La Raison d’État ou les tribulations d'une politique énergétique

http://lemontchampot.blogspot.fr/
25/02/2017

Le malentendu
Le principal malentendu de la politique énergétique actuelle semble apparaître en termes de compétitivité, dans la comparaison de la valeur d'un MWh pilotable avec celle d'un MWh intermittent, pour la raison qu'il ne saurait rendre le même service.
La sécurité impose une fourniture électrique constante répondant immédiatement aux besoins de la consommation, comme autant de parachutes dans un avion que de passagers à l'instant T.


Une fourniture intermittente d'électricité fausse le marché avec la même évidence que l'utilisation forcée et subventionnée de parachutes qui ne s'ouvrent que lorsqu'il y a du vent le fausserait en matière de sécurité aérienne.
Le vent étant gratuit, le coût marginal nul de la fourniture électrique intermittente entraîne l'effondrement du cours, ce qui dissuade les investissements de production de qualité, aussi bien pour la pérennité de parachutes fiables que de MWh les moins carbonés.

Tant qu'une fourniture n'est pas fiable, on ne peut évoquer sa compétitivité avec une qui l'est.
La situation critique de TOUS les électriciens européen en est la dramatique illustration, pour le plus grand malheur d'EDF.

L'incapacité des centrales intermittentes à remplacer le moindre MW pilotable

Alors que le réseau demande un équilibre permanent, le taux de charge éolien est susceptible de s'effondrer à moins de 1% de sa puissance installée, celui du photovoltaïque tombant chaque soir à 0% de celle ci.


(Source RTE http://www.rte-france.com/fr/eco2mix/chiffres-cles )

L'absence de possibilité de stockage à grande échelle pour un coût acceptable par la collectivité interdit ainsi aux énergies intermittentes de permettre la fermeture de quelque centrale pilotable que ce soit.

En Allemagne
Leur développement exponentiel n'a toujours pas permis de fermer le moindre MW pilotable, avec 102,88GW pilotables en 2002 et 105,19 GW en 2016.


Source https://www.energy-charts.de/power_inst.htm


En France
La même incapacité se vérifie en France où, depuis 2005, notamment, où la consommation, de 483 TWh, était strictement égale à celle de 2016, les seuls 3,2 GW de thermique qui ont été fermés correspondent au seul remplacement de l'usine d'enrichissement G.Besse 1 [qui consommait la production des 3 réacteurs du Tricastin (3000MW)] par G.Besse 2, qui consomme 50 fois moins (60 MW) et rend disponible cette puissance supplémentaire sur le réseau depuis 2013.
Le développement parallèle de la biomasse, (1,9 GW en 2016) qui elle, est pilotable, a donné la marge de manœuvre supplémentaire de réduction, notamment avec le pic historique de 27,4 GW thermiques installés en 2010.
Tandis que le parc hydraulique est inchangé depuis 1990 et que le nucléaire a accompagné l'augmentation de la consommation jusqu'en 1999, date depuis laquelle il reste également inchangé.


(Source statistiques RTE de l'électricité complétées du bilan RTE 2016)

Leur concurrence déloyale
Mais c'est, pour 2 raisons, quand elles produisent que les éoliennes sont les plus néfastes à la pérennité du système électrique.
Baisse de rentabilité des nécessaires centrales pilotables
La ruine avérée du système électrique européen provient notamment des surproductions aléatoires éoliennes dont l'impact sur la bourse du MWh ne saurait être contesté. ​


Source https://www.energy-charts.de/price.htm

Ce qui ruine la rentabilité des centrales pilotables dont on ne saurait pour autant se passer


Et pendant que la production éolienne est intermittente au gré du vent,




notre parc nucléaire suit au plus près les besoins de la consommation et se vante même de suivre l'évolution de la production éolienne, pour un intérêt qu'on est en droit de se demander.


Tandis que plus le cours s'effondre, lorsque les éoliennes produisent, et plus le consommateur doit payer cher la compensation avec les largesses qui leur sont accordées, quel qu'en soit ce système de compensation.


Leur besoin de restructuration de l'ensemble du système pour exister
Le plus grave étant le problème que cette surproduction pose au réseau pour lui permettre de la refouler, toujours plus loin, vers des lignes de tension toujours plus fortes.




Situation expliquée plus en détail dans
http://lemontchampot.blogspot.fr/2016/12/le-prix-de-lintermittence.html

Impact négatif sur le CO2 et les prix du MWh
Bernard Durand vient de publier une excellente étude dans laquelle il met en évidence la corrélation de l'augmentation du prix du kWh avec la quantité d' EnRi installées dans les 15 pays de l'UE. Ou, plus précisément d'ELRi, puisqu'il s'agit des "électricités" renouvelables intermittentes.




ainsi que la corrélation inverse avec la réduction de CO2!


(Source http://www.sauvonsleclimat.org/electricite-renouvelable-intermittente-europe/35-fparticles/1966-electricite-renouvelable-intermittente-europe.html)

C'est ainsi que sans permettre la moindre fermeture de réacteur, ces ELRi qui soufflent sur la bourse du MWh ruinent la compétitivité d'EDF, le prive des moyens de sa sécurité et de son indispensable renouveau, tandis que pour la 2° année consécutive, les émissions de CO2 de notre parc électrique ont augmenté en 2016, avec plus de 28 Millions de tonnes contre 19 en 2014.
(En Allemagne, c'est plus de 300 Millions)


Source http://bilan-electrique-2016.rte-france.com/

Une augmentation de CO2 minimisée par les chiffres
En effet, ces estimations ne prennent même pas en compte le fait que que les centrales thermiques, ainsi empêchées de fonctionner à leur régime optimum, émettent bien d'avantage de CO2, par l'augmentation de leurs facteurs de pollution ainsi entraînée.
Ce dont les bilans ne tiennent aucun compte le seul calcul des MWh produits étant retenu.


Ce point est développé dans l'article:
http://lemontchampot.blogspot.fr/2017/02/de-laspect-contre-productif-de-leolien.html

 
Le prétendu retard de la France
Sait on même que la France n'est aucunement en retard sur quiconque, dans la lutte climatique, mais au contraire, est en 4° position mondiale sur la faiblesse de l'intensité CO2, et vient de se voir attribuer le meilleur indice au monde sur l'efficacité climatique.



L'indépendance énergétique
En l'absence de moyens de stockage à grande échelle, dont l'horizon reste hypothétique, toute transition énergétique passe, avant tout, par le gaz et les relations avec la Russie, comme le montre l'importance croissante de la dépendance de l'UE avec celle ci





Et le rôle que s'apprête à y jouer l'Allemagne, à horizon 2035, pour lequel une quelconque sortie du gaz ne semble pas à l'ordre du jour.


 

Une sortie du nucléaire allemande bien timide
La prétendue "sortie du nucléaire" allemande ne consistant d'ailleurs, pour le moment, qu'à une réduction de 12 GW de son parc nucléaire depuis 2002, largement remplacé par + 6 GW de biomasse et + 8 GW de gaz.
La puissance installée en charbon et lignite étant strictement inchangées depuis.
Et cette réduction de son parc nucléaire ne correspond, en fait, qu'à peu près à celle que vient d'affronter la France en raison des contrôles systématiques qui viennent d'être imposés aux générateurs de vapeur d'une bonne dizaine de réacteurs durant les jours les plus froids, et avec une réussite dont on aura assurément masqué la réalité.
Pour plus de détails, voir:
http://lemontchampot.blogspot.fr/2017/01/la-roulette-russe.html


La gestion du risque
Quantité de nouvelles technologies émergent, qui s'imposeront pour remplacer progressivement les réacteurs actuels. Le renouveau de la conquête spatiale n'est d'ailleurs pas étrangère à cette quête du Graal. Après la Chine, même l'Inde semble s'y intéresser de près.

Ce n'est pas en refusant de gérer les déchets nucléaires de la génération actuelle de réacteurs, qui sont d'ailleurs appelés à devenir combustibles d'une génération future, qu'on risque de faire progresser la question, pas plus qu'en décidant de fermer des réacteurs considérés sûr par l'autorité chargée de se prononcer.
Et tant que les solutions alternatives ne sont en mesure de les remplacer, le nucléaire demeure, qu'on le veuille ou non la source d'électricité pilotable la moins dangereuse à l'heure actuelle.


La croissance verte
Le hiatus entre slogans et réalité n’est pas moindre dans le domaine de l’emploi.
Les panneaux solaires proviennent essentiellement de Chine, les éoliennes de cette zone Asie Pacifique (APAC, en rouge ci-dessous), d’Allemagne (GE, Siemens, Enercon) et d’Espagne (Gamessa)



(Source http://www.planetoscope.com/eolienne/1060-production-mondiale-d-energie-eolienne.html)

Depuis 2014, date de ce classement, AREVA a soldé sa tentative dans le domaine par un fiasco économique en revendant à Gamessa, désormais propriété de Siemens. Avec, selon "Challenges", 550 millions de pertes dans les renouvelables pour la seule année 2014

On se doute que ce n'est pas non plus en phase exploitation que ces énergies créeraient plus d'emplois qu'elles n'en détruisent.
En tout état de cause leur faiblesse en emplois temps plein par MW installé en phase exploitation est confirmé par le rapport des 400 experts de l'ANCRE.


(Source Scénarios de l'ANCRE pour la transition énergétique

Et suffisamment d'études, telles que celles de l’Universidad Rey Juan Carlos, de Beacon Hill Institute, de Gordon Hughes , de l’Instituto Bruno Leoni ou bien d’autres avaient conclu que le développement des énergies renouvelables détruisait les emplois.
Rappelons que concernant les sources des chiffres officiellement avancés, la Cour des Comptes avait considéré:
« ces sources sont souvent croisées entre elles ou avec celles non validées des organisations professionnelles, ce qui multiplie les incertitudes et les risques de propagation des erreurs d’estimation ». (Rapport juillet 2013, p 64)


La Raison d’État
La politique nucléaire française avait été initiée par Georges Pompidou, pour sortir le pays du piège où l'avait enfermé les années de pétrole facile et bon marché, face au premier choc pétrolier.
Cette politique volontariste affranchissait en même temps le pays de l'emprise de l'Agence internationale de l'énergie (AIE) créée à cette occasion.
Cette politique exprimait clairement ses objectifs qui étaient dictés par la Raison d’État et qu'elle a amplement atteints en contribuant à l'indépendance et la grandeur de la France d'alors.


La Raison d’État céda ensuite la place à des raisons électorales et à l'apparition d'une cohorte d'apôtres de la décroissance, pour le plus grand bonheur des pays que menaçait cette réussite.
Une campagne publicitaire sans précédent et des décisions bureaucratiques européennes auront achevé la mise en œuvre de cette politique contraire aux intérêts de la France.


Des promesse inconséquentes
Les promesses de sortie du nucléaires qui ne proposent pas d'alternative pilotables engageront des centaines de milliards d'euros d'argent public sur des hypothèses d'une fragilité extrême, pour ne pas dire fantaisistes, au vu du bilan de bientôt un quart de siècle de leur développement.

Mais bien pire encore, elles priveront EDF des moyens de sa sécurité et de son renouveau, seule sa branche "renouvelable" lui permettant alors de survivre, par perfusion d'argent public.
Tandis que s'éloignera la perspective de toute alternative pérenne.

La politique énergétique conditionnera la prospérité des années à venir. C'est elle qui peut rendre possible la réalisation des programmes industriels, sociaux et économiques de notre prochain gouvernement.
Le futur président ne doit pas jouer sur l'émotion irrationnelle, mais sur des bilans chiffrés.
Il ne doit pas plus évoquer des promesses à l'Europe sur un sujet pour lequel le traité de Lisbonne nous laisse encore notre souveraineté.

La seule Raison d’État doit prévaloir.

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