Eolien : les alizés sont-ils à peu près uniformes à l'échelle du continent?

Tristan Kamin
09/2018

Commentaire : merci Monsieur Kamin pour votre remarquable travail. Votre démonstration prouve une nouvelle fois, que pour sauver le Climat, les ENR intermittentes, non-pilotables et leur développement ne sont qu'une vaste escroquerie intellectuelle, technique et ...financière.
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Ainsi, de par la variété des vents sur le vieux continent, il y a toujours un endroit où souffle une brise a même d'alimenter ceux où l'air est statique. Ainsi, les variations de production - mais aussi de consommation, mais c'est un autre sujet - s'en retrouvent lissées. Bon, ce concept présente de nombreux écueils - fonctionnement du marché, capacité des interconnexions, pertes, coût de renforcement du réseau, gestion des pics simultanés...

Mais sans discuter de sa faisabilité technique et économique, je vais simplement regarder l'hypothèse à sa base : est-ce qu'à l'échelle du continent, les alizés sont à peu près uniformes ? Le site d' ENTSO-E, le Réseau européen des gestionnaires de réseau de transport d’électricité, met a disposition les courbes de production électrique de chaque pays, heure par heure, moyen de production par moyen de production. C'est d'ailleurs sur les données d' ENTSO-E ainsi que, pour la France, d' que se base l'excellent site de pour produire sa carte en temps réel des émissions de CO2 des mix électriques des différents pays européens.


Intermède
La base de données ENTSO-E n'est pas follement pratique à manipuler. Les données brutes sont à télécharger pays par pays. Et même réseau par réseau. Si la plupart des pays n'ont qu'un réseau, deux à tout casser (Danemark), et si l'Allemagne, le Luxembourg et l'Autriche se regroupent sous un seul réseau... L'Italie a plus d'une dizaine de réseaux différents ! Et autant de fichier à télécharger. Et c'est pas optimisé, hein ! Faut sélectionner un pays/réseau [patientez], "Export Data", "Year.xlsx", enregistrer sous, donner et nom... Pour les dix réseaux italiens et pour chaque autre réseau. Bon, pas question de faire toute l'Europe à ce niveau. Et puis, quel intérêt? Reprenons.

J'essaye de sortir d'un point de vue fermé sur la France, mais je reste centré sur la France : j'ai pris tous les pays interconnectés à la France, et tous les pays interconnectés à ceux-là. Toutes les relations au deuxième niveau, en quelque sorte. Ainsi, sans aller jusqu'en Ukraine, je pousse jusqu'à la Pologne à l'Est, le Danemark au Nord, l'Irlande à l'Ouest et le Portugal au Sud. Je vous filerai la liste complète. Et, basique, je récupère les productions éoliennes onshore et offshore de tous ces pays (France incluse)... et je somme le tout, point par point (pas horaire, pour rappel). Et j'obtiens une charmante courbe de la production éolienne en Europe de l'Ouest du 1er Janvier dernier au 31 août dernier. Bon il manque quelques données sur les derniers jours d'août, c'est approximatif.

Bon, sans rire, ça fait un paquet de turbines, hein. 150 GW, à une vache près. Si je prends la moyenne française d'environ 2.2 MW/mât, ça fait 70 000 éoliennes. Même puissance que le parc hydraulique de toute l'UE, un peu plus que son parc nucléaire. Et la résultante de tout ce parc, c'est ça. Liste des pays et de leurs parcs respectifs, et quelques données statistiques de base inclues sur la figure.

auteur : Tristan Kamin
Bon. C'est sans appel... Ça fluctue toujours énormément, même à cette échelle de 3000*3000 km. On produit entre 7% et 60% de la puissance nominale, ce qui n'est pas sans rappeler le cas français isolé.  La moyenne se situe 38 et 39 GW. Quant aux extrema (le maximum d'une fonction), vous pouvez les évaluer sur la courbe.

 Conclusion
Au final, à cette vaste échelle, que conclure ? Tout simplement que 150 GW peinent à arantir une puissance d'une vingtaine de GW (délivrée 90% du temps sur cette période). Et dans le cas où l'on est prêt à payer le déploiement de 150 GW pour seulement 20 GW de puissance disponible en à-peu-près-base, il faut prévoir de gérer des pics de 80 à 90 GW. Ou accepter de laisser se perdre l'essentiel de la (sur)production. Alors... Certes, on peut concéder un très faible effet foisonnement, parce qu'on arrive à ne tomber sous les 10 GW que très, très exceptionnellement, et qu'on arrive à soutenir 20 GW une large partie du temps, ce qui est est quand même une performance honorable. Mais la puissance à-peu-près garantie est de l'ordre du dixième de la puissance installée. L'intermittence est toujours là, considérable, avec de production stratosphériques et d'autres abyssales, et le problème de back-up reste entier. Aussi,
- Soit on se contente de 10 GW garantis par 150 GW installés et payés, pas de back-up requis, mais une production très largement excédentaire l'essentiel du temps et donc une équation économique infernale.
- Soit on cherche à utiliser toute la puissance mais il faut prévoir un back-up pilotable d'environ 130-140 GW pour un parc éolien de 150 GW. Là encore, l'équation économique n'est pas simple. Et si le back-up est fossile, ne parlons même pas de l'équation écologique !

On m'a demandé les courbes pour le seul éolien offshore.

réalisation : Tristan Kamin
Le minimum se situe à 239 MW, le maximum à 10 170 MW et la moyenne est de 5 738 MW. À noter qu'il y a un changement d'échelle d'un facteur 10 entre ce graphe et les précédents, hein ;) Les variations n'en paraissent que plus violentes.


P.S : si je ne parle de l'énergie solaire, c'est pour ne pas tirer sur l'ambulance ! Quasiment tous les reproches que je fais à l'éolien : puissance garantie VS puissance installée, absence de foisonnement, variations importantes, décorrélation avec la consommation, et évidemment impossibilité de piloter la production... Tous ces défauts s'appliquent au centuple au solaire ! La production tombe à zéro, que ce soit à l'échelle française ou ouest-européenne, environ 365 fois par an, plusieurs heures de suite à chaque fois. La puissance garantie est donc rigoureusement nulle. Les pics sont très variables d'un jour à l'autre, et encore plus d'une saison à l'autre. Et l'hiver, quand la demande est la plus forte, la production solaire est non seulement très faible mais en plus elle se répartit sur une durée très limitée. Qui évite soigneusement les pics de consommation, avec une puissance quasiment nulle à ces moments. Bien évidemment, pas de foisonnement ni de pilotabilité. Et un impact environnemental plus important que l'éolien. En termes d'émissions de GES, mais aussi en quantités de matériaux consommés par kWh - et en variété de ces matériaux.
Par contre on peut concéder au solaire que la production est plus aisée à prévoir que celle de l'éolien. Mais c'est léger comme avantage.




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