Georges Sapy
08/05/2018 Pour estimer la « capacité garantie » du parc éolien français, RTE postule dans son bilan prévisionnel 2017 que le facteur de charge éolien (FC) a 90 % de chances d'être supérieur à 10 % pour l'éolien terrestre et 20 % pour l'éolien en mer (par rapport aux capacités respectives installées). Or, cette estimation pose question à plusieurs égards au vu de plusieurs analyses et retours d'expériences convergents :
-L'analyse des retours d'expérience des productions éoliennes durant les mois les plus critiques de décembre et janvier, qui montre que le FC de l'éolien descend sous la barre des 10 % 4 à 12 fois par mois (6 fois en moyenne) et peut atteindre des valeurs très faibles (jusqu'à 0,3 % !). Ce n'est donc pas un phénomène rare. De plus, l'observation de la monotone des productions éoliennes de 2016 par exemple montre que le FC est inférieur à 10 % pendant... 26 % du temps !
-Dans son bilan prévisionnel 2016, RTE concluait que la contribution de l'éolien ne permettait pas de dégager de marges supplémentaires significatives de couverture des défaillances. En clair, qu'on ne pouvait compter dessus. Alors que cette contribution atteint 10 et 20 % dans le bilan 2017...
-L'existence de corrélations statistiques entre les pointes de consommation et la fréquente quasi-absence de vent lors des anticyclones polaires hivernaux,
-Enfin, les quatre gestionnaires de réseaux de transport (GRT) d'outre-Rhin, homologues de RTE, concluent, au vu des retours d'expérience de leurs très importants parcs éoliens terrestres et en mer, que la capacité garantie de ces derniers ne dépasse pas 1 % de la puissance éolienne totale installée... Soit 10 et 20 fois moins que ce que retient RTE !
En résumé, là où les gestionnaires de réseaux allemands adoptent une approche déterministe prudente, validée par leur retour d'expérience, RTE retient une approche probabiliste dont les justifications scientifiques soulèvent des interrogations, car cela revient à « jouer aux dés » la sécurité d'alimentation en électricité du pays en faisant faussement apparaitre les scénarios à fort taux d'éolien comme plus sûrs qu'ils ne le seront en réalité. L'enjeu de cette approche étant considérable, eu égard aux risques, y compris sur la vie humaine, en cas de coupures massives de l'alimentation en électricité, notre société devenant de plus en plus dépendante de cette dernière.
C'est de facto un choix de société qui est en cause pour l'avenir : juge-t-on acceptable que le pays subisse dans les années à venir (lorsqu'une forte proportion d'éolien sera atteinte dans le mix électrique) des coupures d'électricité, à l'instar de ce que l'on observe dans de nombreux pays en développement, avec une forte probabilité et gravité particulière lors des hivers très froids ? La réponse ne peut être apportée par les seuls calculs probabilistes de RTE, pouvant rester ignorés des institutions de régulation concernées (CRE) et des pouvoirs publics du pays, sans que ces derniers aient la possibilité de faire un choix éclairé et explicite, car ils en assumeront in fine la responsabilité.
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