès, utiliser le bois à son rendement maximal avec un coût minimal et une transformation minimale, c'est-à-dire pour le chauffage, de préférence sous forme de bûches, et réserver aux véhicules le peu de pétrole qui reste, en cherchant une alternative, que certains on sans doute déjà trouvée ! (Mais si j’en crois mes lectures, l’alternative serait une fois de plus trop simple !) À qui profite le crime ? Sous mes fenêtres, les forêts ferment l’horizon de toutes parts, mon poêle à double combustion ronronne en brûlant une bûche que j’ai chargée il y a plusieurs heures: Il est tout à fait d’accord !
PS. Depuis l’écriture de ce texte en 2010, ma vallée préférée a été vendue aux marchands de déchiquetage, berges et coteaux, aulnes et chênes majestueux…, de même que vos coteaux…. Mais, les vrais déchets de taille ou d’arrachage des haies, d’arrachage de buissons ne sont pas « valorisés », ils sont brûlés en tas au bord des chemins ou au milieu des champs !!!! Cherchez l’erreur !
Rosa de Vroncourt, 01/12/10
1 De pièce avec l’étuve, ce mot désignant la pièce fourre-tout aurait évolué vers « pièce en grand désordre », puis vers désordre, en général, selon d’autres sources, ce mot viendrait de cochon, il est dans ce cas tout aussi adapté !
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