La Tribune
11 déc. 2017
Commentaire : (...) « Le développement de cette nouvelle classe d’actifs est une opportunité pour avancer vers un avenir bas carbone tout en augmentant les investissements mondiaux et en stimulant la croissance »[...] Un marché de niche, qu’il faudra davantage encadrer et standardiser, pour éviter le green washing, l’éco-blanchiment de projets pas si bénéfiques pour le climat. " Tout est clairement dit, non?
Des représentants de la banque HSBC interviennent dans cet article. Pour rappel : (...) "HSBC Private Bank, filiale suisse du géant britannique bancaire, s'est engagé à verser 300 millions d'euros pour éviter un procès en France pour "blanchiment de fraude fiscale", a annoncé mardi le parquet national financier français (PNF)." Fraude fiscale: HSBC Private Bank versera 300 millions d'euros pour éviter un procès en France (justice)
Quand au futur et au bien-être de l'Humain, de l'environnement, de la biodiversité, etc. , cela est une autre histoire... Ne soyons pas naïfs.ves!
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« D'un seul coup, le monde financier a réalisé qu'une catastrophe écologique serait aussi une catastrophe économique », résume Gérard Mestrallet, le président d' Engie. [Guy's Art/Shutterstock]
Sous la pression de la réglementation ou par crainte des risques, les investisseurs institutionnels, assureurs, fonds de pension et de retraite, ont commencé à réduire l’empreinte carbone de leurs portefeuilles en vendant les actifs les plus nocifs pour l’environnement. Les banques accélèrent les financements des projets verts, notamment via les « green bonds », un marché en très forte croissance, explique notre partenaire, La Tribune.
« Un monde à +2 degrés pourrait être encore assurable, un monde à +4 degrés ne le serait certainement plus », avait déclaré Henri de Castries, l’ex-PDG d’Axa en mai 2015, au premier Climate Finance Day à Paris, consacré aux moyens de rediriger les milliers de milliards de dollars gérés par le secteur financier vers une économie bas carbone. Un propos révélateur de la prise de conscience accélérée ces dernières années des acteurs de la finance, en particulier les assureurs, des conséquences dévastatrices du réchauffement climatique. Pour la planète… et pour le business !
«Il faut supprimer les subventions au charbon et au pétrole»
Président du conseil d’administration d’ Engie et patron de Paris Europlace, Gérard Mestrallet est au confluent de la transition énergétique et de la finance carbone. En exclusivité pour notre partenaire, le Journal de l’Environnement, il rappelle les enjeux du sommet climatique du 12 décembre et les progrès accomplis en la matière par les secteurs de la finance et de l’énergie.
Axa avait à l’époque annoncé son intention de céder ses participations dans les entreprises « les plus impliquées dans les activités liées au charbon », pour 500 millions d’euros, et de tripler ses investissements verts à plus de 3 milliards d’ici 2020. Car désinvestir n’est qu’une partie de la réponse : il faut surtout massivement réorienter ces milliards vers le développement durable, par exemple au travers de nouveaux outils de financement verts, comme les green bonds (obligations vertes).
Moins soumis au diktat de la rentabilité immédiate qui prévaut sur les marchés financiers, les investisseurs de long terme, comme les assureurs, les fonds de pension et de retraite, notamment nordiques, ont été parmi les premiers à se saisir des sujets climatiques, après s’être engagés sur les questions éthiques et responsables. Parfois sous la pression des ONG, décidées à assécher les financements des énergies fossiles au profit des renouvelables. Et sous la pression de la réglementation et des gouvernements, comme ce fut le cas en France où la loi de Transition énergétique a constitué un tournant.
Le fonds de pension norvégien, le plus gros fonds souverain au monde (plus de 1.000 milliards de dollars d’actifs), qui avait banni de son portefeuille les fabricants d’armes et de tabac dès le milieu des années 2000, s’est engagé à la demande du Parlement à sortir du secteur du charbon en 2015. Dans un intérêt bien compris. C’est tout le paradoxe de ce fonds qui tire ses revenus des hydrocarbures (taxes, licences d’exploration, dividendes de la compagnie Statoil) et prépare l’avenir de l’après-pétrole, illustrant le concept même de transition.
Réduire les risques en « décarbonant » les portefeuilles
En septembre 2015, dans un discours qui a frappé les esprits, Mark Carney, le gouverneur de la Banque d’Angleterre et président du Conseil de stabilité financière (FSB), a le premier formalisé les risques que les dérèglements climatiques font peser sur le système financier : le risque physique lié aux inondations, ouragans et autres catastrophes naturelles, qui touche les assureurs et la valeur des actifs ; le risque juridique, en cas de poursuites contre les industriels les plus pollueurs ; et le risque de transition, pouvant rapidement déprécier de larges classes d’actifs qui seraient « ensablés » (stranded assets), sous l’effet de décisions politiques ou d’évolutions technologiques. Une approche par les risques auxquels les acteurs de la finance sont très sensibles, plus qu’aux arguments purement écologiques. Le risque s’est d’ailleurs concrétisé en 2016 par les mises en faillite de géants du charbon aux États-Unis (Arch Coal, Peabody).
« Quand le changement climatique deviendra une question déterminante pour la stabilité financière, il sera peut-être déjà trop tard », avait mis en garde Mark Carney.
Son rôle a été déterminant dans la mise en mouvement de la planète finance. « Un travail essentiel a été réalisé sous la houlette du Conseil de stabilité financière, par la Task Force Climate-related Financial Disclosures (TCFD), afin de renforcer le reporting des risques climatiques dans le secteur financier et les secteurs non financiers, dans le même esprit que l’article 173 de la loi de transition énergétique française », soulignait Jean Boissinot, le directeur de la stabilité financière à la direction du Trésor, lors du Forum Smart City du Grand Paris organisé le 28 novembre par La Tribune.
Le reporting climat, défendu par le Carbon Disclosure Project depuis le début des années 2000, n’est pas suffisant, mais il est nécessaire.
« Ces informations doivent permettre au secteur financier – prêteurs, investisseurs – de se sentir plus confortable avec telle entreprise parce qu’elle a compris les enjeux du climat et mène une stratégie solide, et moins avec d’autres qui persistent à vouloir vivre dans un monde à +6 degrés, alors que nous essayons collectivement d’aller vers un monde à +2 degrés », a-t-il soutenu.
Le sujet était déjà dans l’air. Dès septembre 2014, des investisseurs du monde entier, dont le célèbre fonds de retraite des fonctionnaires californiens CalPERS, s’étaient engagés à évaluer et rendre publique l’empreinte carbone de leur portefeuille en adhérant à la « Promesse de Montréal » (Montreal Carbon Pledge). D’autres s’engageaient à réduire cette empreinte en rejoignant la Coalition pour la décarbonisation des portefeuilles, sous l’égide de l’ONU. Cette initiative, dont le numéro un européen de la gestion d’actifs, le français Amundi, est l’un des membres fondateurs, regroupe désormais près de 30 investisseurs, dont la Caisse des Dépôts, le FRR (Fonds de réserve pour les retraites), l’ERAFP (Établissement de retraite additionnelle de la fonction publique), Humanis, BNP IM et Mirova (Natixis AM), pesant plus de 3.000 milliards de dollars d’encours sous gestion, qui se sont engagés collectivement à réduire de 600 milliards l’intensité carbone de leurs portefeuilles. La COP21 a ensuite clairement joué un rôle d’accélérateur.
La France numéro 3 mondial durable de la finance verte
Selon la banque HSBC, la France fait partie du trio de tête derrière les Etats-Unis et la Chine de la finance verte et prend même la première place cette année grâce au méga emprunt souverain. Un article de notre partenaire la Tribune.
Pressions à géométrie variable
« Attention cependant aux limites du désinvestissement », relève Nicolas de Jenlis, le directeur développement durable chez Deloitte, sur son blog.
« Lorsqu’un investisseur vend une action d’une entreprise dans le charbon, quelqu’un d’autre l’achète. Certains fonds sont même spécialisés dans les sin stocks (les actions des entreprises de secteurs non éthiques comme les armes, l’alcool, le tabac, le charbon). Le désinvestissement n’a donc trop souvent qu’un impact limité sur l’accès au financement des entreprises, et répond bien souvent à une simple problématique de réputation. »
L’expert du cabinet de conseil invite les investisseurs dans la voie de « l’engagement actionnarial », à se faire entendre des conseils d’administration et en assemblée générale (AG).
C’est l’approche choisie par le numéro un mondial de la gestion d’actifs, l’américain BlackRock (6.000 milliards de dollars d’encours), qui a mis le risque climatique en avant depuis l’an dernier. Actionnaire des grandes majors pétrolières, le gérant d’actifs privilégie « un dialogue privé » et une attitude « constructive » pour faire évoluer le management sur ces questions. À l’AG d’Exxon Mobil, en mai, il a soutenu la résolution sur le reporting climat, mais sa position n’est pas constante à toutes les AG. Idem pour les autres géants américains Vanguard ou JP Morgan.
La pression des investisseurs reste encore à géométrie variable, tout comme les convictions. Les Européens sont les plus exigeants et les plus motivés, selon une récente enquête réalisée pour HSBC : 97% des investisseurs interrogés en Europe prévoient d’augmenter les montants alloués à l’investissement durable contre 85% en Amérique du Nord, 64% en Asie et 19% au Moyen-Orient.
Éclosion d’un écosystème de la finance verte
Le verdissement des portefeuilles passe aussi par l’investissement dans les bons projets pour transformer en profondeur l’économie. De nouveaux outils ont vu le jour il y a dix ans, les green bonds, ou obligations vertes, pour lever des fonds exclusivement consacrés à des projets ayant un impact positif sur l’environnement, qui ont connu une croissance exponentielle ces quatre dernières années et fait éclore tout un écosystème de la « finance verte », domaine dans lequel la France est en pointe. La Banque européenne d’investissement (BEI) a été la première à s’y aventurer en juillet 2007.
« Au cours de la dernière décennie, l’engagement sans faille d’un large éventail d’acteurs du marché […] a transformé la contribution des marchés obligataires en solutions de financement climatique », analyse Jonathan Taylor, le vice-président de la BEI chargé de l’action en faveur du climat et de l’environnement, en célébrant le dixième anniversaire de l’émission.
« Les obligations vertes sont cruciales pour lutter contre les changements climatiques et accélérer le soutien aux investissements liés au climat », a-t-il fait valoir.
La BEI a émis pour plus de 18 milliards d’euros d’obligations climatiquement responsables dans onze monnaies (ce qui en fait le plus grand émetteur en cumulé à ce jour). Cela lui a permis de financer une part importante des prêts qu’elle accorde dans le domaine des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique.
D’autres banques de développement s’y sont mises (la Banque mondiale, la KfW allemande), puis des collectivités territoriales, comme l’Ile-de-France et Paris, des mégapoles américaines ou chinoises pour financer ou refinancer des infrastructures de transport collectif, d’installations de traitement de l’eau, de protection contre les inondations. Puis de grandes entreprises, notamment du secteur de l’énergie, comme EDF et Engie ou Iberdrola ont suivi. Et même des États : la Pologne et surtout la France, qui a émis le plus gros emprunt vert souverain à ce jour (8,6 milliards d’euros après extension).
Les îles Fidji ont émis en octobre le premier green bond d’un pays émergent, de 50 millions de dollars. Le Nigeria et le Kenya pourraient être les premiers pays africains à s’y lancer. D’autres États européens pourraient émettre l’an prochain des « obligations vertes » souveraines, notamment l’Irlande, la Belgique, la Suède et les Pays-Bas. Selon nos informations, toutes les grandes banques sont invitées à l’ambassade des Pays-Bas à Paris cette semaine pour plancher sur le sujet.
De quelques milliards par an en 2008-2009, le marché des green bonds (obligations vertes) a explosé pour dépasser les 100 milliards de dollars d’émissions cette année : il devrait atteindre 120 à 130 milliards à la fin du mois, en deçà toutefois de l’estimation très ambitieuse de 200 milliards que l’agence Moody’s anticipait en janvier. L’ensemble des obligations vertes en circulation représentent près de 300 milliards, et même le triple si on inclut des obligations climat non labellisées, selon l’ONG britannique Climate Bonds Initiative. Cela ne représente cependant encore que quelques pour cent du colossal marché mondial des obligations classiques.
La finance verte gagne du terrain dans l’UE
L’Union des marchés de capitaux, dont un bilan est attendu le 7 juin, contribue à généraliser le verdissement de la finance européenne.
La finance durable était encore considérée comme « exotique » il y a peu. Elle est cependant en train de se faire une vraie place dans les politiques européennes, selon Niall Bohan, chef d’unité chargé de l’Union des …
Retrouver un rôle positif dans la société
« Pour les investisseurs, le marché des green bonds offre un placement stable, noté et liquide, et de longue durée. Pour les émetteurs, les green bonds sont un moyen d’exploiter l’énorme bassin de 100 000 milliards de capital privé géré par les investisseurs institutionnels obligataires du monde entier », expliquait Mark Carney en septembre 2016 dans un discours à Berlin.
« Le développement de cette nouvelle classe d’actifs est une opportunité pour avancer vers un avenir bas carbone tout en augmentant les investissements mondiaux et en stimulant la croissance » observait-il.
Un marché de niche, qu’il faudra davantage encadrer et standardiser, pour éviter le green washing, l’éco-blanchiment de projets pas si bénéfiques pour le climat.
« Il y a beaucoup de nuances de vert », relève Victoria Clarke, responsable green bonds chez HSBC pour la zone Europe Moyen-Orient Afrique.
Dans leur rapport intérimaire de juillet dernier, le groupe d’experts de haut niveau sur la finance durable (HLEG), mis en place par la Commission européenne il y a un an, soulignait que, dans le contexte post-crise financière,« répondre aux défis de long terme du développement durable est aussi un moyen puissant pour les institutions financières de retrouver un rôle positif à jouer dans la société ».
Des banques ont montré l’exemple depuis deux ans. La Société Générale a émis deux obligations « à impact positif » de 500 millions d’euros, BPCE une obligation verte de 300 millions en décembre 2015, BNP Paribas une de 500 millions en novembre 2016. HSBC, dont la filiale française avait émis un green bond de 500 millions, vient d’émettre une méga obligation de développement durable d’un milliard de dollars. La plus grande banque du monde, la chinoise ICBC, s’y est mise en octobre, avec une opération à plus de 2 milliards de dollars.
Certaines ont aussi pris des engagements sur leurs financements non verts. En octobre, BNP Paribas a annoncé l’arrêt de ses relations avec les acteurs dont l’activité principale est l’exploration, la production, la distribution, le marketing ou le trading de gaz et de pétrole de schiste et/ou de pétrole issu des sables bitumineux. « Un pas dans la bonne direction », aux yeux des Amis de la Terre, l’ONG qui en mai avait interpellé les dirigeants de la BNP en pleine AG sur le financement de l’oléoduc américain controversé Dakota Access Pipeline. Crédit Agricole a annoncé de nouveaux engagements pour le climat mercredi, tout comme la Société Générale vendredi.
Il s’agit aussi de soutenir les champions de demain plutôt que ceux d’hier. Laurent Jacquier-Laforge, gérant chez La Française, prédisait en mai dernier, lors d’une table ronde, que « après les Gafa, les acteurs qui interviennent dans la lutte contre le réchauffement climatique devraient figurer les principales capitalisations boursières mondiales ». Autant y investir le plus tôt possible.
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