05/06/2018
Préambule :
Retour sur la fin du pétrole facile
A la suite du premier choc pétrolier, qui a provoqué le quadruplement du prix du pétrole en cinq mois à peine, la France avait fait le choix de l’énergie nucléaire pour assurer l’indépendance énergétique du pays. [1]
En 1973, P. Messmer, premier ministre de Georges Pompidou, annonçait la construction de 13 nouvelles centrales nucléaires en 1974 et 1975.
Cet effort s’est accompagné de la « chasse au Gaspi » visant à réduire la consommation.
Cet effort s’est accompagné de la « chasse au Gaspi » visant à réduire la consommation.
La problématique aujourd’hui
A l’heure actuelle, le sol français ne fournit plus la moindre source d’énergie fossile ou nucléaire et la loi du 30 décembre 2017 interdit même toute nouvelle prospection pour les hydrocarbures.
Or les énergies intermittentes que sont l’éolien et photovoltaïque condamnent non seulement à une forte dépendance vis-à-vis de la Chine pour les composants stratégiques (métaux rares) qui leur sont nécessaires. Mais par ailleurs leur intermittence impose le recours à des énergies de substitution dès que le vent ou le soleil se couche.
Notre approvisionnement énergétique est heureusement largement assuré par nos 19 centrales nucléaires (63 GW) qui, aidées par l’énergie hydraulique, fournissent près de 90% de la production totale d’électricité.
La face cachée de notre indépendance énergétique
Le gisement en combustible
En effet, les importations d’uranium ne sont généralement pas comptabilisées dans les taux de dépendance énergétique, ces importations n’intervenant que de façon très ponctuelle (un réacteur a du combustible pour trente ans) mais aussi marginale dans les coûts de production d’énergie : actuellement moins d’1,5€/MWh [2], rendant les conséquences de tensions sur leur cours sans commune mesure avec celles de tensions sur le pétrole ou le gaz.
Cette indépendance énergétique serait encore mieux assurée avec les réacteurs de la 4ème génération tels que le BN 800 russe, entré en phase commerciale en 2016 et élu meilleure centrale au monde par la presse américaine [3].
De tels réacteurs permettent d’obtenir 50 à 100 fois plus d’électricité avec la même quantité de combustible en utilisant notamment le recyclage des déchets nucléaires pour l’alimentation [4].
Les quantités de combustibles déjà en notre possession assureraient alors à de tels réacteurs des siècles de fonctionnement.
De tels réacteurs permettent d’obtenir 50 à 100 fois plus d’électricité avec la même quantité de combustible en utilisant notamment le recyclage des déchets nucléaires pour l’alimentation [4].
Les quantités de combustibles déjà en notre possession assureraient alors à de tels réacteurs des siècles de fonctionnement.
Ses ressources encore inexploitées
D’autre part, cette indépendance est généralement évaluée en termes d’énergie primaire, c'est-à-dire d’énergie totale libérable par chaque source, celle perdue en chaleur lors de la fission nucléaire comprise.
Car si les 2/3 de l’énergie produite par notre parc nucléaire sont actuellement perdus en vapeur d’eau, la totalité de cette énergie est potentiellement exploitable.
La cogénération nucléaire, permettrait d’utiliser cette chaleur pour produire de l’eau chaude. Aucun problème technique spécifique ne s’y oppose [5].
L’énergie à notre disposition est une chose, l’optimisation de son utilisation en est une autre.
Celle de notre parc nucléaire est disponible et abondante.
C’est la raison pour laquelle la Commission européenne classe la France parmi les États dont l’indépendance énergétique est supérieure à la moyenne européenne, et bien supérieure notamment à celle de l’Allemagne dont le sol regorge pourtant de lignite.
Le tableau ci-dessous illustre cette relative indépendance énergétique nationale, tandis que la même source indique que l’Allemagne dépend à 61,9% de ses importations.
(Source Commission européenne) [6]
La vulnérabilité de cette indépendance
Petite cause...
En 2017, l’autorité de sureté nucléaire (ASN) a prescrit des travaux de renforcement de la digue protégeant les réacteurs du Tricastin afin d’assurer sa résistance en cas de séisme 5 fois supérieur au séisme le plus fort enregistré depuis 1000 ans.
L’ ASN a imposé l’arrêt des réacteurs durant les travaux [7]. Selon le directeur de la centrale, cette perte de production a entrainé un manque à gagner de 200 millions d’euros [8]. Ce manque à gagner pour EDF s’ajoute aux arrêts imposés pour contrôle à d’autres réacteurs.
A ces pertes d’exploitation s’ajoutent les réductions de puissance et même arrêts complets de réacteurs imposés par le gestionnaire de production lorsque la demande est faible et que la production éolienne est importante.
Ces circonstances ont entraîné une réduction de 1,3 % de la production nucléaire 2017 par rapport à celle de 2016.
Grands effets
Cette réduction minime a eu de grands effets tant sur notre indépendance énergétique que sur notre balance commerciale.
En effet, en avril dernier, le ministère de la Transition écologique et solidaire prenait acte de ce recul nucléaire, et considère celui-ci comme la principale cause du recul d’1 point de notre indépendance énergétique [9].
Toujours selon ce ministère, un tel recul, combiné avec une augmentation de 0,7% de la consommation d’énergie primaire a entrainé 4,7% d’augmentation du déficit des échanges d’énergie et a contribué, avec la hausse des cours internationaux, à un rebond de 23 % de la facture énergétique de la France, à 38,6 milliards d’euros.
Chronique d’une dépendance annoncée
La loi pour la Transition énergétique et la croissance verte prévoit de ramener à 50% de la part de la consommation la production nucléaire qui en représente actuellement 75%. Aucun indicateur ne permet actuellement de tabler sur une baisse de la consommation électrique. Celle-ci, en effet, est en légère augmentation et le développement programmé des véhicules électriques et du stockage des données électroniques (data center) augurent, bien au contraire, d’une augmentation significative de celle-ci.
Il serait illusoire d’imaginer que des énergies intermittentes pourraient s’y substituer sans faire appel à des importations pour lisser leur production lorsque le vent ou la nuit tombent.
L’indépendance énergétique constitue un paramètre majeur du domaine de l’énergie.
Il est nécessaire que ce paramètre éclaire le choix de tirer le meilleur parti ou non des spécificités de notre parc électrique.
En tout état de cause, seul 1/3 de l’énergie primaire produite par nos centrales nucléaires est actuellement disponible pour la consommation.
La cogénération nucléaire représente une opportunité unique de diminuer notre dépendance énergétique grâce au formidable gisement des 2/3 restants, en la substituant aux énergies fossiles, notamment dans des domaines tels que le chauffage collectif ou la chaleur industrielle.
Tandis que les conséquences d’une simple diminution de 1,3 % de la production nucléaire rappellent que toute réduction de celle-ci menace d’affecter durablement notre indépendance énergétique et notre dépendance à la fluctuation des cours des hydrocarbures.
2 http://lemontchampot.blogspot.fr/2017/11/pourquoi-n-hulot-recule.html
3 http://lenergeek.com/2016/11/08/le-power-award-2016-attribue-au-reacteur-a-neutrons-rapides-russe-bn-800/
4 https://www.connaissancedesenergies.org/fiche-pedagogique/reacteurs-de-4e-generation
5 http://www.sfen.org/rgn/cogeneration-nucleaire-production-electricite
6 https://ec.europa.eu/commission/publications/energy-union-factsheets-eu-countries_en
7 http://www.sfen.org/rgn/seisme-fallait-arreter-centrale-tricastin
8 https://www.francebleu.fr/infos/economie-social/arret-des-reacteurs-de-tricastin-plus-de-200-millions-de-manque-a-gagner-pour-edf-1512670987
9 http://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/publications/p/2753/969/bilan-energetique-france-metropolitaine-2017-donnees.html
php
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire