France : l’éolien est une erreur ruineuse, sans profit pour le climat


Groupe Indépendant 1er mars 2018 de réflexion sur l’énergie
-Pierre Audigier, ingénieur général
-Patrice Cahart, inspecteur général des Mines (h) des Finances (h) ancien conseiller de la Commission Européenne ancien conseiller à la Cour de cassation
-Denis de Kergorlay, président exécutif d’ Europa Nostra, la fédération européenne des associations de défense du patrimoine paysager et monumental

En France, l’éolien est une erreur ruineuse, sans profit pour le climat 

La France n’a pas besoin de nouvelles éoliennes. Elle est excédentaire en électricité, ce qui la contraint à exporter, au prix de lourdes pertes, 11% de sa production, en année normale. N’aggravons pas ce gaspillage. De nouveaux engins n’auraient d’ailleurs aucune utilité du point de vue du climat. En effet, les sources fossiles, émettrices de CO2, ne fournissaient déjà plus, en 2015, que 6,3 % de notre électricité. Elles ne pourront, pour des raisons techniques, être totalement éliminées. Or l’éolien, lourdement handicapé par son intermittence, est beaucoup plus coûteux, pour notre économie, que d’autres sources d’énergie. Et ses engins sont pour l’essentiel fabriqués hors de France.

Nos paysages, nos finances publiques, nos budgets de consommateurs ne sauraient leur être sacrifiés.
En Allemagne, où l’’éolien s’est développé de façon effrénée, les émissions de CO2 par le secteur électrique n’ont pas diminué. La moitié du courant est fournie par des sources fossiles (charbon, lignite). Les prix de l’électricité atteint, pour les ménages, le double du niveau français. Le nécessaire combat pour le climat doit être recentré sur l’isolation des bâtiments et l’amélioration des modes de transport. C’est seulement là qu’une réduction importante des émissions de CO2 pourra être obtenue.

I/ En France, l’éolien est la pire solution, page2
A/Rien ne justifie un nouveau supplément éolien, page 2
B/ L’éolien est gravement handicapé par son intermittence, page 5
C/Un fort supplément d’éolien aurait un coût écrasant, page 6
D/ Il serait désastreux pour le cadre de vie, page 9
II/ Mais alors, que faire ?, page 10
Études jointes, pages 15 et 16.


I/ En France, l’éolien est la pire solution Nous sommes des écologistes. Le combat pour la planète, son eau, son air, ses paysages, est le nôtre. Mais nous pensons qu’en promouvant l’éolien, on choisit la plus mauvaise arme.
Notre note est centrée sur le cas de la France métropolitaine 1. Elle ne concerne pas l’éolien déjà en service, ni l’éolien déjà décidé. Elle s’oppose en revanche aux projets et programmes qui s’y ajouteraient. Nous ne traiterons pas ici de l’éolien en mer, qui appellerait des développements particuliers.


A/ Rien ne nécessite un nouveau supplément éolien

Quatre arguments ont été avancés pour justifier un second supplément éolien. Aucun d’eux ne résiste à l’examen.
a/ La France n’a pas besoin d’un second supplément éolien pour couvrir durablement sa consommation d’électricité.
En année normale 2, notre pays exporte 11 % de sa production électrique. Ces exportations s’effectuent à des prix de braderie : EDF doit revendre moitié moins cher, en moyenne, sur les marchés internationaux, le courant qu’elle a acheté aux exploitants éoliens. Un supplément d’éolien ne ferait qu’aggraver ce gaspillage, mis en fin de compte à la charge du consommateur. La durée de vie prévue d’une éolienne est d’une vingtaine d’années Les implantations qu’on voudrait effectuer actuellement n’ont donc pas
vocation à remplacer les réacteurs nucléaires en service, qui peuvent être prolongés de vingt ans voire quarante (voir II, a).

b/ Un second supplément éolien français serait sans effet sur le climat

Au cours des prochaines années, la consommation française d’électricité sera sans doute à peu près constante, comme elle l’est depuis six ans. D’un côté, les économies d’énergie auront des effets, et la désindustrialisation peut hélas se poursuivre. De l’autre, la population augmente un peu, le niveau de vie aussi, et les véhicules électriques, il faut
l’espérer, prendront leur essor. En 2015, année normale, les combustibles fossiles (charbon, fioul, gaz) n’ont fourni que 6,3 % de l’électricité française. Ce faible pourcentage va se réduire encore, du fait des nouvelles installations éoliennes et photovoltaïques décidées. Il ne pourra néanmoins tomber à zéro, car on devra maintenir des installations de secours, en raison notamment de l’intermittence éolienne et photovoltaïque. Peut-être nous répondra-t-on qu’une progression des excédents français aiderait à la suppression des centrales allemandes au lignite, particulièrement polluantes. Mais c’est vouloir remplacer une production stable par une production intermittente ; vain exercice 3. Et la France ne
porte aucune responsabilité dans le désordre allemand ; elle ne saurait sacrifier, en cette affaire, ses finances et ses paysages.

c/ Une nouvelle progression de l’éolien ne réduirait pas vraiment la dépendance énergétique de la France
Par analogie avec les importations d’hydrocarbures, dont notre pays est dépendant, certains font valoir que la promotion de l’éolien permettrait de réduire nos importations d’uranium. Mais celles-ci ne constituent pas une réelle dépendance. L’uranium n’entre que pour 10 % environ dans le prix de revient du courant nucléaire. Les réserves mondiales, qui permettent de tenir environ cent ans au rythme actuel, se trouvent bien réparties sur la planète, et notamment dans des régions sûres, ce qui n’est pas le cas du pétrole et du gaz : l’Australie vient au premier rang, et le Canada au troisième. D’ailleurs, les études en cours dans divers pays s’orientent vers la construction de surgénérateurs, à consommation très faible. Un second combustible, le thorium, dont les réserves sont triples de celles de l’uranium, s’ajouterait à ce dernier. De son côté, la fabrication des éoliennes exige des métaux rares - dont le tantale - que la France ne produit pas, et dont la fourniture comporte, sur la longue période, de sérieux aléas.

d/ Le remplacement d’une partie des réacteurs par des éoliennes serait sans incidence sur notre sécurité intérieure
Les avocats de l’éolien font surtout valoir des motifs de sécurité intérieure. Soucieux de ne pas mettre tous les œufs dans le même panier, ils sont à l’origine de la loi relative à la transition énergétique, du 17 août 2015, qui tend à limiter à 50 % la part du nucléaire dans la production électrique de notre pays. Mais le potentiel est déjà diversifié : le nucléaire n’en constitue que 48 %. S’il assure néanmoins 75 % de la production, c’est en raison de l’intermittence de l’éolien et du photovoltaïque. La mise en service, au début de 2019, d’une centrale de la troisième génération, et quelques années plus tard, de celles de la quatrième accroîtra la diversité. En second lieu, les risques du nucléaire civil, en France, sont faibles. L’accident de Fukushima a été provoqué, non par le séisme, auquel les structures de béton ont résisté, mais par le raz-de-marée, phénomène que notre pays n’a jamais connu, si loin qu’on remonte dans les archives 5. Le centrales françaises en service ont d’ailleurs été construites selon des règles de sécurité beaucoup plus strictes qu’au Japon.

e/ La France est en avance et non en retard
La France est en retard, répètent les promoteurs éoliens et leurs avocats. C’est tout le contraire. Voici la hiérarchie des émissions de CO2 nécessaires pour produire 1 kwh : Pologne 750 g, Allemagne 520 g, Royaume-Uni 450 g, Italie 390 g, France 60 g. Seule de l’échantillon, la Suède fait mieux (10 g) grâce à son hydro-électricité, et aussi à son potentiel nucléaire, aujourd’hui remis en cause 6.

B/ L’éolien est gravement handicapé par son intermittence

1/ Elle l’empêche de remplacer le nucléaire dans une proportion significative. En effet, les éoliennes de France ne fonctionnent, en année moyenne, qu’à 24 % de leur puissance. Quand le vent est faible, elles ne tournent pas. Quand il est trop fort, elles doivent être arrêtées. Dans leurs présentations de projets, les promoteurs affirment que les engins prévus
permettront d’alimenter tant de foyers ; c’est spécieux, car les intéressés dépendront d’autres sources énergétiques pour les trois quarts de leur consommation d’électricité.

2/ Les avocats de l’éolien minimisent ce défaut :
• ils invoquent le « foisonnement », c’est-à-dire la supposée compensation des vents de la Manche, de l’Atlantique et de la Méditerranée ; or cette compensation est très imparfaite ; chaque année, et parfois durant plusieurs jours, la production éolienne tangente le zéro dans l’ensemble de la France ; particulièrement critiques sont les périodes de grand froid, durant lesquelles il n’y a ni vent ni soleil, alors que la consommation des particuliers atteint son maximum ; il serait fort imprudent de compter, en pareil cas, sur les importations, car nos voisins subissent les mêmes vagues de froid ;
• les pointes de production de l’éolien, dit-on, pourraient être utilisées à extraire l’hydrogène de l’eau, et ce gaz servirait ensuite à faire fonctionner des véhicules 7 ; mais ces procédés expérimentaux sont encore très loin de la rentabilité, et il n’existe, dans le monde, aucune usine d’électrolyse.

3/ Dès lors, un pays qui souhaite développer l’éolien doit se doter d’une capacité de secours, utilisable à tout moment, et d’une puissance égale à celle de l’éolien. Il doit donc assumer le coût de ces installations sous-utilisées, en sus de celui de l’éolien. Jusqu’à présent, ce problème a pu être résolu sans trop de difficultés, car la production éolienne n’atteint encore
que 4 % de la production totale française.

Mais les éoliennes supplémentaires déjà décidées sont d’une capacité à peu près égale à celle des éoliennes en service. Ainsi, l’objectif du président Macron, consistant à doubler le potentiel éolien, est déjà pratiquement atteint. De ce fait, l’éolien fournira, dans quelques années, 8 % de notre production. Le problème d’une capacité de secours, permettant de pallier l’irrégularité éolienne, ne peut donc plus être éludé.

Cette réserve sera-t-elle constituée de barrages de montagne ? Non, car ceux-ci sont déjà entièrement utilisés pour couvrir les pointes de consommation (phénomène tout à fait distinct des creux de l’éolien). La réserve peut-elle consister en centrales au gaz ? Nos autorités ont commencé de s’engager dans cette voie, en concluant des « marchés de capacité » avec les industriels concernés. Cette formule a permis d’éviter des fermetures de centrales à gaz. Mais ce combustible émet du CO2. Du fait de l’alliance inévitable avec le gaz, l’éolien n’est pas une véritable énergie renouvelable, ni une véritable énergie propre.
 
4/ Reste le nucléaire. Aussi EDF et même, dans une certaine mesure, les promoteurs professent-ils à présent qu’il est complémentaire de l’éolien. C’est un abus de langage, car si les éoliennes ont besoin du nucléaire, la réciproque n’est pas vraie. En outre :
• cette solution cumulerait les coûts ; outre ceux de l’éolien supplémentaire il faudrait supporter ceux du grand carénage (voir plus loin, II, A), de façon que les réacteurs soient prêts à intervenir ; pour la même raison, on ne pourrait guère faire d’économies sur les dépenses de personnel des centrales ;
• les risques de sinistres, auxquels les adversaires du nucléaire sont hypersensibles, resteraient les mêmes ; les réacteurs seraient toujours là, chargés de combustible, de façon à pouvoir servir à tout moment.

C / Un fort supplément éolien aurait un coût écrasant

1/ La comparaison des coûts du nucléaire avec ceux de l’éolien ne doit pas porter sur le passé, qui n’a qu’un intérêt rétrospectif. La question est la suivante : combien faut-il dépenser, suivant l’une et l’autre formule, pour maintenir la production d’électricité de notre pays ?
La comparaison ne saurait inclure des prototypes onéreux comme l’ EPR de Flamanville ou Hinkley Point en Grande-Bretagne. Un EPR à la française est d’ailleurs mené à bien en Chine, dans des conditions acceptables de délais et de coût. Notre estimation des coûts futurs sera donc limitée aux centrales nucléaires en service, dont l’exemple des Etats-Unis, où la technique est similaire, montre qu’elles peuvent être prolongées de vingt ans, voire de quarante, au prix d’opérations dites de grand carénage 8 ; et donc qu’elles peuvent assurer, sans même prendre l’ EPR en compte, le maintien de la production actuelle.
 
Autre remarque préalable : le courant d’origine nucléaire et le courant d’origine éolienne sont deux produits différents. Le premier est pilotable, donc de haute qualité ; on peut régler le débit à volonté. Le second, intermittent, est non maîtrisable, et donc de basse qualité ; il faut pouvoir le consommer quand le vent souffle.

2/ Ces précautions étant prises, la fiche Alpha ci-jointe montre que le remplacement d’un tiers de la production nucléaire par du renouvelable à dominante éolienne coûterait, en investissement, 94 Mds € de plus que le maintien de cette production nucléaire.

Trois lourdes charges s’ajouteraient encore à ce surcoût :
le renforcement et la ramification du réseau, rendus nécessaires par la dispersion géographique des engins (alors que pour les centrales nucléaires existantes, le réseau est déjà en place) ; cette contrainte (lignes à haute tension) nous paraît, à elle seule, décisive ;
• la constitution des réserves de secours mentionnées aux pages 6 et 7 ;
• le démantèlement des centrales nucléaires, opération dont le coût élevé donne lieu à débat ; cette dépense devra être effectuée un jour ou l’autre, quelle que soit la politique énergétique suivie ; mais si l’on renonce, comme nous le proposons, à un nouveau supplément éolien, elle pourra être différée de vingt à de quarante ans ; or l’application d’un taux d’actualisation de 10 %, par exemple, sur vingt ans, réduit une dépense de 86 % !

Ainsi, contrairement à ce qu’on pouvait attendre, le produit de haute qualité est beaucoup moins cher que le produit de basse qualité.

3/ Le financement de l’éolien repose surtout sur les finances publiques : la Contribution pour le Service Public de l’Électricité (CSPE), taxe supportée par le consommateur, transite par un compte spécial du Trésor et va aux promoteurs. Elle est maintenant complétée par des prélèvements publics sur d’autres sources d’énergie. Or nos finances publiques sont en
crise. Notre pays ne pourra supporter en même temps deux masses de dépenses, l’une consacrée à la poursuite de sa politique climatique (isolation des bâtiments, mise en place d’un réseau d’alimentation des véhicules électriques) et l’autre sans intérêt climatique (un nouveau supplément d’éolien). Les moyens de financement disponibles doivent être réservés aux actions utiles.

Ces difficultés ne sont pas propres à la France. Le Danemark, champion de l’éolien, est aussi le pays européen où l’électricité est la plus chère (le
double des niveaux français, pour les particuliers comme pour les industriels). Le Royaume-Uni, l’Espagne et le Québec ont récemment renoncé à aider l’éolien terrestre.

D / Un nouveau supplément éolien serait désastreux pour le cadre de vie
1/ Les éoliennes qu’on implante aujourd’hui en France ont, de manière habituelle, 120 m de mât et 50 m de pale, soit 170 m de hauteur totale. En juin 2017, le préfet des Ardennes a autorisé 63 engins de 200 m au Mont des Quatre-Faux ; elles se verront notamment de la cathédrale de Reims, située à une trentaine de kilomètres. Quant au projet du Haut-Armançon (Yonne) il comporte 25 éoliennes d’une hauteur comprise entre 220 et 250 m de
haut : on se rapproche des 300 m de la tour Eiffel. À ce train, les paysages français connaîtront leur plus importante mutation depuis les grands défrichements du Moyen Âge.

La fiche Bêta ci-jointe montre l’incidence qu’aurait la loi sur la transition énergétique, si on l’appliquait : près de la moitié du territoire métropolitain rural se trouverait comprise dans des cercles de 3 km de rayon autour des engins.

Quand elles seront hors d’usage, ces éoliennes pourront-elles être supprimées ? Sans doute non, car les garanties règlementaires sont loin de couvrir les frais du démantèlement 9. Aux Etats-Unis, 14 000 éoliennes abandonnées achèvent de rouiller, notamment en Californie et à Hawaï.

Or, dans les zones rurales, l’industrie décline, et la population agricole continue de se réduire, en raison du regroupement des exploitations. L’avenir de ces zones dépend donc, pour une part, du tourisme (chambres d’hôtes et gîtes ruraux). Il dépend plus encore du nombre de résidents secondaires ou même principaux (navettes, télé-travail) qui voudront bien s’installer. Les touristes et les résidents éventuels feront leurs choix, dans une large mesure, en fonction de l’attrait que les zones rurales auront ou n’auront pas conservé. La prolifération des grandes éoliennes est donc fortement contre-indiquée.


2/ Les chauves-souris, groupe d’espèces protégées, ne supportent pas les fortes variations de pression au voisinage des pales d’éoliennes. En Allemagne, leur mortalité, de ce fait, est évaluée à 250 000 par an. En France, les dégâts sont moindres, mais certainement importants, et ils s’accroissent en fonction de l’expansion éolienne.

S’agissant des oiseaux, la mortalité causée actuellement dans notre pays par les lignes à haute ou moyenne tension atteint le chiffre effarant, cité par l’ ADEME, de 26 millions par an. Or la prolifération des éoliennes sur tout le territoire implique une forte densification du réseau. Le massacre en serait aggravé d’autant. Les personnes sincèrement soucieuses de l’environnement ne sauraient continuer à pousser en ce sens.

3/ Le voisinage d’une ou plusieurs grandes éoliennes bouleverse la vie des habitants, et peut détériorer leur santé (bruit, vision obsédante d’une haute silhouette). La distance minimale entre les engins et les habitations n’est que de 500 m ; les préfets ont, depuis peu, la faculté de la relever cas par cas, mais n’en usent pas.

4/ Les habitations voisines des grandes éoliennes sont dépréciées. Il n’est pas aisé de mesurer ce phénomène, car le plus souvent ces habitations ne se vendent pas ; personne n’en veut. Cependant, les rares décisions des tribunaux font apparaître des dépréciations de l’ordre de 40 %.

Certains élus locaux invoquent, en contrepartie, les ressources budgétaires artificiellement procurées à leur commune ou à leur communauté. Elles sont effacées, et au-delà, par la dépréciation des maisons, la réduction de leurs valeurs locatives, sur lesquelles sont basés les impôts locaux, et la perte des potentialités touristiques.

5/ Face à ces considérations, l’argument ressassé de l’emploi que créerait l’éolien ne pèse pas lourd. L’essentiel de la fabrication des engins s’effectue hors de France. La mise en place des engins est souvent assurée par des équipes étrangères, sous le régime des travailleurs détachés.

II / Mais alors, que faire ?

a/ Le grand carénage
Nous avons déjà présenté le grand carénage, qui permettrait de maintenir la production d’un courant exempt de carbone comme l’éolien, mais pilotable, beaucoup moins cher et sans nuisance nouvelle envers les paysages.

Aux États-Unis, la plupart des centrales nucléaires existantes, qui ont été à l’origine des centrales françaises, ont été autorisées à fonctionner jusqu’à soixante ans d’âge. La prolongation jusqu’à quatre-vingts ans est déjà demandée. Le répit de vingt à quarante ans que la France peut obtenir grâce au grand carénage devrait permettre d’attendre la mise au point de meilleures formules nucléaires, plus sûres, productrices de peu de déchets ; on y travaille intensément dans divers pays.

b/ Le solaire thermique
Il est vraisemblable que, dans quelque temps, la majeure partie des ballons d’eau chaude de la planète fonctionneront au moyen de capteurs solaires. Cette solution permet en effet de conserver la chaleur durant plusieurs jours, alors que l’électricité ne se stocke pas, sauf dans des batteries très coûteuses. Le solaire thermique ne produit pas d’électricité, mais permet d’en économiser.

Selon les professionnels, son efficacité est triple de celle du photovoltaïque, à surface égale 10. En outre, il fonctionne sans réseau de transport et de distribution, ce qui évite des difficultés de financement et de voisinage. Une norme de 2012 le pénalise injustement par rapport au photovoltaïque. Toutefois, ses inconvénients esthétiques (aspects des toits) le rendent indésirable dans les centres historiques des villes, sauf à subventionner la mise en place d’ardoises masquantes.

c/ Autres énergies renouvelables
Le bois et la biomasse industrielle sont les énergies renouvelables les moins chères 11.

D’autres sources ont été négligées. La récupération de la chaleur des égouts permet de chauffer tout un quartier de Nanterre, sans inconvénients d’ordre esthétique. C’est cette formule novatrice qu’il conviendrait d’aider, et de généraliser, au lieu de déverser l’argent public sur l’éolien.

d/ Et l’éolien ?
Notre note comporte une conclusion logique : à l’instar du Royaume-Uni, de l’Espagne et du Québec, la France doit cesser toutes ses aides aux implantations éoliennes nouvelles.
Si elles étaient maintenues, il conviendrait, à tout le moins, d’améliorer le système.

1/ Il faudrait y introduire une véritable concurrence. Un décret récent impose le recours aux appels d’offres pour les groupes de plus de six engins. Mais à l’heure actuelle, la grande majorité des projets se situe en-dessous de cette limite. La faveur ainsi faite aux « petits » projets n’a aucune justification, car ceux-ci sont menés le plus souvent par des filiales
d’entreprises importantes. Et elle est contre-productive : les promoteurs préféreront rester en-dessous de sept unités, ce qui conduira à un mitage accru de nos campagnes.

Le recours à l’appel d’offres doit être généralisé. On éliminerait ainsi les projets portant sur une, deux, trois, voire quatre éoliennes ; ce qui limiterait le mitage. Le concurrent qui proposerait le prix garanti le moins élevé pour le calcul de sa rémunération « compensatoire » serait déclaré vainqueur.

2/ L’éolien, si on continue de l’aider, doit respecter l’impératif de protection de la santé des habitants. Dans un rapport adopté le 9 mai 2017, l’Académie de Médecine a pointé de graves défauts, et proposé des solutions :
• Le consensus des populations est insuffisant, en raison de la désinvolture de beaucoup d’enquêtes publiques.

Nous suggérons que le rayon d’affichage, égal à seulement 6 km, soit adapté à la hauteur croissante des engins. Il a été fixé à une date où celle-ci n’était couramment que d’une centaine de mètres, pale comprise ; pour des engins de deux cents mètres de haut, le rayon d’affichage devrait logiquement atteindre 12 km. Nous demandons aussi que les commissaires-enquêteurs tiennent réellement compte des observations recueillies. Trop
souvent, ils les balayent, en faisant valoir de prétendus avantages de l’éolien, dont nous avons montré la vanité.

• L’Académie de Médecine relève que dans un rayon de 1,5 km, les brits de l’éolien perturbent généralement le sommeil 12. Ce constat confirme le caractère inadapté de l’actuel minimum de 500 m.

• L’Académie constate également que les éoliennes engendrent peu de pathologies précises, mais qu’en raison surtout de leurs effets visuels, elles compromettent l’état de complet bien-être physique, mental et social des riverains, c’est à dire leur santé, ainsi définie par l’OMS.

En conséquence, les académiciens préconisent, sans chiffrer un multiplicateur, que la distance minimale entre les éoliennes et les habitations soit désormais proportionnelle à la hauteur des engins. Cette proposition rejoint, dans son principe, les législations de la Bavière et de la Pologne, qui fixent cette distance minimale à dix fois la hauteur des engins
(donc 2 km, par exemple, pour une hauteur de 200 m). Les promoteurs éoliens ne manqueront pas d’observer qu’une telle solution leur laisserait peu de sites pour s’implanter. Une question cruciale se pose. Qu’est-ce qui est prioritaire ? Le développement de l’éolien, dont nous avons montré l’inutilité, ou la santé des habitants? 

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La lutte contre la dégradation du climat demeure plus que jamais nécessaire, mais par d’autres moyens que l’éolien : la taxation du carbone dans le cadre d’une politique européenne, l’isolation raisonnée des bâtiments, l’usage des voitures électriques, la promotion des vélomoteurs et scooters électriques (à l’exemple des pays d’Asie, où elle a fortement réduit les nuisances urbaines). Les citadins de la prochaine génération seront
peut-être libérés, non seulement des gaz d’échappement, mais aussi de l’essentiel du bruit !

Encore faut-il que les sources de financement privilégiées soient réservées à ces actions, au lieu d’être détournées au profit de l’éolien.

Pièces jointes :
fiches Alpha et Bêta

Fiche Alpha : coûts comparés du courant nucléaire et des courants intermittents qui le remplaceraient à raison du tiers
Notre comparaison porte, non sur les investissements déjà effectués, mais sur ceux qui sont jugés nécessaires, en sus, pour atteindre les objectifs. La production globale d’électricité est supposée stable, comme depuis six ans.

Coût du mégawatt-heure (MWh)
1/ Eolien terrestre : les professionnels et le ministère de l’Environnement s’accordent sur un montant de l’ordre de 70 € par MWh 13.

2/ Centrales nucléaires existantes : l’investissement initial est déjà réalisé et amorti.
Selon la Cour des Comptes, le grand carénage et la maintenance courante, sur la période
2014-2025 (douze ans), pour l’ensemble du parc, coûteront 63 Mds € 14. Cette dépense
permettrait de maintenir la production actuelle pendant douze ans, soit 400 TWh x 12
= 4800 TWh 15. D’où coût marginal :
63.000 millions € / 4.800 millions MWh = 13 € par MWh.
Il convient d’y ajouter, selon la même source, 6 € pour l’uranium consommé, et encore 6 € pour le personnel non employé aux investissements. Total 25 €.

Un MWh éolien revient donc 2,8 fois plus cher qu’un MWh produit par une centrale nucléaire existante grâce au grand carénage. 

Coût direct des programmes d’investissement correspondants

1/Les professionnels s’accordent sur un coût moyen de 1,5 million € par MW, dans
l’éolien terrestre. D’où (voir Bêta) 17.000 engins x 2,5 MW x 1,5 million = 64 Mds €.

Coût moyen du MW d’autres sources renouvelables : 2 millions par MW 16. Pour
fournir les 44 millions de MWh manquants, il faudrait une puissance de 25 000 MW,
utilisée en moyenne 1760 heures par an. D’où 25 000 MW x 2 millions = 50 Mds €.

Coût total du renouvelable supplémentaire : 114 Mds €
2/ Du côté du nucléaire, le coût de l’investissement supplémentaire atteindrait (voir
plus haut) 63 Mds €. Ce montant est à diviser par trois, puisque le remplacement
porterait sur le tiers de la capacité nucléaire actuellement en service. Soit 21 Mds €.

Donc surcoût du programme d’investissements renouvelables par rapport au grand
carénage : 114 – 21 = 93 Mds €. Et même beaucoup plus, compte tenu des coûts indirects décrits ci-dessus pages 7-8.

Fiche Bêta
Les éoliennes vont-elles impacter toute la France ?
Nombre d’éoliennes terrestres à prévoir
Selon la loi sur la transition énergétique, le tiers de la production électrique nucléaire devrait être remplacé, d’ici à 2025, par du renouvelable. L’objectif est maintenu, avec un différé de cinq ou dix ans. La production nucléaire est d’environ 400 TWh par an, dont un tiers fait 133 TWh.
Hypothèse : deux tiers de ces 133 (soit 89 TWh) à fournir par l’éolien terrestre, un tiers par l’éolien en mer et les autres renouvelables (hydroélectricité exclue).
La puissance moyenne des éoliennes actuellement mises en chantier est d’environ 2,5 MW, d’où pour chacune une production annuelle (2 100 heures) de 5.250 MWh. Il faudrait donc 89 millions MWh/5.250, soit 17 000 de ces engins. Or il y a déjà environ 8 000 grandes éoliennes en service, de puissances diverses. L’effectif serait porté, en fin de période, à 8.000 + 17 000 = 25 000 grandes éoliennes.

Cercles de vive sensibilité
Les organisateurs des enquêtes publiques tracent autour des éoliennes proposées
un « cercle de sensibilité », dont le rayon est de 3 km. Compte tenu de la hauteur des
engins, c’est plutôt un cercle de vive sensibilité.
Les éoliennes étant presque toujours groupées, les cercles de 3 km de rayon se chevauchent. Il est proposé de raisonner sur une situation moyenne, celle d’une file de 5 engins espacés de 330 m. Compte tenu du chevauchement, les 5 cercles de nuisances probables ont ensemble une surface d’environ 35 km2, soit 7 km2 par engin, en moyenne.

Les professionnels de l’éolien objectent l’existence de divers masques :
• les constructions, mais on se trouve en zone rurale, où elles ont peu d’importance ;
• la végétation, mais elle ne doit pas être prise en compte, car les arbres peuvent faire
l’objet de coupes normales, être victimes de tempêtes, périr de maladies, et de toute
façon, perdent leurs feuilles à la mauvaise saison ;
• le relief, mais les implantations d’éoliennes tendent à se faire sur des crêtes ; le relief
est donc plutôt un facteur aggravant.
Total des cercles de vive sensibilité : 25 000 engins x 7 km2 = 175 000 km 2
À comparer au territoire métropolitain rural : 550 000 – 116 000 = 374 000 km2.

Conclusion : en 2030 ou 2035, près de la moitié des habitations de la France rurale se trouveraient à moins de 3 km d’une grande éolienne. C’est inacceptable, pour un pays qui prétend procurer à ses habitants une qualité de vie élevée, et qui veut continuer d’être la première destination touristique mondiale, en nombre de visiteurs.

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1 Pour une bonne compréhension des phénomènes, notre groupe a consulté Claude Mandil, ancien directeur général de l’ Energie et des Matières premières, ancien directeur général de l’Agence Internationale de l’ Energie, ainsi que Jacques Treiner, physicien, professeur émérite à l’Université Pierre-et-Marie Curie, ancien professeur à l’Institut d’ Études Politiques de Paris, enseignant à l’Université de Paris VII. Bien entendu, les positions du groupe n’engagent que lui.
2 Au long de cette note, nous faisons abstraction des perturbations causées en 2016 et 2017 par l’arrêt de nombreux réacteurs pour contrôle. La France va maintenant retrouver ses rythmes antérieurs de production et d’exportation. 

3 En Allemagne, en 2015, 44 % de la production électrique a été fournie par du charbon ou du lignite ! La progression de l’éolien, dans ce pays, a donc été inefficace, voire contre-performante. Le 1er octobre 2004, à Cologne, Mme Angela Merkel, alors dans l’opposition, avait pourtant souligné les dangers d’une prolifération de l’éolien. 
 4 RTE, Bilan électrique 2015, page 20. Le total des émissions de carbone inclut les autres gaz à effet de serre, convertis en équivalents-carbone. Vouloir sauver le climat en agissant sur la production d’électricité française, c’est se tromper de combat. Elle n’engendre plus que 3,6 % de nos émissions de gaz à effet de serre 4 ; le pourcentage va encore s’abaisser. Le reste, donc l’essentiel, résulte de l’industrie manufacturière, des transports, de l’agriculture et du chauffage des bâtiments. C’est sur ces secteurs que l’action en faveur du climat doit être concentrée. 
5 En décembre 1999, une tempête a partiellement inondé la centrale nucléaire du Blayais, dont trois réacteurs ont dû être arrêtés. Des travaux de sécurité ont alors été effectués. En 2007, l’Autorité de Sûreté Nucléaire, dont on connaît la rigueur, a jugé la situation satisfaisante.
6 Institute for Climate Economics, 2017. Les chiffres sont de 2013, mais la hiérarchie demeure. 

7 Actuellement, l’hydrogène consommé par des voitures de recherche provient du gaz naturel, polluant.
8 Plus précisément, les centrales françaises pourront être prolongées aussi longtemps que l’Autorité de Sûreté Nucléaire y consentira. Réponse attendue fin 2018 ou début 2019.
9 La caution règlementaire n’atteint que 50 000 € par grande éolienne ; or le coût de son enlèvement est évalué à 170 000 € (le gros socle de béton restant enfoui). Un devis a même atteint 413 000 €. Or, dans les zones rurales, l’industrie décline, et la population agricole continue de se réduire, en raison du regroupement des exploitations. L’avenir de ces zones dépend donc, pour une part, du tourisme (chambres d’hôtes et gîtes ruraux). Il dépend plus encore du nombre de résidents secondaires ou même principaux (navettes, télé-travail) qui voudront bien s’installer. Les touristes et les résidents éventuels feront leurs choix, dans une large mesure, en fonction de l’attrait que les zones rurales auront ou n’auront pas conservé. La prolifération des grandes éoliennes est donc fortement contre-indiquée.
10 Actu Environnement, 26 mai 2017.
11 Ademe, Le coût des énergies renouvelables en France, 2016. 

12 Académie de Médecine, Nuisances Sanitaires des Eoliennes terrestres, rapport du Pr.
Tran Ba Huy adopté à la quasi-unanimité le 9 mai 2017, page 10. 

-13 Avec un taux d’actualisation de 5 %, ce qui est bas. Si on le relève, le coût augmente.
-14 58 Mds, selon la Cour des Comptes, Le coût de production de l’électricité nucléaire, mai 2014, pages 15-16.
Nous avons ajouté 5 Mds au titre de l’érosion monétaire de 2011 à 2017.
-15 1 térawatt (TW) égale mille gigawatts (GW), un million de mégawatts (MW) et un milliard de kw. 

-16 Ademe, Le coût des énergies renouvelables en France, 2016. Prolongé par la note de Georges Sapy, Réduire de 75 % à 50 % la part du nucléaire, « Sauvons le climat », mai 2017. 








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