Les technologies de captage et de stockage du CO2 seront déployables à partir de 2030

Énergie & Environnement
Par Philippe Passebon
publié le 16/09/2015

Commentaire:  Instructif, non? Questions subsidiaires:
-Pour quel coût?
-Qui paiera?


 


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Francois Kalaydjian Directeur de la direction des technologies de développement durable a l'IFP
© Salque Jean-Louis D.R. voir les IPTC

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Le captage de CO2 fait partie des technologies clés qui doivent permettre de réduire les émissions des installations industrielles, responsables de près du tiers des émissions anthropiques de CO2. Il permettra de réduire l'empreinte carbone des centrales thermiques ou charbon, mais peut aussi être utilisé pour d'autres types d'industries. Il doit ensuite être couplé à des stratégies de stockage ou de valorisation chimique du CO2. Pourtant, bien que les technologies soient efficaces, elle sont encore loin d'un déploiement à grande échelle. L'analyse de François Kalaydjian, Directeur adjoint du Centre de Résultats Ressources de l'IFP Énergies nouvelles.

I&T : Le captage et le stockage du CO2 ont-ils un rôle important à jouer dans la lutte contre le réchauffement climatique ?
François Kalaydjian : Le captage et le stockage du CO2 (CCS, pour Carbon Capture and Storage) participent à diminuer les émissions de CO2, mais sont très coûteux. Aujourd’hui, les conditions politiques et les conditions de valorisation de la tonne de CO2 ne sont pas là pour déployer ces technologies. Le prix de la tonne de CO2, à 8,50 euros en Europe, a un effet désastreux. Seule une tonne de CO2 à 60 euros permettra de lancer le CCS. On imagine donc que le CCS pourra vraiment se déployer à partir de 2030. Les technologies sont pourtant déjà à un stade très avancé et font l’objet de démonstrations à échelle industrielle.

I&T : Peut-on évaluer le surcoût sur la production d’une unité dû au CCS ?
F.K. : Les démonstrateurs sont là pour évaluer les surcoûts du CCS sur une unité. Cela peut aller, sur une centrale thermique, jusqu’à doubler le prix de production, jusqu’à 100 euros le MWh. Il est toutefois assez difficile de donner des chiffres absolus, car il faut aussi intégrer le prix du transport puis du stockage du CO2. Il peut y avoir une multiplication par dix si le CO2 est stocké en offshore plutôt qu'en onshore...

I&T : Ces dispositifs permettront-ils pourtant aux centrales à charbon de réduire leurs émissions de CO2 ?
F.K. : Le captage de CO2 est l’option principale pour diminuer les émissions de CO2 des centrales à charbon. Mais on peut s’interroger sur leur déploiement à grande échelle. Il n’est pas certain que le CCS se déploie en Europe en commençant par les centrales à charbon, car il faudra alors un coût de l’électricité produit par ces centrales qui reste compétitif avec celui des énergies renouvelables, qui bénéficient du tarif de rachat. Les centrales thermiques en Europe vont en outre de moins en moins servir comme centrales de base, mais comme semi-base, voire seulement pour les pics de demande d’énergie. Il deviendra alors encore moins bénéfique d’investir dans le CCS.

I&T : Quid des autres industries ?
F.K. : Le CCS peut aussi être appliqué à d’autres industries comme le raffinage, la cimenterie ou la sidérurgie, mais il ne faudrait pas, encore une fois, que le CCS nuise à la compétitivité des industriels d’un pays par rapport à un autre. Il faut alors qu’il y ait un engagement généralisé des pays pour le CCS. Par ailleurs, ces industries émettent dix fois moins de CO2 que les centrales thermiques. Si l’on en vient à mettre du CCS un peu partout, y compris sur les industries faiblement émettrices, les canalisations de transport de CO2 vont aussi se multiplier, traverser des communes, etc. Cela ne sera pas sans ouvrir des débats locaux.

I&T : Quels sont les facteurs qui permettraient d’abaisser le coût du CCS ?
F.K. : Les dispositifs de CCS sont plus pertinents sur des nouvelles unités que sur des anciennes. Il peut se concevoir sur les nouvelles unités des systèmes qui intègrent les dépenses énergétiques du CCS pour améliorer le rendement final du procédé, comme la réutilisation de la chaleur utilisée par le CCS. Mais cela est très compliqué sur d'anciennes unités. Par ailleurs se pose la question de ce que l’on fait du CO2 en sortie. On parle aujourd’hui de CCUS (Carbon Capture, Utilisation and Storage). L’idée est de tirer parti du CO2 capté. Le CO2 gagne en valeur ajoutée si on l’injecte dans un puits de pétrole pour aider à extraire le pétrole restant en fond de puits. Tandis qu’injecté dans un aquifère, il ne prend pas de valeur ajoutée. Enfin, le CO2 peut aussi être valorisé pour la chimie.

I&T : Les recherches dans ce domaine sont-elles très actives ?
F.K. : Plusieurs entreprises font des recherches sur le sujet, même si en Europe, ces recherches sont un peu moribondes. Quant aux pouvoirs publics, les Américains soutiennent beaucoup de démonstrateurs. En Europe, les recherches ont tendance à baisser. La Grande-Bretagne a toutefois lancé différents projets de démonstrateurs, ainsi que les Pays-Bas et la Norvège. En France, nous avons eu le démonstrateur de Lacq, qui a donné des résultats positifs.

I&T : L’IFP en travaille-t-il sur l’amélioration de ces technologies ?
F.K. : Nous travaillons sur une approche alternative à la technique d’oxycombustion, laquelle consiste à injecter un air le plus pur possible en oxygène pour réaliser la combustion. Notre technologie, la CLC (combustion en boucle chimique) nous permet de récupérer cet oxygène au cours d’un cycle d’oxydoréduction d’un métal. Comme le fer, le métal s’oxyde au contact de l’air, puis se réduit à nouveau dans les bonnes conditions de température qui correspondent à la combustion des énergies fossiles. Le métal est ensuite à nouveau prêt pour un nouveau cycle.

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