Paris pendant la Terreur, rapports des agents secrets du Ministère de l' Intérieur, épisode VII

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Il conjure toutes les autorités constituées, tous ceux qui ont servi à côté de lui, et notamment les gendarmes qui font la garde du Sénat (sic), de dire ce qu'ils ont vu, ce qu'ils savent de lui, afin qu'il puisse imposer le silence pour une bonne fois à tous ses ennemis.
  L'affaire de Brichard, Boulard et consorts144, prend une tournure peu favorable au Tribunal révolutionnaire. Neuf personnes sont comprises dans la même accusation ; Auriol, ci-devant introducteur des ambassadeurs chez d' Artois, et sa femme, connue sous le nom de femme Gomand, sont déjà convaincus d'avoir acheté une maison ci-devant Palais-Royal avec les fameux billets d'emprunt dont il est question dans cette affaire.

Source

  Parant145, notaire, rue Sainte-Croix de la Bretonnerie, a été arrêté la nuit dernière dans un bal. On prétend qu'on a trouvé dans la poche d'un des rebelles de la Vendée une de ses lettres dans laquelle il dit que sa correspondance avec tels et tels émigrés ne lui donne pas le temps de lui écrire aussi souvent qu'il le voudrait.
  Le rapport de Barère sur la Vendée146 a donné carrière aux royalistes pour amplifier, selon leur coutume, sur nos prétendus désastres. À les entendre, Charette et La Rochejaquelein [Henri du Vergier dit..., 1772-1794 ; " ... il souleva les Mauges : mars 1793. Battu à Cholet, octobre, il se replia sur la Loire. À la tête des troupes vendéennes, il marcha sur Granville mais de nouveau battu à Savenay, décembre, il se livra à la guérilla ; il fut tué par un Bleu qui venait de se rendre... " ; Larousse] sont déjà à la tête de 50.000 hommes, et cette guerre va devenir plus funeste que jamais aux patriotes.

 La Rochejaquelein

Le chef vendéen Henri du Vergier de La Rochejaquelein. Peinture à l'huile, 1817, de Pierre Narcisse Guérin. Musée d'Histoire et des guerres de Vendée, Cholet. Ph. Studio Golder © Archives Larbor

  Saint-Venant147, ancien commissaire de police dans la section de la Halle-au-Blé, et mis en état d'arrestation, voit grossir tous les jours des charges contre lui. On l'accuse de nouveau d'avoir soustrait 60.000 livres chez un particulier avant l'apposition des scellés.
  On approuve beaucoup l'arrangement148, fait, dit-on, au Comité de salut public, par lequel les acteurs du Théâtre de la République iront jouer sur l'ancien Théâtre-Français rue du Faubourg Saint-Germain, et l' Opéra sur le Théâtre de la République.
  Le bois devient si rare qu'il faut toujours courir jusqu'à l'île Louviers pour en avoir, et, quand on est là, il faut postuler longtemps un numéro qui vous autorise enfin d'en venir chercher une voie quinze jours après.
  La mendicité fait tous les jours d'effrayants progrès dans les rues de Paris. Elles sont, pour la plupart, couvertes d'enfants, de femmes et de vieillards.

Rapport d' Hanriot, W 191
   Les deux députés de la ci-devant principauté de Montbeliard149 [" Les premiers comtes de Montbéliard, issus de la maison de Mousson, apparaissent dans le courant du XIe siècle. Au cours des XIIe-XIVe siècles, le comté - intégré à la mouvance impériale à la fin du XIIIe siècle -, échoit à diverses maisons "françaises", Montfaucon, Chalon, puis à nouveau Montfaucon, avant de passer, à la faveur de l'union d'Henriette de Montfaucon avec Eberhard IV de Wurtemberg en 1397, fiançailles, / 1407, mariage, à la maison de Wurtemberg. Cette maison tiendra le comté jusqu'en 1793. En 1495, l'Empereur érige en duché le comté de Montbéliard, autorisant en pratique les ducs à se qualifier de "souverains princes". C'est là l'origine de l'appellation de "principauté de Montbéliard" désignant les possessions "françaises" des Wurtemberg, appellation courante sous l'Ancien Régime quoique non officielle, en l'absence de diplôme d'érection du comté de Montbéliard en comté princier : malgré un projet en ce sens en 1597. [...] Les années 1790-1793, confuses, voient la conclusion du mouvement de mainmise française : après une première incursion en septembre 1792, les troupes révolutionnaires entrent dans Montbéliard en avril 1793 ; le 10 octobre suivant, le conventionnel Bernard de Saintes prononce la réunion du comté à la République française. [...] Cette situation fut entérinée en droit en 1796 / Convention du 20 thermidor an IV, 7 août 1796 : annexion de la principauté de Montbéliard à la France... "source], entrant dans un café, furent aussitôt environnés par tous les citoyens qui en formaient la société. On leur prodigua les honneurs et les applaudissements dus à leur démarche. On vit même couler des larmes de sensibilité. Les deux députés témoignèrent la joie la plus vive de se voir, par un décret solennel, associés à la grande famille française, protestant de leur ferme résolution de concourir avec elle à la défense de la liberté.
  Ce langage républicain se fit entendre surtout dans la manière dont on persifla la prétendue proclamation du tyran d' Angleterre relative au jeûne général ordonné à tous ses sujets150. " Est-il possible, qu'à la fin du dix-huitième siècle on ose indiquer à des hommes qui jusqu'ici ont eu une réputation de philosophie un jeûne (sic) comme un moyen sûr de vaincre des républicains? Quel contraste entre ces insulaires et nos braves frères d'armes qui, au milieu de leur captivité à Plymouth, y plantèrent l'arbre de la Liberté, après avoir célébré la fête de la mort du dernier tyran151. "

Maquette du Temple Saint-Martin. Montbéliard. Doubs. photo : Espirat CC BY-SA 4.0

  Le prince évêque de Spire [comte Damian August Philipp Karl von Limburg Stirum,1721-1797 ; prince-évêque de Spire de 1770 à 1797 ; il est réputé comme ayant été un des évêques allemands les plus virulents à l'encontre de la Révolution française... ; source], demandant à la Diète de Ratisbonne [représentation des États du Saint-Empire romain germanique de 1663 à 1806, siégeant à la ville libre de Ratisbonne] un remboursement de tous les dommages que les armées françaises lui ont fait éprouver, n' a pas été moins tourné en ridicule.

 

Salle et trône impériaux dans l'ancien hôtel de ville de Ratisbonne. Photo Hajotthu @CC BY-SA 3.0

  La joie eût été complète sans la rareté des subsistances, qui s’accroît tous les jours ; on n'a pas pu s'empêcher d'en parler, et surtout des gémissements continuels de nos braves sans-culottes.
  Je m'approchai hier de deux individus qui causaient, au coin d'une rue, assez haut pour que je les entendisse. L'un se plaignait amèrement à l'autre de l'esprit public de la ville de Perpignan152. " Cette ville, disait-il, qui est une clef importante de la France, sera peut-être sous peu livrée aux Espagnols par les autorités constituées, qui sont entachées d'aristocratie. On est même parvenu, ajouta-t-il, à corrompre le peuple. Les assignats sont tombés dans le plus grand discrédit, les ouvriers ne veulent travailler que pour de l'argent, et les émigrés, en foule aux portes de la ville, n'attendent que le moment d'y entrer en triomphe. "
  Cette déclamation vive fut interrompue par une pluie qui vint à tomber, et les deux citoyens se séparèrent en prenant chacun une route opposée.

Rapport de Jarousseau, W 191
  Vous voyez (sic) dans différents groupes des plaintes violentes par différents personnages qui paraissent déguisés, car leur habillement ne représente pas une conversation aussi coulante que celle qu'ils tiennent. Cependant des discours qui paraissent toujours républicain , entremêlés, disent : " Nous devons tous être surveillants, surtout sur nos armées. Voyez, l'on nous a tous désarmés, en nous promettant que nous serions armés sous peu. Depuis que les fabriques d'armes sont en activité, et la quantité que l'on nous a annoncé qui se faisait par jour, nous devrions tous en avoir, et vous voyez, personne n'en a. Que deviennent-elles, vous n'en savez rien, ni moi non plus ", disent-ils. D'autres : " On les envoie à nos ennemis ; nous avons des comités révolutionnaires pour surveiller ; la plupart ne cherchent qu'à s'enrichir et ne s'inquiètent pas du reste. "
  Partout, plaintes au sujet des poids et mesures. Le public ne peut rien avoir qu'à force d'argent : encore ne lui donne-t-on pas son compte. Les gens de la campagne suivent aussi l'exemple de Paris, vendent à faux poids et fausses mesures. L'on a arrêté une femme de Saint-Ouen qui avait une charrette avec un cheval, qui vendait à fausse mesure ; elle a été conduite à la mairie.

Rapport de Latour-Lamontagne, W 191
   Les regards des républicains s'arrêtent toujours avec peine sur les plumes noires qui ombragent le chapeau à l' Henri IV des magistrats du peuple, organes de la justice. " Des juges sans-culottes, disaient quelques citoyens, ne doivent siéger qu'en pantalons et en bonnets rouges ; il faut que le costume de la Liberté soit le premier objet qui frappe les yeux des lâches qui l'ont trahie. "

Chapeau à plumes noires de magistrat. Source

  On a fort applaudi à l'éloquent discours153 de l'agent nationale de la Commune, relatif au décret154 sur l'abolition de l'esclavage. On désire que ce décret soit envoyé promptement dans les colonies, afin de prévenir les manoeuvres perfides que les Anglais ne manqueront pas de mettre en usage, pour en éluder ou entraver l’exécution.
  On parle avec enthousiasme, dans tous les cafés, d'un discours énergique prononcé par Lacroix, à la Convention nationale155. " Si vous ne voulez pas me rendre justice, a-t-il dit, j'irai la demander au Tribunal révolutionnaire ; je vous annonce que je coucherai ce soir à la Conciergerie. " [ "... un des hauts lieux de détention pendant la Révolution française avec l’installation du tribunal révolutionnaire. Sa prisonnière la plus célèbre est Marie-Antoinette. Une chapelle commémorative est aménagée à l’époque de la Restauration à l’emplacement de sa cellule... "; source] Voilà bien, disait-on, le langage d'un républicain, à qui sa conscience ne fait aucun reproche ! Si Ronsin et Vincent156 eussent été aussi purs que lui, voilà la conduite qu'ils auraient tenue. " Le meilleur de leurs lits, a dit un citoyen, n'a pas autant de prix à mes yeux que le simple grabat que Lacroix sollicitait à la Conciergerie. - Ce grabat ne leur fait point peur, a-t-on répondu, ils sont prêts l'un et l'autre à s'y coucher, je les connais tous deux, et je suis sûr qu'ils préféreraient vingt ans de prison à un jour d' ignominie. " Ce discours a paru faire plaisir à tout le monde.

Rapport de Le Breton, W 191
  J'ai entendu dire qu'il existait une conspiration dans le département des Basses-Pyrénées [le département conserva ce nom jusqu'en 1969, avant de devenir les Pyrénées-Atlantiques] dont le résultat était de faire soumettre ce coin de la République aux Espagnols. On donnait en termes très équivoques, pour siège de cette infâme trahison, la petite ville d' Orthez, en ajoutant que tout le temps elle fut composée de gentillâtres [gentilhomme sans fortune ou de petite noblesse] ou ci-devant nobles. J'écoutai cette conversation attentivement, et j'ai entendu nommer un certain Saint-Cric ou Saint-Christ157, dont la famille est très nombreuse, et qui, sous l'ancien régime, avait épousé, par son intrigue, une femme espagnole parente du comte d' Aranda, ambassadeur en France158.
  J'observe que le Saint-Cric, par les renseignements que j'ai tâché d'avoir et que j'ai obtenus, est un ancien gendarme de la garde, connu sous l'ancien régime et par l'ancienne police comme un escroc très adroit, liant par son commerce, très fin et très spirituel, qui trouva le moyen d'enlever cette femme d' Espagne, où il fit un voyage. Il est âgé d'environ 70 ans, a sept à huit garçons de cette même femme, dont le plus jeune a 22 ans. Deux ont servi dans les gardes du corps anciens, un dans l'infanterie, et un quatrième officier de dragons ci-devant Schomberg [" ... régiment de cavalerie français d'Ancien Régime créé en 1743 sous le nom de Volontaires de Saxe devenu sous la Révolution le 17e régiment de dragons... " ; source]

Régiment de Schomberg dragons de 1786 à 1791. Source : entenier @CC0

  Cette dénonciation mérite la plus grande vigilance par le préjudice que cette trame pourrait porter à nos succès en Espagne.
  On disait aujourd'hui, dans le jardin des Tuileries que d' Eprémesnil159, ancien conseiller au Parlement, venait d'être amené du Havre au Comité de sûreté générale.

Rapport de Le Harivel, W 191
  Sur les places et dans les lieux publics, on ne s'entretenait volontiers que des revers fâcheux que nous avons éprouvés dans le Nord et sur le Rhin160. L'armée formidable de Cobourg [prince Frédéric Josias de Saxe-Cobourg-Saalfeld, 1737-1815 ; commandement suprême de l'Armée impériale ; en 1794, il est battu par le général Jourdan à Fleurus et doit abandonner les Pays-Bas du Sud. À la suite de cet échec, il est relevé de son commandement et se retire dans ses terres de Cobourg] est, dit-on, retranchée dans un bois d'où elle porte des coups certains et, comme elle n'est pas tout à fait à l'abri de l'impétuosité de nos républicains, elle a pratiqué dans ce bois une route ferrée pour sauver son artillerie au cas où elle y serait forcée. Presque tout la nôtre nous a été enlevée. Nous avons, ajoutait-on, été repoussés du côté de Spire et obligés de nous retirer sur les lignes de Wissembourg [Bas-Rhin ; bataille opposant du 26 au 29 décembre 1793 l'armée française, victorieuse, à celles de la première Coalition, formée de l'Autriche, la Prusse, renforcée par le Royaume-Uni ; le royaume de Sardaigne, Sardaigne, Piémont, Savoie ; le royaume d'Espagne ; le royaume de Sicile, Sicile et Naples ; les Provinces-Unies, les sept provinces des Pays-Bas ; le royaume de Portugal et le Saint-Empire, entité regroupant les nombreux États allemands existant à l'époque. Le nom de cette bataille est gravé sur le pilier nord de l'Arc de triomphe de l'Étoile]

 
Le monument de Wissembourg, inauguré le 17 octobre 1909. Il est l’œuvre du sculpteur Albert Schultz et est intitulé : " Patrie ". Il doit " conserver le souvenir des soldats français qui ont combattu dans les batailles livrées aux environs de Wissembourg à quatre époques :

  • La guerre de la succession d’Espagne et notamment en 1705, sous le maréchal de Villars 
  • Au cours de la guerre de la succession d’Autriche et notamment en 1744, sous le maréchal de Coigny. 
  • Lors des guerres de la Révolution en 1793 sous le général Hoche 
  • Le 4 août 1870 sous le général Abel Douay. 
  • ... L’idée de la gloire doit être tempérée par celle de la Mort. "

Source

  Ces nouvelles, si elles sont vraies, sont bien de nature à affliger les bons citoyens, qui n'y veulent pas croire, disent-ils, tant que la Convention ne les aura pas annoncées.
  Plusieurs communes de la République, et notamment celles environnant Paris, sont dans une telle pénurie de grains qu'elles sont réduites dans la dernière des misères ; des citoyens qui arrivaient assuraient qu'elles n'avaient plus de subsistances que pour trois mois.
  Dans le département du Calvados, on est dans une égale pénurie de subsistances ; des lettres particulières annoncent que, sans le sarrasin, on serait en quelque sorte mort de faim.
  Le maximum y est moins observé que jamais ; il semble qu'ils n'en ont jamais eu aucune connaissance.
  Le fanatisme ne s'y éteint pas, il fait au contraire de nouveaux progrès ; l'office se fait comme de coutume dans beaucoup de communes, et les curés eux-mêmes, après s'être mariés civilement, se font donner la bénédiction nuptiale par leurs confrères.
  Le département de l' Eure est également entiché (sic) de cette sorte d'épidémie.

Rapport de Monic, W191
  L'assemblée populaire de la section des Gardes-Françaises [n°9 ; ex section de l' Oratoire, 1790-1792 ; son territoire comprenait le rectangle au nord de la section du Musée du Louvre, entre celle-ci et la rue Saint-Honoré. La future rue de Rivoli le traverse ; elle se réunissait dans l’église de l’Oratoire du Louvre, 145 rue Saint-Honoré ; dissoute en 1795 ; source] a été très orageuse, concernant les dénonciations ; mais la principale de toutes a été contre le nommé Alibert161, un citoyen l'a dénoncé comme ayant des correspondances avec les ennemis de l'extérieur.


Section des Gardes-Françaises, n°9. Par arrêté préfectoral du 10 mai 1811, elle devient le quartier Saint-Honoré / 4e arrondissement de Paris. Carte

  Un citoyen m'a assuré que le nommé Venternière162, qui est de retour depuis quelques jours du côté de Landau [ville allemande de Rhénanie-Palatinat, juste derrière la frontière avec la France, ~20km. Française entre 1680 et 1815 ; fortifiée par Vauban, 1688-1691, avec sa réputée forteresse ; rasée en 1871] où il avait été envoyé en qualité de commissaire du Pouvoir exécutif, qu'il croyait même que ledit Venternière était employé dans un des bureaux du ministre de la Guerre ; que, si le ministre de la Guerre avait été bien instruit sur la conduite de Venternière, il se serait bien gardé de lui donner une mission quelconque, et même qu'il le renverrait de sa place. Premièrement, pour avoir été un de ces individus qui, joints avec une vingtaine d'autres, formaient une compagnie de coupe-jarres. Cette compagnie était dénommée " J' en mange "163 ou " mangeurs d'hommes ". Ces individus faisaient leur tournée dans les maisons de jeux, et rançonnaient les maîtres de ces jeux, ou autrement du tapage. Dans la maison n°36, Jardin-Egalité, les maîtres du jeu avaient leur monde qu'ils payaient aussi pour les défendre, et Venternière et sa clique fut battus et arrêtés et mis en prison ; quelques temps après, Venternière fut relâché.
  Quelques jours après qu'il fut sorti de prison, il fut mandé à la Commune ; la Commune l'envoya prisonnier à la Conciergerie, c’était sur la fin de 91, et n'est sorti de prison que sur la fin du mois de juillet 92, quelques jours avant la journée du dix août. Les registres existent, on peut prendre connaissance des faits. Venternière demeure rue Pelletier164, n°15.

Rapport de Pourvoyeur, W 191

  Le peuple n'a pas paru très content aujourd'hui des nouvelles de la Vendée165. Il dit qu'il y a quelque chose la-dessous, les visages étaient consternés. " Comment, disait-on, depuis si longtemps que l'on nous dit que la Vendée est détruite, il se trouve à présent qu'elle renaît de plus belle? " Westermann savait bien ce qu'il faisait, dit le peuple, en laissant 30.000 fusils entre les mains des communes de Vendée166 ; il savait bien que l'on en armerait les rebelles. Pourquoi ne les a-t-il pas envoyés à Paris? observe le peuple. C'était fait à la main, Westermann est un traître.
  Le peuple dit que c'est un département entier qu'il faut détruire par le feu. Plusieurs patriotes disaient que l'on devrait retirer tous les enfants et fusiller tout le reste.
  Un citoyen, dans un groupe, lisait une lettre d'un de ses amis, qui lui écrit de Marseille et lui mande que cette ville est encore le foyer de l'aristocratie, que les prêtres y lèvent encore leurs têtes altières, qu'ils se promènent dans Marseille en habit de prêtres, c'est-à-dire en soutane.
  Le peuple observe qu'il y en a encore beaucoup dans Paris qui cherchent à séduire les esprits en s'emparant des consciences. Le curé de Saint-André-des-Arcs, ci-devant, baptise chez lui, à ce que l'on dit, même des enfants qui ne sont pas nés dans le quartier ; il a baptisé dernièrement l'enfant d'un dénommé Poulain167, restaurateur rue Saint-Nicaise. Ce n'est pas le seul prêtre qui cherche à égarer le peuple par des conseils perfides, et s'introduise dans les maisons sous différents prétextes soit pour vendre des marchandises, mais plus souvent pour donner des leçons de dessin ou de musique
  Le peuple entendait dire que l'on avait justifié168 Westermann à la Convention nationale, mais il observe aussi que l'on a de même justifié Miranda169, ce général digne de mille morts.
  Le peuple dit qu'il doute beaucoup du patriotisme de Jourdan170.
  Le peuple observe qu'il faut se méfier

   À suivre...

   Pierre Caron, Paris pendant la Terreur, rapports des agents secrets du Ministère de l' Intérieur, tome IV - 21 pluviôse an II - 10 Ventôse an II, 9 février 1794 - 28 février 1794, , La Société de l' Histoire de France, Librairie Marcel Didier, Paris, 1949, pp. 60-70.

144. Cf. ci-dessus, p. 44, notes 2 et 3. - L.-D. Auriol, ci-devant conseiller à la Cour des monnaies de Lyon, et Geneviève Gomand, sa femme figurèrent effectivement comme accusés dans l' affaire Brichard et autres, et furent acquittés.
145. Pas de renseignements. Le nom de Parant ou Parent ne figure pas sur la liste des notaires que donne l' Almanach royal de 1792.
146. Cf. ci-dessus, p. 27, note 1.
147. Cf. t. III, p. 123, note 1.
148. Il n'entra en vigueur qu'une fois prescrit par un arrêté du Comité du 27 germinal [16 avril 1794].
149. Venus à Paris pour demander la réunion de l'ex-principauté à la France fût consacrée par un décret solennel, et qui furent admis à la Convention le 23 pluviôse [11 février 1794] : Moniteur, réimp., t. XIX, p. 453-455.
150. Nous n'avons pas trouvé la source de cette information, non plus que de celle ci-après, relative au prince-évêque de Spire.
151. Cf. le Moniteur du 28 pluviôse [16 février 1794], réimp., t. XIX, p. 474.
152. Cf. t. III, p. 171. - Les Jacobins avait eu, le 21 pluviôse [9 février 1794], communication d'une lettre, écrite de Perpignan, où Milhaud [Jean-Baptiste, 1766-1833 ; général et comte d' Empire] et Soubrany [Pierre-Amable Soubrany de Macholles, dit,1752-1795 ; "... après la chute de Robespierre, Soubrany découvre la réaction thermidorienne, bien qu'il assure n'avoir jamais apprécié Robespierre et se soit brouillé avec son compatriote Couthon. Des émeutiers ayant, au cours de l'insurrection de prairial an III, réclamé qu'il soit nommé commandant de l'armée de l'intérieur, la majorité libérale et modérée en profite pour le faire décréter d'accusation par la Convention, alors qu'il était absent, ce jour-là, et n'avait pris aucune part à l'insurrection. Plutôt que de fuir, Soubrany va se constituer prisonnier à l'Assemblée en apprenant que Gilbert Romme a été arrêté. Emprisonné avec son ami au Château du Taureau, à Morlaix, il est condamné à mort en même temps que lui après un procès aussi rapide que ceux qu'il organisait en mission. En accord avec Romme et les quatre autres condamnés, Goujon, Bourbotte, Duquesnoy et Duroy, il se poignarde à l'annonce de la condamnation, mais ne parvient pas à se tuer immédiatement. On l'étend dans la charrette qui le mène au supplice, mais il meurt pendant le trajet, et c'est un cadavre que la guillotine décapite... " ; source https://fr.wikipedia.org/wiki/Pierre-Amable_de_Soubrany] représentants de l'armée des Pyrénées-Orientales [lire également : Edouard Milhaud et Pierre Soubrany : les messagers de la Terreur] faisaient un sombre tableau de la situation dans la ville et dans le département : Aulard, La Soc. des Jacobins, t. V, p. 647.
153. Prononcé par Chaumette, au nom de la Commune, le 20 pluviôse [8 février 1794], à la fête célébrée en réjouissance de l' abolition de l'esclavage : F. Braesch Papiers de Chaumette, p. 79.
154. Cf. ci-dessus, p. 7, note 1.
155. Séance du 24 pluviôse [12 février 1794] : Moniteur, réimp. , t. XIX, p. 463-464. Le texte en a été publié dans le Moniteur des 4 et 7 ventôse [22 février et 25 février 1794] : réimp. t. XIX, p. 521-599, 550-599. La phrase que Latour-Lamontagne prête à Delacroix, alias Lacroix, ne s'y trouve pas.
156. Cf. t. III, p. 283.
157. Saint-Cricq, Jean-Paul de [chevalier de l'armée ordre de Saint-Louis, gouverneur pour le roi des châteaux de Minerve et Puisserguier en Languedoc], né en 1722 à Arance, Basses-Pyrénées , ex-maréchal de camp, qui venait d'être admis aux Invalides le 30 frimaire [20 décembre 1794]. Arrêté le 2 messidor an II [20 juin 1794], en même temps qu'un de ses fils, il devait être mis en liberté le 27 thermidor [14 août 1794]. Sa femme était née Mazaredo [Marie-Laurence-Josèphe-Raphaëlle-Pétronille de].
158. Jusqu'en 1784, et premier ministre en Espagne depuis 1792.
159. Duval d' Eprémesnil, Jacques, le parlementaire bien connu. Il avait été mis en arrestation dans la région du Havre en septembre 1793. Le Tribunal révolutionnaire le condamna à mort [ " ... Jugé avec Malesherbes, le défenseur de Louis XVI, qui comparut avec sa famille, et avec plusieurs anciens députés de la Constituante comme Le Chapelier et Thouret... " ; source] le 3 floréal an II [23 avril 1794]. Moniteur, réimp., t. XVII, p. 755 : Wallon, Hist. du Trib. révol., t. III, p. 303.
160. Cf. ci-dessus, p. 35.
161. Marchand d'estampes, 16, rue Froidmanteau. Effectivement dénoncé, comme le dit Monic, à sa section, le 22 pluviôse [10 février 1794], il résigne [démissionne] ses fonctions de secrétaire. L'affaire n'a pas de suites. Le 10 prairial an III [29 mai 1795], il est mis en arrestation comme prévenu d'avoir eu une activité terroriste. Il réussit à se justifier, et obtient sa liberté et son réarmement le 18 messidor suivant [6 juillet 1795] : Arch. nat., F7 4578, plaq. 2, et F7 477416. Son dénonciateur de l'an II était le citoyen François Lemaître : cf. ci-après, p. 90.
162. Sic. Il s'agit certainement de Vingtergnier, Jean-Armand, né en 1764 ; il avait bien eu une mission de surveillance à Landau, mais pour le compte du ministère des Affaires étrangères, et il n'a pas été employé dans les bureaux de la Guerre. Voir notice biographique sur lui dans La Révolution française, 1933, t. 86, p. 234-235 ; article de P. Caron sur Les " Défenseurs de la République ".
163. Le texte porte " Gens mange ".
164. Lire " Lepelletier ".
165. Données par le rapport de Barère : cf. ci-dessus, p. 27, n. 1.
166.Cf. ci-dessus, p. 20.
167. Pas de renseignements.
168. Inexact. Au cours de la séance du 18 nivôse [7 janvier 1794] : cf. t. II, p. 205, note 5 ; un membre avait demandé le vote d'un décret portant que Westermann avait " bien rempli ses devoirs ". Cette demande avait été écartée, et la Convention s'était bornée à décréter que le général jouirait de sa liberté jusqu'au moment où le Comité de salut public aurait fait un rapport sur son cas.
169. Cf. t. Ier, p. 410, note 1.
170. Il allait cependant être réintégré : cf. ci-dessus, p. 47, note 3.

 

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