Eolien et panneaux solaires : joindre l'inutile à l'agréable enrichissement... pour quelques uns

"J'appelle ploutocratie un état de société où la richesse est le nerf principal des choses, où l'on ne peut rien faire sans être riche, où l'objet principal de l'ambition est de devenir riche, où la capacité et la moralité s'évaluent généralement, et avec plus ou moins de justesse par la fortune..."
Ernest Renan - 1823-1892 - L'Avenir de la science, Pensées de 1848 - 1890


TENIR TÊTE, FEDERER, LIBERER!

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CHRONIQUE. À l'aide de quelques ordres de grandeur sur l'offre et la demande en électricité, l'économiste explique les limites de ces énergies intermittentes.

Pour vivre, tout être humain a besoin d'oxygène, d'eau et d'aliments qui lui fournissent de l'énergie et permettent que la vie se maintienne. À chaque instant, les humains luttent contre leur destruction ; elle serait très rapide sans oxygène,quelques minutes sans eau, deux jours, et sans aliments, cinq à six semaines.
À cette consommation énergétique de base des Homo de la préhistoire s'est ajoutée depuis moins de deux siècles une demande aussi nouvelle que considérable d'énergie requise par les découvertes récentes qui permettent de se chauffer, de se déplacer, de contribuer à de très nombreuses tâches domestiques, laver la vaisselle, le linge, aspirer la poussière…, de fabriquer des machines, d'accroître la productivité de l'agriculture et de se divertir.


Esclaves électriques
Pour illustrer cette transformation des conditions de vie, dès 2006 Jean-Marc Jancovici et Alain Grandjean choisissaient une image parlante : pour vivre aujourd'hui, disaient-ils, tout Européen dispose à son service l'équivalent d'une centaine d'esclaves. Bien entendu ces esclaves énergétiques que l'on branche sur les prises électriques – ou dont on trouve la puissance à la pompe des stations-service – nous servent quotidiennement parce que le coût de l'énergie et le prix du pétrole sont bas.
Les Français consomment surtout des énergies fossiles (69,9 %) et, dans une moindre mesure, de l'énergie nucléaire (17,3 %). La contribution des énergies renouvelables n'est que de 13,3 %, dont l'essentiel provient de la combustion de la biomasse et des déchets (9,7 %). Si on regarde maintenant l'électricité seule, elle ne représente que 24,3 % de la consommation finale d'énergie en France, pourcentage plus élevé cependant que la part mondiale (20 %). Toutefois, son rôle ne cesse de croître avec l'usage des appareils électroniques et se développera avec les véhicules électriques mais, depuis dix ans, la consommation électrique française est stable du fait de la baisse des usages industriels et de l'amélioration de la productivité des appareils.

Une électricité propre

La production d'électricité mérite en outre une attention particulière, car elle peut ne pas rejeter de dioxyde de carbone. La France – ce n'est pas le cas de l'Allemagne – est en la matière un pays exemplaire, car seulement 11,2 % provient de centrales thermiques, le reste pour 70,9 % provient des centrales nucléaires, 9,8 % des barrages, 4,4 % de l'éolien et 1,7 % du solaire. Toutefois, comme l'électricité n'est qu'à peine le quart de la consommation d'énergie globale, l'éolien ne représente que 1,1 % et le solaire 0,4 % de la consommation finale.

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Est-ce que ces deux sources peuvent répondre de manière significative à la demande d'énergie ? La réponse est clairement négative pour deux raisons simples.
La première est que l'une comme l'autre sont intermittentes, or nous consommons aussi de l'électricité la nuit quand les piles photovoltaïques ne marchent pas et nous avons aussi besoin d'électricité quand il n'y a pas de vent ! Ainsi, en Île-de-France, le facteur de charge des éoliennes n'est que de 23,3 %. Il faut alors leur adjoindre d'autres sources (76,7 % pour les éoliennes) et notamment des centrales thermiques au gaz et au charbon qui prennent le relais des défaillances de ces énergies alternatives.
La deuxième raison s'applique également à l'éolien comme au photovoltaïque, car l'une et l'autre de ces deux sources captent de l'énergie diffuse pour la transformer en énergie électrique. Comme cette énergie est peu dense, il faut beaucoup d'éoliennes ou de grandes surfaces de panneaux pour répondre à la demande. Ainsi, Pierre Vincenzo Piazza a calculé que, pour la seule consommation électrique de pointe de Paris, il faudrait installer au sol des panneaux sur 308 kilomètres carrés, trois fois la surface de Paris, ce qui coûterait plusieurs dizaines de milliards d'euros et, nous l'avons dit, du fait de l'intermittence, ne suffirait pas à approvisionner la capitale ! Quant à l'éolien, pour atteindre la production d'un réacteur nucléaire à eau pressurisée (EPR), il faudrait installer des éoliennes sur tout le rivage méditerranéen de Perpignan à Nice, mais cela ne suffirait pas : il faudrait y ajouter le tour de Corse pour atteindre les 800 kilomètres nécessaires à leur installation.

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Problèmes de réseau
Capter de l'énergie diffuse et la transformer en électricité posent aussi des problèmes aux réseaux électriques jusque-là conçus pour partir de gros centres de production – les centrales électriques ou les barrages – les transporter par des câbles à très haute tension puis, proche des usagers, transformer cette tension en basse tension, pour que les utilisateurs puissent se brancher et faire marcher leurs esclaves électriques.
Comme toute production électrique, les énergies intermittentes doivent être reliées au réseau ; il faut donc ajouter autant de points d'entrée que d'endroits de production. De surcroît, la ligne doit être calculée pour la puissance maximale de production, or celle-ci varie pour les panneaux entre le jour et la nuit, comme entre les jours ensoleillés et les jours couverts ; quant aux éoliennes, leur puissance de génération varie avec la fréquence et la force du vent. On voit alors que, pour transporter cette faible énergie, il faut modifier la ligne de transport et la calculer en fonction de la capacité maximale de production qui arrive sur le réseau, même quand il n'y a pas besoin. Or, s'il y a mille et une idées pour transformer cette électricité peu utile en hydrogène, en énergie cinétique, en accumulation de chaleur dans le sol, en stockage d'air comprimé… c'est inopérant en réalité, car les éventuelles petites usines à construire transformeraient de trop faibles quantités d'énergie, elles ont de très mauvais rendements et ne sont pas économiquement viables. Rappelons à cette occasion que si aujourd'hui des voitures à hydrogène circulent à Tokyo, cet hydrogène vient d'Australie et est fabriqué grâce à des centrales à charbon !

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La suite...


L'éolien et le photovoltaïque : des voies sans issue
Jean de Kervasdoué
30/12/2019

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