Quand le protocole de Kyoto dopait les émissions de CO2 en Russie et en Ukraine

In partnership with The Guardian | Arthur Neslen traduit par Marion Candau





Certains pays auraient augmenter la production de gaz fluorés pour recevoir plus de crédits



Les trois quarts des crédits carbone des pays de l'ex-URSS auraient été bidon, révèle un nouveau rapport.


Selon le Stockholm Environment Institute, le protocole de Kyoto aurait favorisé l'émission de 600 millions de tonnes de CO2, qui n'auraient pas été émises sans lui.


Selon le document publié dans la revue Nature Climate Change, environ 80 % des projets de la mise en oeuvre conjointe, le mécanisme à l'oeuvre dans les pays de l'ex-URSS, était de faible qualité environnementale.


« De nombreux projets ne respectaient pas les exigences de la MOC sur l'additionnalité, et je doute même de l'existence physique de certains de ces projets », a déclaré Vladyslav Zhezherin, un des auteurs du rapport « Je pense que beaucoup d'entre eux étaient faux ».



Sous couvert d'anonymat, un haut responsable des Nations unies a déclaré au Guardianque le nouveau rapport était « approfondi et probablement correct ».


Juste avant que l’UE n'interdise les crédits issus de gaz industriels sur son propre marché de quotas, un effet pervers s'est en effet produit. En Russie et en Ukraine, les usines de production de ces gaz à fort impact sur l'effet de serre se sont mises à tourner à plein régime. Cela a entraîné un déluge de crédits « factices » sur le marché européen, en 2012. Ces deux pays se sont vengés de l’interdiction européenne, selon un expert: « Vous bloquez nos crédits, nous envahissons vos marchés ». Il s'agissait principalement de gaz réfrigérant, ou gaz HFC, dont l'impact sur le réchauffement climatique est jusqu'à 11.000 fois plus important sur le CO2.


>>Lire L'UE peine à convaincre le monde d'éliminer les gaz HFC


Une autre source connaissant la réglementation du marché du mécanisme de MOC en Ukraine a déclaré au Guardian que plus les années passaient, plus les acteurs du marché percevaient la MOC comme un « mécanisme de corruption ».



« L’approbation des projets a cessé de dépendre de leur qualité pour dépendre de relations et de paiements parallèles », a-t-il ajouté. Pour obtenir l'approbation officielle et être ainsi inclus dans le mécanisme de MOC, les acteurs du marché ukrainien ont souvent transféré des crédits à un nombre limité d'entreprises intermédiaires en Suisse, affirme la source.


La Russie et l'Ukraine sont les deux plus grands bénéficiaires du système, qui leur a permis de vendre des unités de réduction d'émissions (URE) en « prouvant » que des réductions d'émissions de carbone avaient été réalisées.


En effet dans le cadre de la « voie 1 » du mécanisme, qui couvrait environ 97 % des projets, les États vérifiaient les réductions d’émissions entre eux, sans la surveillance de la CCNUCC.


Après la chute de l'Union soviétique, les pays de l'Est ont reçu trop de crédits, ce qui fut une condition sine qua non de leur adhésion au protocole de Kyoto.


S’ils ont décidé d’inonder le marché du carbone européen de faux crédits, c’est « en partie à cause du préjudice moral subi du fait de n'avoir reçu aucune compensation adaptée », a déclaré la source de l'ONU « Voilà ce qu'il se passe quand vous offrez un libre accès aux ressources ou que vous mettez en place un mécanisme de subventions sans surveillance appropriée dans les états faillis, ou dans des pays où les structures sont largement corrompues ».


Le sujet pourrait être discuté lors de la conférence climat à Paris, lors de laquelle l'UE souhaite retirer la surveillance des futurs mécanismes basés sur le marché des mains de la CCNUCC. L'ONU préfèrerait quant à elle une version réformée de la « voie 2 » du système, qu'elle peut contrôler.


Anja Kollmuss, l'autre auteure de l'étude a déclaré que les conséquences de cette fraude pour le régime européen d’échange de quotas d’émissions (ETS) étaient importantes. « Presque deux tiers des crédits de la MOC ont été utilisés dans le système d'échange de quotas d'émissions. La qualité médiocre des projets de la MOC en général a donc affaibli l'objectif de réductions des émissions de l'UE d'environ 400 millions de tonnes de CO2, soit un tiers des réductions requises par l'ETS de 2013 à 2020 », a-t-elle expliqué. Les entreprises européennes ne pouvaient toutefois utiliser qu'un nombre modéré de crédits, soit 10 % de leurs besoins.


Plus d'un quart des crédits carbone de la MOC ont été attribués à des projets destinés à mettre un terme à la combustion spontanée du charbon, notamment en Ukraine. L’estimation de Kiev selon laquelle 30 % de son charbon est concerné par ce risque est « complètement irréaliste » et a probablement entrainé l’octroi excessif de crédits, peut-on lire dans le rapport.


Le rapport indique que sur les six plus grands projets de la MOC, un seul a réellement permis de réduire les émissions de carbone davantage que si le système n'avait pas existé. Il consistait à réduire les émissions de protoxyde d'azote dans les usines d'acide adipique, et est le seul à avoir reçu un nombre correct de crédits.


La MOC est l'un des trois mécanismes de compensation des émissions de carbone introduits par le protocole de Kyoto - avec l'échange de quotas d'émission et le Mécanisme pour un développement propre. Il a permis aux anciens pays de l'Union soviétique et du Pacte de Varsovie d’émettre 872 millions d'URE, ce qui représente environ un tiers des crédits d'émissions accrédités pas l’ONU.



Commentaire: Voilà 2 pays pris par «la patrouille». Et les autres nations? Sont-elles des anges? Ne soyons pas trop naïfs! Cela finirait par passer pour de la «connerie». les énergies renouvelables rentrent aussi dans le cadre des crédits carbone...



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