Peut-on faire crédit à l’ADEME ?

Écrit par SLC
Publié le Jeudi, 21 juillet 2016 


Commentaire: «Tout flatteur vit aux dépens de celui qui l’écoute»
Jean de La Fontaine (1621-1695)
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À propos de l’étude :. MIX électrique 100% renouvelable à 2050


L’ADEME (Agence De l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie) est un établissement public qui conseille le gouvernement pour la préconisation et la mise en œuvre des politiques publiques. Elle vient de publier une étude MIX électrique 100% renouvelable à 2050, évaluation macroéconomique.

Il s’agit là d’un nouvel avatar d’une étude qui avait fuité en mai 2015 avant d’être publié officiellement sur le site de l’ADEME en octobre 2015 sous le titre : Vers un mix électrique 100% renouvelables ? Analyses et optimisations. Largement diffusée, elle avait été comprise comme signifiant :« 100% renouvelables dans le mix électrique, c’est possible », entretenant ainsi la confusion entre la mission prospective et la mission préconisation de l’ADEME. Elle avait suscité de nombreuses critiques de la part d’experts indépendants.

Aussi, à l’initiative de Sauvons le Climat, s’était tenue le 8 janvier 2016, sous l’égide de l’Association des Amis de l’École de Paris du management présidé par Michel Berry, une réunion qui a permis à des experts de Sauvons Le Climat de confronter leur analyse avec celle ses auteurs de cette étude.

L’ADEME était représentée par Didier Roux, Président de son conseil scientifique et membre de l’Académie des sciences, François Moisan, Directeur exécutif de la Stratégie qui, en introduction, a précisé que l’étude relevait de la mission prospective de l’ADEME et qu’il ne s’agissait ni d’un scénario, ni d’une préconisation ; elle ne visait pas à conseiller l’État dans la définition des politique publiques. David Marchal a ensuite fait état des principaux résultats de l’étude.

Bernard Tamain, membre de SLC a ensuite présenté les principales faiblesses de cette étude.

Le compte rendu de cette réunion, rédigé sous l’égide de l’Association des amis de l’École de Paris et validé par les participants, figure désormais sur le site de Sauvons le Climat. Il n’a pas, à notre connaissance, été mis sur le site de l’ADEME.

MIX électrique 100% renouvelables à 2050 reprend les analyses de la première étude mais le ton est tout différent. L’étude d’octobre 2015, nous dit-on, a établi et proposé un scénario complet et cohérent de transition énergétique…et étudié la faisabilité technique et économique de très forts taux d’énergies renouvelables. Aujourd’hui, il s’agit bien d’une préconisation. Voici les principales objections que sa lecture suscite de la part de SLC :

· l'ADEME sous estime de façon absolument irréaliste la consommation électrique en 2050 compte tenu de la part prise par les voitures électriques, par les pompes à chaleur, par l'augmentation de la population et du nombre de logements, par le fait que les gains en chauffage électrique des logements actuellement chauffés à l'électricité seront faibles car ces logements sont déjà bien isolés, par le fait qu'il faut réduire le nombre de logements chauffés au gaz ou au fioul (donc les passer à du chauffage par pompe à chaleur) pour réduire l'effet de serre, par le fait que le chauffage à la biomasse ne peut pas s'accroître très fortement.

· l'ADEME fait appel de façon idiote à 14% d'importation dans des périodes sans vent et sans soleil. Ces importations seront massivement carbonées car l'idée de foisonnement au niveau européen est une fausse bonne idée, comme l'a prouvé SLC. Les prix associés à ces importations seront très élevés (car correspondant à des périodes sans vent et sans soleil sur toute l'Europe), ce qui est ignoré par l'ADEME.

· l'ADEME a oublié de gérer la stabilité du réseau en dessous de l'heure, faute fatale pour un organisme qui se prétend sérieux.

· l'ADEME sous-estime très fortement les coûts du stockage que nécessite l'intermittence. Car l'ADEME surestime les rendements de la solution "power to gas to power", mais aussi car l'ADEME a fortement minimisé les consommations ce qui revient à minimiser fortement les quantités d'électricité à stocker, les énergies renouvelables pilotables ayant été plus que saturées dans leur scénario.

· l'ADEME a tout poussé à l'extrême de façon irréaliste : basse consommation (voir plus haut), mais aussi flexibilité exagérée, coûts renouvelables non réalistes car ignorant par exemple que les coûts ne se réduisent pas aux capteurs solaires eux-même mais doivent inclure leurs installations et la modification des réseaux locaux (ignorée par l'ADEME). Ces exagérations touchent tous les domaines : éolien en mer, stockage (voir plus haut), importations...

· l'ADEME n'a pas pour priorité la baisse des GES : son scénario le prouve et est totalement incompatible avec les objectifs de la COP21. La baisse des émissions de GES ne peut venir d'une modification du bouquet électrique (déjà très performant) mais de transferts vers une électricité propre d'une partie des transports et du chauffage des bâtiments. L'ADEME n'en dit mot et c'est une faute.

· l’ADEME affiche une augmentation du PIB (Produit Intérieur Brut) comprise entre 3,6 et 3,9 %. Une telle augmentation irréaliste[1] est le produit d'un raisonnement tautologique dans la mesure où l’hypothèse implicite est que les ENRs intermittentes sont utiles, ce qui, dans le cas de la France, aurait sans doute dû être démontré. Il n’est donc pas surprenant que, à la sortie du modèle, on trouve ce qu’on y a mis à l’entrée.

· Enfin, l’ADEME a « oublié » de traiter de la stabilité des réseaux.

Finalement, le rapport de l'ADEME est un plaidoyer pour le 100% EnR, fondamentalement contestable pour 2 raisons essentielles :
Il se trouve construit sur des bases manquant de solidité technique, détruisant ainsi sa crédibilité ; 100% EnR n'est actuellement pas envisageable, ni techniquement, ni économiquement. En complément de la part EnR, il faut donc choisir entre énergies fossiles et énergie nucléaire.
Il néglige l'objectif de réduction des émissions de GES, préoccupation majeure de l'Accord de Paris pour le climat 2015 ; il s'attache en effet à la production électrique avec des mesures peu efficaces, visant de fait la suppression du nucléaire, et il omet de s'intéresser aux domaines où les gains potentiels sont importants, transports et bâtiments.

L'ADEME se montre ainsi défaillante face à ses responsabilités d'Établissement Public, conseiller du Gouvernement.

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[1] Nous savons pourtant que le PIB n’est qu’un instrument grossier pour mesurer la richesse produite ; ce n’est qu’un pis aller, utilisé faute mieux. Ainsi, lorsqu’il se trouve coincé dans un embouteillage, l’automobiliste contribue à l’augmentation du PIB ; on pourrait multiplier les exemples.

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