François Cordelle
Publié le 31 décembre 2017
RTE, responsable de la bonne utilisation de l'ensemble électrique français, a tiré la sonnette d'alarme pour attirer l'attention sur les difficultés de répondre à la demande d'électricité cet hiver si on respectait la réduction de 50% de la production nucléaire promise par François Hollande la veille de son élection au printemps 2012 .
Pour le présent
En période de forte charge, s’il était nécessaire de produire en nucléaire plus que les 50% promis sous peine de procéder à des coupures de courant, la raison voudrait que l’on transgresse la promesse plutôt que d’importer d'Europe une électricité carbonée à un prix exorbitant . Mais pour cela, il faut que l’on dispose d'une puissance suffisante. Il ne faut donc pas arrêter sans raison valable les unités nécessaires.
Il n'y a d'ailleurs aucun intérêt à ne pas utiliser le parc au maximum du possible, au contraire :
Le coût marginal de production est très faible ; la part de production qui excéderait les besoins en France, non carbonée, aurait toujours preneur dans une Europe qui utilisera encore longtemps du charbon et du lignite. Cela serait très bénéfique pour l'Europe tout entière, et en particulier pour la France qui pâtit actuellement de la pollution venant des centrales allemandes et polonaises. Cette politique, utilement complétée par une taxe significative sur le carbone émis (envisagée à juste titre) aurait un effet très positif sur l’objectif majeur de la lutte pour le climat.
De plus, le raccordement au réseau d'un grand nombre d'unités de grande puissance améliore la garantie de stabilité du réseau, bienvenue face à la multiplication de petites unités sans inertie que sont les éoliennes ou les panneaux photovoltaïques.
Bien que le parc actuel de centrales permette un bilan exportateur positif, il n'est pas suffisant car la France est souvent obligés d'importer ce qui lui manque en période de forte charge. On semble avoir oublié que, pour cette raison, François Hollande avait dans la foulée, prévu que la puissance installée, 62 GW, devait être conservée, et qu’il ne faudrait pas arrêter Fessenheim avant d'avoir mis l' EPR de Flamanville en service.
Dans un passé récent, les autorités de sûreté ont demandé l’arrêt simultanément et sans délai d’un nombre important d'unités, non pas à la suite de défauts avérés, mais simplement pour vérifier si la sûreté restait assurée malgré le renforcement de certaines exigences (risque sismique par exemple) ou de contrôles jugés insuffisants. La perturbation apportée à la planification des arrêts pour rechargement, entretien et travaux en vue de prolonger de 10 ans l'exploitation des unités, a conduit à d’importantes pertes de production qui auraient pu être évitées : les vérifications précédentes avaient toujours été satisfaisantes, comme c’était prévisible compte tenu des marges qui avaient été prises.
Pour l'avenir
Il est urgent que l'examen approfondi des programmes d'investissement dans les moyens de production de l'électricité, puis d'extension du réseau de transport et d'interconnexion soit fait, non seulement pour le très court terme, mais surtout pour le long terme, car il est prévisible que les besoins en électricité croîtront : l’accroissement de la population, la décarbonation des secteurs des transports et des bâtiments se traduiront en particulier en France par le développement de l’usage de l’électricité (moteurs électriques, pompes à chaleur,..) ; les investissements seront importants, les délais de réalisation sont longs, l'industrie doit se préparer à répondre aux besoins. La stagnation de tout développement programmé de ces 30 dernières années a fait que la situation actuelle du parc de production ressemble à beaucoup d'égards à la situation critique de la France après la dernière guerre et à l’effort considérable qu’il a fallut pour construire les centrales hydrauliques et thermiques à flamme nécessaires, puis à partir des années 70, les centrales nucléaires.
La Cour des Comptes a procédé à une analyse très complète du coût de l'électricité nucléaire, en comptant les démantèlements ( Celui de Chooz A, presque terminé, est riche d'enseignements pour la suite) et le traitement des déchets (les études in-situ à Bure sont bien avancées, et se poursuivront jusqu'à l'utilisation du stockage, dans une vingtaine d'années).
Il serait très souhaitable qu'une telle analyse soit également faite pour les diverses sources d'énergies renouvelables, d'une manière aussi exhaustive, en prenant en compte les aides, subventions, obligations d'achat, démantèlements et remise en état des lieux, ainsi que le coût des conséquences sur le réseau (lignes et stabilité du fonctionnement), et l'énergie produite (qualitativement et quantitativement).
Ce n'est qu'avec le résultat de cette étude qu'il sera possible de faire enfin et en connaissance de cause, l'indispensable programme prévisionnel d'investissements, tant attendu, pour l’État, l'industrie et les entreprises.
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