Les éoliennes de M. Hulot creusent la fracture sociale

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Par Rémy Prud’homme, Professeur des Universités
6 mai 2018 / Usbek

En hommage à Sainte « Transition énergétique », la France se couvre d’éoliennes. Elle comptait hier une dizaine de cathédrales de plus de 100 m de hauteur. On y trouve aujourd’hui quelques 7000 éoliennes de plus de 150 mètres de hauteur. Si les fantasmes de M. Hulot se réalisent, vingt mille demain. Où sont-elles implantées ?
Dans les zones les plus pauvres du pays. Dans la « France périphérique » dont parle Christophe Guilly. Considérons la répartition par région.  
-7% seulement des éoliennes françaises sont implantées dans les quatre régions les plus riches en termes de revenu des ménages par habitant (Ile de France, Auvergne, Rhône-Alpes, Provence Côte d’Azur);
-52% le sont dans dans les quatre régions les plus pauvres (Nord Pas de Calais, Picardie, Champagne-Ardennes, Languedoc).
La répartition intra-régionale n’est pas moins tordue. A l’intérieur de chacune des régions, ce sont les terroirs les plus déshérités qui sont éoliennisés. Vous ne trouverez aucun de ces monstres dans le Lubéron ou à l’Ile de Ré.
Cette répartition des éoliennes n’est pas le fruit du hasard, ou du régime des vents, elle s’explique facilement. Partout, les habitants détestent le massacre des paysages, le bruit et les ultra-sons, le bétonnage des terres, la multiplication des fils électriques dans le ciel, les milliers de tonnes de ciment déversées dans les champs ou les forêts, la décimation des oiseau et des chauve-souris, les lumières rouges qui clignotent toute la nuit. Des associations de défense se créent par centaines pour empêcher des projets. Le FED (Fédération de l’Environnement Durable) en fédère plus de 1300. Mais les zones les plus pauvres sont les plus faciles à conquérir par les multinationales de l’éolien. Bien que la législation favorise généreusement l’installation d’éoliennes (il est plus facile d’implanter une éolienne qu’un abri de jardin), des recours restent cependant possibles en principe. Mais dans les zones les plus pauvres, les victimes n’ont pas toujours les moyens de s’engager dans le parcours du combattant des procédures. Les maires des communes désargentées disent plus facilement « oui » pour une bouchée de pain (il y avait pourtant encore trop de maires à dire « non » : on a décidé de ne plus rendre leur avis obligatoire). Les paysans les plus démunis se laissent plus facilement tenter par le revenu (on pourrait dire : le bakchich) que leur promettent les promoteurs pour l’installation d’une éolienne dans leur pré ou leur bois. Comme chacun sait, il est plus facile d’exploiter les pauvres que les riches.
Les conséquences de cette éolianisation de la France périphérique sont dramatiques. Elles sont d’abord économiques. L’implantation d’une éolienne diminue de 10 à 40% la valeur des logements voisins, qui sont souvent l’essentiel du patrimoine des victimes. Elle est un obstacle dirimant à la venue de touristes ou de retraités français et étrangers, qui constitue – ou constituait – l’une des rares sources de revenus d’appoint. Les 7000 éoliennes implantées contribuent à enfoncer les zones périphériques dans la spirale du non développement – entre deux discours convenus sur la « priorité » donnée à la « sauvegarde de la ruralité ».

Quels dégâts la multiplication par quatre ou cinq voulue ne va-t-elle pas causer ?
Mais les conséquences sont surtout sociales et politiques. Les citoyens de ces morceaux de France se sentent impuissants, abandonnés, trahis, livrés au rouleau compresseur des affairistes alliés au et encouragés par le pouvoir politique. Ils savent bien que la France , qui dispose déjà d’une électricité bon marché, décarbonée, abondante, et domestique, n’a nullement besoin de cette électricité éolienne coûteuse, intermittente, destructrice. Les résidents ainsi attaqués ou menacés avaient déjà souvent perdu leur emploi, leur activité, leur école, leur médecin, leur bureau de poste. Il ne leur restait plus que leur paysage, leur environnement, le chant de leurs oiseaux, le silence de leurs nuits. Et voilà qu’on leur vole tout cela. Quels mots peuvent dire leur frustration, leur rancœur, leur fureur ? Ceux qu’ Eluard écrivit au lendemain de Guernica ne sont peut-être pas trop forts :
Visages bons à tout
Voici le vide qui vous fixe
Ils vous ont fait payer le pain
Le ciel, la terre, le sommeil
Et la misère
De votre vie
Ils disaient désirer la bonne intelligence
Faisaient l’aumône partageait un sou en deux
Ils persévèrent ils exagèrent ils ne sont pas de notre monde


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