Par Stéphane Perraud
Le titre est explicite. Dans son dernier ouvrage, le journaliste Fabrice Nicolino règle ses comptes avec l’agriculture industrielle.
« Je m’attends à du goudron et des plumes », s’amuse le rescapé de la tuerie de Charlie Hebdo qui alimente toujours la rubrique écologie de l’hebdomadaire satirique, malgré trois balles reçues dans les jambes et une convalescence interminable. Autant dire que plus rien ne lui fait peur.
Sur un mode pamphlétaire, Nicolino dénonce les technocrates et les industriels qui depuis 70 ans ont fait main basse sur l’agriculture.
Les paysans étaient dix millions en 1939. Ils ne sont plus que 500000 aujourd’hui. Et demain, qui va nous nourrir ?
Pour dénoncer, il faut d’abord expliquer. En 120 pages qui se lisent d’une traite, on comprend mieux comment l’agriculture qui, au sortir de la guerre avait besoin de se moderniser, s’est autodétruite en cédant aux sirènes de l’industrie. La relance s’est faite à grand renfort d’engrais et de pesticides et sur fond de remembrement, de monoculture et d’endettement. Ce qui a conduit la Bretagne, par exemple, à devenir l’éleveur de porcs du pays tout entier, polluant ses sols et sa nappe phréatique pour des décennies. La FNSEA, le puissant syndicat agricole à l’origine des récentes manifestations d’éleveurs, en prend pour son grade. Son président, Xavier Beulin, dirige un empire agro-industriel où se mêlent oléagineux, semences OGM, génétique animale et agrocarburants.
« Ce qui a été fait peut se défaire »
Nicolino tape là où ça fait mal, mais l’histoire n’est pas une fatalité « Ce qui a été fait peut se défaire », écrit celui qui prône le retour à une agriculture paysanne. Il faut replanter des haies, revenir aux engrais naturels et aux semences locales qui résistent à la sécheresse et aux maladies, privilégier les circuits courts… Développer une agriculture à taille humaine est la seule condition pour que les paysans retrouvent leur fonction nourricière et vivent dignement de leur métier.
128 p., 2015, 13,90 euros. Éd. Les Echappés.
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