fondateur de la revue Agriculture & Environnement
Le 24/07 /2017
Le cercle/humeur - Pour notre contributeur, la «sobriété heureuse», dont se réclame Nicolas Hulot est en réalité un projet de décroissance pouvant amener nos sociétés vers le déclin économique.
Imaginé comme un coup de maître par Emmanuel Macron, la nomination de Nicolas Hulot en tant que ministre de la Transition écologique et solidaire pourrait plutôt s’avérer être un choix dramatique.
Certes, l’homme a tout pour plaire : en tête du baromètre de popularité des personnalités politiques, il bénéficie d’une image d’homme indépendant et affranchi des clivages partisans et incarne le renouveau politique auquel aspirent aujourd’hui une majorité de Français.
Sauf qu’il s’agit d’une erreur de casting qui pourrait mettre en difficulté la réélection du l’hôte de l’Élysée, dont le sort dépend de sa réussite économique et sociale.
L'héritier du Club de Rome
Ministre d’Etat, le numéro trois dans l’ordre protocolaire du gouvernement a en effet transmis à Édouard Philippe sa feuille de route avec son projet de société. Nicolas Hulot « n’entend pas simplement s’occuper du sort des abeilles, de la finance verte ou de la biodiversité ; il compte faire de l’écologie une orientation globale pour l’ensemble du gouvernement », selon Yves de Kerdel.
L’éditorialiste résume parfaitement la menace que représentent Nicolas Hulot et son projet censée nous porter vers une « sobriété heureuse » : « C’est surtout voir les héritiers du Club de Rome mettre en place tout un système qui milite en faveur de la décroissance. Comme cela a déjà commencé avec moins de travail, moins d’usines, et moins de crédits bancaires en faveur de l’investissement productif ».
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Le projet de société de Nicolas Hulot s’inscrit en effet dans le sillage de celui du Club de Rome, qui prônait dès le début des années 1970 un terme à la croissance économique au motif que les ressources naturelles étaient limitées. On retrouve ce thème dans son discours prononcé le 27 juin 2017 à l’occasion de l’ouverture des 3e Assises de l’économie circulaire.
« Longtemps nous avons cru que l'abondance était la norme. On découvre que la norme c'est la rareté », a-t-il déclaré. Brandissant régulièrement la menace de la « pénurie », il reste convaincu que « l'humanité devrait passer d'une économie de cow-boys à une économie de cosmonautes ».
Il s’agit ainsi pour le ministre de la Transition écologique et solidaire d’orienter l’économie exclusivement vers des secteurs certes innovants, mais faiblement consommateurs de matières premières. C’est le retour du dogme de la société post-industrielle à la mode dans les années 1990.
Erreurs politiques et choix hasardeux
Or, dans un ouvrage paru en 2011, La France sans ses usines (Edition Fayard) Marie-Paule Virard et Patrick Artus mettaient déjà en garde contre un tel projet : « Dans les années 1980, on nous a expliqué que l’avenir appartenait aux services dans le giron d’une société postindustrielle débarrassée des contingences du "secondaire". Dans les années 1990, la mode fut à la "nouvelle économie" avec internet et la finance, comme principaux leviers de croissances. Au tournant des années 2000, quelques beaux esprits imaginèrent l’entreprise sans usines : les cerveaux en Europe, les jambes en Chine. On sait aujourd’hui ce qu’il en est advenu. »
Les auteurs qui ne croient pas à l’émergence de cette France sans usines censée offrir « ses hôtels de charme et de passe » à une « horde de touristes russes, indiens et chinois » venant se balader dans les belles campagnes du Limousin et de l’Auvergne.
Avec Nicolas Hulot, c’est pourtant le retour de ces erreurs de politique économique et choix hasardeux, à l’origine de la dramatique désertification industrielle régionale, de la baisse du niveau des emplois et des salaires, du déficit extérieur et d’une dette en croissance exponentielle.
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Bien entendu, il ne s’agit pas d’écarter d’un revers de main l’immense potentiel que représente des secteurs innovants dans le recyclage ou dans l’usage plus performant de l’énergie. Ni de faire l’impasse sur les incubateurs de start-up, à l’instar de la Station F inaugurée à Paris le 29 juin dernier.
Le futur de l’industrie française se dessine bien davantage dans ce genre de lieu qu’au sein des comités de réflexions de la Fondation Hulot, tellement imaginatifs qu’ils sont capables de fantasmer sur un monde à la fois dé-carbonisé et sans l’apport de l’énergie nucléaire.
Or, sans un savant mélange entre l’innovation et son application dans le secteur dit « primaire », c’est-à-dire dans le maintien sur le territoire français d’une industrie transformatrice et d’une agriculture compétitive et productive, la France ne retrouvera ni le plein emploi, ni la croissance. Une croissance que Nicolas Hulot et ses amis de l’écologie politique combattent au prétexte qu’elle détruit la planète.
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