Didier Julienne / Stratège des ressources naturelles
Le 05/01/2017
Quelle politique énergétique, quelle pollution atmosphérique, quelle électricité pour le prochain Président de la République ?
Au regard des ambitions énergétiques, les cinq dernières années présentent un funeste résultat. La pollution atmosphérique liée aux énergies fossiles est prégnante. Fessenheim n’aura pas fermé, la France n’est pas en route vers 50% d’électricité nucléaire. Les énergies climatiques sont en « distribil ». L’éolien a progressé mais reste débridé et il ne fonctionne qu’un jour sur quatre ou cinq, le solaire devrait être consistant dans l’urbain dense mais il y semble en panne. Heureusement l’hydraulique fonctionne comme toujours, la géothermie et la biomasse aussi. Les importations et les exportations d’électricité suivent leurs rythmes. Avec le lien suivant, le graphique de RTE est une synthèse éclairante des enjeux de la production nationale ( http://www.rte-france.com/fr/eco2mix/eco2mix-mix-energetique ).
Au niveau européen l’atmosphère est notamment enfumée par les quelques 280 centrales à charbon qui pullulent en Europe de l’Allemagne à la Roumanie en passant par le Danemark, la Pologne et les Pays Baltes ( http://huet.blog.lemonde.fr/2016/07/05/les-morts-du-charbon-en-europe ). Des villes polonaises ont des pollutions atmosphériques supérieures ou égales à celles de villes chinoises ( http://waqui.info ). La pollution européenne résultante est lisible en temps réel sur internet ( https://electricitymap.tmrow.co ). Sur cette dernière carte, le plus souvent un seul pays est en vert, la France ; dans son orient la pollution produite est coloriée de brun et de noir. Lorsque le vent la pousse, la migration de cette contamination de l’est vers l’ouest est inévitable.
L’atmosphère est également polluée par les automobiles, et l’on s’interroge. Affilié à aucun lobby (nucléaire, écologiste, diésélistes, charbonnier,…), l’auteur de ces lignes est comme tout le monde favorable aux bienfaits atmosphériques de la voiture électrique, mais il questionne pourquoi le lobby de cette dernière filière ne répond pas à deux questions. (i) Dans quelles conditions les constructeurs se procureront-ils les métaux critiques nécessaires aux véhicules électriques ? L’automobile a déjà connu des drames de ce côté-là et seule une politique minière les éviterait. (ii) À la lumière de cette page à la date du 2 janvier 2017 ( http://www.rte-france.com/fr/eco2mix/eco2mix-mix-energetique ), qui serait le fournisseur électrique des voitures la nuit et les journées brouillardeuses? Si en France la voiture électrique sera la fille heureuse du nucléaire, elle sera une enfant très tourmentée dans les pays à électricité charbonnière.
Rapide constat, rapide terminus : l’écologie politique semblerait mort-née. Constat d’autant plus navrant lorsque l’on comptabilisera par exemple en Allemagne les réels emplois des énergies vertes, tous muettement adossés aux emplois noirs des mines de charbon que l’on cache. Comparaison qui révélera des emplois de l’électricité intermittence climatique auxiliaires des emplois de l’électricité permanente charbonnière : emploi vert, énergie intermittente =emploi noir, énergie permanente.
Revenons à l’électricité en France. Les choix énergétiques du prochain Président de la République auront le siècle pour horizon. Les grandes orientations s’imposeront à lui : moins d’hydrocarbures, des voitures, avions, bateaux électriques, plus d’objets connectés, de nouveaux emplois (voire des relocalisations), pas de KWh subventionnés par des taxes, …etc. La résultante s’imposera aussi : une élévation de la consommation électrique et donc une production électrique qui devra s’adapter à la hausse.
Comment produire plus d’électricité à un coût peu élevé ?
En France, le coût de l’éolien à beaucoup baissé mais il subit de nombreuses critiques. L’éolien rural a dépassé les limites du supportable: il balafre le patrimoine, défigure la campagne, pollue les hauteurs. Les turbines des éoliennes marines utilisent des métaux critiques provenant de monopoles non européens ; cette dépendance est ignorée, les prix non maîtrisés, le gaspillage accepté puisque les éoliennes démontées après 20 ans n’auront tourné en moyenne que 4,5 années.
Autres reproches. Abandonnées en décharge, les immenses pales en matériaux composites ne sont pas recyclables, la seule issue actuelle est … de les incinérer pour fabriquer du béton ; ce stock de pales usagées évoluerait entre 15 et 20 millions de tonnes d’ici à 2034.
À propos du prix, l’entretien des éoliennes marines est coûteux et dangereux, son électricité coûte cher. Des taxes le subventionnent, sinon pourquoi maintenir la taxe CSPE sur les factures électriques des français ?
Derniers sermons. L’infrastructure éolienne (socle de béton et câblages) est une pollution, elle ne sera probablement jamais totalement démantelée. Quid des infrasons, seront-ils définitivement diagnostiqués une souffrance pour les riverains jusqu’à 10km ? Quid des éoliennes usagées vendues comme des véhicules d’occasion en Europe de l’Est, en Amérique du Sud, en Afrique ; qui les y recyclera en fin de vie ? Y-aurait-il un délit éolien ? À qui profiterait-il ? Lire dans ce domaine l'Handelsblatt : « How to kill an Industry » ( https://global.handelsblatt.com/companies-markets/how-to-kill-an-industry-479057 )
Le solaire à moins d’inconvénient que l’éolien : son intermittence est inférieure, sa nuisance quasi nulle, son coût de fabrication baisse, sa capacité de progrès est importante, l’infrastructure peut être adaptée à l’habitat en zones urbaines et en circuits courts. Il demandera une transparence sur les coûts d’entretien des réseaux électriques entre circuits courts (production solaire et consommation locale), et réseaux longs (production centralisée et permanente des centrales électriques traditionnelles vers les consommateurs). L’élément inconnu reste le stockage électrique mais il n’est pas impossible qu’il soit un jour résolu. Le solaire est l’énergie climatique qui devrait être très vigoureusement encouragée.
Il reste enfin la fission nucléaire et plus précisément l’économie circulaire du nucléaire. Les centrales nucléaires actuelles ne consomment qu’environ 5% des charges de combustible. Le solde est recyclable, la technologie pour le transformer en électricité est connue. Intensifiée, elle brûlera ces déchets transformés en combustible tout en produisant 50 à 100 fois plus d’électricité que de nos jours ; et ce recyclage terminé, le volume et la durée de vie des cendres résiduelles sont infiniment réduits. Puisque ce combustible est déjà stocké sur le sol français sous la forme d’une épargne énergétique, il correspondrait à une indépendance électrique nationale d’environ 10 000 à 20 000 ans, entre 2500 et 5000 ans de la production électrique européenne. Ne peut-on pas utiliser ce combustible au sein d’une Europe de l’énergie, réconcilier l’écologie et le nucléaire en réalisant l’économie circulaire du nucléaire ?
Plus tard l’électricité produite via le thorium est une autre possibilité, la fusion froide une potentialité, l’hydrogène sans utiliser de gaz naturel une alternative. Beaucoup plus tard, la fusion nucléaire (non plus la fission) sera peut-être le Graal. Sans déchets à long terme ni prolifération, un seau d’eau de mer suffira pour assurer 30 années de consommation électrique de l’européen moyen.
Idéologies politiques mises à part, pour l’habitat comme pour l’industrie, les programmes présidentiels devraient détailler des politiques énergétiques à long terme ? Il y aurait encore beaucoup de détails à préciser, cependant le couple (solaire intermittent décentralisé + économie circulaire du nucléaire permanente et centralisée), serait un choix énergétique équilibré qui minimiserait plus que d’autres la consommation de ressources naturelles.
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