Union européenne, énergie : la Russie met les gaz

  Où comment l' Union européenne et la France, sous gouvernance allemande, confie la sécurité de l'approvisionnement de son réseau électrique et la vie de quelques 446 millions d'individus, entre les mains de...la Russie!?
  Winston Churchill, Premier ministre de l’Angleterre, durant la seconde guerre mondiale, déclarait à l'époque : “La Russie est un rébus enveloppé de mystère au sein d'une énigme.”. Que dirait-il aujourd'hui à propos du comportement des 27 pays de l' Union européenne?


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Notre dépendance énergétique à la Russie

Laydgeur
 
  Je vais profiter de cette conférence de presse de Madame Merkel et de Monsieur Poutine à Moscou  pour vous entretenir de la dépendance énergétique de l' Union européenne et donc, de la France, à la Russie. Je décline d'avance toute responsabilité si vous vous sentez faible et vulnérable après avoir lu ce qui suit.😉
 



Quel est le contexte général en Europe?
  Comme dans le monde, le pétrole est la première énergie utilisée avec un tiers de l’approvisionnement total. Le gaz est dans les mêmes proportions, ~un quart, et le charbon est moitié moindre.

Les statistiques sur l’énergie, l'électricité, dans le monde et en Europe
   

  Ainsi, dans l’UE, plus de 70% de l’énergie utilisée est d’origine fossile ; c’est un peu mieux que dans le monde, 80%, mais c’est pas folichon quand même. Là où c'est plus problématique qu'ailleurs, c’est que les dotations géologiques de l’Europe en énergie fossiles sont très limitées.
  Tour d’horizon

  • Les Pays-Bas furent à la fin des années 70 le 3ème producteur mondial de gaz après les Etats-Unis et l’URSS. Ça n’a pas duré mais leur production est restée stable grâce au développement de l’offshore, et s’est complètement effondrée depuis 2014.

 
La production d’hydrocarbures aux Pays-Bas depuis 1960

  • Le Royaume-Uni a été un producteur important de pétrole et de gaz grâce aux gisements de la Mer du nord, mais il passé son pic de production de pétrole en 1999 et de gaz en 2000 et, son pic de charbon en 1913.
 
 
 
  Mais même avec cette baisse de 40% par rapport à son maximum, le Royaume-Uni produit encore actuellement 2 fois plus de pétrole que les 27 pays de l’Union Européenne réunis…! C’est dire la pauvreté de nos réserves…
 
 


  • La Norvège ne fait pas partie de l’Union Européenne mais est un gros producteur d’hydrocarbures, là aussi grâce à la Mer du nord. Elle a passé son pic de pétrole en 2000, et le gaz est en baisse depuis 3 années de suite, ce qui n’était jamais arrivé avant.
 
  • L’Allemagne et la Pologne possèdent à eux deux 70% des réserves de charbon restantes en Union Européenne, soit 6% des réserves mondiales, mais leur production est en baisse constante depuis plus de 30 ans.

  En conclusion, l’Union Européenne est extrêmement dépendante des importations étrangères d’énergies fossiles

  • 95% pour le pétrole,
  • 85% pour le gaz, 
  • 45% pour le charbon, dont 70% pour l’anthracite qui est un charbon de meilleure qualité.

   La provenance des imports en énergie de l’UE

  Et surtout, il faut regarder l’évolution de ces chiffres : sur les 30 dernières années, hormis le pétrole déjà à un niveau très élevé, la dépendance aux importations n’a fait qu’augmenter, entre +25% et +40%, malgré une consommation énergétique quasi constante…!
  Pour importer toutes ces énergies fossiles qu’on a pas, et qu’on a, en fait, jamais vraiment eu, on va parler… de la Russie !
  La Russie est le plus grand pays de la planète, et en règle générale, plus un pays est grand et plus il a de ressources.
  C’est tout à fait le cas ici :

  • 1ère réserve de gaz, 20% mondial,
  • 2ème réserve de charbon, 15%, après les USA,
  • 6ème réserve de pétrole, 6%.

  Des réserves absolument considérables. Cette situation exceptionnelle fait que, malgré la consommation domestique énorme, la Russie peut encore exporter massivement :

  • 2ème exportateur de brut, 12%, après l’Arabie Saoudite,
  • 2ème exportateur de produits pétroliers raffinés, 10%, après les USA,
  • 1er exportateur de gaz, 25%,
  • 3ème exportateur de charbon, 18%, après l’Australie et l’Indonésie.

   Mais là où cela nous intéresse directement, nous Européens et Français, c'est que la "proche" Russie est  le 1er fournisseur de l’Union Européenne en charbon, presque la moitié du total des imports et le 1er fournisseur de l’Union Européenne en gaz, 40% des imports!


    

  La provenance des imports en énergie de l’UE 

  Vous commencez à voir venir le problème ? Maintenant que le décor général est planté, on va se concentrer sur le gaz, c’est le plus rigolo.



" Mère pétrole, Père gaz ", jolie affiche vous ne trouvez pas ?

  Le gaz est importé en Europe à environ 30% via des navires méthaniers, gaz liquéfié, et tout le reste via des pipelines. À elle seule, la Russie compte pour 40% des capacités totales d’imports de l’Union Européenne en gaz, ce qui est considérable!
 
 
 
  Il y a 4 principaux pays d’arrivée dans l’U.E :
  • l’Allemagne, 33%, 
  • la Slovaquie, 22%, 
  • la Pologne, 15%, 
  • la Roumanie, 12%.
   C’est assez peu connu, mais tout comme il y a un réseau européen pour l’électricité, il y a aussi un immense réseau de transport de gaz européen, avec de gros échanges frontaliers entre tous les pays.
 
 
 
  Carte du réseau de gaz en Europe
 
  Une partie importante du gaz en provenance de la Russie arrive aussi en France, faisant de ce pays le 2ème fournisseur de gaz du pays, avec 20% du total.
 
 
 
   Un pipeline ça coûte très cher à construire, mais une fois en exploitation c’est imbattable et c’est fait pour durer des décennies. Aussi, le gaz russe va effectivement continuer à arriver en France et en Europe, et ce, par centaines de milliards de m3. Le président de la fédération de Russie, Vladimir Poutine, ne dit pas autre chose lors de cette conférence de presse : 
" La consommation de gaz des pays d’Europe du sud augmente, et j’espère que ça continuera dans les prochaines années."
 
 
 
   " Je ne pense pas qu’il y aura de sources d’énergie plus stables et plus fiables que le gaz russe."
 
 
 
 
   Pour vous convaincre, si vous aviez encore tant soit peu des doutes, regardez la page d’accueil de Gazprom, le géant mondial du gaz, dont l’état russe est actionnaire majoritaire. Difficile de faire plus clair.
 
 
 
Source

  Mais comment les européens consomment-ils tout ce gaz importé? :   
  • production d’électricité, 
  • chauffage des logements/commerces/bureaux,
  • source de chaleur pour l’industrie. 
  Cela représente 90% des usages du gaz dans l’Union Européenne.
 
 
 
 
Aparté 
  En France, le soi-disant "pays-tout-nucléaire-qui-gaspille-l’électricité-avec-des-chauffages-grille-pains", et bien sachez que la 1ère énergie de chauffage des logements, c’est le gaz… Fin de l’aparté.
 
 
 Le parc de chauffage des logements en France
  
  Maintenant que vous avez pris connaissance de la situation de dépendance de l’Europe vis-à-vis du gaz russe et l’utilisation qu’on en fait, un dessin pour résumer.
 
 
 
 
   Celui-là n’est pas mal non plus, et malheureusement très vrai je trouve…
 
 
 
 
   Arrivé là, on pourrait naturellement penser qu’une des priorités majeures de tous les pays de l’Union Européenne serait de faire le maximum pour se passer, ou au moins diminuer fortement leur consommation de gaz. Damned! Raté. Dans le plan Energie 2050 de la commission européenne, “le gaz joue un rôle clé dans la transition énergétique” pour remplacer le charbon dans la production électrique, et pour le chauffage résidentiel, où il peut être pertinent si l’électricité est trop carbonée.
  En réalité pour se passer du charbon il n’y a pas 36 000 possibilités : pas le choix, il faut du gaz!   D'aucuns vanteront l’essor massif de l’éolien et du solaire. Sauf, qu' ils ne sont pas sans défauts. Et comme certains pays veulent en plus sortir du nucléaire… 
  C’est le cas de la Belgique avec le Plan national énergie-climat qui définit leur stratégie climatique, surréaliste, qui consiste au final à augmenter leurs émissions de CO2, en arrêtant le nucléaire qui sera compensé par des centrales à gaz. Mais c’est aussi le cas de l’Allemagne. Tous les scénarios du Fraunhofer SIT[Fraunhofer-Institut für Sichere Informations technologie]  prévoient la construction de plus de 100 GW de centrales à gaz dans les 30 prochaines années. Par comparaison, c’est l’équivalent de tout le parc électrique français actuel… mais au gaz!
 
 
 
   Concernant l’Allemagne, au 1er semestre 2021 et pour la toute première fois, leur première énergie consommée était le gaz, à cause d’une météo froide et de vents faibles qui ont augmenté la consommation de gaz pour le chauffage et les centrales électriques. Et devinez qui en a fait un communiqué de presse ? Gazprom!  cela ne s'invente pas!
   En fait un pays qui a très bien réussi à se passer du charbon, c’est le Royaume-Uni, grâce à la mise en place d’une taxe carbone plancher sur la production électrique. Le quasi disparition de la production charbon s'est effectuée en seulement quelques années.
 
 
 
   Mais pour beaucoup de pays l’équation est très compliquée : pour le climat il faut arrêter le charbon au plus vite, mais ça veut dire faire une croix sur ses ressources énergétiques domestiques, et augmenter sa dépendance à la Russie. Ajoutez à ça que le gaz n’est acceptable uniquement car il permet de se passer rapidement du charbon, mais il n’est pas viable à long terme pour le climat, ça reste une énergie fossile très carbonée, mais, dans le même temps, les infrastructures gazières sont prévues pour durer des décennies, et au-delà, car les investisseurs ont bien l’intention de rentabiliser leurs mises de fond. Il y a donc ici un gros risque d’être prisonnier de ce système pendant de nombreuses années. Pas simple n’est-ce pas ?

Quelle est la situation en France

  La loi interdit la construction de nouvelles centrales électriques au gaz, une fois celle de Landivisiau achevée, mais l’exploitation de celles déjà en place, 12 GW, quand même, va continuer pendant des décennies vu qu’elles sont récentes.
 
 
 
 Pour le reste, je cite la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) : " Le gaz émet moins de CO2 que le charbon cela explique qu’il n’y a pas de mesures particulières pour la réduction du gaz naturel"  (...) La demande de cette énergie devrait être réduite du fait des mesures de maîtrise de la demande, notamment dans le bâtiment " (...) " Il n’y a pas de mesures de maîtrise de l’énergie directement ciblée sur le vecteur gaz."
 Ce qui veut dire en termes profanes : " Crois moi sur parole, Français, ça va baisser"
 
 
 
 
 
  Sur les approvisionnements en gaz : (...) " l’approvisionnement de la France a connu ces dernières années une concentration sur la Norvège et la Russie, ces deux pays représentant aujourd’hui près de 70 % des importations, contre environ 50 % au début de la décennie " (...) la Norvège, devrait connaître un plateau de production entre 2020 et 2030. Le déclin de la production européenne […], devrait s’accélérer. Cette baisse de la part des producteurs européens pourrait être compensée par une augmentation des importations de gaz russe ou de GNL"
  Ici, pas besoin d'un dessin...
   Vous connaissez maintenant la situation. Vous avez toutes les données pour comprendre certains aspects de la politique étrangère russe, et notamment les enjeux du pipeline Nord Stream 2, fort bien résumé ici .
 
 
 
 
 
 
 
 

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