Alsace, Strasbourg : 10 ans de lutte pour sauver la biodiversité et tout reste encore à faire

Laurie Debove 
  
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le projet d’autoroute qui doit détruire de nombreuses terres agricoles et plus de 10 hectares de forêt. [...] Ils souhaitent préserver 300 ha de terres agricoles,10 hectares de forêt près de Vendenheim  [...] On ne lutte pas contre le GCO parce qu’il va aller dans notre jardin, on lutte pour la construction d’un monde meilleur."


Ce combat est la copie conforme de celles et ceux qui s'opposent au tsunami éolien qui submerge nos territoires et détruits des milliers d'hectares de terres agricoles et accélère la déforestation. Et pourtant, son exposition médiatique n'a rien de comparable. Pourquoi?
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Ce projet autoroutier est vieux de 40 ans. En 2005, le Rapport indépendant du bureau d’études TTK démontre que le GCO (Grand Contournement Ouest de Strasbourg) risque d’engendrer des impacts négatifs sur l’environnement et provoquer un étalement urbain délétère.




Les derniers jours riches ont été en émotions pour le Collectif GCO Non Merci, en lutte depuis plus de dix ans contre le projet d’autoroute qui doit détruire de nombreuses terres agricoles et plus de 10 hectares de forêt. Vendredi dernier, le tribunal administratif de Strasbourg s’est prononcé contre l’échangeur Nord d’autoroute. Cinq jours plus tard, le même tribunal a autorisé les travaux préparatoires du reste du projet autoroutier, malgré la recommandation du rapporteur public de l’arrêter.


Plus de dix ans de lutte pour sauver la biodiversité et les terres agricoles
Ce projet autoroutier est vieux de 40 ans. En 2005, le Rapport indépendant du bureau d’études TTK démontre que le GCO (Grand Contournement Ouest de Strasbourg) risque d’engendrer des impacts négatifs sur l’environnement et provoquer un étalement urbain délétère. Pourtant, il est déclaré « d’utilité publique » par le Conseil d’État en Janvier 2008. En Mars de la même année, Alsace Nature dépose une requête auprès de la section du contentieux du Conseil d’État demandant l’annulation de ce décret. Au même moment, vingt-deux autres recours en annulation sont engagés par les maires des communes, le châtelain de Kolbsheim et quatre personnes privées.

 
Crédit Photo : M. Bernard Irrmann

Le GCO (Grand Contournement Ouest de Strasbourg) est un projet d’autoroute à péage de 24 km remporté par Vinci, officiellement destiné à désengorger la section urbaine de l’A35 strasbourgeois, en passant par l’Ouest. Depuis 20 ans, il est contesté par un grand nombre d’élus, d’agriculteurs, de citoyen-ne-s et d’associations.

En 2003, ils se sont regroupés sous le Collectif GCO Non Merci. Ils souhaitent préserver 300 ha de terres agricoles « parmi les plus fertiles d’Europe », 10 hectares de forêt près de Vendenheim, et un espace naturel exceptionnel entre les communes de Kolbsheim et Ernolsheim-sur-Bruche qui abrite notamment le Grand Hamster d’Alsace, une espèce déjà menacée. Ils protestent également contre la légitimité du projet destiné selon eux à fluidifier le transport routier entre la France et l’Allemagne. En effet, le GCO payant empêcherait difficilement les bouchons de se former sur l’A35 qui resterait
gratuite.


  
Crédit Photo : M. Bernard Irrmann 
 
Une grève de la faim sans réponse : le silence du gouvernement
Parmi les nombreuses actions engagées pour retarder le début des travaux et interpeller le gouvernement, des militants ont suivi une grève de la faim durant un mois. Leur demande est soutenue par 70 parlementaires et 75 scientifiques : un moratoire sur les travaux (décision d’accorder un délai ou une suspension volontaire) et la mise en place d’une commission de médiation, comme celle de Notre-Dame-des-Landes. La réaction du gouvernement ? Aucune, ou presque. Un membre du cabinet d’Emmanuel Macron est rapidement passé voir le collectif GCO Non Merci lors d’un déplacement présidentiel à Strasbourg, sans donner suite à l’entretien. 





« La grève de la faim a mis plusieurs choses en avant. D’abord, nous avons constaté l’absence totale d’intérêt du gouvernement pour une problématique aussi grave qu’une grève de la faim. Ensuite, le Préfet a avoué son impuissance puisque la possibilité d’un moratoire dépend uniquement du gouvernement. La signature des arrêtés pour les travaux a été fait par le Préfet avec la permission de l’Etat. Surtout, la mobilisation ne faiblit pas et les actions sur le terrain continuent avec de plus en plus de soutiens. Toutes les semaines, on va sur le tracé du GCO pour planter des arbres : eux viennent couper, nous on vient planter. On se rend sur un endroit différent à chaque fois dans notre plein droit car les terrains sont toujours publics pour l’instant. » Michael Kugler, Coordinateur du Collectif GCO Non Merci 


Une incohérence pour la transition écologique et sociale

Les deux décisions de justice prises au cours de la dernière semaine ont de quoi désarçonner les militants. En effet, il n’est aujourd’hui plus possible pour la SANEF de construire l’échangeur Nord, mais les travaux préparatoires (des études quasiment déjà toutes effectuées) sont restés permis, créant la situation ubuesque d’une autoroute qui ne mènerait… nulle part.


 
Crédit Photo : GCO Non Merci

Pire, le tribunal administratif a plusieurs fois argué une « justice d’exception » en autorisant les travaux, à l’encontre des avis des rapporteurs publics et de nombreuses études qui ont démontré l’inutilité du projet. Alors que le mouvement des gilets jaunes continue de plus belle, et que la dépendance au pétrole n’est pas viable, le GCO voudrait renforcer la place de la voiture individuelle et du transport routier, comme l’écho d’un monde en déclin.

« On ne lutte pas contre le GCO parce qu’il va aller dans notre jardin, on lutte pour la construction d’un monde meilleur. Pour qu’il y ait un changement de société, les principes de réflexion doivent être inversés. On cherche à régler les problèmes de la voiture par la voiture, alors que nous devrions d’abord réfléchir aux transports publics et à la mobilité douce. Adapter la voiture au vélo et au bus, plutôt que l’inverse. Le collectif GCO Non Merci se mobilise pour impulser ce changement au niveau national. » Michael Kugler, Coordinateur du Collectif GCO Non Merci

Le Collectif GCO Non Merci propose ainsi plusieurs alternatives au GCO : augmenter la place du transport collectif et du covoiturage, faciliter la mixité des modes de transport (marche, vélo, tram, bus, voiture, TER), aménager le territoire en évitant la spécialisation des sites, et mettre en œuvre une écotaxe pour limiter le trafic des poids lourds de transit.

Le Collectif a attaqué la déclaration d’utilité publique du GCO qui a été prolongée en Janvier 2018 par Nicolas Hulot pour huit ans, sans justification.

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