Energie : le projet "Hercule", ou le péril à venir pour EDF, épisode I

"En signant le décret de la Programmation Pluriannuelle de l’Énergie (PPE) basée principalement sur l’industrie du vent, Emmanuel Macron tourne le dos aux décisions du Général de Gaulle qui a donné à la France son indépendance dans le domaine de l’électricité.
Il condamne notre pays au renoncement industriel.
."
Source : https://www.contrepoints.org/2020/05/07/370839-declin-programme-de-lelectricite-de-la-france
Adieu, va!
Ce pays est perdu


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Hercule : le projet de scission d’EDF

Jean-François Raux
Connaisseur du système électrique

Trois volets essentiels
  1. Création d' une structure publique, à part du reste, comprenant le nucléaire, avec ou sans l’hydraulique ;
  2. Filialisation de la partie commerce et service avec les ENR ; 
  3. Regroupement et régionalisation d' ENEDIS et GRDF. Pour faire plaisir à la Direction d’EDF, la création d' une holding de tête qui droit européen oblige, aurait une liberté d’intervention plus que limitée. Aussi, cette structure sera au ¾ financière et pas industrielle.


Volet 1 
Création d' une structure publique, à part du reste, comprenant le nucléaire, avec ou sans l’hydraulique
  Qu’en est-il de cette question complexe. Si tel est le cas, il faudra alors tout y regrouper :
- Recherche & Développement, en lien avec le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) ;
- L’ingénierie, conception,études, achat, contrôle de fabrication des équipements, construction, mise en service ;
- Et tout le « reste » : AREVA, l’exploitation du parc, etc.

Deux questions majeures
Question n° 1 : À qui sera vendu la production nucléaire ?
  Probablement, en totalité, sur le marché, à qui veut bien l'acheter. Le commercialisateur EDF n’ayant pas d’accès privilégié, EDF sera industriellement désintégré. C'est un des objectifs majeurs de la Commission européenne et des concurrents d’EDF. Dans ces conditions, l’avantage compétitif de la France grâce au nucléaire sera annulé en France, mais aussi en Europe : tout le monde pouvant acheter du nucléaire français. C'est un autre objectif fondamental de la Commission et de... l’Allemagne.

Question n° 2 : à quel prix sera vendu le nucléaire ?
   Il pourrait être vendu au prix de marché, en laissant libre un jeu d’enchères au plus offrant. Mais le marché actuel de l’électricité est erratique, d’autant plus que les ENRi se développent avec un fort soutien financier. Le nucléaire existant pourrait, petit à petit, étouffer, obligé qu'il serait, de faire le back-up des ENRi, gratuitement, tout en étant mal rémunéré par le marché. Une étude Franco-Allemande démontre que le marché ne peut pas rémunérer correctement les moyens pilotables. Aussi, cela se fera à un prix régulé. Deux questions essentielles alors !
- Soit, le prix est calculé sur la base des coûts du nucléaire existant y compris sa prolongation à 60 / 80 ans. Ce qui déboucherait sur des prix bas.
- Soit, le prix est calculé sur la base d’un renouvellement du parc nucléaire avec la construction de X réacteurs. Cela s’appelle un « coût de développement », c’est à dire assurer la pérennité de la production à long terme.

Deux réflexions
- La première, c’est qu’il serait inadmissible, sur le plan industriel, que l’on empêche EDF d’assurer la pérennité de son investissement dans le nucléaire.
- La seconde, c'est qu’EDF n’a jamais été prisonnier d’un seul modèle de réacteur. Avec le sauvetage d’ AREVA, on a transféré à EDF la responsabilité industrielle de défendre un modèle de réacteur, l’ EPR. C’est une énorme erreur. EDF doit être en mesure de choisir sur le marché mondial le meilleur réacteur sur la base « performance / sureté / coût ». En clair, faire d’EDF un vendeur d’ EPR a été une énorme « connerie » ! Ce n’est pas son métier.
  Cela étant dit, il faut donner à EDF-Nucléaire le moyen de renouveler son parc de réacteurs, sauf... si l’on ne veut pas poursuivre avec le nucléaire. Auquel cas EDF-Nucléaire sera une entreprise vouée à disparaître. Et cela, on va vite le savoir.
  Un point qui pourrait toutefois s'avérer positif pour Hercule : une structure 100% publique peut avoir accès à des financements publics de long terme, donc à bas taux. Le taux d’actualisation d’une structure publique n’a rien à voir avec le coût du capital d’une SA cotée en bourse.
  L’impact sur le coût du nucléaire en puissance ou en énergie va du simple au double, voir plus. Il est évident que si la Commission européenne interdisait à l’Etat français de garantir les emprunts d’EDF-Nucléaire, la messe serait dite. En tout cas, ce choix signifierait alors qu’elle voulait bien la peau du nucléaire français et que la France était OK.
Hercule, par son volet nucléaire, sera, sans aucun doute, un révélateur des stratégies des uns et des autres.

Volet 2

Filialisation de la partie commerce et service avec les ENRi
  Son capital est ouvert en bourse. Passons sur le fait que le commercialisateur EDF ne bénéficiera plus son intégration avec l’amont, production nucléaire et autre. Les règles de la concurrence européenne rendent le bénéfice de cette intégration très légers. Par contre, il y a deux intérêts majeurs pour les candidats à prendre des parts de capital :
  1. L’accès à une des plus belles bases clients de France pour accélérer les ventes croisées et favoriser une diversification « positive », notamment de TOTAL qui doit sortir du pétrole ;
  2. Accédez à l’ingénierie d’EDF en matière de développement des ENRi ; ingénierie pleine de succès, disons-le, et qui peut, demain, servir de base, avec ENGIE, à l’inéluctable concentration du secteur actuellement atomisé, voir l’histoire du pétrole. Notons que dans ce dernier cas, les prix de rachat garantis des ENRi, permettent d’accéder à des financements pas chers. Donc tout va bien.
Volet 3

Regroupement et régionalisation d' ENEDIS et GRDF
  J’ai parlé du scandale RTE en son temps. En revanche, demain, il va falloir restructurer fortement le secteur des réseaux qui ne peuvent se développer de manière anarchique avec les ENR.La commune ou les regroupements de commune n’est, à l’évidence pas la bonne échelle : trop petite, trop sensible aux effets "magouilles". Aussi, l’idée de regrouper tout cela au niveau de la région n’est pas stupide.   Harmoniser, au sein d’une même structure régionale le développement de l’électricité, du gaz et du gaz-vert est, sans doute, futé et évitera les conneries actuelles des Réglementations Thermiques et de l’ ADEME, pro-gaz irrationnelle.
  J’ai géré ce type d’arbitrage à Paris : cool ! Mais ne nous leurrons pas : ENEDIS, GRDF sont largement indépendants stratégiquement et industriellement de leur maison mère, même si ce sont des "machines à cash" donc sous contrôle financier des « mères » qui ne pèsent que sur les coûts, donc.

À suivre... 

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