Une jeunesse sacrifiée et qui le sait

Par Guillaume Liégard  
9 mai 2016



photo cc Jean-Paul Romani


Commentaire:  Oh! Jeunesse, soit la bienvenue à nos côtés. Ici, on ne te promet pas le grand soir mais on t'a gardé toute ta place et... une part de gâteau, fait maison. On a besoin de toi. À bientôt!?

OPTIMISONS: ZÉRO ÉOLIENNE et BASTA!

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Une récente enquête, peu médiatisée, établit l’ampleur de la désespérance politique chez les 18-25 ans. Sentiment d’abandon, progression de l’abstention et des intentions de vote FN : c’est un feu qui couve dans la jeunesse.

C’est une enquête qui aurait mérité de faire la une de tous les grands médias. Réalisée par l’Ifop pour le compte de l’ANACEJ (Association nationale des conseils d’enfants et de jeunes), elle n’a donné lieu qu’à des commentaires sur le volet des intentions de vote des 18-25 ans à la prochaine élection présidentielle. Pourtant, au-delà des préférences électorales, c’est bien le portrait d’une jeunesse laissée pour compte qui se dessine question après question.


Une jeunesse abandonnée


Sobrement intitulé "Le regard sur sa situation économique et sociale personnelle", la troisième partie de l’étude de l’IFOP se révèle la plus riche d’enseignements sur l’état réel de ce que ressent la jeunesse en France.

Ainsi, à la première question, "Globalement, quel est votre état d’esprit face à la société française actuelle ?", les 18-25 ans sont presque un sur deux (48%) à répondre : "révolté". Signe des temps qui en dit long sur la France de 2016, ils sont même 27% à se déclarer "résignés". Avec seulement 8% de "confiant" et 5% d’ "enthousiaste", le nouveau credo du gouvernement qui serine à tout va le "ça va mieux" apparaît pour le moins assez conceptuel.


Interrogés sur le pronostic sur leurs conditions de vie dans dix ans, les 18-25 ans sont 48% à répondre "mieux qu’aujourd’hui", 30% "moins bien qu’aujourd’hui" et 22% à penser que cela n’évoluera pas. Dans une précédente étude menée à l’automne 2014, la même question avait été posée avec des résultats forts différents. Ils étaient en effet 64% à penser que la situation s’améliorerait et seulement 16% à estimer qu’il y aurait une aggravation. Bref, un beau bilan pour le gouvernement, qui avait fait de la jeunesse la priorité du quinquennat et qui la désespère chaque jour un peu plus.


Très forte poussée de l’abstention

Corollaire logique de ce qui précède, pour l’élection présidentielle de 2017, l’indice de l’abstention chez les 18-25 ans s’établit à 52% contre seulement 48% pour la participation. Certes, cela semble un progrès par rapport aux dernières élections régionales, lors desquelles l’abstention avait atteint des sommets dans la jeunesse avec 72%. Mais, parce qu’il faut comparer ce qui est comparable, c’est bien la précédente élection présidentielle qui doit être la référence. Selon diverses enquêtes qualitatives publiées après le premier tour en avril 2012, l’abstention avait atteint 27% parmi la fraction la plus jeune de l’électorat français.

S’il faut bien sûr rester prudent sur la validité d’un sondage réalisé "à froid", près d’un an avant l’élection, il n’en demeure pas moins que l’enquête de l’Ifop donne des indications claires sur les tendances lourdes à l’œuvre. En moins d’un quinquennat Hollande, l’abstention aurait presque doublé chez les 18-25 ans.

Interrogés sur les motivations de leur abstention, la première réponse avec 20% est "pour manifester votre mécontentement à l’égard des partis politiques", la deuxième avec 18% "parce qu’aucun candidat ne défend ou représente vos idées" et la troisième, 11%, "parce que cette élection ne changera rien à votre situation".


30% d’intentions de vote pour le FN
Interrogés, pour 2017, en fonction de diverses configurations qui, en réalité, changent assez peu les intentions de vote, les jeunes désavouent massivement l’actuel chef de l’État sans que cela profite à un autre candidat de gauche : LO et NPA cumulent à eux deux 4 à 5% des jeunes susceptibles de voter, Jean-Luc Mélenchon de 15 à 19%, un candidat socialiste entre 13 et 15% et la candidature écologiste autour de 3% – sauf dans l’hypothèse Hulot où elle obtiendrait 8%. Si faire la somme a encore un sens, l’ensemble de ces candidatures totalisent autour de 40%.

La comparaison avec 2012 s’avère saisissante. Selon l’enquête Ipsos du 22 avril 2012, dans la tranche 18-24 ans, l’extrême gauche obtenait 3%, Jean-Luc Mélenchon 16%, Eva Joly 4% et François Hollande 28% – soit un total de 51%. Le Parti socialiste a ainsi divisé par deux les intentions de vote des 18-25 ans en sa faveur, les autres courants étant à peu près stables.

À l’inverse, Marine Le Pen, qui avait obtenu 15% chez les 18-24 ans, recueillerait désormais de 27 à 31% des 18-25 ans allant voter. La droite parlementaire resterait stable en totalisant environ un tiers des votants.


Et maintenant ?

Les 18-25 ans ont su apprécier à sa juste valeur l’orientation de François Hollande : une politique gouvernementale qui favorise la précarisation et qui valorise la rente plutôt que le travail est absolument contraire aux intérêts de la jeunesse. Ils sont 76% à penser que la société française n’accorde pas sa place aux jeunes pour qu’ils réussissent leur vie professionnelle. Fort logiquement, la sociologie de l’électorat socialiste s’aligne sur la politique menée : plus âgé, plus nanti – bref, tous les attributs d’une formation conservatrice.

À cette étape, deux éléments dominent : le refus par l’abstention et le ressentiment dans le vote Front national, terrible bilan que celui de ce gouvernement. Mais parce qu’on ne construit pas un pays contre sa jeunesse, parce que la révolte l’emporte sur la résignation, il y aura à court ou moyen terme des réactions d’ampleur. Il restera alors à leur proposer une issue positive et progressiste, c’est tout l’enjeu.

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