Certificats d’économie d’énergie ou comment taxer en douce

Michel Negynas


Connaissez-vous le marché des certificats d’économie d’énergie ?




Sur l’énergie, nous avons la TICPE, la CSPE, la taxe sur l’acheminement de l’électricité, les taxes spécifiques aux carburants, la TVA et nous avons échappé de peu à la taxe carbone. Mais nous sommes taxés aussi de manière plus subtile. Tout le monde oublie par exemple le marché de quotas d’émission de CO2, qui coûte au moins 1 milliard d’euros à l’économie française et devrait coûter encore plus à l’avenir avec de nouvelles règles. Il est évident que ce milliard, il faut bien que quelqu’un le paye : in fine c’est vous, évidemment.

Il en existe une autre, largement méconnue des Français, qui est le marché des certificats d’économie d’énergie. Le principe est le suivant :

L’État impose aux fournisseurs d’énergie (assimilés à des pollueurs) de prouver qu’ils ont participé à des opérations d’économie d’énergie sur une période donnée. L’unité est le « KWh cumac » : seule l’administration française est capable de nous inventer ça. Il s’agit du nombre de KWH cumulés évités et actualisés pour une période donnée. Vu la complexité du système, on comprend que les Français ne s’y sont guère intéressés. Ils ont tort. Voici pourquoi.

Pour se soustraire à leurs obligations, les « pollueurs » doivent soit investir directement dans leurs propres opérations d’économie d’énergie, soit acheter des cumacs produits par d’autres, par exemple chez leurs clients.

Une industrie nouvelle était née : producteur et vendeur de cumacs. D’où l’éclosion du harcèlement par téléphone que vous avez sans doute déjà subi où l’on vous propose des opérations à 1 euro… cumulant aides, prêts à taux zéro et ventes de cumacs…

Pour la période à venir, le gouvernement a décidé d’augmenter encore le nombre de cumacs imposés aux « pollueurs ». Le prix du « marché », alors déséquilibré par une pénurie d’offres rapportée à la demande a répondu par une explosion de plus 30 %. 


Les « cumaqueurs » s’en mettent plein les poches
Les adhérents de l’Union françaises de l’électricité s’en émeuvent dans leur dernier bulletin : ils estiment que cela pourrait coûter jusqu’à 4 milliards payés évidemment in fine par les consommateurs. Ce serait 3 à 4 % des dépenses énergétiques des Français. Les « cumaqueurs » s’en mettent plein les poches. La facture pourrait d’ailleurs être alourdie par des amendes infligées à ceux qui n’auraient pas trouvé leurs cumacs imposés.

Mais il y a pire. On se souvient de l’arnaque à la TVA sur les quotas d’émission de CO2, qui a coûté plusieurs milliards d’euros aux pays européens. Les fraudeurs eux-mêmes ont déclaré que le système était tellement mal ficelé qu’il suffisait de se baisser pour ramasser la monnaie. C’est qu’on ne construit pas un marché financier sans une armada de professionnels du contrôle.

Pour le cumac, c’est la même chose. Quatorze personnes sont affectées au contrôle de dizaines de milliers de dossiers : seuls 165 contrôles ont été finalisés depuis 2015, selon le ministère même.
Il existe deux types de fraudes : celle des artisans de bonne foi qui croient installer des équipements économes, mais se trompent car les calculs sont complexes, ou parce qu’ils n’ont pas le savoir-faire technique.

Mais on a vu aussi l’éclosion d’entreprises purement commerciales de vendeurs de cumacs. Il y a fort à parier que certaines sont le fruit du recyclage des ex fraudeurs sur les quotas… Comme il n’y a pas de contrôle, on peut déclarer n’importe quoi.

Si bien que personne ne sait si les milliards que vous allez payer en achetant votre énergie auront vraiment servi à quelque chose. Sauf qu’ils ne seront pas perdus pour tout le monde.


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