Marcel Arland, Terres étrangères, Varennes, 1923.
Gare d' Aprey-Flagey
La gare
À la création de la ligne en 1883, on pense que le train facilitera l'exportation des faïences d'Aprey. Mais l'entreprise continue à péricliter et la fabrication est arrêté en 1885.
Avant et après la Grande Guerre, Equendorf originaire de Delles près de Belfort établit dans l'est de la France des dizaines de petites fromageries. Dans notre région ses usines s'installent à Courcelles Val d'Esnoms, à Flagey, à Brennes, à Noidant-le-Rocheux. Cet industriel utilise des fromagers suisses qui connaissent bien la fabrication du gruyère. D'autres aussi établissent des laiteries comme Hubert, un Suisse de Aarau, à Longeau et à Flagey. À Baissey, c'est Cordival puis Beer qui traitent le lait des paysans.
Tous les mois, sur des chariots, les meules de gruyère sont conduites à la gare d'Aprey et chargées dans des wagons à destination de Belfort ou de la région parisienne. Les éleveurs sont heureux d'obtenir ainsi un petit revenu mensuel et les laitiers font très souvent fortune et mènent grande vie.
Laiterie Cordival-Flocard, à Baissey, près Longeau (Haute-Marne)
La gare de Flavey est bien alimentée en bois. La grue qui peut porter six tonnes charge les grumes grâce à la force de deux hommes qui actionnent une manivelle double. Des chargeurs remplissent les wagons de bois de mine, de bois de chauffage, de charbonnette que les débardeurs ont déposés le long du quai.
Ceux qui ont chargé le bois se souviennent du travail si pénible et surtout de la rudesse de certains hivers. Il fallait alors se ficeler dans de vieilles capotes militaires et plus tard dans des canadiennes pour se protéger du froid. Bien sûr on n'hésitait pas à brûler un stère de bois ; mais le feu réchauffait les hommes par devant et le vent glacé leur gelait le dos.
À la gare d'Aprey, aucun relief, pas un bouquet d'arbres pour se protéger de la bise. Un jour, Maxime Protot d'Auberive tomba raide de froid. Il fallu le reconduire chez lui.
Depuis la dernière gare, la gare est tenue par une femme. Son mari est chef de l'équipe d'entretien. À la barrière proche habite le sous-chef dont la femme est garde-barrière, Lallemant puis Moniot.
Pendant les hostilités, M. et Mme Aubertin et leurs sont connus de certains habitants des villes qui leur envoient les jeunes gens menacés par les rafles et le Service du travail obligatoire (STO). Cette filière qui passe par la gare de Flagey a permis à plusieurs Langrois d'échapper à l'occupant.
Le garçon et la fille Aubertin, s'engagent dans les Forces françaises de l'intérieur (FFI). Louis participe aux activités du maquis de Vivey. Geneviève, agent de liaison, se déplace à bicyclette portant des messages d'un maquis à l'autre. Le 22 août 1944, en compagnie de Mme Lamy, elles passent entre Auberive et Vivey. On les retrouvera torturées à mort près de la Chapelle Saint-Rémy.
Mai 2018. Inauguration de la plaque en mémoire de Madame Suzanne Bret, épouse Lamy, et de Geniève Aubertin, résistantes FFI.
"Suzanne Lamy et Geneviève Aubertin revenaient à vélo d’une cueillette de prunes, lorsqu’elles furent arrêtées le 22 août 1944 sur le territoire d’Auberive (Haute-Marne), au carrefour des routes de Vivey et Praslay.
Elles furent toutes deux conduites vers la chapelle Saint-Rémy par des soldats russes servant dans l’armée allemande (Armée Vlassov). Là, elles se trouvèrent en présence de leur bourreau, un soldat russe ivrogne et sadique. Outragées, frappées à coups de crosse et de bottes, elles furent finalement assassinées d’un coup de fusil dans la poitrine."
Suzanne Bret, épouse Lamy @acvg-de-cote-d-or.fr
Ensuite, Madame Martin devient chef de gare après avoir exercé a Aujeurres et à Brennes. Le dernier déchargement important est celui des longs tuyaux du pipe-line de l' OTAN, devenu Trapil, qui est posé à Saints-Geosmes en 1955. Mais circulent toujours la présure et les produits détersifs pour M. Bredelet gérant de la coopérative de Flagey, l'engrais pour les cultivateurs, le wagon de bière pour Richard de Chameroy et le bois de la société Europabois, Deloix.
La gare est abandonnée quelques années. Bientôt elle devient la maison d'habitation de M.Louis Séjournant ancien facteur à Aprey et de son épouse. Leur demeure s'appelle maintenant "les trois tilleuls". Elle va être transformée en logement confortable en 1990.
Auberive. Vue prise des Côteaux du Chanois
Un ancien maçon construit le café proche de la gare. C'est un bâtiment léger aux murs de torchis et cloisons de planches. Cependant la construction a belle allure avec ses granges et ses chambres du premier étage.
Théophile Bocquenet et sa femme élèvent des abeilles, deux vaches et s'occupent de ce café. L'une de leurs filles, Clémence revenue de paris y travaille ensuite avec son père devenu veuf. Elle se mariera avec Furer le fromager de Noidant qui revendra son entreprise à son neveu Siegfried.
Vers 1930, le café est restauré par les frères Guillemin entrepreneurs à Orcevaux. Le fils de l'un d'eux, Gaston s'y installe avec sa jeune femme. Malheureusement, il se tue à moto sur la route de Langres, 6 mois plus tard.
L'établissement est alors repris par son beau-frère Hubert Richard de Flagey qui travaille chez Damance épicier en gros à Langres. Sa femme Madeleine, qui tient le commerce et soigne une vache, meurt le 25 janvier 1939.
Hubert travaille ensuite comme intérimaire sur la ligne et charge des traverses à la gare. Ce dernier emploi est trop pénible pour lui et il décède le 1er juillet 1944.
Ensuite Stauffer, puis Escudé, chiffonnier, habitent ce café. En 1950, Mme et M. Varette, anciens cafetiers du village de Flagey reçoivent les quelques clients de passage vers la gare.
La famille Adam, d'une barrière proche, sera propriétaire à son tour, puis le bâtiment brûle...
À suivre...
Bernard Sanrey, Le petit train de la montagne haut-marnaise, de Langres à Poinson-Beneuvre, pp. 28-31, 1990.
Aujourd'hui
Aprey @aprey52.free.fr
Auberive 2019. Photo php
Flagey, église
@.tourisme-langres.com
php
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