9 mars 2018
La situation des oiseaux en Europe va de mal en pis. En novembre 2014, la revue scientifique Ecology Letters ne laissait pas de doute planer : 421 millions d’oiseaux ont disparu en 30 ans, ce qui correspond à près de 25% de la population totale existante au début des années 1980. Si les raisons de ce désastre sont connues depuis bien des années, les conséquences, elles, ne font qu’amplifier et témoignent d’un manque d’action et de prise de conscience criant.
L’étude d’Ecology Letters, menée sur 144 espèces d’oiseaux dans 25 pays d’Europe, nous apprend que les espèces les plus touchées sont en fait les plus répandues dans nos villes et campagnes, et non les plus marginales. En effet, l’alouette des champs a vu ses effectifs baisser de 46%, le nombre de tourterelles a quant à lui chuté de 77%. Par ailleurs, sur les 10 dernières années, en France, les populations de chardonneret ont diminué de 40%.
Alouette des champs (gauche) ; Chardonneret (droite)
Si ce constat est dramatique, il va de pair avec les récentes publications dévoilant la disparition alarmante de 80% des insectes en Allemagne depuis 1989. En effet, une des principales causes responsables de ces disparitions est l’utilisation toujours croissante de pesticides et insecticides, qui détruisent une grande partie des ressources en nourriture pour les oiseaux. Il y a également la destruction des habitats naturels causée par la disparition des haies, bocages, zones humides, et l’extension urbaine et des zones de monoculture. De leur côté, les oiseaux marins sont davantage affectés par les pollutions dues aux hydrocarbures et la réduction des ressources alimentaires causée par le réchauffement climatique.
Cet effondrement des populations d’oiseaux n’est qu’une partie de l’extinction biologique de masse que nous vivons. Les espèces disparaissent 100 à 1000 fois plus vite qu’auparavant, ce qui est extrêmement dangereux puisque chacune d’entre elles participe à l’équilibre des écosystèmes. Ces derniers rendent d’innombrables services essentiels, comme l’assainissement de l’air et de l’eau, le stockage du CO2, la pollinisation, le transport de graines, etc.
Moineaux
Les sociétés humaines profitent de ces services écosystémiques chaque jour, et ce gratuitement bien sûr. Seulement, si l’on devait assurer par exemple le processus de pollinisation nous-même, cela couterait des centaines de milliards de dollars par an. En comparaison, protéger les 421 espèces les plus menacées reviendrait aujourd’hui à débourser entre 1 et 1,5 milliard de dollars par an, soit 100 fois moins. De quoi relativiser le supposé coût de la transition écologique et solidaire par rapport à la conservation du modèle actuel qui détruit inconsidérément les milieux naturels.
Quelques pistes ont déjà été exploitées pour protéger des espèces, mais les initiatives manquent cruellement de financements. Cependant, en France, la création de réserves naturelles, la protection des zones humides engagées depuis décennies, la Loi de protection de la nature votée en 1976 et la Directive européenne « oiseaux » de 1979 ont permis le maintien de certaines espèces d’oiseaux et même des reconquêtes de territoires inespérées il y a une quarantaine d’années.
Ces résultats montrent qu’il est évidemment possible de préserver notre biodiversité et nos écosystèmes, et sont motifs d’espoir pour la suite. Seulement, aucun changement profond de notre système économique n’est encore visible, et prendre son temps est un luxe qu’on ne peut plus se payer. Le temps est compté : « Deux ou trois décennies au maximum », assurent des chercheurs d’une étude du Proceedings of the National Academy of Sciences publiée en juillet 2017. Alors, qu’est ce qu’on attend ?
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