Victoires-Éditions
19/01/2012
Commentaire : comme une prophétie : c'était il y a 6 ans.
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Environnement - Energie - Transports
Dans un rapport rendu public le 18 janvier, la haute juridiction financière pointe l'imprécision dans le suivi du Grenelle de l'environnement, ses lacunes fiscales et préconise des ajustements dans les objectifs qu'il fixe, notamment en matière de transports.
Les objectifs du Grenelle sont-ils soutenables financièrement ? A cette question, qui mérite d'être posée en pleine disette budgétaire, la Cour des comptes a donné une réponse mitigée dans le cadre d'un référé rendu public le 18 janvier 2012 et qu'elle avait adressé le 3 novembre dernier au Premier ministre. L'exercice présente un aspect inédit puisqu'il est pour la première fois rendu public, comme l'autorise la dernière réforme de la juridiction financière. Il faisait l'objet le 18 janvier d'une présentation devant la commission des finances de l'Assemblée nationale. Les députés ont salué l'initiative mais regretté que ce bilan d'étape triennal (2009-2011) ne porte que sur les comptes de l'Etat. "Il n'inclut pas les financements engagés par les collectivités locales et les partenaires privés, qui sont pourtant des acteurs essentiels du Grenelle", a déploré Hervé Mariton, député de la Drôme et rapporteur du budget transports à l'Assemblée. A noter : dans son dernier bilan d'activité, la Commission consultative d'évaluation des normes (CCEN) évaluait le coût annuel des lois Grenelle 1 et 2 pour les collectivités à 220 millions d'euros.
Didier Migaud, premier président de la Cour des comptes, a pour sa part regretté l'imprécision dans le suivi du Grenelle : "Il manque pour le suivre un tableau de bord efficace." En effet, les rapports produits par le Commissariat général au développement durable (CGDD), qui sont transmis une fois par an au Parlement, ne suffisent pas. "Ces rapports rendent davantage compte des moyens mis en œuvre que des résultats obtenus, alors même que la loi Grenelle 1 avait défini des objectifs précis à moyen terme, à l'horizon 2010 ou 2012", indique le rapport de la Cour. Autre écueil : ils font l'impasse sur les moyens mis en œuvre par d'autres ministères que celui de l'Ecologie, par exemple celui de l'Agriculture, qui agit pourtant dans le développement de l'agriculture bio et la réduction de l'usage des pesticides.
Un coût de 5 milliards d'euros pour l'Etat
Loin des 4,3 milliards budgétés entre 2009 et 2011, la dépense exécutée est de 3,5 milliards d'euros selon la Cour. Les dépenses, plus délicates à estimer dans certains secteurs (eau, déchets) que dans d'autres (transports), n'ont pas dépassé le niveau initialement prévu. En coût net, le Grenelle a coûté 5 milliards d'euros à l'Etat. Mais le bât blesse plus du côté des recettes. Les magistrats ont ainsi sanctionné le volet fiscal du programme. "La maîtrise de l'outil fiscal a été inefficace. Une mesure telle que le bonus-malus automobile a accentué ce déséquilibre. Quant aux deux principales sources de recettes attendues, la contribution carbone et l'éco-redevance poids lourds, elles ont soit été annulées soit reportées à 2013", a relevé devant les députés Didier Migaud.
Du côté du bâtiment, l'instauration du crédit d'impôt et de l'éco-PTZ font partie des mesures saluées par la Cour pour leur impact effectif sur la consommation d'énergie et sur les émissions de gaz à effet de serre. Un constat partagé par le CGDD, qui publiait en décembre dernier une étude à ce sujet. L'un comme l'autre pointent néanmoins leurs insuffisances et doutent que ces seuls outils permettent d'atteindre l'objectif de réduction de 38% des consommations d'énergie du parc résidentiel en 2020. Du côté des énergies renouvelables, les objectifs fixés d'ici 2020 par le Grenelle en vue d'augmenter leur part dans la consommation finale d'énergie (elle est de 12,9% en 2010) devraient être tenus selon la Cour. Elle prévient néanmoins que la facture du consommateur augmentera en conséquence.
La Cour relève aussi le manque à gagner en l'absence d'un réel travail fait sur les niches fiscales dommageables à l'environnement. Le gisement d'économies est estimé à plus de 2 milliards d'euros. Devant les députés, la détaxation du kérosène pour les vols intérieurs a été évoquée. "Dans l'eau, de gros efforts ont été faits sur les stations d'épuration des villes de plus de 10.000 habitants mais il reste à agir sur les autres. L'autre point noir est l'agriculture : l'objectif de porter l'agriculture bio à 6% de la surface agricole utile ne sera pas atteint, des dépenses n'ont donc pas été faites et un rattrapage est à effectuer", a ajouté Christian Descheemaeker, président de la septième chambre de la Cour. Enfin, la Cour n'est pas moins critique sur le volet des transports, un secteur où elle préconise de freiner les investissements et de revoir à la baisse les objectifs au regard de la situation des finances publiques. A ce propos, la Cour consacrera un chapitre aux autoroutes ferroviaires dans son rapport annuel publié en février. Elle y inclura aussi un volet sur la fraude aux quotas de CO2 et publiera prochainement un avis sur les biocarburants.
Pour aller plus loin
Le rapport de la Cour des comptes sur l'impact budgétaire et fiscal du Grenelle de l'environnement
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