Les énergies renouvelables : le monopole solaire-éolien

http://geopolitique-electricite.fr
Lionel Taccoen

Lettre n°84- 31mai 2018

Les énergies renouvelables : le monopole solaire-éolien
Il y a dix ans, un tiers des investissements mondiaux concernant les énergies renouvelables était consacré à d’autres sources que le solaire et l’éolien. En 2007, 60 milliards de dollars s’étaient dirigés vers les biocarburants, la biomasse, la petite hydraulique, la géothermie et les énergies marines. En 2017, ce montant s’est réduit à moins de 12 milliards. Solaire et éolien bénéficient désormais de 96% des fonds. Cette évolution est majeure. L’électricité, seule débouché possible du solaire et de l’éolien, ne compte que pour 18,5% de la consommation finale d’énergie mondiale. L’impact de ces deux sources sur le mix énergétique est marginal. Il est faible pour les émissions de gaz à effet de serre.
Il existe une contradiction entre les baisses des prix de production du solaire et de l’éolien et une augmentation continue des factures des clients. La cause est une profonde mutation des secteurs électriques, dont les coûts suivant plusieurs Cour des Comptes ne sont pas maîtrisés voire mal connus. Les autres moyens de réduire les émissions manquent de moyens financiers. L’établissement du monopole solaire+éolien pour les renouvelables apparaît comme dommageable à la lutte contre le réchauffement climatique.
Les énergies renouvelables : le monopole solaire-éolien

L’objet de cette étude est d’évaluer l’évolution des programmes actuels de développement des énergies renouvelables et ses conséquences.

Explicitons ces termes : comment définir les énergies renouvelables ?
Il y a un consensus pour admettre qu’une énergie renouvelable ne doit pas émettre de gaz à effet de serre lors de sa production d’énergie. Plus généralement, une énergie renouvelable n’a pas d’impact irréversible sur l’environnement. Ceci n’est pas suffisant pour définir une politique.
Pour recevoir des aides, il est nécessaire que les énergies renouvelables reçoivent une définition juridique précise. Celle-ci n’est pas partout la même. L’Union européenne, se contente d’une liste. L’hydraulique en fait partie, mais seuls les petits barrages peuvent être aidés. Toute la production hydraulique est néanmoins comptabilisée dans les statistiques. Le bilan est plus flatteur pour les Européens. Les États montagneux, la Suède, l’Autriche, la Norvège ou la Suisse deviennent des parangons des énergies renouvelables sans effort particulier. La prise en compte de l’hydraulique, différente de par le monde fait souvent varier les définitions et gêne les comparaisons statistiques. L’ONU privilégie les installations hydrauliques de 1 à 50MW. L’IRENA (International Renewable Energy Agency) considère de préférence toutes les installations hydrauliques de 0 à 10 MW.
Certains pays, comme la Chine, l’Inde et quelquefois les Etats-Unis, utilisent la notion « d’énergie propre », définie comme toute source n’émettant pas de gaz à effet de serre, donc incluant le nucléaire. Les médias européens présentent quelquefois les bilans « d’énergie propre » dans ces pays comme ceux des énergies renouvelables.

Que veut dire « programmes actuels » ? L’année 2004
A quelle époque a réellement débuté l’idée de « transition énergétique », indissociable de la volonté de promouvoir les énergies renouvelables ? La force du vent est utilisée depuis longtemps et que dire de la combustion de la plus courante d’une biomasse, le bois ? Rechercher le début effectif du mouvement actuel et des premières législations importantes liées à une prise de conscience écologique est important. Nous avons suivi l’ONU, qui, dans ses Rapports annuels concernant les investissements renouvelables, démarre ses études et ses statistiques en 2004, considérant que leur importance économique devient notable cette année-là. .
Ainsi nous prendrons 2004 comme première année d’entrée dans l’histoire du vaste mouvement actuel vers les énergies renouvelables. Ce qui signifie que leur usage immémorial précédent ne relevait pas d’une prise de conscience écologique, mais provenait d’autres considérations. L’exemple des grands barrages hydrauliques construits au XXème Siècle éclaire ces « autres considérations ». Elles étaient purement économiques.

Quelle conséquence allons-nous étudier ?
Le but premier des énergies renouvelables est de rendre plus « propre » le mix énergétique, c'est-à-dire de diminuer les émissions de gaz à effet de serre pour une consommation donnée d’énergie. Il ne s’agit pas de diminuer la consommation, qui relève d’une autre problématique, l’efficacité énergétique, non étudiée ici.
C’est donc l’impact sur la lutte contre le réchauffement climatique qui sera étudié ici.

Deux sources de données principales ont été utilisées:
1. Tous les ans, le Programme des Nations Unies pour l’Environnement publie un Rapport sur les investissements mondiaux de l’année précédente concernant les énergies renouvelables.(1) Rapport nommé dans cette étude « Rapport des Nations Unies ». Les investissements étudiés concernent :
- les projets éoliens, géothermiques ou utilisant la biomasse et les déchets de capacités supérieurs à 1 MW
 - les projets hydrauliques de 1 à 50 MW. - ceux concernant le biocarburant d’une capacité supérieure à une production d’un million de litres par an.
- ceux concernant le solaire et l’énergie marine, quelle que soit leur puissance. Une estimation globale est faite pour les petites installations.

2. Les statistiques de l’ IRENA (International Renewable Energy Agency), organisation intergouvernementale regroupant aujourd’hui 156 Etats, dont les principaux pays européens.

I)Le Rapport des Nations Unies pour 2017 : un bilan flatteur.
A. Des investissements massifs. Des coûts en baisse.
2017 a vu une augmentation record des capacités de renouvelables correspondant a des installations nouvelles d’une capacité totale de 157 GW. Donc largement supérieures aux capacités des nouvelles centrales électriques à combustible fossiles, 70 GW. En 2017, les nouvelles capacités électriques des renouvelables ont représenté 61% de l’augmentation totale du parc électrique. En 2016, elles constituaient déjà 57% de ce total. Avec les conventions du Rapport des Nations Unies, c'est-à-dire sans la grande hydraulique (installations supérieurs à 50 MW), les moyens de production électriques renouvelables représentaient, en 2017, 19% de la capacité du parc mondial et avait généré 12,1% de l’électricité de la planète.

Voici l’évolution depuis 2007 (2) :
 -Année          2007       2010         2013         2014        2015             2016            2017
-% capacité    7,5%      10,2%      13,0%       14,3%        15,7%        17,3%            19%
-% product.   5,2%        6,1%        8,6%       9,2%        10,0%           11,0%            12,1%

Les investissements mondiaux dans les énergies renouvelables furent de 279,8 milliards de $ en 2017. Ils ont atteint, depuis 2010, 2 200 milliards de $, et depuis 2004, 2 900 milliards de $. On notera que le PIB français a été en 2017 de 2 570 milliards de $.
Parallèlement, les coûts par MWh ont beaucoup baissé. De 2010 à 2017 : de plus de 70% pour le photovoltaïque, 27% pour l’éolien terrestre et 44% pour le marin. (3) Ce qui implique des capacités plus importantes pour un investissement donné.
Le résultat est le doublement en sept ans de la part « renouvelables » dans l’électricité


B. L’impact sur le réchauffement climatique.
Le Rapport indique que les énergies renouvelables en 2017 ont évité l’émission de 1,9 gigatonnes de gaz carbonique, soit plus de 5% des émissions mondiales liées à l’énergie (estimées à 32,5 millions de tonnes d’équivalent gaz carbonique).(4)

C. L’Union Européenne
Baisse des investissements...
Les investissements « renouvelables dans l’Union européenne diminuent, passant de 110- 120 milliards de dollars en 2010 et 2011 à moins à 41 milliards en 2017. La baisse a été sévère de 2016 à 2017 dans les trois pays qui, ensemble, accueillent la moitié des investissements : Royaume- Uni (-65%), Allemagne (-35%). et France (-14%).

... contrebalancées par de fortes baisses des coûts.
Cependant, une forte baisse des coûts solaire et éolien a permis, malgré la baisse de ces investissements que plus des 3⁄4 des nouvelles capacités électriques construites en 2017 soient éoliennes et solaires.(5) Soient près de 15 GW pour l’éolien et plus de 6 GW pour le solaire.(6)
Nous sommes en présence d’investissements massifs a priori susceptibles d’entraîner des mutations majeures dans le domaine de l’énergie.

II) L’établissement du monopole solaire + éolien.
Le Rapport des Nations Unies fournit les investissements dans les énergies renouvelables (hors grande hydraulique), de 2004 à 2017, et par source d’énergie.

Voici les résultats dans le tableau ci-dessous, en milliards de $. Nous indiquons également la part en % des investissements consacrés au solaire additionné de l’éolien.
-Année                2004    2007     2010      2013       2014       2015        2016        2017
-Inv. totaux         47,0    158,9    243,6     234,4      284,3      323,4       274,0       279,8
-Solaire+éolien   65%    62,5%   84,1%   88,0%    90,0%    94,0%      94,3%     95,8%

Nous constatons, depuis 2007, une augmentation régulière de la part cumulée du solaire et éolien électriques qui conduit à un quasi-monopole de leurs investissements.

Les Nations Unies considèrent sept sources d’énergie renouvelable, le solaire, l’éolien, la biomasse (principalement du bois), les biocarburants, la petite hydraulique (de 1 à 50MW) et les énergies marines (vagues, courants et marées).
Voici la répartition en % des investissements en 2007 et 2017 :
Année   Eolien      Solaire     Bio carburant    Biomasse+déchets   Petite hydraulique.  Géothermie   En.marine
2007       38,3%       24,4%             17,2%                 14,4%                              4,1%                            1,1%         0,5%
2017       38,3%        57,5%              0,7%                   1,7%                               1,2%                              0,6%       0,1%

Les investissements autres que solaire et éolien s’effondrent. Non seulement en pourcentage, mais aussi en valeurs absolues (chiffres en milliards de $) :
Année     Eolien      Solaire     Bio carburant    Biomasse+déchets   Petite hydraulique.  Géothermie   En.marine
2007           60,9           38,7           27,4                                  22,9                         6,5                           1,7                  0,2
2017           107,2       160,8          2,0                                     4,7                          3,4                            1,8                  0,2

En dix ans, ni la géothermie, ni les énergies marines n’ont décollé, et leurs apports restent négligeables. Les bioénergies se sont littéralement effondrées, leurs investissements totaux sont passés de plus de 50 milliards à moins de sept milliards de $. La petite hydraulique résiste mieux, mais ses investissements sont divisés par deux. L’ensemble des investissements autres que solaire et éolien est passé de près de 60 milliards de $ en 2007 à 12 milliards en 2017. Cinq fois moins.
L’éolien garde très exactement la même part. Ses investissements ont augmenté parallèlement aux investissements totaux : +76%. Les investissements dans le solaire explosent : ils ont été multipliés par plus de quatre en dix ans.
Le développement des énergies renouvelables dans le monde, diversifié il y a dix ans, se concentre aujourd’hui sur deux sources, le solaire et l’éolien. Les autres formes de renouvelables s’effondrent ou restent marginales. Les investissements dans les biocarburants ont été divisés par treize en sept ans.
L’Union Européenne suit la même évolution, solaire et éolien accaparent 95% des investissements en 2017 (38,8 milliards de $ sur 40,9 milliards au total).

Comment expliquer l’apparition de ce quasi-monopole solaire + éolien?
Nous n’avons pas trouvé d’explication. Principalement parce que le phénomène est largement passé inaperçu. Il n’est donc pas étudié.
Nous nous contenterons de quelques réflexions. L’envolée du solaire a certainement un lien avec la baisse importante de ses coûts, mais l’éolien a aussi fait des progrès et reste moins cher. Or il a cédé la première place au solaire, et de loin. Les biocarburants rencontrent des problèmes techniques, mais leur dégringolade est tellement spectaculaire que l’explication paraît insuffisante. La chute de la petite hydraulique est curieuse car les capacités non installées restent importantes. Une explication bien plus simple se trouve dans les Rapports de plusieurs Cours des Comptes, française, allemande et européenne qui pointent toutes les trois une certaine irrationalité dans les stratégies concernant les transitions énergétiques (7) et plus particulièrement dans la répartition des crédits pour les énergies renouvelables.

Une raison possible est que, solaire et éolien soient populaires.

Le soleil et le vent, depuis le fonds des âges, ont toujours accompagné la vie des hommes. Le poète a écrit : « le souffle de la vie est dans la lumière du soleil, et la main de la vie est dans le vent ».(8)
III) Une évolution majeure.
Les programmes actuels de développement des énergies renouvelables se résument aujourd’hui à un puissant mouvement de promotion du solaire et de l’éolien, qui bénéficient de 96% des investissements. Cela correspond à une évolution majeure.

La première conséquence est de focaliser encore plus les renouvelables sur le secteur électrique. Or dans le monde, l’électricité ne correspond qu’à 18,5% de la consommation finale d’énergie (9). En conséquence, l’expansion de 6,1% à 12,1% des renouvelables dans l’électricité en sept ans correspond à une augmentation de 1,1% de ces énergies dans la consommation finale d’énergie de la planète de 2007 à 2017.
La focalisation des renouvelables dans l’électricité ne modifie que marginalement et très lentement les mix énergétiques.

La deuxième conséquence provient de l’intermittence du solaire et de l’éolien. Certes leurs capacités construites (puissance installée) sont plus importantes, en Europe et dans le monde que celles des centrales classiques. Mais ces dernières sont capables de fonctionner en permanence et produiront plus d’électricité. La plus grande centrale solaire de France, Cestas, en Gironde, a une capacité de 250 MW, mais ne produit pas plus qu’une installation nucléaire de 60 MW (10). En 2017, les capacités renouvelables, hors grande hydraulique, représentaient 19% du parc mondial, mais produisait 12% de l’électricité. Le monopole solaire+éolien creusera encore plus l’écart entre capacité et production.
La focalisation sur le solaire et l’éolien déconnecte les parts en capacité et en production. La suprématie du développement en renouvelables disparaît.

La troisième conséquence provient encore de l’intermittence. La production électrique doit être, à tout instant, égale à la consommation. Or l’électricité ne se stocke que par des dispositifs à l’heure actuelle onéreux. Les études sur les renouvelables sont, aujourd’hui, essentiellement des documents de prospective visant 2025, 2030, voire 2050. Le retour d’expérience, c'est-à-dire l’observation de la réalité présente et les évolutions récentes, manque cruellement. Or il apparaît une grave contradiction entre la baisse des coûts de production du solaire et de l’éolien et l’augmentation des factures d’électricité. Un périodique économique fort connu a pu écrire : « Si solaire et vent sont si bon marché, pourquoi fabriquent-ils une électricité si chère ? » (11). La réalité, aujourd’hui, est que les factures d’électricité sont lourdement grevées par les aides aux renouvelables et que la chute des coûts de production, réelle, n’a pas stoppé les hausses ressenties par les consommateurs. Les trois États les plus avancés en renouvelables intermittents, Danemark, Allemagne et Australie du Sud affichent les factures les plus élevées au monde. L’industrie allemande n’a résisté que par des dégrèvements des taxes renouvelables : 2 à 3 milliards d’euros/an. Les factures pour les familles ont recommencé à augmenter en Allemagne en 2017 (12) et des études convergent vers des dépenses futures très élevées (13). Il faut ajouter des coûts indirects, la construction de nouveaux réseaux, souvent décrits comme intelligents, mais toujours fort onéreux. Les craintes de coupures dues à l’intermittence obligent l’Allemagne à entretenir un parc de centrales hypertrophié ce qui revient cher. Son remplacement par du stockage devra, aussi, être payé.

Certains coûts sont oubliés. Le solaire implique des surfaces importantes. Dans les déserts le terrain est bon marché, mais la demande d’électricité est généralement faible. Par contre, la plus grande centrale solaire française (Cestas) occupe 260 ha dans une banlieue aisée de Bordeaux acquis pour un prix fort modique. Mais de telles occasions se font rares. Concluons par cette phrase de la Cour des Comptes allemande :
« Le Gouvernement fédéral n’a aucune vue d’ensemble des coûts actuels et futurs de l’Energiewende [transition énergétique largement basée sur solaire+éolien] » (14).

IV) Quel impact observé pour le climat de la planète?
En 2017
La croissance mondiale a été de 3,8% (FMI). Si rien n’avait changé quant à l’utilisation de l’énergie, la consommation d’énergie et les émissions auraient donc augmenté de 3,8%, donc de 1,25 Gigatonnes de CO2 Or elles n’ont augmenté que de 0,47 Gigatonne (15). 0,78 Gigatonne a ainsi été évitée.

Quelle est la part des énergies renouvelables dans ce gain ?
Le Rapport des Nations Unies indique que l’apport supplémentaire des énergies renouvelables (hors grande hydraulique) de 2016 et 2017 a été de 0,1 Gigatonne (16). Le gain le plus important provient d’une baisse de 1,7% de l’énergie nécessaire pour une production d’une valeur donnée (meilleure efficacité de l’utilisation de l’énergie), ce qui en termes techniques se traduit par une baisse de 1,7% de l’intensité énergétique (17). Cela correspond à une baisse des émissions de 2016 de 1,7% : donc d’environ 0,55 Gigatonnes (18).
Le solde, 0,23 Gigatonnes est du à une énergie légèrement plus « propre » en 2017, c'est-à- dire émettant moins de gaz à effet de serre pour une consommation donnée. L’impact des renouvelables est naturellement inclus dans ces 0,23 Gigatonnes, mais n’y contribue que pour moins de la moitié (0,1 Gigatonne sur 0,23). Le mix énergétique est donc devenu plus « propre » par différentes autres mesures (par exemple, gaz remplaçant le charbon).
Voici résumées les parts respectives, en gigatonnes des facteurs de baisse des émissions en 2017 :

Gains en baisse d’émissions               Facteurs
-Efficacité énergétique :                          0.55
-Renouvelables (sauf gde hydr.) :         0.10
-Autres mesures de propreté :               0.13
 -Total :                                                     0.78


L’impact sur le climat des investissements de renouvelables est faible.

V) Impact sur le climat : cas de l’Union européenne.
A. L’année 2017
La croissance économique de l’UE a été en 2017 de 2,4% (19).

Si rien n’avait changé dans le fonctionnement du secteur énergétique, la consommation d’énergie aurait grimpé du même chiffre et les émissions aussi. Mais l’UE a utilisé moins d’énergie en 2017 qu’en 2016 pour une production donnée : 0,5% en moins (20). Ceci correspond à une utilisation plus efficace de l’énergie. Il ramène la croissance de la consommation finale d’énergie à 1,9% (2,4% moins 0,5%), et à une émission de gaz carbonique qui augmenterait du même chiffre : 1,9%, si le mix énergétique était resté identique. Or, les émissions de gaz carbonique européennes liées à l’énergie ont augmenté de 1,8% de 2016 à 2017 (21). Pratiquement le chiffre auquel amène le seul impact de l’efficacité énergétique (1,9%).
Le gain par rapport à 2016 est dû essentiellement à une utilisation plus efficace de l’énergie. La « propreté » du mix énergétique européen est resté à peu près le même. Or c’est sur cette propreté que les énergies renouvelables devraient agir. Leur impact apparaît comme bien faible.

B.A plus long terme : des résultats décevants et surprenants

Le développement des énergies renouvelables devrait conduire une énergie plus propre, c'est-à-dire émettant moins de gaz à effet de serre pour une consommation finale d’énergie donnée.
Eurostat mesure ces émissions en les appelant « Intensité des émissions de gaz à effet de serre rapportées à la consommation [finale] ». Effectivement, nous constatons que ces émissions baissent de 2007 à 2015 pour l’Union européenne, alors que les investissements dans les renouvelables sont importants et que leur part dans la production croît. Les renouvelables ont certainement un rôle dans cette évolution favorable, mais en sont-elles la cause principale ?
Comparons les évolutions avant la promotion des renouvelables et après.
Eurostat fournit les données depuis 1990, pour la zone correspondant à l’Union européenne actuelle. On constate que cette baisse des émissions rapportées à la consommation existait avant les programmes de promotion des renouvelables à un rythme similaire, voire supérieur au rythme actuel (22).
Eurostat, pour faciliter la lecture, prend comme valeur d’intensité des émissions, la valeur 100 en l’an 2000. Plus cette intensité d’émissions est faible, plus le mix est « propre » (23). Voici les résultats pour le territoire correspondant à l’Union Européenne actuelle, ainsi que les investissements « renouvelables » des programmes actuels (après 2004 en milliards de $), indiqués par le Rapport de l’ONU par périodes de cinq ans se terminant l’année indiquée :

-Année                              1990          1995             2000           2005          2010           2015
-Émissions                         112         105(-6%)     100(-5%)     96(-4%)     92(-4%)     89(-3%)
-Investissements                -               -                        -              58            391,9         407,5

On s’aperçoit que les émissions de gaz à effet de serre pour une consommation d’énergie donnée baissaient régulièrement bien avant les programmes actuels de promotion des renouvelables.
Elles baissaient même plus vite...ce qui est bien surprenant !

C.L’Allemagne : l’échec absolu
Le choix de l’année 2004 comme début des effets de l’Energiewende semble fort judicieux Cette année-là, les investissements dans les renouvelables s’envolent et dépassent pour la première fois 10 milliards d’euros/an. Les résultats n’en sont que plus surprenants et spectaculaires. Alors que la « propreté » du mix énergétique s’améliorait jusque là à un rythme soutenu, la tendance s’annule !

En 2015, le mix énergétique allemand est aussi sale qu’en 2005 !

-Année                             1990         1995           2000             2005            2010              2015
-Émissions                       114           105(-8%)   100(-5%)      95 (-5%)     94 (-1%)       95 (+1%)
-Investissements             -                 -                  -                     21,0           92,9            95,0

Les Européens ont dépensé 860 milliards d’euros dans les renouvelables de 2004 à 2015. Les Allemands ont contribué pour plus de 200 milliards. Le but était d’obtenir un « mix énergétique » plus propre. L’amélioration de cette « propreté » du mix énergétique européen semble insensible de ces énormes efforts financiers. L’échec allemand est caricatural. L’amélioration précédant le développement des renouvelable a été stoppée.

Dans le monde et en Europe, le rôle des programmes actuels d’énergies renouvelables dans la lutte contre le réchauffement climatique apparaît comme bien plus faible que prévu. Pour l’Union Européenne, c’est la réalité même de ce rôle qui n’apparaît pas.

Les résultats surprenant de l’Union européenne ont fait l’objet d’un titre significatif de l’important média spécialisé Greentech Media : « Les énergies renouvelables européennes en hausse, les émissions aussi »
(24). Les analyses expliquant cette contre-performance manquent. Cela est d’autant plus grave que les investissements réalisés fin 2018 représenteront cinq fois le budget propre de l’Union Européenne (25) qui, lui, fait l’objet d’âpres débats.
Le principe même du développement des énergies renouvelables pour lutter contre le réchauffement climatique ne peut être mis en cause. C’est la mise en œuvre qui est déficiente.

Peu de temps avant la conférence de Paris (Cop 21), la Commission Européenne et l’Agence Européenne de l’Environnement avait annoncé que le rythme de baisse des émissions de gaz à effet de serre s’affaiblissait. Ce que notre étude confirme. Ces deux Institutions avertissant que l’Union européenne n’atteindrait pas, et de loin, les objectifs de baisse des émissions de gaz à effet de serre qui avaient été annoncés pour 2030. (26) Ce qui s’est produit est pire : cette baisse des émissions est stoppée. En France, en 2017, les émissions liées à l’énergie ont augmenté de 3,2% en chiffres réels et de 4% corrigés du climat.


En conclusion
L’évolution des investissements renouvelables montre l’instauration d’un monopole solaire+éolien qui écrase les autres sources. Ainsi les biocarburants, qui bénéficiaient en 2007 de 27,4 milliards de $, sont réduits à 2 milliards en 2017.
En conséquence, les énormes investissements renouvelables se focalisent sur le secteur électrique qui ne fournit que 18,5% de la consommation finale d’énergie mondiale. L’impact sur le mix énergétique de la planète est, en conséquence, dérisoire. L’expérience montre que la part de l’électricité dans cette consommation finale n’augmente que fort lentement.
L’impact sur les émissions de gaz à effet de serre apparaît faible, voire clairement douteux pour l’Union européenne.

Cette focalisation sur l’électricité entraîne une transformation radicale du secteur correspondant. Une contradiction apparaît entre la baisse des coûts de production solaire et éolienne et la hausse des factures des consommateurs, qui ne semble pas maitrisée. Les études de prospective foisonnent mais l’observation de la situation actuelle et des retours d’expérience sont fort rares.
L’instauration du monopole « solaire+éolien » est passé largement inaperçu. Il n’a donc pas été étudié. Il est possible qu’il ne soit dû qu’à la popularité des thèmes « solaire » et « vent ». Le poète a écrit : « le souffle de la vie est dans la lumière du soleil, et la main de la vie est dans le vent ».

Poésie et Économie ont chacune leur valeur, mais pas dans les mêmes domaines. La solution est d’introduire plus de rationalité dans les politiques des énergies renouvelables. Trois Cours des Comptes, européenne, française et allemande, montrent la voie.
L’apparition du monopole solaire+éolien, focalisant les efforts sur la seule électricité et au coût mal connu est un handicap dans la lutte contre le réchauffement climatique.


Notes
1 « Global trends in renewable energy investment 2018 ». ONU-UNEP, Bloomberg New Energy Finance and Frankfurt School.
2 Rapport des Nations Unies-Fig.23
3 Idem p.17. On y trouvera plus de détails.
4 Agence Internationale de l’Énergie- « Global Energy and CO2 status report-2017 »
5 Cf. Greentech Media-14/5/2018 –« European Renewable Are Up. So Are Carbon ».
6 Cf. Statistiques d’ IRENA « Renewable Capacity Statistics 2018
7 Par ex. Cour des Comptes européenne-2017-« L’action de l’UE dans le domaine de l’énergie et du climat »-« ...la mise en œuvre des projets d’énergie renouvelable n’ pas pour principe le rapport coût-efficacité » (Point 56 du rapport)
8 Khalil Gibran-« Le Prophète ».
9 Un peu plus dans l’Union Européenne, 20%. La France a un secteur électrique développé et cette part atteint 25%.
10 Voir notre étude « La centrale solaire de Cestas »-30/09/2015-www.geopolitique-electricite.com

11 Forbes-23/4/2018. « If solar and wind are so cheap, why are they making electricity so expensive? ».
12 Eurostat tableau nrg_pc_204. L’augmentation de 2,5% provient d’une nouvelle croissance des taxes pour les renouvelables.
13 Düsseldorf Institute for Competition Economics (DICE)- 2016-Voir aussi l’étude IW publiée par Handelsblatt (23/8/2015)
14 Cité entre autres par Frankfurter Allgemeine Zeitung et Tagesschau le 12/1/2017.
15 Rapport de l’Agence Internationale de l’Energie-« Global energy and CO2 status report -2017 »- Les émissions en 2017 sont de 32,5 Gigatonnes, en augmentation de 1,4%, soit 0,47 Gigatonnes par rapport à 2016.Cf. p.3.
16 Cf. Rapports ONU 2017 et 2018, qui donnent 1,9 Gigatonnes évitées du fait des renouvelables en 2017 contre 1,8 en 2016.
17 Ce chiffre de 1,7% provient de l’Agence Internationale de l'Énergie-Cf. note 15.
18 Cf. Rapport note 7- L’intensité énergétique baisse de 1,7% en 2017.
19 Commission Européenne-« Winter 2018 Economic Forecast »-Communiqué du 7/2/2018
20 Baisse de l’intensité énergétique dans l’UE : 0,5% - Agence Internationale de l’Énergie- « Global Energy and CO2 status Report-2017 »
21 Communiqué de presse Eurostat 80/2018 du 4 mai 2018.
22 Cf.Eurostat-TrendEconomy-« Greenhouse gas emissions intensity of energy consumption »- Publié le 14 février 2018.
23 Les données concernant l’intensité des émissions rapportées à la consommation proviennent des tableaux d’Eurostat dans sa publication EconomyTrend et intitulée « Greenhouse gas emissions intensity of energy consumption » du 14/2/2018
24 14/5/2018-« European Renewable Are Up. So are Carbon »
25 Ce budget est de l’ordre de 280 milliards d’euros en 2018.
26 Communiqué du 20 octobre 2015.



php


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

BOURDONS-SUR-ROGNON : LE CONSEIL MUNICIPAL Y VEUT ET... Y VEUT PAS DES USINES ÉOLIENNES

  Précédemment :  CIREY-LÈS-MAREILLES & MAREILLES : LE PROJET DE L' USINE ÉOLIENNE EST AUTORISÉE PAR LA PRÉFECTURE LANQUES-SUR-ROGNO...