Dans l'article précédent sur le financement des EnR, nous avions vu que les EnRi étaient particulièrement subventionnées (121 Mds d’engagement en 2017) à travers, entre autre, des obligations d’achat.
Dans le rapport de la Cour des Comptes (CdC) cité alors, cette dernière reconnaissait ne pas avoir pris en considération les conséquences du développement des EnRi sur le réseau et de leur coûts.
Dans l’épisode précédent, nous avions vu que les EnRi sont des moyens de production diffus. Reliés au réseau de distribution (RPD), ces moyens de production décentralisée impliquent une adaptation et un renforcement des RPD, mais aussi de transport (RPT)*.
“Ok, j’ai suivi tout ça ! Mais alors qu’en est-il ? Les coûts réseaux explosent ?”
“C’est plus compliqué.”
En effet, par définition les infrastructures réseaux servent à relier différents acteurs et il peut donc être difficile d’attribuer la construction d’un nouvel ouvrage à un acteur en particulier. Pour autant, l’impact du développement des EnRi ne passent pas inaperçu.
Historiquement, l’implantation des EnRi s’est réalisé sur les sites les plus propices et sans concertation. Les ouvrages nécessaires au raccordement par exemple des éoliennes pouvaient être importants et étaient à la charge du producteur comme pour les centrales thermiques ou nucléaires.
Afin d’aider l’intégration des EnRi dans le réseau, la France a institué les Schémas Régionaux de Raccordement au Réseau des Énergies Renouvelables (S3RENR) qui permet la planification et la mutualisation des ouvrages et des coûts de raccordement.
Un S3RENR est un document de concertation régional entre RTE, les gestionnaires de réseaux de distribution et la région. Il analyse :
- les différents travaux de développement du réseaux, nécessaires aux EnRi ;
- la capacité d'accueil globale ;
- les coûts prévisionnels et un calendrier de réalisation.
Ex:
-Alsace: 0 €/MW ;
-Occitanie: 70 k€/MW.
“Bah tu vois, les EnRi sont subventionnés mais là, elles payent leurs dus.”
“On ne parle là que des nouveaux ouvrages de raccordement, il reste le renforcement.”
“D’accord mais le renforcement est partagé avec les autres moyens de production, non ?”
“Oui, mais en France la majorité des nouveaux moyens de production installés sont ... des EnRi alors que la consommation et la production restent stables, voir diminuent.”
Au total en France, les S3RENR représentent 3,164 Mds € dont la large majorité est à la charge des gestionnaires de réseaux pour une capacité d'accueil d’environ 30 GW.
De plus, depuis 2017, pour aider les petites installations, ces dernières bénéficie de réductions (appelé taux de réfaction) qui reste à la charge du réseaux donc des consommateurs. Ces réductions bénéficient à 6% des éoliennes et au ⅔ des installations PV. Une autre manière de subventionner...
Enfin, les S3RENR ne prennent pas en compte le raccordement des éoliennes en mer qui bénéficie d’un statut particulier. Ce dernier est entièrement pris en charge par RTE comme le montre ce graphique.
Avec en moyenne, un coût de 200 Mio € pour 500MW, les 6 zones d’exploitation offshore représentent un investissement de 1,2 Mds € pour RTE. En comparaison, l’un des raccordement les plus dispendieux selon le président de RTE est celui de l' EPR de Flamanville: 343 Mio € pour 1 600 MW.
Une simple division donnerait un facteur 2 entre les deux raccordements sauf qu’en prenant en compte les facteurs de charge: éolien ~~35%, nuke ~~70%, l’énergie transmise par l’éolienne est 2 fois moindre à puissance égale.
Il y a donc un facteur 4 sur le coût de raccordement par unité d’énergie transmise.
De manière générale, ce phénomène est assez logique, il est beaucoup plus coûteux de relier 1 000 éoliennes de 1 MW (à terre ou en mer) qu’une centrale de 1 GW. Et le raccordement est d’autant moins cher par unité d’énergie que le moyen de production est utilisé (facteur de charge). CQFD.
Au total, 4,3 Mds d’euros ont été engagé dans l’intégration des EnRi et aura pour conséquence une augmentation des investissements des gestionnaires de réseaux. Entre 2017 et 2020, 30% des
investissements de RTE y sera dédiés
L’impact sur les prix de l’électricité n’est pas encore conséquent par rapport à celui des taxes mais le prix de l’acheminement augmente plus vite que celui de la fourniture. 5% en 4 ans contre 2%.
En Allemagne, l’intégration d’une part toujours plus grande d’EnRi dans le mix électrique ont des conséquences importantes sur le réseau et sur les prix que j’analyserai dans un prochain article.
A l’heure où on ne cesse d’entendre que les coûts de production des EnRi continuent de baisser, il est bon de rappeler qu’ ON NE PEUT PAS COMPARER des moyens de production :
- PILOTABLES AVEC DES INTERMITTENTS OU FATALS ;
- CENTRALISÉE AVEC DES DIFFUS.
*les producteurs injectent l’électricité produite sur le réseau public de transport
Sources
https://www.rte-france.com/fr/article/les-schemas-regionaux-de-raccordement-au-reseau-des-energies-renouvelables-des-outils
https://www.rte-france.com/sites/default/files/schemas-regionaux-enr-2014_1.pdf
https://www.rte-france.com/sites/default/files/panoramat4-2018-hd.pdf
https://www.cre.fr/Electricite/Reseaux-d-electricite/Raccordement/PDF_LES-CONDITIONS-FINANCIERES-DE-RACCORDEMENT.PDF
http://www.assemblee-nationale.fr/15/cr-cetransene/18-19/c1819012.asp
https://www.rte-france.com/sites/default/files/be_pdf_2018v3.pdf
https://www.rte-france.com/sites/default/files/sddr-2016_synthese.pdf
https://observatoire-electricite.fr/IMG/pdf/oie_-note_conjoncture-prix_et_tarifs_de_l_elec_-juin2018.pdf
Autres :
http://www2.assemblee-nationale.fr/15/autres-commissions/commissions-d-enquete/commission-d-enquete-sur-l-impact-economique-industriel-et-environnemental-des-energies-renouvelables-sur-la-transparence-des-financements-et-sur-l-acceptabilite-sociale-des-politiques-de-transition-energetique/(block)/57313
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