Suzanne Césaire : l'autre Césaire

Suzanne Césaire, la poésie en partage
Gabrielle Saïd
 

Suzanne Césaire (1915-1966)

Sous le titre Le grand camouflage, Écrits de dissidence (1941-1945) (Paris, Seuil, 2009, puis 2015), Daniel Maximin a eu l’heureuse idée de réunir en un volume les articles rédigés par Suzanne Césaire dans la revue littéraire et culturelle martiniquaise Tropiques, durant les années de guerre. Heureuse et lumineuse idée car cette édition permet de (re)découvrir une voix féminine restée dans l’ombre, cachée derrière la présence solaire de son époux Aimé Césaire.



Nous suivons à travers les sept articles réunis la pensée et l’engagement d’une intellectuelle dans une Martinique non seulement coloniale, mais encore pétainiste et coupée du reste du monde par le blocus anglo-américain. Une pensée vigilante et passionnée, qui interroge tout en traçant un chemin sûr, ouvert au dialogue, et libre de toute tutelle. Une pensée qui éprouve l’homme et le réel, croisant histoire et géographie, sans oublier de s’éprouver elle-même pour mieux inviter à la dissidence, à la réinvention de soi et du monde. Syncrétiques, ces écrits nous offrent une réflexion ontologique à la fois théorique, socio-politique et poétique. Et surtout ils érigent la poésie en parole essentielle, principe vital et révolutionnaire.

Tropiques ou le grand camouflage
Les Césaire sont de retour aux Antilles depuis 1939, ils sont tous deux professeurs au lycée Schœlcher à Fort-de-France. Aimé Césaire vient de publier Cahier d’un retour au pays natal dans la revue Volonté. A Paris, ils ont connu l’effervescence de la Négritude, point de ralliement des intellectuels noirs venus d’Afrique et d’Amérique. C’est désormais dans l’île natale que la pensée vive et combative doit s’ancrer. C’est alors que l’amiral Robert – et Saurin en Guadeloupe –, contre l’avis des représentants politiques locaux, se rallie à Pétain et, suppléé par le renfort de la marine militaire, place les Martiniquais sous l’autorité policière de Vichy. Comme le rappelle Daniel Maximin dans son introduction : « loin de rester silencieusement soumises, les Antilles entrèrent rapidement en résistance » (p. 9). Nombre d’Antillais choisissent la dissidence, rejoignant par la mer la France libre. D’autres résistent sur place. C’est ainsi que les Césaire fondent, avec quelques amis et collègues, René Ménil, Aristide Maugée et Lucie Thésée, une revue qui prend pour nom Tropiques, nom à la bénignité exotique, en accord avec le régionalisme bon enfant que les autorités coloniales et pétainistes attendent de leur part. Suzanne Césaire s’occupe d’apporter les articles au service de censure avant chaque nouvelle publication : la poésie, les contes, la botanique, l’anthropologie n’inquiètent en rien les autorités qui voient d’un œil complaisant ce passe-temps littéraire.

 
Suzanne et Aimé Césaire

La censure tombera pourtant le 10 mai 1943, la revue jugée soudainement « révolutionnaire, raciale et sectaire ». Mais ce musellement sera de courte durée puisque la Martinique se libère au mois de juillet de la même année et rejoint la France libre. Suzanne Césaire répondra à la lettre de censure sans même juger utile de se justifier, acceptant toutes les épithètes et concluant : « n’attendez de nous ni plaidoyer, ni vaines récriminations, ni discussion même. Nous ne parlons pas le même langage » (p. 14).

Pour les contributeurs de la revue, l’enjeu réside justement dans le langage, dans la capacité de la littérature à révolutionner un langage faussement universel, exclusif et pétri de lieux communs donnant voix à l’impérialisme, au colonialisme et au nazisme. Il faut, par la parole, reconquérir l’identité antillaise, affirmer sa culture, non pour se réfugier dans un entre-soi coupé du reste du monde, mais pour proposer autre chose à ce monde. Dans l’article qui ouvre le premier numéro de la revue, Aimé Césaire déclare ainsi : « l’Europe, y compris la France, n’a qu’une formule de civilisation concevable, c’est la civilisation occidentale. Et nous en voyons, nous, le pitoyable échec. Il faut que nous affirmions notre civilisation, il faut la manifester, il faut créer quelque chose, et ça pourra aider à la renaissance d’un monde nouveau. » On remarquera que Césaire utilise l’expression « formule de civilisation ». Il ne s’agit pas d’opposer ou de fonder une autre forme de civilisation dans une perspective essentialiste, mais de contrecarrer un modèle, un système de pensée, en formulant autrement la civilisation.

Suzanne Césaire reprend cette même injonction, cette nécessité d’une réflexion profondément martiniquaise pour qu’elle soit universelle : « Il est maintenant urgent de se connaître soi-même, d’oser s’avouer ce qu’on est, d’oser se demander ce qu’on veut être. Ici aussi, des hommes naissent, vivent et meurent. Ici aussi, se joue le drame entier. « Il est temps de se ceindre les reins comme un vaillant homme. » » (p. 40). Faisant sien un des vers du Cahier d’un retour au pays natal, elle affirme haut et fort le rôle à la fois combatif et fondateur de Tropiques : le revue sera un terreau culturel à même d’ourdir une réflexion, une littérature, un art enracinés et libres, indépendants et ouverts au monde.



Le titre choisi, Tropiques, met en avant le rapport que cette parole nouvelle entretient avec son lieu d’ancrage, sa tropicalité très végétale que l’on retrouve dans les écrits de Suzanne Césaire, avant même la question historique. Tropiques évoque un paysage à l’image de la forêt d’ Absalon qui révolutionnera l’imaginaire de ses visiteurs : Breton, Masson, ainsi que Wilfredo Lam qui produira, suite à son séjour martiniquais, son chef-d’œuvre La Jungle. Suzanne Césaire évoque magnifiquement le saisissement des poètes : « les balisiers d’ Absalon saignent sur les gouffres et la beauté du paysage tropical monte à la tête des poètes qui passent. A travers les réseaux mouvants des palmes ils voient l’incendie antillais rouler sur la Caraïbe qui est une tranquille mer de lave. » (p. 93) Ravissement d’un paysage où le réel se heurte à l’irréel, qui emporte aux frontières du possible et du concevable.



Dans son étymologie grecque, « tropique » désigne en outre le changement, et plus particulièrement le changement des saisons ou la révolution du soleil, mouvement cyclique essentiel à la constitution de l’imaginaire antillais promu par Suzanne Césaire. Enfin, « tropique » réfère également au trope, à la métaphore, et souligne la place essentielle de la poésie dans la révolution de la langue, de la pensée et de l’imaginaire. Titre poétique et programmatique, Tropiques annonce par lui-même la teneur des articles rédigés par Suzanne Césaire.

Ces derniers, malgré les intervalles qui fragmentent leur publication, font apparaître une pensée continue, toujours en construction, revenant sur elle-même. La poésie d’abord y affleure, puis jaillit, comme par un mouvement éruptif incontrôlable. Si les premiers articles prennent la forme du compte-rendu (Frobenius puis Alain), l’écriture se meut peu à peu en dialogue (de connivence avec Breton, de rupture avec la poésie « doudou »), puis s’érige, dans les trois derniers articles, en pensée, en poésie libre, syncrétique, puissante et tropicale. Parole d’abord prudente et masquée, mais qui ne peut retenir le cri impatient et lucide de sa propre révolution, voyant clair dans le grand camouflage du monde et de son île.

Poétique végétative de l’homme-plante
Le premier article, « Léo Frobenius et le problème de la civilisation », semble à première vue un simple compte-rendu des thèses de l’anthropologiste, thèses pour le moins essentialistes dont il n’est pas ici question de juger la pertinence. Ce qui nous intéresse est ce que retient Suzanne Césaire : le concept anthropologique de « l’homme-plante » qui définit selon elle le Martiniquais, « confiant dans la continuité de la vie : germer, pousser, fleurir, donner des fruits et le cycle recommence. Poésie vécue, sentie profondément » (p. 33). Cette image cyclique s’oppose à « l’idée du progrès continu, chère au XIXe siècle », devenue « véritable folie de puissance et de domination » au XXe siècle. Saisi par les mouvements rythmiques de la vie et de la mort, l’homme-plante, dans un mouvement de poésie pure, prend conscience de lui-même par « abandon », sans désirs de possession ni de maîtrise du monde.

Nous quittons ici l’anthropologie pour retenir l’image poétique à même de signifier la relation de l’homme avec le monde extérieur. Face à une civilisation occidentale qui depuis des siècles entend soumettre le monde à sa mesure, mesure qu’elle nomme universel, Suzanne Césaire promeut une conception discontinue, erratique des civilisations : « L’humanité ne possède pas une volonté de perfectionnement. Encore une fois, elle ne se crée pas une civilisation qu’elle veut de plus en plus haute. Elle va, au contraire, mue par une Païdeuma interne, dans des directions multiples, de « saisissements » en « saisissements » » (p. 36). L’essentiel du propos ne réside pas dans le concept fort discutable de « Païdeuma » (force vitale créatrice des civilisations), mais dans l’idée que les cultures se développent sans direction ni ordre préétabli, processus qui s’assimile au concept de créolisation que défendra, cinquante ans plus tard, Édouard Glissant, auteur incontournable de la Caraïbe : observant aux Antilles un phénomène de rencontres d’éléments culturels divers qui se créolisent, il conçoit l’idée que cette créolisation s’opère dans le monde entier de façon continue et imprévisible.

Suzanne Césaire revient de façon plus approfondie sur la culture antillaise et ses conditions de création dans « Malaise d’une civilisation ». Elle évoque trois facteurs expliquant la sclérose culturelle du pays : la transplantation sur un sol étranger, la soumission à un mode de civilisation étranger et enfin, après l’abolition de l’esclavage, le désir d’assimilation à ce mode imposé. Elle invite alors le peuple antillais à chercher en lui-même son identité, le mettant en garde contre un retour illusoire au passé africain et l’engageant à mobiliser « toutes les forces vives mêlées sur cette terre où la race est le résultat du brassage continu » (p. 74). Et c’est à nouveau « sous le signe de la plante » qu’elle projette cette identité antillaise à venir.



Il est étonnant de constater comme cette image est prégnante dans l’œuvre de Suzanne Césaire, rédigée dans les années quarante, préfigurant la parution en 1982 de Moi, laminaire d’Aimé Césaire, recueil où le poète s’identifie à la plus insignifiante et apoétique des plantes : une algue en forme de longs rubans qui se laissent porter par le mouvement des vagues. Poétique végétative, ouverte au mouvement et au murmure du monde, portée de saisissement en saisissement. Une génération plus tard, Édouard Glissant choisira lui aussi une image végétale pour définir l’identité antillaise : le rhizome deleuzien, comme racine en relation avec d’autres racines, identité culturelle en contact, ouverte à l’autre. Le végétal est parti lié avec le mouvement, le rythme, la circularité. Aussi, cherchant à définir l’être humain, Glissant lui associe la notion d ’étant : l’être fige l’identité dans un absolu, alors que l’étant met l’accent sur l’état changeant de l’humanité et des cultures, à l’image de l’homme-plante imaginé par Suzanne Césaire. Deux poétiques à même de repenser les relations de l’homme à lui-même et à l’autre, à même de formuler une pensée plus large, embrassant la totalité du monde.

Poésie surréaliste, poésie cannibale
Quel est dès lors le rôle de l’homme ? Suzanne Césaire répond : « il est de se préparer à vivre cet avenir autre, il est de se laisser mouvoir par le Réel, sans perdre ce sens de la piété, ce sens de la conquête, ce sens du destin » (p. 39). C’est par un double mouvement d’abandon au monde et de conquête de soi que l’homme en général, et l’Antillais en particulier, pourra se réinventer et réinventer le monde qui l’entoure. Quelles sont ces armes ? La poésie, expression totale de la liberté et de la vie. Dans son second article, « Alain et l’esthétique », l’auteure rappelle la place essentielle que le philosophe accorde à la création poétique et souligne son acuité redoublée en ces temps de troubles « dans un monde ruineux, dans un monde de banqueroute et de fraude […] où se joue le plus lugubre des jeux : le cache-cache de l’homme et de lui-même. » (p. 41). Face à l’atrocité, face à la pensée unique, face au totalitarisme, la poésie est la seule parole capable d’ouvrir une brèche vers un monde nouveau car, dépassant la volonté de l’artiste dessaisi de lui-même, elle laisse jaillir l’imprévu. Elle exige abandon : à la sensation, au tressaillement, au saisissement. Elle instaure un « un point de rencontre, un lieu d’équilibre » entre le monde et l’artiste, dans un jeu de projections et de désirs, allant de l’artiste au monde, et du monde à l’artiste. Imprévisible, la poésie navigue au porte de l’inconnu, « de l’étrange, du merveilleux, du fantastique ».

C’est pourquoi Suzanne Césaire laisse alors Alain de côté, trop raisonneur, trop intellectuel, peut-être trop philosophe dans sa volonté de définir l’art et aborde aux rivages d’André Breton qui incarne à ses yeux le poète : il « habite un merveilleux pays […] fantastique et familier où toutes choses font signe. Et Breton répond à ces signes » ; « Ici vivent d’une vie sensible et émouvante les monstres et les fleurs qui ont ravi d’effroi notre enfance » (p. 55). Que dire alors de l’étonnement de Breton, en escale en Martinique en 1941, qui découvre dans Cahier d’un retour au pays natal ainsi que dans la végétation tropicale, ses propres visions fabuleuses, saisi par cette réalité martiniquaise qui rejoint son propre imaginaire, et dont il témoignera dans Martinique charmeuse de serpent ?



Ce « pays merveilleux », créé ou incréé, dont parle Suzanne Césaire, n’est ni refuge ni évasion en dehors du réel. Il ramène au contraire au réel, à cette Martinique coloniale et tropicale ostracisée qu’il faut libérer de ses peurs et de ses carcans, car l’esprit du poète, abolissant l’espace et le temps, atteint un monde illimité et « renoue avec la diversité du monde les liens oubliés » (p. 60). La poésie opère décloisonnement et mise en relation insoupçonnée, et en cela devance le réel, le révolutionne.

Aussi la poésie, et plus particulièrement le surréalisme, prennent aux yeux de Suzanne Césaire un rôle accru, rôle émancipateur qu’elle résume en un mot : liberté. Il ne s’agit pas là d’une posture d’esthète déçu par la vie, par l’histoire, tournant le dos au réel, c’est tout le contraire. Consciente des privations, des manques, des dénis qui ont pesé sur le peuple antillais depuis l’esclavage, elle mesure, en pleine guerre, que ce qui fonde l’être humain, sa liberté, s’exprime en premier lieu dans et par le langage poétique qui incarne une liberté totale et intransigeante. Or le surréalisme incarne selon elle la poésie pure car il exige une complète reconquête et révolution de l’esprit humain. Il exige une posture intellectuelle qui refuse toute compromission, ce qui fut justement l’attitude des rédacteurs de Tropiques. Suzanne Césaire rappelle l’efficacité réelle de la poésie comme arme de lutte, son pouvoir caché dans sa fragilité apparente, invisible aux censeurs de Tropiques : « aveugles parce qu’ignorants, ils ne voyaient pas rire [la liberté,] insolente, agressive, à travers nos pages – lâches ensuite, quand il comprirent, apeurés, honteux. » (p. 82). Les étouffeurs de liberté ne peuvent venir à bout de la poésie et ils le savent : comment la mettraient-ils en cage ?

Mais il ne s’agit pas de n’importe quelle poésie. Faisant le bilan de la production poétique martiniquaise, Suzanne Césaire stigmatise la « littérature de hamac » qui se laisse porter par le doux balancement d’une nature exotique. « Allons, la vraie poésie est ailleurs. Loin des rimes, des complaintes, des alizés, des perroquets. Bambous, nous décrétons la mort de la littérature doudou. Et zut à l’hibiscus, à la frangipane, aux bougainvilliers. La poésie martiniquaise sera cannibale ou ne sera pas. » (p. 66). Injonction aux accents césairiens — « je lis bien à mon pouls que l’exotisme n’est pas provende pour moi » (Cahier) et surtout injonction à la création sous le signe du bambou, plante venue d’Extrême-Orient, à la longue tige droite tendue vers le ciel que l’on retrouve dans les toiles de Wilfredo Lam, dans ses forêts de femmes et d’homme bambous, où le corps fait saillie : pieds, mains, seins et sexes levés. Et cette poésie cannibale s’empare du surréalisme, non par imitation/assimilation, mais parce que le surréalisme est antillais, parce que tout ce que revendique Suzanne Césaire est compris dans le surréalisme : « il s’agira de transcender enfin les sordides antinomies actuelles : blancs-noirs, européens-africains, civilisés-sauvages […]. Retrouver notre valeur de métal, notre tranchant d’acier, nos communions insolites. » (p. 83).

Muse intransigeante et féroce, Suzanne Césaire lance un appel impatient au renouveau poétique, libre et sauvage. Et dans son tout dernier article écrit, « Le grand camouflage », voici que la muse cède entièrement le pas au poète. Écrit comme réponse au « dialogue créole » entre Breton et Masson qui sera publié dans Martinique charmeuse de serpents, ce long poème en prose raconte l’île, son archipel et son histoire peuplée d’effrois. Malgré l’ébranlement des volcans et de la terre, malgré le balai des cyclones et les brûlures du soleil, « les cigales haïtiennes pensent à crisser l’amour. Quand il n’y a plus une goutte d’eau dans l’herbe brûlée, elles chantent furieusement que la vie est belle, elles éclatent dans un cri trop vibrant pour un corps d’insecte. Leur mince pellicule de soie sèche tendue à l’extrême, elles meurent en laissant fuser le cri de plaisir le moins mouillé du monde. » (p. 85). Mais, rappelle Suzanne à Breton, si les cigales se laissent ébahir par la luxuriance toute végétale du paysage, sans voir « s’aviver les flammes tropicales […] aux faims, aux peurs, aux haines, à la férocité qui brûlent dans les creux des mornes », « c’est qu’alors le grand jeu de cache-cache a réussi » (p. 94). Que les poètes ne se laissent pas aveuglés par la beauté de la nature ! La poésie, toute surréaliste qu’elle soit, doit d’abord se faire cannibale, dans un lâcher prise sans retenu des « désirs inassouvis » (p. 87).


Wilfredo Lam, La Jungle, 1943

Et Daniel Maximin de s’interroger sur le silence de Suzanne Césaire, juste après qu’elle nous a révélé avec éclat et humilité comment naissent les poètes : « Alors, se dit-on, pourquoi pas elle-même aussi se faire poète-bambou contre la poésie doudou ? Serait-ce concevable que la lumière de l’un [Aimé Césaire] puisse faire accepter l’ombre à la lumière de l’autre ? » (p. 21). Son cri, « expression totale de la vie », était-il trop vibrant pour son corps d’insecte ? Femme citadelle qui n’a jamais pris la poésie pour un monument, mais comme un lieu de partage, fortement arrimé au « nous » qui traverse tous ses textes, en dialogue constant avec les amis intellectuels et poètes : d’abord l’aimé, puis André Breton, André Masson et René Ménil. Autant de voix que l’on retrouve dans un florilège de textes placés en échos aux paroles de Suzanne Césaire, à la fin de ce beau volume épais comme un cahier.

Suzanne Césaire, Le grand camouflage, Écrits de dissidence (1941-1945), Le Seuil, 2015 (2009), 128 p., 14 € 20



A voir aussi : « Suzanne Césaire, fontaine solaire », du 26 mai 2016 au 27 mai 2016 au Tarmac – La scène internationale francophone –, Paris. Adapté du Grand camouflage par Daniel Maximin, réalisé et mis en scène par Hassane Kassi Kouyaté, interprété par Astrid Bayiha, Nicole Dogué et Martine Maximin — Toutes les infos ici

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