L’automatisation pourrait creuser les inégalités territoriales

Grégoire Normand
La Tribune



Le rapport indique que "dans 60% des régions des 21 pays étudiés, les créations d'emplois peu susceptibles d'être automatisés ont été plus nombreuses depuis 2011 que les destructions de postes dans les secteurs fortement exposés au risque d'automatisation", souligne l'OCDE. [Shutterstock]

D’après l’OCDE, l’automatisation du travail pourrait frapper des régions entières et accroître les inégalités si aucun effort n’est fait pour renforcer les compétences de la main d’œuvre, explique notre partenaire, La Tribune.

L’automatisation du travail pourrait favoriser les inégalités en matière d’emploi. D’après le rapport Créations et développement économique local 2018 de l’OCDE publié le mardi 18 septembre, l’impact de l’automatisation sur le marché du travail présente de grandes divergences selon les régions des pays développés. « La proportion d’emplois fortement exposés au risque d’automatisation est proche de 40% dans certaines régions (en Slovaquie-Occidentale, par exemple), tandis qu’elle est de 4% seulement dans d’autres (notamment dans la région d’Oslo, la capitale norvégienne) », souligne un communiqué de l’organisation internationale. De fortes disparités apparaissent également à l’intérieur des pays.
« Les innovations technologiques telles que l’automatisation peuvent alimenter la croissance de la productivité, créer de nouveaux emplois et contribuer à rehausser le niveau de vie. Mais nous devons nous prémunir contre tout creusement des disparités régionales en termes d’emploi, tant sur le plan qualitatif que quantitatif », a déclaré le Secrétaire général de l’OCDE, Angel Gurría. « Nous devrions nous attacher avant tout à améliorer les compétences et l’efficience des entreprises dans toutes les régions. »

L’Espagne face à la robotisation
Sur l’ensemble des 22 pays étudiés, l’Espagne est le pays où la proportion d’emplois fortement menacés par l’automatisation présente le plus de variations. L’écart entre la région où cette part est la plus élevée et celle où elle est la plus faible est de 12 points. Ce phénomène est également fortement visible en Slovaquie ou en République Tchèque.
À l’opposé, le Canada est le pays où il y a le moins grand écart (1 point). L’Italie et l’Autriche apparaissent également comme des pays nettement moins vulnérables à ce genre de conséquences. Les économistes de l’OCDE expliquent que ces inégalités tiennent en partie au fait « que les secteurs et les emplois les plus susceptibles d’être automatisés ne sont pas répartis de manière égale sur chaque territoire national ».



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De fortes disparités en France
Pour la France, l’institution internationale a établi, dans une note spécifique, une typologie des régions (découpage à partir des anciennes régions) en fonction des menaces que faisaient peser l’automatisation sur l’emploi récemment crée. Sur la période 2011/2016, trois régions, qui ont continué à créer des emplois, pourraient être fortement touchées par la robotisation. Il s’agit de la Basse-Normandie, la Bretagne et Midi-Pyrénées.
En revanche, sur les régions qui ont continué de détruire des emplois sur cette période, la Champagne-Ardenne, la Picardie, le Nord-Pas-de-Calais, la Lorraine, l’Alsace et la région Poitou-Charentes présentent un degré de menace plus faible.

Des créations d’emplois plus favorables

En dépit du risque accru d’inégalités, les experts de l’OCDE se montrent optimistes. Selon le document, les créations d’emplois peu susceptibles d’être automatisés « ont été plus nombreuses que les destructions de postes dans les secteurs fortement exposés au risque d’automatisation ».
Généralement, les régions les moins menacées se caractérisent par une population avec un niveau de qualification élevé, « un secteur de services exportables et dynamiques », et une forte urbanisation. En revanche, les zones qui souffrent d’une faible croissance de la productivité et d’un marché du travail sinistré risquent « davantage d’être affectées par l’automatisation dans l’avenir, ce qui contribue à aggraver encore la situation de faiblesse relative dans laquelle elles sont enfermées. »

La montée en puissance des machines
Les robots devraient accomplir de plus en plus de tâches que les humains dans les années à venir. Selon un rapport sur l’avenir du travail publié par le Forum économique mondial le lundi 17 septembre, plus de la moitié des tâches seront effectuées d’ici 2025 par des machines contre 29% actuellement. En s’appuyant sur une enquête menée auprès des directeurs des ressources humaines et des responsables de stratégie à l’intérieur des grands groupes, les auteurs du rapport concluent que 54% des employés des grandes entreprises auraient besoin d’une reconversion importante.
Sur l’ensemble des entreprises interrogées, près de la moitié des entreprises anticipent d’ici 2022 une diminution de leurs effectifs à temps plein en raison de l’automatisation. À l’inverse, près de 40% prévoient une augmentation globale de leurs effectifs et plus de 25% s’attendent à ce que l’automatisation crée des nouveaux emplois dans leur société.



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Plus de créations
Si la plupart des économistes n’arrivent pas à trouver un consensus sur le nombre d’emplois crées et détruits en raison de l’automatisation, les auteurs du rapport du forum économique semblent confiants. D’après leur étude, les répondants anticipent une diminution de 984 000 emplois et un gain de 1,74 million.
« L’extrapolation de ces tendances aux grandes entreprises de la main-d’œuvre non agricole des 20 économies couvertes par le rapport suggère que 75 millions d’emplois pourraient être déplacés par un changement de la répartition du travail entre les humains, les machines et les algorithmes, tandis que 133 millions de nouveaux emplois plus adaptés à cette nouvelle division du travail pourraient émerger. »

Des mutations considérables
L’automatisation du travail devrait entraîner des transformations profondes du marché du travail avec des problèmes de pénuries de compétences. Les conséquences concrètes pour les employés sont difficiles à prédire, mais les chercheurs s’attendent à une « énorme perturbation […] au sein de la main d’œuvre mondiale » avec « des changements importants dans la qualité, l’emplacement, le format et la permanence des fonctions ».
Selon l’enquête menée par le forum économique, tous les secteurs prévoient des pénuries considérables notamment dans l’industrie de l’aviation, du voyage et du tourisme prévoyant des besoins de reconversion très importants sur la période 2018-2022. Des pénuries sont également à prévoir dans les secteurs des technologies de l’information et de la communication, des services financiers et des mines et des métaux.
À l’inverse, le secteur de la grande mobilité serait celui qui serait le moins frappé par le manque de compétences et le besoin de requalifier ses employés.



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