L'électricité verte attaque la Commission sur les subventions au nucléaire

EurActiv.de | Daniel Tost 
Traduit par Manon Flausch



Avec ses deux réacteurs, la centrale d'Hinkley Point C est censée remplacer un cinquième des vieilles centrales nucléaires et au charbon du Royaume-Uni. [Mark Robinson/Flickr]



Une dizaine de fournisseurs d’énergie verte et autres régies municipales allemandes et autrichiennes ont déposé une plainte à la Cour européenne de justice contre les subventions à Hinkley Point, une future centrale nucléaire britannique.


C'est une alliance d'un nouveau genre. Une dizaine de producteurs d’énergie verte et de régies municipales ont attaqué la Commission devant la Cour de Justice de l'UE, à propos des subventions accordées à la centrale nucléaire d’Hinkley Point. Ils estiment que ces « subventions excessives à l’énergie nucléaire » constituent une « aide effective illégale », et demandent à la cour de justice d'annuler la décision de l'exécutif européen.


En octobre 2014, la Commission européenne avait de fait approuvé l’aide apportée par le Royaume-Uni à la construction des réacteurs nucléaires d’Hinkley Point.


Or cette aide « n’aurait jamais dû être approuvée », selon Sönke Tangermann, président de Greenpeace Energy, producteur d'électricité coopératif de Hambourg. Neuf autres entités allemandes et autrichiennes ont rejoint la société pour lancer cette action en justice: Oekostrom AG, Energieversorgung Filstal et les régies d’Aalen, de Bietigheim-Bissingen, de Bochum, de Mainz, de Mühlacker, de Schwäbisch Hall et de Tübingen.

>> Lire : L'Autriche veut bannir le nucléaire du plan Juncker

Distorsion du marché


Récemment, les plaignants ont présenté des études scientifiques qui estiment à 108 milliards d’euros les subventions garanties que l’État versera à la centrale nucléaire.


À 12 cents le kilowatt-heure, la rémunération garantie de la centrale sera trois fois plus élevée que les prix du marché et ne devrait en outre pas changer pour les 35 ans à venir, compte tenu de l’inflation.


Les fournisseurs d’énergie accusent la Commission d’« erreur procédurière et juridique ». Ils craignent que ce paquet de subventions très complet, ajouté à d’autres projets nucléaires, ne crée une « énorme distorsion » du marché européen de l’énergie et ne donne un avantage considérable au nucléaire.


Les services municipaux s’inquiètent quant à eux de l’impact des subventions sur l’efficacité des centrales électriques décentralisées, qui pourraient être amoindri, explique Achim Kötzle, responsable de l’économie énergétique à Tübingen.


« Pour nous, le danger est que les marchés de l’énergie européens soient inondés d’électricité nucléaire subventionnée, et que la production d’énergie écologique et efficace ne survive pas sur le marché », explique-t-il.


L’Autriche a également mis en cause les aides d'État perçues par Hinkley Point, mais Berlin n’a pas voulu s’impliquer dans cette plainte. Le gouvernement allemand n’a en effet pas souhaité prendre de mesures légales contre la décision controversée de la Commission, pour des raisons politiques.

>> Lire : Vienne attaque le programme nucléaire britannique


Greenpeace Energy exhorte à présent le gouvernement à porter également plainte contre la Commission.


« Quiconque accepte sans broncher le retour de l’énergie nucléaire en Europe, une énergie coûteuse, risquée et engendrant des distorsions de la concurrence, trahit la transition énergétique dans son propre pays », martèle Sönke Tangermann.


En quelques semaines, plus de 15 000 personnes ont répondu à l’appel de la communauté de l’énergie et envoyé mails, cartes postales et pétitions en ligne exhortant les politiques allemands à s’opposer aux subventions d’Hinkley Point.


Les entreprises et États membres qui souhaitent encore porter plainte contre la décision de la Commission doivent le faire d’ici le 23 juillet.


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