Le gaz naturel enrichi à l' hydrogène nous entraîne-t-il vers l' "EnergieKatastrophe"?

    À qui viendrait-il l'idée de préparer son kir* avec un grand cru de Bourgogne?😳
    Et pourtant, c'est bien à ce que se prépare à faire l' Union européenne en matière d'énergie...

  * Le kir, apéritif mélangeait, à l'origine, 1/3 de crème de cassis de Dijon à 20° avec 2/3 de bourgogne aligoté. Les proportions actuelles sont d'environ 1/5e de crème de cassis de Dijon à 20°, allongé de 4/5e de bourgogne aligoté. 
 
  (...) " Un jour de 1904, dans un bar de Dijon, le Montchapet, à l’angle de la rue du même nom et de la rue Constantine, un serveur aurait eu l’idée d’améliorer un vin blanc ordinaire en lui ajoutant de la crème de cassis. Le nom du serveur ne nous est pas parvenu, en revanche, Henri Barabant, maire de Dijon de 1904 à 1908, qui avait la bonne idée d’habiter juste au-dessus du bar, aurait été séduit par ce nouvel apéritif au point de l’introduire aux réceptions de l’hôtel de ville.
  Le blanc-cassis devient populaire en Bourgogne dans l’entre-deux-guerres, avant de s’étendre au reste du pays dans les années 1950. Le député-maire Kir, raconte-t-on, ne buvait rien d’autre que son petit blanc-cass’ au bar de l’Assemblée nationale. Or, par une lettre du 20 novembre 1951, le chanoine donne « en exclusivité » à la maison Lejay­-Lagoute le droit d’utiliser son nom pour « une réclame de cassis, dans la forme qu’il lui plaît et notamment pour désigner un vin blanc-cassis ». Et le blanc-cassis devient jusqu’à nos jours le Kir ! Du coup, en 1952, le liquoriste ­enregistre la marque Un Kir. [...] Aujourd’hui, les quatre liquoristes Lejay-Lagoute, L’Héritier-Guyot, Briottet et Gabriel Boudier sont les seuls à pouvoir utiliser l’ IGP [Indication géographique protégée] « crème de cassis de Dijon ». Résultat : une production de 16,5 millions de bouteilles en 2015 représentant 80 % de la production française de crème de cassis, et dont la moitié part à l’export...
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Hydrogène : le Parlement européen ignore la chimie industrielle

Samuel Furfari

   Appauvrir le gaz naturel avec de l’hydrogène apparait être une approche désormais idéologique, déconnectée des réalités scientifiques.

   Lorsque les armées de Napoléon passaient devant le Clos de Vougeot afin d’honorer ce grand vin de Bourgogne, Napoléon voulait que ses soldats marchassent au pas. Le Parlement européen semble ne pas avoir le même intérêt que Bonaparte pour des choses de valeur puisqu’il confond piquette avec grand vin. Mais ce n’est pas d’œnologie qu’il s’agit ici, mais d’hydrogène.

 https://i0.wp.com/www.contrepoints.org/wp-content/uploads/2021/09/Photo-by-SELIM-ARDA-ERYILMAZ-on-Unsplash.jpg?resize=660%2C374&ssl=1

 Photo by SELİM ARDA ERYILMAZ on Unsplash https://unsplash.com/photos/Grg6bwZuBMs

 
  Le Parlement européen vient de décider qu’en UE certains gazoducs pourront, jusqu’en 2027, encore bénéficier d’une étiquette « projet d’intérêt commun », label qui démontre leur intérêt stratégique ce qui leur permet d’avoir accès plus facilement au financement des banques et à bénéficier d’exemptions aux règles de concurrence de l’UE. La crise en cours des prix de l’énergie montre combien l’approvisionnement en gaz naturel est crucial pour notre économie, mais plus encore pour se chauffer. On ne rappellera jamais assez qu’environ la moitié de l’énergie finale que nous utilisons dans l’UE sert à produire de la chaleur.
  Si on ne perd pas de vue cette forte réalité encore très longtemps incontournable, on comprend que ce ne sont pas les éoliennes ni les panneaux solaires qui vont permettre de se passer du gaz naturel. Cela les députés l’ont compris et ils ont donc permis que ces gazoducs nécessaires à l’achèvement des interconnexions gazières lancés par la Commission Juncker reçoivent l’estampille de projet d’intérêt commun. Toutefois, pour calmer les ONG environnementales furieuses qui ne veulent plus du tout entendre parler d’énergie fossile, le parlement a assigné à cette possibilité l’obligation de transporter aussi de l’hydrogène, sans d’ailleurs préciser le pourcentage d’hydrogène que le gaz naturel devra contenir. Et c’est là que la comparaison entre le grand cru et un vin médiocre nous
aidera à comprendre de quoi il s’agit.

Appauvrir le gaz naturel avec de l’hydrogène
  Dans la première édition de mon livre L’utopie hydrogène, j’avais intitulé la section qui traite de cette idée « Enrichir le gaz naturel avec de l’hydrogène ». La molécule d’hydrogène étant tellement noble que tout naturellement j’avais choisi ce titre sans trop y réfléchir. Ce n’est qu’en travaillant sur la version anglaise que j’ai réalisé l’erreur et que je l’ai intitulée « Appauvrir le gaz naturel avec de l’hydrogène ».
  Voyons pourquoi.
  L’idée n’est pas neuve. Le rapport EUR12610 de la Commission européenne le proposait déjà en 1990 :
  « Dans une période de transition, l’hydrogène pourrait être ajouté au gaz naturel et ce mélange être transmis par les gazoducs existants. Il faut toutefois garder à l’esprit que le système de gazoduc de méthane existant n’est pas optimisé pour le mélange. En fait, l’hydrogène a un pouvoir calorifique volumétrique égal à environ un tiers de celui du méthane »
  Cesare Marchetti, un brillant physicien fonctionnaire européen, l’avait proposé encore plus tôt, en 1973 :
   « C’est pourquoi, lors d’une conférence à Moscou, j’ai fait une proposition audacieuse, à savoir réformer en cours de route une partie du méthane que la Russie vend en Europe en utilisant l’énergie nucléaire. […] En mélangeant l’hydrogène avec le méthane distribué, le réseau distribuerait l’hydrogène dans toute l’Europe »
  Mais lui proposait de le faire avec l’énergie honnie par les institutions européennes.
  À présent, l’Allemagne — le pays qui nous entraine vers la EnergieKatastrophe — propose d’utiliser du gaz naturel enrichi à l’hydrogène, dans le jargon anglais : « hydrogen-enriched natural gas » — HENG. On mélangerait au gaz naturel de l’hydrogène, dans une proportion de 5 à 20 % pour tenir compte des normes de sécurité en vigueur, car il y a des raisons objectives pour lesquelles de grandes quantités ne peuvent être injectées. Cependant, l’hydrogène sous forme gazeuse possède un pouvoir calorifique d’un tiers de celle du méthane, 10,8 MJ/m³ contre 35,8 MJ/m³. Un ajout de 20 % d’hydrogène dans le réseau gazier diminuerait le pouvoir calorifique du mélange à 30,8 MJ/m³, soit une perte de 14 % en pouvoir calorifique, tout en réduisant de 20 % ses émissions de CO₂. Dans ce contexte, la question qui se poserait naturellement est de savoir comment inciter les fournisseurs de gaz et les utilisateurs finaux à utiliser un gaz plus pauvre.
  On ne peut pas l’envisager rationnellement, car cela reviendrait à ajouter un produit à haute valeur ajoutée, produit à partir du méthane !, à du méthane bon marché. En effet, actuellement près de 90 % de l’hydrogène produit dans le monde, 130 millions de tonnes par an, provient de reformage du gaz naturel. C’est la méthode la plus simple et la moins chère et elle consomme sept fois moins d’énergie que l’électrolyse de l’eau.
  Donc ils espèrent produire — probablement en Russie, mais le Parlement européen ne le dit pas —
de l’hydrogène à partir de gaz naturel, russe, pour ensuite le diluer dans… du gaz naturel.

Se chauffer en brûlant des sacs à main Louis Vuitton

  Ce serait comme ajouter un grand vin — par exemple du Château Petrus ou Clos de Vougeot ― à du vin à prix réduit pour mieux s’en débarrasser, ce qui est plutôt surréaliste. Peut-on un seul instant envisager que Gazprom préfèrera vendre de l’hydrogène au prix du gaz naturel alors qu’il en obtiendrait un prix plus élevé en le vendant à la pétrochimie n’importe où dans le monde ?
  La principale utilisation de l’hydrogène est la production d’ammoniac qui lui sert à produire des engrais indispensables pour alimenter une population mondiale en croissance. Et eux pensent sérieusement de bruler cette molécule fabriquée à partir de méthane pour se chauffer ? C’est comme — pour rester dans l’analogie des produits de luxe — se chauffer en brulant des sacs à main Louis Vuitton.
  Lorsqu’on perd de vue les principes scientifiques — en l’occurrence dans ce cas ceux de la chimie industrielle —, on fait de l’idéologie. Il est temps comme je l’explique dans mon livre L’utopie hydrogène que l’UE abandonne ce rêve que la Commission européenne avait pourtant étudié dans tous ses aspects dans les années 1970-1990.

  Le dernier ouvrage de Samuele Furfari est Écologisme. Assaut contre la société occidentale, Éditions VA.

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